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tion ne pourrait plus s'effectuer en nature, elle s'opérerait par voie d'indemnité, qui sera réglée entre les deux gouvernements. Les prescriptions du présent article devront être exécutées dans le délai d'une année, à compter de l'échange des ratifications de la présente convention.

10. Les deux gouvernements veilleront à ce que la nomenclature des îles soit invariablement maintenue et observée dans tous les actes, telle qu'elle se trouve portée sur la carte annexée au procès-verbal de la description de la limite de propriété. Ils se feront connaître, l'un à l'autre, les noms

totalité, soit immédiatement, soit par mode de ravalement.

14. L'enlèvement du bois fabriqué en vertu de l'article précédent ne sera permis qu'après que la quantité en aura été constatée par un dénombrement contradictoire, dont il sera dressé procès-verbal dans les formes déterminées par les lois du pays où la coupe aura eu lieu.

15. Le prix du bois dont il aura été disposé en vertu des articles précédents sera fixé à l'amiable, et, au besoin, d'après les lois qui règlent la matière dans le pays sous la souveraineté duquel l'exploitation aura eu lieu. Le paiement en sera fait, au

qu'auront reçus, de la part de leurs proprié- plus tard, dans le délai d'une année, à

taires, les îles de nouvelle formation.

11. Chacun des deux gouvernements concourra à l'entretien et à la conservation de la limite des propriétés et de ses repères, ainsi qu'au prolongement de ces lignes dans les nouveaux atterrissements. Les tranchées pratiquées dans les bois pour marquer, soit la limite, soit les transversales qui lui servent de repères, devront toujours être tenues ouvertes, et les divers signes de la limite seront successivement placés, à mesure que de nouvelles formations de terrains permettront de les rétablir sur les points indiqués dans sa description géométrique. Les deux gouvernements se communiqueront réciproquement les mesures qu'ils auront adoptées pour l'exécution du présent article.

12. Les tranchées qui auront servi à établir la ligne de la limite fixe sont déclarées propriétés domaniales, indivises entre les deux Etats. Les tranchées qui auront servi à établir les transversales, ainsi que l'emplacement des bornes repères, sont décla rées propriétés domaniales de l'Etat dans les communes duquel ces signes ou repéres sont situés. Les possesseurs seront indemnisés, s'il y a lieu, par leurs gouvernements respectifs. Les deux gouvernements supporteront, par portions égales, le montant des indemnités qui seront allouées pour les tranchées de la ligne limite.

13. Les souverains des deux rives continueront à jouir du droit de faire faire, dans les îles et terrains soumis à leur souveraineté, des exploitations de bois de fascinage pour la défense des rives du fleuve. Ce droit s'exerce sur le bois qui n'a pas encore atteint sa huitième feuille, de même que sur celui qui, ayant dépassé cet âge, n'aurait pas été coupé, dans le délai d'une année, par le propriétaire; dans ce cas, le droit de chaque gouvernement se prolonge de cinq autres années. Tout canton ou portion de canton boisé, mis en coupe à quelque titre que ce soit, sera exploité en

dater de l'époque où la quantité de bois ainsi exploitée aura été constatée.

16. Les propriétaires des îles du Rhin, ou des droits utiles dont il est disposé dans l'art. 5 de la présente convention, sont autorisés à nommer des gardes, qui devront réunir les qualités requises pour être assermentés.

17. Les deux gouvernements veilleront à ce que les autorités compétentes statuent, dans le plus court délai, sur les demandes qui leur seront adressés par les communes et autres propriétaires de la rive opposée pour obtenir, soit autorisation de faire des coupes, soit celle de jouir des herbes, roseaux et pâturages, lorsque les demandes leur seront présentées en temps utile, et d'après les formalités prescrites par chacun des deux gouvernements. qui s'en donneront respectivement connaissance.

