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J'ai l'honneur d'être, avec la considération la plus distinguée,

Signé CH. ARBUTHNOT.

La lecture des pièces étant terminée le Sénat a délibéré :

1° Que les pièces dont il a été donné lecture au Sénat seront déposées dans ses archives;

2o Qu'il sera fait une adresse à S. M. L'EMPEREUR ET ROI, en réponse au message de Sa Majesté transmis aujourd'hui au Sénat.

Le Sénat a de suite nommé, pour la rédaction de cette adresse, une commission de cinq membres, composée des sénateurs Lacépède, Démeunier, Chaptal, Senonville et Jaucourt.

La séance a été prorogée à vendredi prochain, pour entendre le rapport de cette commission.

SÉNAT CONSERVATEUR.

PRÉSIDENCE DE M. MONGE.

Séance du 18 février 1807.

Le Sénat conservateur, réuni au nombre de membres prescrit par l'article 90 de l'acte des constitutions du 22 frimaire an VIII;

Vu les listes de candidats au Corps législatif formées sur les procès-verbaux des colléges électoraux de département et d'arrondissement, des départements de l'Aisne, de l'Allier, des Alpes (Hautes), des Ardennes, de l'Aude, de l'Aveyron, du Cantal, du Cher, de la Corrèze, de la Creuze, de l'Eure, d'Indre-et-Loire, de Loir-et-Cher, de la Lozère, de la Lys, de la Marne (Haute), des Pyrénées-Orientales, de la Saône (Haute) et des DeuxSèvres (1re série), lesdites listes adressées au Sénat par message de S. M. l'Empereur et Roi, du 30 décembre 1806;

Après avoir entendu, sur ces listes, le rapport de sa commission spéciale, nommée dans la séance du 28 janvier dernier,

Procède, en exécution de l'article 20 de l'acte des constitutions du 22 frimaire an VIII, et conformément à l'article 73 de celui du 16 thermidor an X, à la nomination des membres du Corps législatif à élire parmi les candidats présentés en l'an 1806, pour chacun desdits départements, d'après les proportions déterminées par l'arrêté du Sénat du 14 fructidor an X.

Le résultat successif des scrutins donne la majorité absolue des suffrages, dans l'ordre des élections, conforme à celui du tableau de la première série, aux candidats ci-après désignés :

Département de l'Aisne.

Lobjois (François), membre sortant du Corps législatif. Delorme (Albin-Barthélemi-Fleuri), négociant, maire de Saint-Quentin.

Collard (Jacques), propriétaire-cultivateur à Villersle-Hellon.

Leleu (André-Simon), procureur général impérial près la cour de justice criminelle de Laon.

Département de l'Allier.

Hennequin (Joseph), ex-député du Corps législatif, sous-préfet à Gannat.

Giraudet père (Pierre), président du tribunal de première instance, à Moulins.

Département des Hautes-Alpes.

Bonnot (Jean-François), membre sortant du Corps législatif.

Département des Ardennes.

Lefebvre-Gineau (Louis), inspecteur général des études, membre de l'Institut.

Golzart (Nicolas-Constant), membre sortant du Corps législatif.

Département de l'Aude.

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Dupré fils aîné (Jean-Pierre-Emile), secrétaire des commandements de S. A. S. madame la princesse Borghese.

Martin-Saint-Jean (Hugues-Hélène-Joseph), maire de Castelnaudary

Département de l'Aveyron.

Monseignat (Hippolyte), membre sortant du Corps législatif.

Clausel (Jean-Claude), propriétaire à Coussergues. Grandsaigne (Gilles-Louis-Antoine), contrôleur des contributions directes à Milhau.

Département du Cantal.

Coffinhal (Jean-Baptiste), procureur-impérial près le tribunal civil d'Aurillac.

Salvage (Jean-Félix-Augustin), domicilié à SaintMartin-Valmeroux, ex-député au Corps législatif.

Département du Cher.

Petit (Pierre-François), sous-préfet à Sancerre. Beguin fils (Pierre-Gabriel), président du tribunal de première instance à Saint Amand.

Département de la Corrèze.

Penières-Delzors (Jean-Augustin), propriétaire à Valette, ex-député au Corps législatif.

