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clôture, il est présumable que celui-ci a payé la moitié de ce que le mur a coûté, depuis la fondation jusqu'à la hauteur d'un mur de clôture.

Mais c'est là une décision évidemment inadmissible pour deux raisons. D'abord, en construisant mon bâtiment, je n'aurais pu vous forcer de payer que la moitié de ce que pouvait coûter un simple mur de clôture, et non pas la moitié de ce que coûtait mon mur de bâtiment avec ses fondements formés d'énormes pierres de taille; comment donc pourriez-vous induire, de la faculté que j'avais de vous faire contribuer pour 100 ou 150 fr., la copropriété d'un mur qui me coûte peut-être 2,000 fr. ? N'est-il pas bien plus probable que la modicité de la somme pour laquelle vous auriez contribué m'a décidé à rester seul propriétaire, sauf l'espérance de vous voir acheter plus tard la mitoyenneté de tout mon mur, si vous veniez à bâtir vousmême?... Mais ensuite, quand même on supposerait que l'art. 663 me donnait le droit de vous forcer à payer la moitié de mon gros mur, la décision ne pourrait pas encore être admise. En effet, cette doctrine ne se soutiendrait qu'au moyen de la distinction entre les murs de villes ou faubourgs ( auxquels elle s'appliquerait) et ceux des campagnes (auxquels elle ne s'appliquerait pas); or, cette distinction est complétement arbitraire, il n'en existe nulle trace dans notre article, et elle est en flagrante contradiction avec la volonté du législateur, qui déclare positivement porter une règle qui sera identique dans les villes et les campagnes.

Pour échapper à ce dernier argument, il aurait donc fallu aller plus loin que ne l'ont osé faire ces auteurs, et en venir jusqu'à dire qu'il en serait aussi de même dans les campagnes. Or, ce que n'ont pas osé Toullier et Pardessus, un autre l'a fait Delvincourt professe que, même dans les campagnes, le mur du bâtiment sera mitoyen, si le terrain voisin est enclos de tous côtés. Mais sur quoi fonder cette présomption, quand on se prive du seul prétexte qu'on lui trouvait dans le droit de contraindre à la clôture?...

Ainsi donc, il n'y a moyen de soutenir ni l'une ni l'autre doctrine. Si l'on argumente du droit de contraindre à la clôture, on a du moins un motif tel quel; mais on se jette dans un arbitraire flagrant, puisqu'on ne peut appliquer qu'aux villes une règle que la loi dit expressément faite pour les villes et les campagnes. Que si l'on veut étendre la règle nouvelle aux campagnes, on n'a pas même un prétexte spécieux à donner à cette extension.

Il faut donc tenir pour certain que l'article s'applique seulement entre deux bâtiments ou entre deux enclos (1). — Si toutefois, de l'autre côté du mur d'un bâtiment, il n'existait pas actuellement un second bâtiment, mais qu'il y eût des vestiges d'un bâtiment ancien, aujourd'hui détruit, il est clair que ce mur serait mitoyen jusqu'au point où

(1) Duranton (V-303), Zachariæ (II, p. 44), Duvergier (sur Toull.); Pau, 18 avr. 1834; voir aussi Orléans, 19 janv. 1819 (Dev., 35, 2, 298; 19, 2, 596).

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l'on voit que s'élevait ce bâtiment, tout comme s'il existait encore. La preuve qui doit faire tomber la présomption de mitoyenneté ne peut se trouver que dans un titre ou dans l'un des signes que va nous indiquer l'article suivant.

654. Il y a marque de non-mitoyenneté lorsque la sommité du mur est droite et à plomb de son parement d'un côté, et présente de l'autre un plan incliné ;

Lors encore qu'il n'y a que d'un côté ou un chaperon ou des filets et corbeaux de pierre qui y auraient été mis en bâtissant le

mur.

Dans ce cas, le mur est censé appartenir exclusivement au propriétaire du côté duquel sont l'égout ou les corbeaux et filets de pierre.

I. 603. Les signes légaux de non-mitoyenneté d'un mur sont au nombre de trois: 1° une sommité de mur inclinée d'un seul côté. Ainsi, quand le dessus du mur (au lieu d'être plus élevé au milieu, pour s'incliner des deux côtés, de manière à faire tomber l'égout sur les deux propriétés) a sa partie la plus élevée à l'arête d'un des côtés, et s'incline vers l'autre côté dans toute sa largeur, de manière à rejeter l'égout entier sur un seul héritage, cette circonstance indique légalement que le mur appartient en entier au propriétaire de ce dernier héritage. C'est ce que veut dire la loi quand elle parle d'un mur dont la sommité est d'un côté à plomb du parement, c'est-à-dire en ligne droite avec la paroi extérieure, la surface.