18. Le régime des douanes ne pourra, dans aucun cas, porter obstacle ni à l'exportation ni à l'importation, en franchise de tous droits, des produits des terrains spécifiés dans l'art. 6 de la présente convention, ni de ceux qui proviendront de la jouissance des droits utiles désignés dans l'art. 5. Les propriétaires de ces produits seront, néanmoins, assujettis aux formalités relatives, soit à l'exportation, soit à l'importation.

19. Les deux gouvernements conviennent de faire diriger désormais les travaux, sur chaque rive du Rhin, dans un but purement défensif, et de manière à arriver successivement à la régularisation de son cours. A cet effet, les ingénieurs des deux Etats chargés de ces travaux formeront une commission mixte, qui se réunira au mois d'octobre, alternativement à Strasbourg et à Carlsruhe. Le président de cette commission sera nommé par le gouvernement du pays où en sera le siége. Les dispositions concertées en commission ne seront obliga. toires qu'après l'approbation des gouvernements respectifs. Dans sa première réu

nion, la commission tracera un projet général de lignes de régularisation, qui servira de base aux travaux à exécuter dans l'année; et, dans les années subséquentes, la commission apportera à ce tracé les corrections que les changements survenus dans le cours du fleuve auront rendues nécessaires, ainsi que celles qui seront indiquées par les résultats de l'expérience. Aucun des deux Etats ne fera exécuter de travaux en dehors des lignes convenues, sauf le cas où des circonstances extraordinaires nécessiteraient l'exécution d'urgence d'ouvrages imprévus. Dans les réunions annuelles, les ingénieurs se communiqueront l'indication des travaux qu'ils ont le projet d'exécuter dans le cours de l'année. Les ingénieurs des deux rives se donneront réciproquement avis des modifications qui auront été prescrites par leurs gouvernements. Si des circonstances extraordinaires nécessitaient l'exécution d'urgence d'ouvrages imprévus, l'ingénieur de la rive attaquée en donnerait immédiatement avis motivé à l'ingénieur de la rive opposée. Dans ce cas, la commission aurait à examiner, à sa prochaine réunion, s'il y a lieu de changer les lignes convenues antérieurement ou de les maintenir, en remplaçant les travaux d'urgence par des ouvrages définitifs.

20. Afin de faciliter autant qu'il est en eux l'exécution des travaux de défense et de régularisation du cours du Rhin, les deux gouvernements s'engagent à n'apporter aucun obstacle à l'exploitation et au transport, d'une rive à l'autre, des matériaux destinés aux susdits travaux. Toutefois, ces matériaux resteront soumis aux droits ordinaires et au régime des douanes établis dans le pays d'où ils auront été tirés.

21. Les deux gouvernements conviennent de faire faire, à l'égard des ponts et bacs existants, une enquête à la suite de laquelle la position et le nombre de ces moyens de passage seront déterminés par un accord mutuel, en ayant égard aux concessions et aux titres de ceux qui les exploitent. En cas de suppression ou de modification d'un ou de plusieurs de ces moyens de passage, les exploitants actuels, aprés vérification faite de leurs concessions et titres, seront indemnisés, s'il y a lieu, par leurs gouvernements respectifs. Lorsque, pour favoriser les relations entre leurs Etats, les deux souverains auront, d'un accord mutuel, trouvé utile d'augmenter le nombre des moyens de passage déterminés, l'établissement des nouveaux ponts ou bacs sera réglé sur le principe d'égalité d'avantages réciproques. L'établissement des ponts et des bacs ne peut, en aucune

façon, porter atteinte à la liberté de navigation du Rhin, sous le rapport du commerce, telle qu'elle est consacrée par les traités. Il ne peut non plus priver les habitants des communes riveraines du droit de traverser le leuve pour transporter leurs produits agricoles, en se conformant, toutefois, aux lois de police et de douane de chaque Etat. La même faculté de libre navigation est réservée pour le transport des matériaux destinés aux travaux du Rhin.

22. La présente convention sera ratifiée, et les ratifications seront échangées dans le délai de trois mois, ou plus tôt, s'il est possible. En foi de quoi, les commissaires respectifs ont signé la présente convention, et y ont apposé le sceau de leurs armes. Fait à Carlsruhe, le 5 avril 1840.— (L. S.) Signé AD. DE BACOURT. (L. S.) Signé FRÉDÉRIC baron DE BLITTERSDORFF.