Combret-Marsillac (Armand), capitaine commandant de la gendarmerie du département.

Département de la Creuse.

Colaud la Salcette (Joseph-Louis-Claude), préfet du département.

Grellet (Jean-Baptiste), inspecteur des contributions à
Guéret.
Département de l'Eure.

Ledanois (André-Basile), membre sortant du Corps législatif.

Bouquelon (Noël), juge au tribunal de première instance à Evreux.

Bourlier (Jean-Baptiste), évêque d'Evreux.
Frontin (Pierre-Mathieu), sous-préfet à Louviers.
Département d'Indre-et-Loire.

Aubert du Petit-Thouars (Abel-Ferdinand), sous-préfet à Chinon.

De la Mardelle fils (Pierre-Suzanne-Marie), juge au tribunal civil de Paris.

Département de Loir-et-Cher. Marescot-Perignat (Bernard-François), lieutenant colonel dans l'arme du génie.

Pardessus (Jean-Marie), maire de Blois.

Département de la Lozère.

Barrot (Jean-André), membre sortant du Corps législatif.

Département de la Lys.

Goubau (Eugène-Joseph-Marie-Ghislain), conseiller de préfecture à Bruges.

Herwyn (Philippe-Jacques), sous-préfet

Furnes.

Dekersinaker (Joseph-Jean), président de la Cour de justice criminelle à Bruges.

Vandermeersch (François), président du tribunal de
première instance à Ypres.

Département de la Haute-Marne.
Marquette de Fleury (Marie-Nicolas-Louis), membre
sortant du Corps législatif.
Roger (François), membre du conseil général du dé-
partement.

Département des Pyrénées-Orientales.
Lamer (Charles), domicilié à Arles, général inspecteur

aux revues.

Département de la Haute-Saône.

Vigneron (Claude-Bonaventure), membre sortant du
Corps législatif.

Martin fils (Alexandre-François-Joseph), maire de la
ville de Gray:

Département des Deux-Sèvres.
Fontanes, président et membre sortant du Corps lé-
gislatif.

Auguis (Jean-Baptiste), membre sortant du Corps législatif.

Les candidats élus sont, à mesure des élections, proclamés par M. le président, membres du Corps législatif, pour les département de la première série auxquels ils appartiennent.

Le Sénat arrête qu'il sera fait un message à S. M. l'Empereur et Roi, pour lui donner connaissance de ces nominations, lesquelles seront pareillement notifiées au Corps législatif lors de sa rentrée, et au Tribunat.

Les président et secrétaires.

Signé MONGE, FERINO et G. GARNIER.

SÉNAT CONSERVATEUR.

PRÉSIDENCE DE S. A. S. MONSEIGNEUR LE PRINCE ARCHICHANCELIER DE L'EMPIRE.

Séance du 20 février 1807.

Le Sénat conservateur, réuni au nombre de membres prescrit par l'article 90 de l'acte des constitutions du 22 frimaire an VIII;

Délibérant sur les communications qui lui ont été faites au nom de S. M. L'EMPEREUR ET Roi, par S. A. S. le prince archichan celier de l'empire, dans la séance du 17 de ce mois;

Après avoir entendu le rapport de sa commission spéciale, nommée dans la même séance,

Arrête qu'il sera fait à S. M. Impériale et Royale, en réponse au message de Sa Majesté du 29 janvier dernier, l'adresse dont la teneur suit:

Sire, le message que Votre Majesté Impériale et Royale vient d'adresser au Sénat, de son camp impérial de Varsovie, et les actes importants qu'elle a bien voulu lui faire connaître, seront un nouveau monument de votre sollicitude paternelle pour le bonheur du peuple français.

La date des traités de Posen, que Votre Majesté Impériale et Royale a fait communiquer au Sénat montrerait seule qu'après les victoires les plus éclatantes Votre Majesté n'a pour but que la paix la plus honorable pour les peuples, et par conséquent celle dont on peut espérer la plus longue durée.

Ces traités, en assurant l'indépendance d'une nation généreuse et brave, que ses lumières, son industrie, ses habitudes et son intérêt devaient rapprocher de la France, accroissent et consolident cette grande confédération du Rhin que réclamait l'état actuel de l'Europe, et que les vastes conceptions de Votre Majesté pouvaient seules lui donner comme la meilleure garantie de sa tranquillité future.

