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75. Remarquons, cependant, que la société n'est tenue que des risques inséparables de la mission. On devra compte au sociétaire de toutes les choses dont la nécessité ordonnait le transport; mais la société ne se trouve pas tenue du superflu.

76. Ici Pothier soulève une question dont il importe de faire connaître la solution. Il suppose qu'un sociétaire voyage pour les affaires de la société. Ce dernier prend avec lui de l'argent bien au-delà de ce qu'il lui fallait. Des voleurs attaquent la voiture où il se trouve, lui prennent là moitié de l'argent qu'il portait; il veut exercer son recours contre la société, et récupérer sur elle les sommes qu'il a perdues. La société lui répond, en invoquant la règle ci-dessus posée:

dois vous indemniser de l'argent nécessaire pour votre voyage, qui était à mes risques et périls; mais je ne vous suis pas redevable du superflu, et les sommes prises sur vous s'imputeront sur la partie superflue. L'associé soutient au contraire que tout ce qu'il a perdu doit lui être restitué, puisque, sans la mission donnée par la société, il n'aurait jamais compromis son argent. Quid? Pothier (§ 130) pense qu'il n'existe pas de raison pour l'imputer plutôt sur une partie que sur l'autre l'imputation, selon lui, sé fera par proportion sur l'une et sur l'autre. Ainsi, l'associé n'avait besoin que de dix pistoles pour sonvoyage, il en portait trente avec lui, il en sauve six,

la

·société, qui n'était chargée que du risque du tiers des trente pistoles, ne doit profiter que du tiers de ce qui a échappé aux voleurs, et elle doit par conséquent indemniser de huit pistoles cet associé. (Pothier... textuellement.)

77. La société n'est tenue que des pertes inséparables de la gestion; quant aux pertes dont la gestion est une occasion accidentelle, elles ne sont pas à sa charge. Par exemple : Pierre a nommé un des sociétaires son légataire à titre universel: plus tard Pierre a un procès avec la so. ciété. Celle-ci charge le légataire du soin de suivre ce procès. Pierre irrité révoque son legs. L'associé n'a aucune indemnité à réclamer pour cette perte accidentelle.

78. Il en est encore ainsi, quand un associé néglige ses propres affaires pour celles de la société; car il a été payé de ses soins par les profits qu'il a partagés avec ses co-associés.

79.

Mais quant à toutes les pertes occasionées directement par la gestion, il a droit d'en demander compensation à la société.

Partage de la société.

80. Le partage est l'acte qui détermine le lot de chaque associé dans les bénéfices, ou bien la part qu'il doit supporter dans les pertes.

81. Lorsque l'acte de société ne détermine

point la part de chaque associé dans les bénéfices ou pertes, la part de chacun est en proportion de sa mise dans le fonds de la société..

A l'égard de celui qui n'a apporté que son industrie, sa part dans les bénéfices ou dans les pertes est réglée comme si sa mise eût été égale à celle de l'associé qui a le moins apporté (art. 1853).

.

82. Si les associés sont convenus de s'en rapporter à l'un d'eux ou à un tiers pour le réglement des parts, ce réglement ne peut être attaqué s'il n'est évidemment contraire à l'équité.

Nulle réclamation n'est admise à ce sujet, s'il s'est écoulé plus de trois mois depuis que la par tie qui se prétend lésée a eu connaissance du réglement, ou si ce réglement a reçu de sa part un commencement d'exécution (art. 1854).

M. Delvincourt demande, quand il y a eu des affaires faites en commun, si on doit présumer que l'intention des parties a été de s'en rapporter pour ce cas à des experts, ou si on doit déterminer les parts, comme si le contrat ne renfermait aucune stipulation à cet égard? M. Dalloz adopte avec raison le second avis comme plus conforme à l'équité, et par conséquent plus applicable à la société. (Répert. v° société, p. 92. )

Pour que le délai de révision du réglement coure, il faut qu'il ait été notifié à la partie qui se prétend lésée.

Le reglement sera redressé, quand il y aura lé sion prouvée. Cette correction du réglement dépend beaucoup des circonstances, et est abandonnée à la prudence des juges.

Formes du partage.

83. Les règles concernant le partage des suc cessions, la forme de ce partage, et les obligations qui en résultent entre les co-héritiers, s'appliquent aux partages entre associés (art. 1872).

84. Le créancier de la société, qui avait le droit d'intervenir à la liquidation et au partage, ne peut les critiquer dès qu'ils ont été consommés sans opposition de sa part. (Sirey, 7, 2, 719).

Enregistrement des sociétés.

85. L'enregistrement, d'après la définition. donnée par M. Rolland de Villargues dans son Traité du notariat, est la relation des actes et des mutations de propriété sur un registre public, moyennant un droit que l'on paie au fisc.

86. L'enregistrement est très-important pour les sociétés faites sous seing-privé: car, en vertu de l'article 1328 du Code civil, les actes sous seing-privé n'ont date contre les tiers que du jour où ils ont été enregistrés, sauf quelques exceptions consignées dans ce même article.

87. Pour l'acte de société passé devant notaire,

l'enregistrement présente encore son utilité, c'est

un surcroît de garantie.

Droits d'enregistrement.

88. Les droits d'enregistrement sont fixes ou proportionnels. ( L. 22, frim. an vII, art. 2).

89. Le droit fixe s'applique aux actes, soit civils, soit judiciaires, ou extrajudiciaires, qui ne contiennent ni obligation, ni libération, ni condamnation, collocation ou liquidation de sommes et valeurs, ni transmission de propriété, d'usufruit ou de jouissance de biens, meubles ou immeubles (ibid. art. 3).

90. Le droit proportionel s'applique aux obligations, libérations, condamnations, collocations ou liquidations de sommes et valeurs, et à toute transmission de propriété, d'usufruit ou de jouissance de biens meubles et immeubles, soit entre-vifs, soit par décès (Ib. art. 4).

91. Le droit proportionnel est de deux sortes,. droit proportionnel simple et droit de mutation.

92. Les actes qui, quoique opérant mutation, n'entraînent pourtant aucune transmission de propriété, sont soumis au droit proportionnel simple.

93. Il existe une grande différence entre le droit proportionnel simple et le droit de mutation. Quand il s'agit d'actes n'emportant pas trans

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