ANNEXE N. 1.

Procès-verbal historique

et descriptif des opérations de la démarcation de limite dite des propriétés ou des bans des communes, tracée entre la France et le Grand-Duché de Bade.

Ce jourd'hui cinq avril mil huit cent quarante, les soussignés Louis - Adolphe -Aimé Fourier de Bacourt, officier de l'ordre royal de la Légiond'Honneur, chevalier du nombre de l'ordre de Charles III d'Espagne, commandeur de l'ordre de la Conception du Portugal, envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de sa majesté le roi des Français près les Etats-Unis d'Amérique, son commissaire extraordinaire nommé, le 17 mars dernier, en remplacement de M. le lieutenant général comte Guilleminot, décédé le 14 mars 1840; assisté des sieurs François-Nicolas Immelin, chef d'escadron au corps royal d'état-major, chevalier de l'ordre royal de la Légion-d'Honneur, et Henri. Camille Martner, capitaine au même corps, chevalier de l'ordre royal de la Légion d'Honneur, faisant fonctions d'ingénieurs, d'une part;

Et Frédéric-Charles Landolin, baron de Blittersdorff, ministre d'Etat de la maison Grand-Ducale, el des affaires étrangères de son altesse royale le grand-duc de Bade, grand-croix des ordres du Lion de Zaehringen, de Léopold d'Autriche, de la Couronne de Bavière, du Lion d'or de HesseElectorale, et de Louis de Hesse Grand-Ducale, commissaire de son altesse royale le grand-duc de Bade; assisté des sieurs Philippe-Jacques Scheffel, major, ut conseiller à la direction des ponts-etchaussées, chevalier de l'ordre grand-ducal du Mérite militaire, de l'ordre royal de la Légion, d'Honneur et de celui de Saint-Wladimir de Russie; et Joseph Reiner, ci-devant Zipfel, géomètre en chef du bureau topographique, faisant fonctions d'ingénieurs, d'autre part; se sont réunis à l'effet de dresser et signer le présent procès-verbal histo. rique et descriptif des opérations de la démarcation de la limite dite des propriétés ou des bans des communes, tracée entre la France et le grand-duché de Bade, en exécution du paragraphe 5 de l'art. 3 du traité de Paris, du 30 mai 1814, et du paragraphe 2 de l'art. 1" de celui du 20 novembre 1815.

Limites entre la France et l'Allemagne, antérieurement au traité de Lunéville.

Lorsque, par le traité de Westphalie, conclu en 1648, l'Alsace fut réunie à la France, le bras principal du Rhin, appelé le Thalweg, forma la limite de souveraineté entre cet Etat et l'empire germanique.

En même temps on conserva une autre limite, parce que, depuis un temps immémorial, elle fixait la position respective des propriétés des com. munes riveraines. Il y eut donc, dès lors, entre la France et l'Allemagne, deux limites; celle dite de souveraineté et celle dite des propriétés ou des bans des communes.

La première variait avec les changements fréquents que subit le thalweg du fleuve.

La seconde était fixe de position, et divisait gé. néralement en deux parties tout le lit du Rhin par une ligne longitudinale.

Toutes deux se coupant fréquemment, il y avait toujours, de deux communes contigues, une au moins dont une partie des propriétés se trouvait soumise à la souveraineté de l'autre rive.

D'un autre côté, la limite de propriété ne pouvant être tracée en grande partie que dans les îles, était détruite avec elles, et sa reproduction dans les fles nouvelles exigeait des travaux de la main des hommes.

Les discussions continuelles qui résultaient nécessairement de la destruction du tracé matériel de cette limite décidèrent, en 1769, les gouvernements des Etats riverains à faire procéder à une délimitation. Le roi de France nomma pour son commissaire le sieur Noblat, dont le nom désigne encore à présent la limite qu'il a tracée. Les opérations des commissaires durèrent jusqu'en 1790, et n'étaient point entièrement achevées à cette époque.