La haute sagesse de Votre Majesté Impériale et Royale a vu aisément, dans les dangers de l'empire Ottoman, ceux qui menacent l'Europe entière.

Si la Porte pouvait succomber sous les efforts des Russes, quelles barrières arrêteraient les torrents dévastateurs de barbares dont le Nord et l'Orient inonderaient l'Occident et le Midi?

La violence, le meurtre, l'incendie et la destruction marqueraient les routes funestes que suivraient ces Scythes sauvages. Ne voit-on pas encore de tristes ruines attester leur terrible passage en Italie, en Suisse, en Hollande, auprès des champs à jamais fameux d'Austerlitz, et dans cette Pologne dont tant de rivages vont être illutrés à jamais par les hauts faits des armées conduites par Votre Majesté? Les arts, les sciences la civilisation périraient; ou si la force des institutions européennes résistaient à ces invasions perpétuellement renouvelées de ces hordes fatiguées de leurs climats glacés, et qui se précipiteraient sans cesse vers les belles contrées de l'Europe, quel serait le sort de l'industrie de la

France, et surtout de celle de la France méridionale?

L'existence de cette industrie, si nécessaire à la prospérité de tant de millions de Français, est liée avec l'indépendance du trône de Constantinople. Les provinces et les mers qui avoisinent le Bosphore, sont le centre vers lequel la nature a voulu diriger les routes du commerce du monde. Que les Russes s'en emparent, et le commerce du monde leur sera bientôt asservi.

Heureusement, Sire, l'ascendant irrésistible de Votre Majesté a rassuré l'Europe.

La conquête rapide et imprévue de la Prusse, et l'apparition des aigles françaises au delà des bords de la Vistule, ont déconcerté les projets ambitieux et perfides de la cour de Pétersbourg. Les Russes ont trouvé à Pultusk et à Golymin les vainqueurs d'Austerlitz. Une combinaison extraordinaire dans le cours des saisons, et de vastes plages de sables mouvants et de terres noyées, ont pu scules dérober leurs phalanges à une entière destruction. Et dans le moment où nous adressons à Votre Majesté Impériale et Royale nos vœux et nos hommages, de nouveaux chants de victoire retentissent des rives de la Prégel jusqu'à la grande capitale de l'empire français.

Et cependant, Sire, que demande Votre Majesté pour déposer ses armes redoutables? La liberté du commerce et l'indépendance de ses alliés.

La paix, Sire, est l'unique objet de vos désirs, de vos projets, de vos nobles entreprises. Mais, comme le peuple français, vous la voulez réelle et durable.

Placé au plus haut degré de puissance que la victoire ait pu donner, vous n'abandonnerez pas aux hasards d'un demi-siècle de nouveaux combats les destinées de la France et celles de l'Europe, que la suite de vos triomphes peut bientôt fixer à jamais.

Vous ne pouvez plus, Sire, combattre pour la renommée. Vous avez plus de gloire qu'aucun héros n'en a jamais obtenu. Mais vous combattez pour une paix qui assure le bonheur du grand peuple, de celui qui, par son courage, par ses travaux, par son industrie, par son amour pour vous, mérite si bien la félicité pour laquelle vous bravez, chaque jour, tant d'obstacles et de dangers.

Bientôt, Sire, il vous reverra environné d'innombrables trophées. Il reverra autour de votre char triomphal vos invincibles légions faisant briller aux yeux de la France et de l'Europe reconnaissantes l'olivier de la paix que vous aurez conquis.

Par quels transports il saluera votre auguste présence, et par combien de dévouement, de fidélité et d'affection il payera tout ce que le plus grand des monarques aura fait pour sa gloire et sa prospérité !

Déjà, Sire, nous nous plaisons à considérer l'arrivée de votre auguste épouse dans cette grande cité comme l'annonce de ce jours si heureux pour tous les Français, et où il sera permis au Sénat d'offrir à Votre Majesté Impériale et Royale le tribut de sa gratitude, de son admiration et de son respect. Les président et secrétaires,

Signé CAMBACÉRÈS, archichancelier
de l'empire, président.
G. GARNIER. FERINO, secrétaires.

