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» n'eût pas le droit de proroger, lorsque ce droit » est confié aux arbitres.

Sous un autre rapport on ne saurait le lui con» tester: l'article 54 pose le principe que, dans ce » que les parties peuvent faire relativement à la » fixation du délai, le tribunal les supplée toutes ⚫les fois qu'elles ne parviennent pas à l'accorder. » Or, puisqu'il est avoué que les parties ont le » droit de proroger le délai expiré, comment lors» qu'elles ne peuvent pas s'entendre sur ce point, le tribunal n'interviendrait-il pas pour les rè>> gler, pour proroger un délai qu'il n'a d'abord >> pu fixer qu'au hasard, et pour réparer une méprise en quelque sorte inévitable dans ce genre » de contestation?

» Cedernier système fut soutenu par MM. Toul•»lier, Dupin, Delvincourt, Carré, Fournel et » Berryer.

La cour de Bordeaux et la cour de cassation ne l'ont pas accueilli, malgré la puissance des argumens développés à l'appui et l'autorité des jurisconsultes qui y ont adhéré.

Pour moi, en dépit de l'opinion de la cour de Bordeaux, adoptée par la cour de cassation, je me range de l'avis de M. Locré.

Comme ce célèbre jurisconsulte, je ne vois pas pourquoi on refuse au tribunal le droit accordé à de simples arbitres. Il est constant que ceux-ci, ainsi que l'a démontré M. Locré, peuvent

toujours proroger le délai fixé par le compromis, par cela seul qu'ils ont le pouvoir de proroger le délai pour la production des pièces. Eh bien! pourquoi dénier au tribunal cette faculté? Lorsqu'il désigne le délai, qu'est-il? Rien autre chose que le représentant des parties qui n'ont pas été d'accord. Pourquoi, au défaut de conciliation entre les parties, charger le tribunal de fixer le délát? Parce qu'on le le suppose plus instruit, par suite plus à même de juger quel est le temps nécessaire pour mener à fin une affaire; parce qu'on le sait dégagé de toute l'irritabilité de l'intérêt particulier. On lui refuserait le droit de proroger le délai! Si les parties peuvent le renouveler lorsqu'elles l'ont elles-mêmes fixé pour une première fois, le tribunal doit jouir de la même prérogative lorsqu'il a fixé le délai à leur lieu et place en cas de désaccord entre elles.

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Ces motifs, joints à ceux émis par M. Lodré, me font embrasser avec conviction, l'opinion que ce jurisconsulte a soutenue avec une logique remarquable.

ART. 55. En cas de refus de l'un ou de plusieurs des associés de nommer des arbitres, les arbitres sont nommés d'office par le tribunal de commerce.

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1. Il ne fallait pas qu'une partie pût, à sa guíse, traîner en longueur des affaires dont la solution

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an matière de commerce, plus qu'en toute autre matière, est de la plus haute importance. Le législateur a bien senti que les affaires éprouveraient de la difficulté dans leur marche, s'il ne donnait pas aux parties un moyen sûr pour dé- jouer la mauvaise foi des individus, qui reculesraient à dessein le terme des contestations. Il a © donné au tribunal le droit de nommer les arbithes pour ceux qui refuseraient de faire un choix.

2. Comme il arrive souvent que plusieurs des parties ont le même intérêt, il serait alors dangereux de leur permettre de nommer autant d'arbitres qu'il y a d'individus ayant le même intévet. Tous ceux donc qui agissent de concert par ́ée que leurs intérêts sont les mêmes, doivent s'enItendre sur la nomination d'un seul arbitre. Y a-t-il contestation entre les parties pour désigner celles qui feront une nomination commune; c'est au tribunal de commerce qu'il appartient de les départager, de déterminer celles dont les inté-rêts sont communs, et de règler de nombre des arbitres. Mais si chacune des parties a fait son choix sans contestation aucune, tous les arbitres nommés par les associés jugent à la majorité, sans que jamais, par la suite, ils puissent prétendre, sous prétexte de l'identité d'intérêt entre plu sieurs sociétaires, que leurs arbitres ne pou vaient compter que pour une voix.

3. Tout associé qui met de la lenteur dans la

nomination de son arbitre, et laisse prononcer contre lui un jugement par défaut portant nomination d'office d'un arbitre, peut y former oppo sition. Car la loi permet l'opposition à tout juge ment par défaut, sans aucune distinction, etil n'y a nulle raison de l'interdire contre celui qui porte nomination d'arbitre.

4. Quand bien même ce jugement serait contradictoire, le tribunal arbitral n'a pas le pouvoir de se constituer, si l'associé, pour lequel un arbitre est nommé, a interjeté appel du jugement, nonobstant la règle posée par l'article 439 du Code de procédure civile, que les tribunaux de commerce peuvent ordonner l'exécution de leurs jugemens par provision. On conçoit sans peine le motif de cette dérogation. En effet l'article 439, comme tous ceux qui prononcent l'exécution d'un jugement par provision, ne l'ordonne raisonnablement que pour les cas où le jugement sera exécuté sans préjudice des droits de l'appelant. Autrement l'appel serait inutile, puisque l'appelant qui ferait infirmer la sentence qui le condamme, ne pour rait pas empêcher qu'un acte préjudiciable pour ses intérêts n'eût été consommé. En un mot, l'exécution provisoire ne doit jamais avoir lieu que lorsque le dommage causé est appréciable à prix d'argent et que l'appelant qui a gain de cause peut demander des dommages-intérêts qui l'indemnisent de tout ce qu'il a perdu par suite de

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l'exxécution provisoire. Pour le jugement, portant nomination d'un arbitre, il n'est pas possible qu'il en soit ainsi, puisque le dommage causé consisterait dans la perte de temps, perte qui d'ailleurs seraient partagée par toutes les parties et que l'appelant ne trouverait personne à qui il pût réclamer des dommages-intérêts.

Enfin, ne serait-il pas ridicule que les arbitres se constituassent, se missent à même de juger l'affaire, prononçassent même leur sentence, pour plus tard entendre déclarer leur travail inutile, parce qu'un d'entre eux, par suite de l'arrêt infirmatif du jugement portant nomination, était incapable de connaître des contestations? Il faut donc dire, avec la Cour royale de Paris, qu'il n'appartient pas aux arbitres de statuer jusqu'à ce que l'appel ait été vidé.

Instruction devant les arbitres.

ART. 56. Les parties remettent leurs pièces et mémoires aux arbitres, sans aucune formalité de justice.

Le législateur a voulu que tous ces débats entre associés fussent regardés comme de véritables comptes de famille, et qu'ils se terminassent avec le moins de frais possible. S'il avait exigé toutes les formalités de justice, onéreuses tant par les frais qu'elles entraînent que par le

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