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tifs. Le titre II, de la Compétence, a présenté Art. des questions plus importantes.

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632. Depuis la publication de l'ordonnance de 1673, mais sur-tout depuis 1789, le commerce est devenu la profession d'un bien grand nombre de Français; la volonté seule donne le droit de faire le commerce. Tel se livre habituellement au négoce, tel autre ne fait qu'accidentellement des actes qui, sous certains rapports, sont de véritables actes de commerce. De-là, on avait conclu que la compétence des Tribunaux de Commerce se déterminait par le fait qui donnait lieu à la contestation; que si ce fait était un acte de commerce, celui qui y avait pris part, quelle qu'en fût la cause, quelle que fût sa qualité, était justiciable d'un Tribunal de Commerce; qu'en définissant les actes de commerce, on réglerait invariablement la compétence des Tribunaux de Commerce; que passant ensuite à la reconnaissance des actes de commerce, on devait considérer comme tels, .... tous actes de trafic et négoce de denrées et marchandises,.... toutes signatures données sur des lettres de change, ou billets à ordre,.... toutes entreprises de manufactures, &c. &c..... Ainsi, la compétence aurait été déterminée par le fait seul, sans exception.

L'application rigoureuse de ce principe a paru présenter de graves inconvéniens, en ce que tous les Français, faisant des actes de trafic plus ou moins étendus, seraient tous, par ce seul fait, justiciables des Tribunaux de Commerce.

Par exemple, un magistrat achète des denrées pour les besoins de sa maison ; quelques circonstances le déterminent à en vendre une partie.

D'après le principe que le fait détermine la compétence, comme dans l'espèce, il y a eu achat et vente, et conséquemment trafic de denrées : le jugement des contestations nées sur la vente faite par le magistrat, appartiendrait au Tribunal de Commerce; cependant, en soi, l'acte de ce magistrat n'est pas un véritable acte commercial; c'est un acte civil qui, en cas de contestations, doit conduire les contractans devant les Tribunaux civils.

La loi n'a donc pu admettre le principe dans sa généralité, mais elle a dû considérer que le Français non négociant, que celui exerçant une profession civile ou militaire, que le capitaliste qui achète des marchandises ou des denrées audelà de ses véritables besoins, fait alors un acte commercial de sa nature, puisque la quantité de la chose achetée prouve l'intention de la revendre, ce qui constitue le trafic. Cependant il n'y a encore que présomption; le fait qu'il a acheté au-delà de ses véritables besoins, n'est pas reconnu ; la loi a dû réputer ce marché, acte de commerce, et laisser aux juges l'examen du fait et les conséquences à en tirer.

Mais si la loi a dû dire, tel acte est réputé fait de commerce, n'en est-il pas tels autres qui le sont si évidemment, qu'il n'y a point d'examen à faire pour les qualifier? Oui, sans doute, mais c'est en considérant, comme le fait la loi, la qualité des personnes qui ont contracté..... Et en effet, il est constant que les engagemens et transactions entre négocians, marchands et banquiers, sont des actes positifs de commerce, à moins qu'il ne s'agisse de denrées et marchandises achetées pour leur usage parti

Art.

culier; car, dans ce dernier cas, ce n'est plus comme négocians qu'ils ont contracté, mais comme citoyens.

Il suit de ces considérations, que la compétence des Tribunaux de Commerce a dû être déterminée, soit par la nature de l'acte sur lequel il y aura contestation, soit par la qualité de la personne.

631. Ainsi, les Tribunaux de Commerce connaîtront.... de toutes contestations relatives aux engagemens et transactions entre négocians, marchands et banquiers ;..... entre toutes personnes, des contestations relatives aux actes de commerce;.... et la loi définit ce qu'elle répute actes de commerce.

Il serait superflu de vous entretenir, avec détail, de ces définitions comprises aux articles 18 et 19 de la loi; leur clarté paraît devoir nous en dispenser, et nous passons aux dispositions des articles 22 et 23 qui ont des rapports avec ce que dit l'article 18 sur la lettre de change.

Nous sommes obligés de rappeler l'article 112 du livre er du Code de Commerce; il dit : sont réputées simples promesses toutes lettres de change contenant supposition, soit de nom, soit de qualité, soit de domicile, soit des lieux d'où elles sont tirées, ou dans lesquels elles sont payables. Les motifs de cet article sont : que certaines circonstances changent la nature de l'engagement souscrit sous le titre de lettre de change, qu'alors il n'est qu'une obligation civile, dont l'examen appartient aux tribunaux civils; conséquemment, l'article 22 dispose que sur la réquisition du défendeur, le Tribunal de

Commerce sera tenu de renvoyer au tribunal civil.

Mais il peut arriver que la lettre de change, réputée simple promesse aux termes de l'art. 112, porte, en même temps, des signatures d'individus négocians et d'individus non négocians; l'article 23 veut alors que le Tribunal de Commerce en connaisse, mais qu'il ne puisse prononcer la contrainte par corps contre les individus non négocians, à moins qu'ils ne se soient engagés à l'occasion d'opération de commerce, trafic, change, banque ou courtage. Dans le cas ci-dessus, il y a, sauf celui d'engagement commercial, obligation civile de la part du signataire non négociant, et obligation commerciale de la part du signataire négociant; celui-ci a paru devoir entraîner l'autre devant les juges de commerce.

Les mêmes articles 22 et 23 dont nous venons de rapporter des dispositions relatives aux lettres de change réputées simples promesses, règlent encore la compétence des Tribunaux de Commerce, en ce qui concerne les billets à ordre.

On demandait que le billet à ordre fût, en tout, assimilé à la lettre de change, et pour la juridiction, et pour la contrainte par corps, quels qu'en fussent les signataires.....

Après de longues discussions, les raisons, en faveur de cette opinion, ont paru plus spécieuses que justes, et conséquemment aux principes suivis pour le réglement de la compétence des Tribunaux de Commerce, l'on s'est arrêté aux principes suivans.

Art.

Le billet à ordre portant des signatures d'in- 636,

Art.

dividus non négocians, et n'ayant pas pour occasion des opérations de commerce, trafic, change, banque ou courtage, est une obligation civile qui ne peut être soumise aux Tribunaux de Commerce. 637. Le billet å ordre portant, en même temps, des signatures d'individus négocians et d'individus non négocians, est, tout à la fois, une obligation civile pour les uns, et une obligation commerciale pour les autres ; l'intérêt du commerce veut, dans ce cas, que les Tribunaux de Commerce en connaissent. Mais il ne faut pas qu'ils puissent prononcer la contrainte par corps contre les individus non négocians, à moins qu'ils ne se soient engagés à l'occasion d'opérations de commerce, trafic, change, banque ou courtage.

L'application de ces principes accorde au commerce tout ce que son intérêt, bien entendu, exigeait de la loi ;.... aller au-delà, c'était mettre les individus non négocians dans le cas de ne pouvoir plus se servir d'un papier qui, avec un usage modéré, peut leur être utile dans les transactions sociales ;..... aller au-delà, c'était étendre la faculté de se soumettre à la contrainte par corps, quand il est dans l'intérêt de l'Etat et dans nos moeurs qu'elle soit limitée;.... enfin, cette faculté eût fait prendre une autre direction aux emprunts pour affaires civiles, direction contraire à l'intérêt des familles, en ce qu'elle eût offert plus de facilités pour mobiliser les fortunes immobilières.

C'est donc par des considérations d'ordre public que la loi a refusé d'assimiler, en tout, le billet à ordre à la lettre de change, mais, en même temps, elle a su ménager l'intérêt particulier du

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