SÉNAT CONSERVATEUR.

PRESIDENCE DE S. A. S. MONSEIGNEUR LE PRINCE ARCHICHANCELIER DE L'EMPIRE.

Séance du 4 avril 1807.

Aujourd'hui, à deux heures après midi, en exé

cution des ordres de S. M. l'Empereur et Roi, S. A. S. Monseigneur le prince archichancelier de l'empire s'est rendu au Sénat.

MM. Regnauld (de Saint-Jean d'Angély) et Lacuée, orateurs du Conseil d'Etat, ont été introduits. Son Altesse Sérénissime (Cambacérès) a étéreçue avec le cérémonial d'usage, et ayant pris séance a dit:

Messieurs, la haine toujours persévérante des ennemis de la France a rendu jusqu'à présent inutiles les efforts multipliés de S. M. L'EMPEREUR ET ROI pour le rétablissement de la paix.

Sa Majesté se voit donc contrainte de poursuivre le cours de ses opérations militaires, qui, grâce à son génie, secondé par la valeur de ses troupes, ont été couronnées par tant de succès.

Cependant, de toutes parts, les puissances belligérantes rassemblent leurs extrêmes ressources.

Des recrutements extraordinaires, d'immenses levées tendent à repeupler ces armées, détruites ou dispersées devant les aigles impériales.

Dans ces circonstances, Messieurs, l'Empereur a reconnu qu'il était de sa prudence de préparer de bonne heure de nouveaux moyens coutre ces nouvelles tentatives.

Il a pensé qu'un grand développement de forces pouvait seul amener les ennemis au sentiment de leurs véritables intérêts.

Pour parvenir à ce but, Sa Majesté juge nécessaire d'appeler dès ce momeut une partie de la conscription de l'année 1808.

Tel est, Messieurs, l'objet d'un projet de sénatusconsulte qui vous sera présenté dans cette séance, après que vous aurez entendu la lecture du message adressé au Sénat par S. M. L'EMPEREUR ET ROI, et celle d'un rapport du ministre de la guerre, dont Sa Majesté a voulu qu'il vous fût donné communication.

Une disposition particulière de ce projet n'échappera point à votre attention, et sera pour vous une nouvelle occasion de reconnaître les bontés paternelles de Sa Majesté. Elle n'a point voulu que les nouveaux conscrits affrontassent les grands travaux de la guerre avant de s'être, par degrés, familiarisés avec eux; et jusqu'à l'époque déterminée pour offrir à leur courage l'occasion de se signaler dans les champs de la victoire, ils resteront dans l'intérieur, afin d'y apprendre les manœuvres et la discipline, sous des chefs dont les exemples seront pour eux des leçons vivantes de courage et de dévouement pour leur souverain, ainsi que pour la gloire de la patrie. Ces chefs, Messieurs, seront choisis parmi vous; et dans cette intention de Sa Majesté il est facile de reconnaître tout à la fois, une preuve de sa tendre sollicitude pour les conscrits, et un témoignage des sentiments d'estime et de confiance dont il est animé pour Sénat.

L'empressement, Messieurs, avec lequel vous avez toujours secondé les grandes vues de Sa Majesté, notamment par vos décrets des 24 septemnbre 1805 et 4 décembre 1806, est un garant assuré du zèle que vous développerez dans la conjoncture présente.

L'ardeur des jeunes Français, pour se ranger sous les étendards de leur EMPEREUR, prouvera qu'ils sont dignes de marcher sur les traces de leurs ainés, et qu'ils se sentent, comme eux, appelés à devenir l'ornement et le rempart de leur pays. Ainsi, les ennemis de la France, qui bercent depuis si longtemps leurs espérances chimériques d'obstacles qui n'ont point existé, de germes de discorde perdus dans un sentiment universel d'amour et d'admiration pour le héros qui nous

gouverne, verront tous les âges, tous les rangs, toutes les opinions se réunir pour la défense commune; ils verront autour des mèmes drapeaux, et ceux dont un nouvel ordre de choses a signalé les talents, et ceux que de pénibles souvenirs auraient pu y rendre étrangers.