Traité de Lunéville.

Pour éviter d'avoir deux limites qui se croisent, les auteurs du traité signé à Lunéville, le 9 février 1801, tombèrent dans un inconvénient plus grave encore. En vertu de l'art. 6 de ce traité (1), cha. que Etat s'empara de tous les terrains que les communes de la rive opposée possédaient dans sa souveraineté; il en résulta que la limite des propriétés, devenue la même que celle de souveraineté, fut soumise à toutes les variations capricieuses du thalweg du fleuve.

Traités de Paris.

Les traités de Paris des années 1814 et 1815, en ce qui concerne la frontière du Rhin, eurent pour objet de remédier à ce désordre. Leurs disposi. tions rétablirent le principe d'une limite fixe de propriété distincte de celle de souveraineté, mais en modifiant l'application de la première. Ces dis

(1) Art. 6. La République française possède désormais en toute souveraineté et propriété les pays et domaines situés à la rive gauche du Rhin et qui faisaient partie de l'empire germanique, de manière que le thalweg du Rhin soit désormais la limite entre la République française et l'empire germanique.

(2) Traité de Paris de 1814.

Art. 3. Quant au Rhin, le thalweg constitucra la limite, de manière cependant que les chan⚫gements que subira par la suite le cours de ce fleuve n'auront à l'avenir aucun effet sur la pro priété des îles qui s'y trouvent l'état de posses

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positions ordonnent le rétablissement de l'état de possession des fles, tel qu'il existait à l'époque du traité de Lunéville; elles prescrivent la nomipropriété des îles à la suite d'une nouvelle reconnation de commissaires chargés de fixer l'état de naissance du fleuve (2).

Opérations des commissaires.

Les commissaires noinmés à cet effet ouvrirent leurs conférences à Bâle, au mois de juin 1817, mais leurs relations ne furent en pleine activité que dans le cours de l'année suivante.

Ils avaient d'abord à déterminer les surfaces sur lesquelles ils auraient à statuer; car les propriétés auxquelles les dispositions de l'art. 6 du traité de Lunéville s'appliquèrent appartenaient généralement aux banlieues des anciennes communes, qui s'étendaient souvent sur le continent de la rive op. posée, tandis que les dispositions des traités de Paris ne devaient s'appliquer qu'aux íles du Rhin. 11 y avait donc à déterminer quels terrains seraient considérés comme iles, et, par cette raison, déclarés sujets à restitution. En conséquence, il fut

convenu:

1 Qu'on appellerait ile tout terrain entouré des eaux du Rhin à l'époque de leur hauteur moyenne;

2° Que les terrains qui seraient réunis au continent par des barrages ou autres ouvrages d'art ne pourraient être regardés comme iles qu'autant que ces ouvrages n'auraient pas occasionné un atterrissement suffisant pour établir, entre les terrains et le continent, une communication découverte qui subsisterait encore après la suppression de l'ouvrage d'art.

Détermination de la hauteur moyenne des eaux du Rhin.

Pour établir une distinction entre les terrains qui seraient réputés îles et ceux du continent des deux rives qui resteraient aux propriétaires qui les avaient acquis par le traité de Lunéville, les cominissaires adoptèrent pour base le lit du fleuve déterminé par l'état des eaux à l'époque de leur hauteur moyenne, et convinrent que celle-ci serait déduite des hauteurs quotidiennes observées pendant les sept dernières années.

Le chiffre de la hauteur moyenne devant avoir une grande influence sur la aotité des propriétés qui seraient restituées, sa fixation donna lieu à de longues discussions sur la valeur et la régularité des cotes de hauteur et sur celles des rhinomètres qui devaient servir d'instruments de mesure.

Finalement on arrêta les cotes de hauteur sui.

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sion de ces fles sera rétabli tel qu'il existait à l'époque de la signature du traité de Lunéville.. Traité de Paris de 1815.

