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valeur dépasse 150 fr., lorsque les sociétaires n'appuient pas leurs prétentions sur un acte dû ment en forme, on ne donne aucune autorité à leurs dires, qui ne sont estimés qu'au taux de pures allégations, n'ayant aucune force en justice.

Cependant il est de jurisprudence maintenant qu'un acte n'est pas une formalité substantielle pour le contrat de société. Le législateur, par l'article 1834, a eu seulement en vue de repousser la preuve testimoniale lorsque la valeur de la société dépassait 150 fr. Pour former le contrat de société, le consentement suffit; peu importe que ce consentement soit prouvé par des faits ou des paroles. Toute preuve doit être admise, hors la preuve testimoniale, parce qu'avec l'admission de la preuve testimoniale, on rendrait la fraude possible. Societatem coire et re et verbis posse nos dubium non est. (L. 4 ff. pro socio).

Le Code ne déroge point à la loi romaine. S'il exige un acte de société, ce n'est pas comme formalité substantielle, mais comme le moyen le plus facile de prouver l'existence de la société. Son seul but est de rejeter la preuve testimoniale. Plusieurs arrêts furent rendus en ce sens. «Attendu, dit la cour de Bruxelles, que l'article 1834 a seulement pour but d'exclure la preuve testimoniale, mais non celle qui résulterait d'actes ou d'écrits émanés d'associés, autres que le contrat d'association, etc.» (Sirey. 14, 2, 93.)

admisé contre

La preuve testimoniale n'est pas et outre le contenu en l'acte de société, ni sur ce qui serait allégué avoir été dit avant, lors et depuis cet acte, encore qu'il s'agisse d'une somme ou valeur moindre de 150 fr. (art. 1834).

Cet article 1834 ne concerne point les sociétés de commerce. La jurisprudence est fixée sur ce point. (Arrêt du 22 messidor an ix. Arrêt du 23 novembre 1812. Cassation, journal du Palais, année 1813, t. 2, p. 15.)

DIVERSES ESPÈCES DE SOCIÉTÉS.

7. Les sociétés sont universelles ou particulières. (Art. 1835.)

Sociétés universelles.

On distingue deux sortes de sociétés universelles, la société de tous biens présens, et la société universelle de gains (art. 1836).

8. La société de tous biens présens est celle par laquelle les parties mettent en commun tous les biens, meubles et immeubles, qu'elles possèdent actuellement, et les profits qu'elles pourront en tirer (art. 1837).

9. Pour que cette société soit contractée, il faut que les associés s'expriment d'une manière claire, précise, de sorte qu'il n'existe aucun doute sur leurs intentions. Car, on le voit, il y a de la part

de l'individu qui entre dans cette association, une aliénation de tous ses biens présens, et des avantages qu'il pourrait en tirer au profit d'un être moral, appelé société. Si l'explication formelle n'a pas été donnée par les parties, la simple convention de société universelle, faite sans autre explication, n'emporte que la société universelle de gains (art. 1839).

10. Lorsqu'il y a manifestation complète de la volonté des parties, il s'établit aussitôt entre les nouveaux sociétaires une communauté de tous les biens qu'ils possèdent. In societate omnium bonorum omnes res quæ coëuntium sunt, continuo communicantur. (L. 1, § 1, ff. pro socio.) Cette communauté existe pour tous les biens. Ainsi les dettes actives de l'associé, au moment où l'association est contractée, sont comptées comme. biens présens et entrent dans la masse de la société.

11. Si la société profite des avantages particuliers à chacun de ses membres, elle supporte aussi les charges qui pèsent sur les biens composant la mise sociale de chaque sociétaire. Toutes les dettes sont une charge présente des biens présens puis on ne peut légalement appeler sa propriété que ce qui reste, déduction faite des dettės: cum bona non intelligantur, nisi deducto ære alieno. On peut enfin regarder la société comme un successeur à titre universel, qui doit

en conséquence être chargé des dettes. (Delvincourt, p. 196, § 3, t. 2.)

12. Dans une société universelle de tous biens, de tous profits, chaque associé peut prendre sur le fonds commun pour l'entretien de sa famille. Ea quoque, quæ in honorem alterius liberorum erogata sunt, utrinquè imputanda. (L. 73, § 1. ff, pro socio.)

13. Tous les gains illicites, faits par un associé, n'augmentent pas le fond commun de la société. Ils ne profitent pas à la communauté, parce que la société doit avoir un objet licite. Mais si la richesse sociale ne s'accroît pas des profits déshonnêtes, elle n'est pas non plus grevée des dettes honteuses. Ainsi les associés n'ont pas de recours contre la société pour lui imposer les pertes faites au jeu. La société ne sera pas tenue des réparations civiles qui pourront être imposées à un sociétaire pour quelque délit par lui commis. Domat et Pothier prétendent, au sujet de ces réparations qu'ils déclarent personnelles, que, si la condamnation était injuste, elle devrait retomber sur toute la société. La raison est, ajoute Pothier, que ce qu'il lui en a coûté (à l'associé), en ce cas, est une dépense qui ne procède pas de sa faute, et qu'il n'a pu éviter. Elle est une charge de ses biens, dont la société est chargée.

L'associé ne doit pas être reçu à alléguer l'injustice de la condamnation, tant que la condam

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nation subsiste. Il faut qu'il ait fait infirmer la sentence par un juge supérieur. Mais si, après avoir fait infirmer, il ne peut, par suite de l'insolvabilité de la partie et de la caution, répétér ce qu'il aura été obligé de payer, alors la perte retombera sur toute la société.

34. Nous avons vu que les sociétés de biens présens comprennent tous les meubles et immeubles que les parties possèdent actuellement, et les profits qu'elles pourront en tirer.

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Elles peuvent aussi comprendre, ajouteronsyous, toute autre espèce de gains. Mais la loi exclut formellement de cette société tous les biens qui pourraient avenir aux associés par succession, donation ou legs. Elle ne permet l'entrée de ces biens dans la société que pour la jouissance: toute stipulation tendant à y faire entrer la propriété de ces biens est prohibée, sauf entre époux, et conformément à ce qui est réglé à leur égard (art. 1837). 11. I

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15. Sous la loi romaine, sous l'ancien droit écrit, calqué sur le droit romain, les biens provenant des legs, des donations, des successions, pouvaient être compris dans la société universelle de tous les biens. Aujourd'hui, le Code civil les rejette de cette communauté, sans établir même de distinction entre les meubles et les immeubles. Cette exclusion est fondée sur ce qu'une société universelle est regardée comme partici

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