2° L'existence d'un chaperon ou de filets d'un seul côté. — On appelle chaperon la couverture du mur, laquelle est tantôt en briques, en ciment, chaux ou plâtre, tantôt en tuiles ou ardoises. Les filets, qu'on appelle aussi le larmier, ne sont rien autre chose que la continuation de la couverture dans la partie qui déborde le mur. Or la couverture, soit qu'elle ait ou non des filets (et il serait bien rare qu'elle n'en eût pas), ne peut guère exister d'un seul côté; car on ne couvre pas un mur dans une partie seulement de son épaisseur. Donc, quand l'article parle de chaperon ou de filets n'existant que d'un côté, il s'exprime inexactement et veut dire un chaperon, avec ou sans filets, incliné vers un seul côté.

On voit donc que ces deux cas se réduisent à cette idée unique: « quand le mur est construit de telle sorte que l'égout ne tombe que d'un côté ; » parce qu'en effet, s'il était mitoyen, un seul des propriétaires n'aurait pas voulu recevoir cet égout à lui seul.

3. Enfin, l'existence de corbeaux d'un seul côté du mur. Ces corbeaux sont des pierres placées dans le mur et qui font saillie dans le dessein de recevoir des poutres; on reconnaît ordinairement qu'ils ont été placés en construisant le mur quand la pierre dont une partie fait saillie est assise dans toute l'épaisseur du mur. — Il ne faudrait pas 5 ÉDIT., T. II.

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le mode de réparations et reconstructions, elles doivent être faites ainsi qu'il suit :

Les gros murs et le toit sont à la charge de tous les propriétaires, chacun en proportion de la valeur de l'étage qui lui appartient; Le propriétaire de chaque étage fait le plancher sur lequel il marche ;

Le propriétaire du premier étage fait l'escalier qui y conduit; le propriétaire du second étage fait, à partir du premier, l'escalier qui conduit chez lui, et ainsi de suite.

614. Le cas, prévu par notre article, d'une maison divisée par étages entre ses divers propriétaires sera probablement assez rare ; mais enfin, s'il se présentait, et que l'acte de partage n'eût pas prévu le mode de réparations et de reconstructions à faire, on appliquerait les règles posées ici. Les gros murs et le toit ne pouvant pas appartenir en particulier à tel ou tel des propriétaires, et restant la propriété commune et indivise de tous, seraient, comme choses mitoyennes, réparés ou rétablis aux frais communs de tous les intéressés. Il en serait de même, quoique l'article ne le dise pas, de toutes autres parties indispensables à l'existence du bâtiment entier, ou demeurées nécessairement communes à tous; par exemple, les voûtes de cave, une fosse d'aisances, des piliers qui soutiendraient la construction, comme on en voit souvent dans les maisons formées d'anciennes églises. Et, bien entendu, le propriétaire de l'un des étages, copropriétaire de l'objet mitoyen à réparer en commun, par exemple d'un gros mur, ne pourrait pas se libérer de l'obligation de contribuer, en disant qu'il renonce à la mitoyenneté de ce gros mur, puisqu'il continuerait d'en tirer les mêmes services qu'auparavant. Il ne pourrait se libérer qu'en renonçant à l'étage entier qui lui appartient.

Quant aux autres réparations, chacun des propriétaires les fait en entier pour ce qui le concerne; ainsi le propriétaire de chaque étage répare et reconstruit l'escalier et les petits murs de cet étage; en un mot, tout ce qui fait partie de cet étage, moins les gros murs. Cette règle, à la vérité, en ce qui touche l'escalier, blesse profondément les règles et de l'équité et de la logique; car le propriétaire du second se sert de l'escalier du premier tout autant que le propriétaire de ce premier étage. Mais statuit lex.

665. Lorsqu'on reconstruit un mur mitoyen ou une maison, les servitudes actives et passives se continuent à l'égard du nouveau mur ou de la nouvelle maison, sans toutefois qu'elles puissent être aggravées, et pourvu que la reconstruction se fasse avant que la prescription soit acquise.

615. Cette règle, indiquée ici à l'occasion de reconstructions de murs ou parties de maisons mitoyens, n'est qu'une application toute simple

porte une construction de ce propriétaire; car il serait dérisoire à lui de dire qu'il abandonne son droit sur le mur quand il veut continuer de s'en servir il faudrait, dans ce cas, qu'il abandonnât aussi le bâtiment ou qu'il le jetât bas; 2o quand c'est par le fait de ce copropriétaire que la réparation ou le rétablissement du mur ont été nécessités; car ce n'est plus à titre de propriétaire du mur, mais comme personnellement obligé, qu'il est tenu dans ce cas; et quand même il se dépouillerait de cette qualité de propriétaire du mur, son obligation, ayant une autre source, n'en continuerait pas moins.

