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tion au porteur exclut l'idée d'un engagement vis-à-vis des gérans; la souscription et l'adhésion ne sont rien puisqu'elles sont échangées contre une promesse d'action qui est au porteur; il s'opère une novation qui détruit le contrat.

Le contrat est nul pour défaut de lien de capitaux; car il dépend des actionnaires de ne pas verser les trois quarts de leur mise sociale. Dire que le versement des trois derniers quarts est facultatif, c'est oublier l'article des statuts qui promet aux tiers un capital de dix millions, et qui fixe l'action à mille francs.

Jugement du tribunal de commerce.

<< Attendu qu'en thèse générale, la société en >> commandite doit être considérée comme un >> contrat mixte, qui participe tout à la fois de la » société en nom collectif et de la société ano» nyme;

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Qu'il emprunte à la première ses gérans, à la >> seconde ses capitaux civils;

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Que la seule différence qui existe entre le >> contrat et la société anonyme réside dans l'au» torisation du gouvernement et la responsabilité » des gérans ;

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Que, s'il est vrai de dire qu'il y ait un lien » de droit indéfini pour les gérans, qui sont asso

>> ciés en nom collectif, il faut reconnaître qu'il

» n'y a qu'une association de capitaux pour les >> commanditaires:

Qu'en effet, aux termes de l'article 23 du >>> Code de commerce, ils ne sont que simples bailleurs de fonds;

Que, suivant les dispositions des articles 25 » et 43, leurs noms ne peuvent faire partie de » la raison sociale, ni même être révélés dans les » extraits des actes dont la publication est pres» crite;

» Qu'enfin, après avoir posé dans les articles 34 et 35, que les sociétés anonymes peuvent » être divisées en actions au porteur, le législa» teur, dans l'article 38, ajoute que le capital des >> sociétés en commandite peut être aussi divisé >> en actions;

> Attendu qu'en posant ce principe, la loi n'éta>>blit aucune distinction;

Attendu qu'il faut en conclure qu'elle a per» mis ce qu'elle n'a point défendu;

Que les nullités sont de droit étroit, qu'elles >> ne peuvent être suppléées lorsqu'elles ne sont >> pas écrites;

Attendu, au surplus, que, si, par l'effet du >> contrat de société, passé entre les sieurs Armand, Le Comte et comp, il peut arriver qu'une grande portion de la commandite ne soit pas » fournie, quelque grave, quelque dangereuse » que soit cette éventualité pour le public, les

>>

» tiers ni les associés n'en peuvent prétendre cause d'ignorance, puisqu'il leur a été loisible de con>> naître les stipulations sociales avant de contrac>> ter;

» Attendu enfin qu'on ne saurait trop favori » ser l'esprit d'association en France, puisqu'il est une des causes de prospérité du commerce; » Par ces motifs, etc.» (15 août 1830, Gazette des tribunaux.)

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Un avocat distingué du barreau de Paris s'est encore constitué le défenseur de l'opinion admise par le tribunal de commerce. M. Mollot, dans son ouvrage sur les bourses de commerce, ajoute cette note: << On a mis en doute, dans une affaire » récente, que les sociétés en commandite pussent » émettre des actions au porteur. Pour moi, je » n'avais pas conçu jusque là l'idée de cette con» troverse. La loi, en permettant de constituer › en actions le capital de la commandite, ne dit >> point qu'elles seront nominatives (art. 38 du » C. de comm.), et d'un autre côté, je ne vois » pas que les actions au porteur répugnent aux règles de cette société. » (Mollot, Bourses de commerce, p. 200.)

>>

Toutes ces autorités, quelque imposantes qu'elles puissent être, ne changent pas ma conviction. Selon moi les argumens, que présente la consultation de Me Persil, n'ont n'ont pas été détruits;

ils restent dans toute leur force. Il demeure cons

tant pour moi qu'en permettant les actions au porteur dans la commandite, on laisse aux commanditaires, contrairement au vou du législateur, la possibilité de s'immiscer dans les opérations sociales. On dit que, comme dans les cas ordinaires, ce sera une preuve à faire. Je réponds qu'il sera presque impossible de la faire, puisque bien souvent on ignorera le nom du commanditaire qui, de concert avec les co-associés, pourra toujours par des subterfuges criminels, bien difficiles à déjouer, échapper aux poursuites des tiers. Je crois pouvoir persister dans mon opinion, malgré le jugement du tribunal de commerce confirmé purement et simplement par la Cour royale de Paris, jusqu'à ce qu'on m'apporte des raisons plus convaincantes, ou jusqu'au moment où je serai forcé de courber la tête devant la décision unanime des Cours royales et devant l'arrêt souverain de la Cour de Cassation.

TITRE DEUXIÈME.

FORMALITÉS DES CONTRATS DE SOCIÉTÉS

COMMERCIALES.

ART. 39. Les sociétés en nom collectif ou en commandite doivent être constatées par des actes publics ou sous signature privée, en se conformant, dans ce dernier cas, l'article 1325 du Code civil.

à

1. Il faut remarquer que pour les sociétés en général l'écriture soit authentique, soit privée, n'est pas de l'essence du contrat, mais qu'elle est requise seulement pour la preuve.

Sous l'empire de l'ordonnance de 1673, le même principe s'appliquait aux sociétés commer⚫ciales; on pouvait pour celles-ci, comme on le peut aujourd'hui pour les sociétés civiles, suppléer à l'acte social, soit par la preuve testimoniale aidée d'un commencement de preuve par écrit, soit par les reconnaissances des parties, soit par toute autre espèce de preuve non prohibée. (Voir à ce sujet un réquisitoire remarquable de M. Merlin, t. 12. Répert. verb. Société.)

Aujourd'hui le Code de commerce commande des formalités plus rigoureuses pour la preuve des sociétés. Pour les associés entre eux, rien ne peut tenir lieu de l'acte social; les tiers seuls sont

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