Art. 2. Lethalweg du Rhin formera la démar⚫cation entre la France et les Etats de l'Allemagne, mais la propriété des îles, telle qu'elle sera fixéé à la suite d'une nouvelle reconnaissance du cours de ce fleuve, restera immuable, quelques chan⚫gements que subisse ce cours par la suite du temps. Des commissaires seront nommés de part et d'autre par les hautes parties contractantes, dans le délai de trois nois, pour procéder à la

* dite reconnaissance. ■

dante, à quatre-vingt-onze pouces au-dessous de zéro.

C. A celui de Strasbourg, échelle ascendante, à cinquante-sept pouces à l'ancience échelle ou quarante-deux pouces à l'échelle actuelle, correspondant à un mètre vingt-six centimètres au-dessus de zéro.

D. A celui de Helmlingen, échelle descen dante, à cent quatorze pouces au-dessous de zéro.

Application de la hauteur moyenne des eaux.

Le mode d'application de la hauteur moyenne des eaux ne put être adopté qu'après de nouvelles discussions.

Il fut enfin convenu que l'application dont il s'agit se ferait en observant l'état du fleuve le jour où les rhinomètres marqueraient la hauteur moyenne.

L'observation était donc subordonnée à la va riation de hauteur des eaux, et, parce qu'il fallait que cette variation fût lente, l'observation ne pouvail avoir lieu que dans la période où cette hauteur allait en diminuant.

L'observation eut lieu successivement pour les diverses parties du fleuve, et les eaux passèrent par la hauteur moyenne les 19 juin et 9 septembre 1820, 2 et 15 juillet 1821.

D'après les données qui résultèrent de l'observation, l'ancienne limite dite de Noblat, partout où elle passait sur le continent, fut reportée dans le bras du fleuve le plus voisin indiqué par les eaux moyennes; de telle sorte que cette limite, modifiée d'après le sens littéral des traités de Paris, présenta alors, tantôt ses anciennes lignes polygonales, et tantôt les lignes courbes de ses nouvelles positions.

Fixation de la propriété des iles.

Après avoir déterminé ainsi la surface du lit du fleuve, les commissaires s'occupèrent à régler les droits réciproques des communes sur cette même surface.

Toute la surface du lit du Rhin, fles et eaux, devait être partagée, selon l'état de possession existant à l'époque du traité de Lunéville, entre les communes riveraines du fleuve, et le droit à la propriété des îles appartenir à chaque commune dans la partie de la surface circonscrite par la limite déterminée et invariable de son ban. Les commissaires avaient donc :

1 A reconnaître quelle commune avait possédé chaque fle à l'époque du traité de Lunéville;

2 A fixer les droits respectifs à la propriété des fles pour lesquelles l'état de possession ne pouvait pas être constaté, comme aussi à la propriété de celles d'une formation postérieure à la date de ce traité, ou qui pourraient se former à l'avenir;

3° A régler les droits de propriété, dans le cas où ils auraient déjà été un sujet de litige, avant l'époque de ce même traité;

4° Enfin, à faire procéder à des partages de toutes les îles entre les communes mères d'une rive et leurs filiales ou annexes de l'autre rive, qui étaient indivises, et dont l'indivision devait cesser par l'effet dudit traité de Lunéville.

Opérations préparatoires.

Les changements fréquents opérés par l'action des eaux dans l'étendue comme dans la position des îles du Rhin, dont l'une peut disparaître, tandis qu'une fle nouvelle peut se former, soit à la même place, soit à sa proximité, ne permettaient

de rétablir intégralement l'état de possession d'une époque quelconque qu'autant que la surface totale des fles appartenant à une commune, dans l'éten due de son ban, n'aurait pas été altérée, et que la possession réelle se fût exercée sur chaque partie de la surface de ce ban. Il est donc impossible de trouver l'état de possession, à l'époque du traité de Lunéville, tous les éléments propres à fixer la propriété des îles présentes et futures. Ces circon. stances out obligé les commissaires à faire procéder, en commun, par leurs ingénieurs, aux opérations suivantes :

1o A lever la carte topographique du lit du Rhin, en prenant pour base un canevas trigonométrique ;

2 A déterminer par le calcul et fixer sur la carte la position de tous les points de la limite, retrouvés ou non, que des repères rattachaient au continent;

3o Et à reporter entre ces mêmes points la limite de Noblat, au moyen de ses plans et des éléments numériques contenues dans ses procès-verbaux,

Nouvel état de propriété.