Si, après l'abandon que le copropriétaire aurait fait de son droit de mitoyenneté, le voisin laissait tomber le mur, qu'arriverait-il? Il est évident que ce propriétaire n'a fait l'abandon que dans la vue et sous la condition tacite de la réparation que le voisin devait faire ; car, si l'on avait dû laisser tomber le mur, il n'aurait pas eu besoin pour arriver là de faire cadeau de sa moitié, ou autre fraction, dans le terrain et les matériaux. Mais, puisque l'abandon n'a été fait que sous la condition du rétablissement et que cette condition ne s'est pas accomplie, l'abandon serait donc non avenu, et le copropriétaire pourrait reprendre

ses matériaux et son terrain.

657. -Tout copropriétaire peut faire bâtir contre un mur mitoyen, et y faire placer des poutres ou solives dans toute l'épaisseur du mur, à cinquante-quatre millimètres (deux pouces) près, sans préjudice du droit qu'a le voisin de faire réduire à l'ébauchoir (1) la poutre jusqu'à la moitié du mur, dans le cas où il voudrait luimême asseoir des poutres dans le même lieu, ou y adosser une cheminée.

658. -Tout copropriétaire peut faire exhausser le mur mitoyen; mais il doit payer seul la dépense de l'exhaussement, les réparations d'entretien au-dessus de la hauteur de la clôture commune, et en outre l'indemnité de la charge, en raison de l'exhaussement et suivant la valeur.

606. L'exhaussement du mur apportant au reste de ce mur une charge plus considérable et qui nécessitera des réparations plus dispendieuses, il est juste que le copropriétaire qui fait exhausser paye à l'autre une indemnité plus ou moins forte selon l'importance de l'exhaussement. Le Code ajoute : et suivant la valeur de cet exhaussement; ces mots ont été copiés dans l'art. 197 de la Coutume de Paris (Voy. Ferrières), qui fixait uniformément le montant de l'indemnité au sixième de la valeur de l'exhaussement. Aujourd'hui que l'indemnité n'est pas déterminée par la loi, il est clair qu'il suffisait bien d'avoir dit :

(1) L'ébauchoir est un instrument de charpentier avec lequel on diminue la longueur de la poutre sans déplacer cette poutre.

en raison de l'exhaussement, et que les mots qui suivent ne sont plus qu'une redondance parfaitement oiseuse.

Il va sans dire que l'exhaussement du mur appartiendra au propriétaire qui l'a fait faire; c'est pour cela que lui seul en supportera les réparations.

659. Si le mur mitoyen n'est pas en état de supporter l'exhaussement, celui qui veut l'exhausser doit le faire reconstruire en entier à ses frais, et l'excédant d'épaisseur doit se prendre de son

côté.

607. Il n'y aura pas toujours lieu, comme le dit l'article, à reconstruire le mur; il se pourra très-bien qu'il suffise de lui donner un surcroît d'épaisseur en le laissant subsister.

Au reste, soit qu'on prenne ce dernier moyen, soit qu'on reconstruise le mur, le nouveau mur ne sera mitoyen que pour l'épaisseur qu'il avait précédemment, et par conséquent le voisin ne pourrait pas y placer des poutres dans toute son épaisseur actuelle moins cinquantequatre millimètres; mais il pourrait le faire dans toute l'épaisseur antérieure, sans être tenu de réserver ces cinquante-quatre millimètres sur cette ancienne épaisseur. En effet, la seule raison pour laquelle l'art. 657 réserve ces cinquante-quatre millimètres du côté voisin, c'est uniquement que le parement du mur ne soit pas désagréé, et il est clair que cette raison n'existe plus ici. Que si, après que ce voisin aura fait placer ces poutres, l'autre en voulait mettre aussi sur le même point, c'est évidemment jusqu'au milieu de l'épaisseur mitoyenne, et non pas de l'épaisseur totale, que les premières devraient être réduites. Quant au point de savoir si une indemnité est due dans le cas de notre article comme dans le cas de l'article précédent, il est clair que sa décision dépendrait du point de savoir si le surcroît d'épaisseur est ou non suffisant pour empêcher des réparations plus dispendieuses qu'auparavant.

660.- Le voisin qui n'a pas contribué à l'exhaussement peut en acquérir la mitoyenneté en payant la moitié de la dépense qu'il a coûté, et la valeur de la moitié du sol fourni par l'excédant d'épaisseur, s'il y en a.

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608. Il est clair que si c'était peu de temps après les travaux faits que le voisin demandât la mitoyenneté et avant qu'il eût eu à faire les réparations plus dispendieuses en vue desquelles une indemnité lui a été payée, il devrait aussi et avant tout restituer cette indemnité.

C'est en se reportant à cette époque peu éloignée de la confection des travaux que notre article exige du voisin qui veut acquérir la mitoyenneté de l'exhaussement le payement de la moitié de la dépense. Car, si c'était fort longtemps après que le voisin voulût faire l'acquisition et à une époque où cet exhaussement, vu son état de vétusté, aurait

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