Alors, peut-être, leurs yeux s'ouvriront; alors, ils pourront connaître toute la vanité de leurs entreprises; ils apprendront du moins qu'on n'abaisse point facilement un empire fondé par le génie, soutenu par le courage, raffermi de jour en jour par l'amour et par la fidélité.

Il a été ensuite fait lecture des pièces suivantes :
Extrait des minutes de la secrétairerie d'Etat.
De notre camp impérial d'Osterode,
le 20 mars 1807.

NAPOLÉON, EMPEREUR DES FRANÇAIS, ROI D'ITALIE. Nous avons décrété et décrétons ce qui suit : Le Sénat se réunira le samedi 4 avril, dans le lieu ordinaire de ses séances, sous la présidence de notre cousin l'archichancelier de l'empire.

Signe NAPOLEON.

Par l'Empereur,

Le ministre secrétaire d'Etat,
Signe H.-B. MARET.

Au camp impérial d'Osterode, le 19 mars 1807. Rapport du ministre de la guerre à S. M. L'EMPEREUR ET ROI.

SIRE, jamais les armées de Votre Majesté ne furent aussi nombreuses, aussi bien exercées et mieux organisées.

Le sénatus-consulte du 24 septembre 1805 a mis à la disposition du Gouvernement quatre-vingt mille hommes de la conscription de 1806. Celui du 4 décembre dernier a ordonné la levée d'un pareil nombre d'hommes de la conscription de 1807.

Les cent soixante mille hommes sont arrivés à leurs drapeaux. Je ne puis que rendre le témoignage le plus avantageux de l'activité des préfets, de la bonne conduite des officiers de recrutement et de la gendarmerie, et surtout de l'excellent esprit manifesté dans ces circonstances par la nation tout entière.

Mais, Sire, il ne faudrait pas conclure du résultat de ce concours général de tous les sentiments, que les armées de Votre Majeste sont de cent soixante mille hommes plus nombreuses quelles ne l'étaient au moment où a éclaté la guerre de la quatrième coalition.

Les revues annuelles ont été terminées depuis le 1er septembre; et, par l'effet des doubles inspections que Votre Majesté avait ordonnées, on a été dans le cas de retrancher des contrôles les vieux soldats qui avaient acquis des droits aux récompenses militaires, ou parce que le temps de leur service était expiré, où par les honorables blessures dont ils étaient couverts. Le nombre des congés ou des retraites qui ont été accordés s'est élevé à seize mille. La consommation des maladies dans une armée aussi considérable, les pertes faites sur le champ de bataille, aux combats de Schleitz et de Saalfed, à la journée d'léna, aux combats de Prentzlow, de Lubeck, aux affaires de Pultusk et de Golymin, aux combats de Bergfried et de Hoff, et à la bataille d'Eylau; celle des braves qui sont morts par suite de leurs blessures, ou que j'ai dû faire passer dans les dépôts pour être mis en retraite à la première inspection, ont produit une autre diminution de quatorze mille hommes. C'est donc réellement, Sire, de cent trente mille hommes que votre état militaire se trouve en ce moment augmenté. Vous aviez, à la fin de la guerre de la troisième coalition, des armées belles, nombreuses, formidables; elles le

sont devenues davantage par cet important accroissement.

L'armée d'Italie, que Votre Majesté a réunie dans le Frioul et aux camps de Brescia, de Vérone, de Bassano et d'Alexandrie, est la plus considérable que la France ait jamais eue dans ces contrées. Rien n'en a été retiré pour la Grande-Armée, à l'exception de quelques corps de troupes à cheval, qui ont été remplacés en conséquence de la résolution qu'a prise Votre Majesté de doubler la formation de la cavalerie.

L'armée de Dalmatie avait essuyé des maladies qui ont cessé par le retour de la meilleure saison. Elle a réparé ses pertes, et ses dépôts en Italie offrent une force notable.

L'armée de Naples a reçu dix mille conscrits, tirés des dépôts que Votre Majesté a fait établir en divisions dans ses Etats d'Italie.

La Grande-Armée couvre, par ses triomphes, la frontière du Rhin, qui l'est en seconde ligne par la réserve que commande le maréchal Keller

mann.

Les corps du camp de Boulogne, portés au complet par la conscription de 1807, mettent le nord de la France à l'abri des tentatives de l'ennemi.