Lorsque les ingénieurs eurent procédé ainsi qu'il vient d'être expliqué, et que les droits respectifs eurent été fixés, les commissaires s'occupèrent de l'exécution de la disposition des traités de Paris qui leur prescrivait de faire la délimitation des propriétés et d'en constater les limites réciproques, en plaçant des poteaux et en dressant des cartes.

La théorie et l'expérience se réunissaient pour les convaincre de l'insuffisance de la limite telle que Noblat l'avait tracée. Sa reproduction dans les fles nouvelles n'aurait pu se faire, à cause de la multiplicité de ses lignes, qu'au moyen d'opérations difficiles et dispendieuses; c'est à cause de ce grand nombre de lignes que beaucoup de signes de la limite n'ont pu être retrouvés dans le lit du fleuve, et que plusieurs communes avaient perdu des surfaces quelquefois assez considérables.

Rectification de la limite.

Le tracé d'une figure polygonale donnée étant impraticable sur la surface des eaux par les moyens babituels, il s'ensuit que la limite, qui, dans le droit et sur le papier, est une ligne continue, ne peut exister dans la nature que par groupes isolés, en nombre égal à celui des lignes qu'elle traverse. D'un autre côté, le tracé de chaque partie de la limite ne peut avoir lieu qu'autant que dans l'île qu'elle doit traverser on trouve la position du sommet d'un angle et la direction d'un de ses côtés.

Ce problème fut résolu par les commissaires. Au moyen de la rectification des parties de l'ancienne limite conservée, et de la limite tracée par les bras des eaux moyennes, ils réduisirent le nombre de lignes de la limite de propriété à cent vingt au lieu de douze cent quatre vingts qui marquaient celle dite de Noblat; et, par cette rectification, ils la rendirent susceptible d'être rattachée au continent pour chacune de ces lignes; celles ci restant indépendantes les unes des autres quant à leur reproduction.

La rectification consista dans la substitution d'une seule ligne droite, de position moyenne, à un grand nombre de lignes plus courtes, soit droites, soit courbes; elle s'est faite en suite de la convention diplomatique du 15 octobre 1820, qui fut approuvée par les deux gouvernements.

Cette convention voulait aussi qu'en changeant la figure de la limite on conservât à chaque propriété la même valeur. Toutes les flas étant boisées

et formées de terrains d'alluvion, on a supposé que, dans l'espace ordinairement très-resserré qui est renfermé entre l'ancienne et la nouvelle limite, l'unité de surface y était de même valeur, en faisant abstraction du bois, dont la propriété fut réservée à ceux qui donnaient leurs terrains en échange; mais lorsque cet espace était composé de terrains actuellement productifs et d'eau qui ne présentait que la chance de production future, on a compté cinq surfaces d'eau pour une surface de terre, afin de compenser les terrains actuels par le droit aux atterrissements à venir.

Système de la nouvelle limite.

par

des com

La rectification de la limite, faite pensations de surfaces, n'a déplacé que peu des points polybanaux conservés après l'application des eaux moyennes, c'est-à-dire ceux auxquels concourent au moins trois bans de commune.

Chacun de ces points, ainsi que tous ceux où la nouvelle limite forme un angle, est rattaché à un ou plusieurs clochers par des lignes appelées transversales, de telle manière que chaque côté de la limite peut être reproduit sur le terrain sans le secours des autres. Če côté appartient toujours à un ou plusieurs triangles dont l'angle qui lui est opposé a son sommet dans l'axe d'un clocher, et dont les deux autres côtés passent, de plus, par des bornes repères dites rheinmark. Chacun de ces triangles est calculé trigonométriquement et lié au système de triangles par lesquels sont déterminées les positions respectives de tous les clochers de l'une et de l'autre rive.

Les résultats numériques déduits du calcul des triangles sont consignés dans deux tableaux. Le premier, intitulé tableau géométrique de la limite, contient pour chaque borne sa distance à la précédente et à la suivante, sa distance aux clochers ét aux rheinmark auxquels elle est rattachée, la direction azimutale de toutes ces lignes et les angles qu'elles font entre elles. Le second, intitulé description numérique, donne, en allant du sud au nord, les coordonnées de chacun des points angulaires et des repères de la limite, c'est-à-dire leurs distances à la méridienne de Paris et à sa perpendiculaire.

Tracé de la nouvelle limite,

Après avoir établi dans le cabinet la position des lignes dont se compose la nouvelle limite et les transversales de chaque point angulaire ou polybanal, les ingénieurs en ont fait le tracé en se plaçant dans le clocher de chaque transversale, et y déterminant la direction de ces lignes. Le concours ou l'intersection de celles-ci a donné, sur le terrain, la position de ces points.

Alornement.

Afin de rendre visibles les lignes de la limite dans les îles et de fixer la position des transversales, les ingénieurs y ont fait l'application du mode d'abor. nement déterminé par une convention diplomatique qui a aussi reçu l'approbation des deux gouvernements. Les lignes de la limite ont été marquées dans toutes les îles par des bornes placées aux points angulaires ou polybanaux et entourées de peupliers; par des poteaux plantés entre les bornes, et par des allées de peupliers dans toutes les fles, qui sont généralement boisées.

Les transversales sont aussi marquées sur le terrain, dans toutes les parties où elles traversent des bois, par des tranchées bordées de saules, et les

rheinmark placées sur leur direction ont été entou. rées de peupliers.

Des notations gravées sur les deux espèces de bornes y indiquent, par des traits, la direction des lignes qui y concourent; par des lettres initiales, les noms des communes et des édifices, et par des nombres, les longueurs des lignes de repère.

Suspension des opérations de la démarcation.

La délimitation avait été tracée sur tout le déve loppement de la frontière, à l'exception d'une la cune de trois bornes. Elle avait été mise en vi gueur, à la grande satisfaction de tous les proprié taires des îles, sur les trois cinquièmes de son développement, sans qu'aucune réclamation fondée se fût élevée contre elle, lorsque intervint le traité de 1827.

Le résultat immédiat de cet acte, conçu dans un esprit tout à fait contraire aux principes établis, fut de paralyser, pendant cinq années, les opéra tions déjà si avancées de la démarcation.

Les deux gouvernements, convaincus, enfin, de l'impossibilité de mettre ce traité à exécution, se décidèrent, en 1833, à l'abroger.

Mais telles étaient, et la nature des complica tions auxquelles cet acte a donné naissance, et la difficulté des questions qui restaient encore à résoudre, qu'il n'a pas été possible aux commissaires de compléter plus tôt et de soumettre à la sanction de leurs gouvernements respectifs le présent procès-verbal.

Modification de la limite de propriété.

Les commissaires avaient à reconstituer la pro priété des communes riveraines en reconnaissant leurs droits respectifs : ces droits résultaient, soit de la possession de fait en l'année 1801, soit du titre qui la faisait présumer à défaut de documents certains.

Ils avaient à statuer: 1° sur les surfaces des anciennes propriétés communales, exceptées de la restitution prescrite par les traités de Paris, comine faisant partie du continent de la rive opposée, d'après l'observation de la hauteur des eaux moyennes.

2 A stipuler sur des cas de litige, d'incertitude, d'indivision, de droits d'usage, etc.

54

Ils ont, en conséquence, arrêté la modification de la limite pour vingt-quatre communes fran. çaises et trente communes badoises, qui se troa. vaient dans la première catégorie, ci. Pour seize communes françaises et quinze badoises, qui se trouvaient dans la seconde catégorie, ci.

. ...

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Ce qui porte en résultat les communes riveraines au nombre de. 106

Les commissaires eurent encore à prendre des

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