Votre Majesté a ordonné à Saint-Lô, à NapoléonVille et dans la Vendée, la formation de trois camps qui protégent les côtes de la Bretagne, de la Normandie et de la Gascogne. Ils se réunissent dans ce moment-ci.

Les grenadiers et les chasseurs des gardes nationales des départements de la Gironde, de la Seine-Inférieure et du Rhin sont venus concourir à ce système de défense intérieure.

Dans cette situation des choses, j'obéis aux ordres de Votre Majesté en lui proposant d'appeler dès ce moment la conscription de 1808, et de former cinq légions de réserve de l'intérieur. Votre Majesté m'avait fait connaître, qu'outre cette ligne de camps et ces réunions de gardes nationales qui ceignent ces frontières, elle voulait avoir une triple réserve qui mit son territoire à l'abri de tout projet d'insulte. Elle a considéré d'ailleurs que les camps de Boulogne, de Saint Lo, de Napoléon-Ville et de la Vendée emploient un grand nombre de vieux bataillons prêts à se porter partout où ils pourraient être nécessaires, et qu'alors elle retirerait tous les avantages de sa prévoyance, puisque ses frontières et ses côtes seraient encore suffisamment garnies par les gardes nationales el par les légions de la réserve.

Cette prévoyance, Sire, est digne du chef d'un grand peuple et d'un capitaine que j'ai vu, quoique constamment victorieux, s'occuper avec sollicitude de tout ce qui pouvait réparer un revers. Lorsqu'il marchait à la victoire d'léna, j'ai dû, par ses ordres, armer et approvisionner toutes les places du Rhin, comme si l'ennemi avait pu menacer ses frontières.

Quelque importantes que soient ces considérations, il en est une non moins digne du cœur de Votre Majesté. Les conscrits de 1808 seraient appelés par l'ordre naturel des choses à venir dans six mois se ranger sous les drapeaux; ils auraient alors à faire de longues marches, à supporter des fatigues auxquelles il est d'une bonne et paternelle administration de les préparer, de les accoutumer d'une manière insensible. Réunis six mois plus tôt, ils auront l'avantage de faire leur apprentissage du métier des armes dans nos places, dans nos camps, au sein même de la patrie.

Par une autre disposition qu'inspire également à Votre Majesté son amour pour ses peuples, elle

a voulu confier l'instruction de cette jeunesse à des personnes distinguées par leur rang et par les services qu'elles ont rendus à l'Etat. Elle a, en conséquence, apelé au commandement des légions de la réserve de l'intérieur ceux des membres du Sénat qui, avant de faire partie de ce corps, s'étaient illustrés par leurs talents militaires. Ce sont les pères de la patrie qui en élèveront les enfants; c'est l'expérience consommée qui dirigera les premiers pas des jeunes Français dans la carrière de la gloire.

Tant d'avantages réunis, Sire, doivent décider Votre Majesté à appeler à l'heure même la conscription de 1808.

Une seule objection, Sire, pourrait être opposée aux puissants motifs qui dictent cette mesure: c'est l'accroissement de dépense qui doit en résulter. Mais les finances de Votre Majesté sont dans une situation si prospère; elle a si bien su se ménager pour des circonstances extraordinaires des ressources extraordinaires, que, sans imposer à ses peuples de nouvelles contributions, sans exiger d'eux de nouveaux sacrifices, elle peut satisfaire à ce que demandent sa gloire et la sûreté de la patrie.

Le prince de Neufchâtel, ministre de la guerre,
Signé MARECHAL ALEX. BERTHIER,

Message de S. M. Impériale et Royale au Sénat.

Sénateurs, nous avons ordonné qu'un projet de sénatus-consulte ayant pour objet d'appeler dès ce moment la conscription de 1808 vous soit présenté.

Le rapport que nous a fait notre ministre de la guerre vous donnera à connaître les avantages de toute espèce qui résulteront de cette mesure.

Tout s'arme autour de nous. L'Angleterre vient d'ordonner une levée extraordinaire de deux cent mille hommes; d'autres puissances ont recours également à des recrutements considérables. Quelque formidables, quelque nombreuses que soient nos armées, les dispositions contenues dans ce projet de sénatus-consulte nous paraissent, sinon nécessaires, du moins utiles et convenables. Il faut qu'à la vue de cette triple barrière de camps qui environnera notre territoire, comme à à l'aspect du triple rang de places fortes qui garantissent nos plus importantes frontières, nos ennemis ne conçoivent l'espérance d'aucun succès, se découragent et soient ramenés enfin, par l'impuissance de nous nuire, à la justice, à la raison.

L'empressement avec lequel nos peuples ont exécuté les sénatus-consultes du 24 septembre 1805 et du 4 décembre 1806, a vivement excité en nous le sentiment de la reconnaissance. Tout Français se montrera également digne d'un si beau nom.

Nous avons appelé à commander et à diriger cette intéressante jeunesse des sénateurs qui se sont distingués dans la carrière des armes, et nous désirons que vous reconnaissiez dans cette détermination la confiance sans bornes que nous mettons en vous. Ces sénateurs enseigneront aux jeunes conscrits que la discipline et la patience à supporter les fatigues et les travaux de la guerre sont les premiers garants de la victoire. Ils leur apprendront à tout sacrifier pour la gloire du trône et le bonheur de la patrie, eux, membres d'un corps qui en est le plus ferme appui.

Nous avons été victorieux de tous nos ennemis. En six mois nous avons passé le Mein, la Saale, l'Elbe, l'Oder, la Vistule, nous avons conquis les places les plus formidables de l'Europe, Magde

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approvisionnées, nombreuses, impatientes, n'attendent que le signal pour triompher encore.

Bientôt elles n'auront plus à combattre contre les saisons; bientôt il ne leur restera que des hommes à vaincre; bientôt elles marcheront, sous l'inspiration du génie, à des victoires nouvelles, à ces succès décisifs qui commandent à l'ennemi la modération, la justice et la paix.

bourg, Hameln, Spandau, Stettin, Custrin, Glogau, | tule, et de l'ennemi et du climat, completées, Breslau, Schweidnitz, Brieg ; nos soldats ont triomphé dans un grand nombre de combats et dans plusieurs grandes batailles rangées; ils ont pris plus de huit cents pièces de canon sur le champ de bataille; ils ont dirigé vers la France 4,000 pièces de siége, 400 drapeaux prussiens ou russes et plus de deux cent mille prisonniers de guerre ; les sables de la Prusse, les solitudes de la Pologne, les pluies de l'automne, les frimas de l'hiver, rien n'a ralenti leur ardent désir de parvenir à la paix par la victoire, et de se voir ramener sur le territoire de la patrie par des triomphes. Cependant nos armées d'Italie, de Dalmatie, de Naples, nos camps de Boulogne, de Bretagne, de Normandie, du Rhin sont restés intacts.

Si nous demandons aujourd'hui à nos peuples
de nouveaux sacrifices pour ranger autour de
nous de nouveaux moyens de puissance, nous
n'hésitons pas à le dire, ce n'est point pour en
abuser en prolongeant la guerre. Notre politique
est fixe nous avons offert la paix à l'Angleterre
avant qu'elle eût fait éclater la quatrième coali-
tion; cette même paix, nous la lui offrous encore.
Le principal ministre qu'elle a employé dans ses
négociations a déclaré authentiquement dans ses
assemblées publiques que cette paix pouvait être
pour elle honorable et avantageuse; il a ainsi mis
en évidence la justice de notre cause. Nous som-
mes prêts à conclure avec la Russie aux mêmes
conditions que son négociateur avait signées, et
que les intrigues et l'influence de l'Angleterre
l'ont contrainte à repousser. Nous sommes prêts
à rendre à ces huit millions d'habitants conquis
par nos armes la tranquillité, et au roi de Prusse
sa capitale. Mais si tant de preuves de modération
si souvent renouvelées ne peuvent rien contre les
illusions que la passion suggère à l'Angleterre,
si cette puissance ne peut trouver la paix que
dans notre abaissement, il ne nous reste plus
qu'à gémir sur les malheurs de la guerre, et à
en rejeter l'opprobre et le blame sur cette nation
qui alimente son monopole avec le sang du con-
tinent Nous trouverons dans notre énergie, dans
le courage, le dévouement et la puissance de nos
peuples, des moyens assurés pour rendre vaines
les coalitions qu'ont cimentées l'injustice et la
haine, et pour les faire tourner à la confusion
de leurs auteurs. Francais! nous bravons tous
les périls pour la gloire et pour le repos de nos
enfants.

Donné en notre camp impérial d'Osterode, le 20
mars 1807.
Signé NAPOLEON
Par l'Empereur:

Le ministre secrétaire d'Etat,

Signe H.-B. MARET.

M. Regnauld (de Saint-Jean d'Angély), orateur du conseil d'Etat, étant monté à la tribune pour exposer les motifs du sénatus-consulte, a dit:

Monseigneur,

Sénateurs,

Les jeunes Français appelés aux bataillons de guerre par le dernier sénatus-consulte, ont répondu à la voix de l'Empereur et de la patrie avec le plus généreux dévouement.

Tous les départements de l'empire ont rivalisé d'empressement et de zèle, et déja les conscrits de 1807 sont ou dans les rangs des braves devant l'ennemi ou dans les dépôts de l'intérieur et de l'Italie, ou en chemin pour l'une de ces destinations, tous sur la route du devoir et de l'honneur. Aussi les armées françaises qui, après quatre mois d'éclatants succès, ont triomphe, sur la Vis

Mais Sa Majesté, dont l'œil protecteur ne perd jamais de vue ses amis, dont l'œil vigilant suit tous les mouvements de ses ennemis, à dès longtemps prévu que les pavillons de l'Angleterre pourraient se montrer sur nos côtes; que peutêtre ils essayeraient d'y jeter, ou quelques enfants perdus, restes de hordes de brigands, ou quelqueuns de ces régiments dont ils font espérer depuis si longtemps le secours à leurs alliés.

Déjà tout est prêt sur nos côtes, moins encore pour repousser que pour bien recevoir les bataillons anglais; déjà les ordres sont donnés, moins pour leur fermer le chemin du continent que pour leur interdire, s'ils osent y pénétrer, le retour au delà des mers.

Des camps sont formés sur tous les points d'où l'ennemi, s'il se présente, peut être observé avec vigilance, joint avec promptitude, attaqué avec succès, combattu avec avantage.

En troupes de ligne seulement, nous avons des forces supérieures à celles dont l'ennemi peut essayer le débarquement sur nos côtes.

Grâce à la providence de Sa Majesté et à votre sagesse, sénateurs, nous avons encore d'autres bras armés pour défendre le sol français ou en punir la violation.

Le sénatus-consulte que Sa Majesté vous proposa avant de partir pour vaincre à Olmultz et commander la paix à Austerlitz, cette loi qui remet la défense des frontières au courage, au dévouement des gardes nationales, a promis à l'empire d'autres soldats, dont le courage et le dévouement ont répondu à la confiance de l'Empereur, et devancé les besoins de la patrie.

Des légions de gardes nationales sont en armes sur les côtes, au nord et à l'ouest de la France, et c'est parmi les premiers citoyens de l'empire, parmi les pères de la patrie que Sa Majesté a choisi ceux qui devaient armer, commander les citoyens des communes, les pères de famille pour la défense de leurs fovers.

Organes des décrets du Sénat, des besoins de la France, des ordres de Sa Majesté, ceux d'entre vous qui sont à la tête de ces légions n'ont trouvé dans les citoyens qui les composent que de l'empressement et du zèle. Qu'ils soient envers eux les organes de la satisfaction de l'Empereur et de la reconnaissance de la nation.

Mais plus ces généreux citoyens se montrent disposés à faire à la patrie tous les sacrifices de leurs affections, de leurs intérêts et, ce qui est plus difficile peut-être, de leurs habitudes civiles et domestiques, plus le chef de l'Etat croit devoir leur en épargner.

Et cependant il faut assurer, il faut garantir contre les chances les moins possibles, les moins prévues, la défense intérieure, la sûreté du territoire de l'empire.

La sagesse de Sa Majesté a déjà réalisé tout ce qui est nécessaire, a fait tout ce qui est utile; sa prudence et l'intérêt de l'Etat lui prescrivent d'aller plus loin et de préparer une réserve aux régiments de ligne, aux légions des gardes nationales dont les aigles bordent nos frontières maritimes.

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