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Ces formes paternelles adaptées à un établissement paternel concilieront les intérêts des habitants et ceux du bureau des nourrices, en rendant la justice prompte et gratuite.

Projet de loi.

Art. 1er. Le recouvrement du prix des mois de nourrice des enfants de la ville et banlieue de Paris sera fait désormais d'après un rôle qui sera rendu exécutoire par le préfet du département, lequel, en cas de retard de payement, pourra décerner contrainte, comme pour les contributions, sans que la yoie de contrainte par corps puisse jamais avoir lieu.

Art. 2. Il sera statué par le conseil de préfecture, présidé par le préfet du departement, sur aux rôles ou contraintes, et sur les contraventions aux les oppositions lois et règlements touchant le bureau des nourrices.

Le Corps législatif arrête que ce projet de loi sera transmis au Tribunat par un message.

M. Regnauld (de Saint-Jean-d'Angély) succède à la tribune à M. Pelet et présente un projet de loi relatif au droit d'entrée dans les bassins non à flot du Havre, d'Ostende et de Bruges. En voici le texte et l'exposé des motifs :

Motifs.

Messieurs, une loi du 12 floréal an XI a assuré la réparation des bassins à flot des ports d'Ostende, Bruges et le Havre, par une taxe d'entretien payable par les propriétaires des navires entrés dans ces bassins.

La longueur du séjour des navires, pendant l'inaction que nécessite la guerre, a pu faire trouver la taxe plus pesante.

Pour s'y soustraire, des armateurs, au lieu de faire entrer leurs navires dans les bassins à flot, les laissent souvent dans les autres bassins, où ils ne sont pas à flot, où ils ne payent rien, et où ils causent pourtant aux quais des dégradations qui nécessitent des travaux et des dépenses de réparation.

Pour y pourvoir, Sa Majesté à jugé convenable d'imposer sur les navires qui, sans entrer dans les bassins à flot, séjourneront dans les bassins d'échouage ou non à flot, une demi-taxe qui acquittera les frais auxquels il faut pourvoir afin de tenir en état les quais en bois ou maçonnerie auxquels touchent et sont amarrés les navires.

La loi de floréal an XI a pourvu aux moyens de perception d'emploi de comptabilité.

Ces dispositions s'appliqueront à l'exécution de celle dont je vais vous donner lecture.

Projet de loi.

Art. 1er. Il sera établi dans les bassins, non à flot, du Havre, d'Ostende et de Bruges, sur les navires admis à y entrer et à y séjourner, une taxe d'entretien égale à la moitié de celle qui est établie pour les bassins à flot dans les mêmes ports, par la loi du 12 floréal an XI.

Art. 2. Les bateaux pêcheurs ne seront pas assujettis au payement du droit.

Art. 3. La perception de cette taxe sera faite d'après le mode établi par la loi du 12 floréal an XI.

Le Corps législatif arrête que ce projet de loi sera transmis au Tribunat par un message. La séance est levée.

CORPS LEGISLATIF.

PRÉSIDENCE DE M. FONTANES.

Séance du 17 mars 1806.

Le procès-verbal de la séance du 15 est adopté. Les orateurs du conseil d'Etat et du Tribunat étant introduits, M. le Président rappelle que l'ordre du jour est la discussion des deux projets

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de loi présentés, dans la séance du 7, par MM. Pelet (de la Lozère) et Begouen, conseillers d'Etat, portant exemption de contribution foncière en faveur des habitants des villes de Mayence et Argenton-le-Château, dont les maisons ont été détruites par l'effet de la guerre, et qui les ont fait ou feront rebâtir.

M. Jard-Panvilliers. Quand un prince veille lui-même aux soins de son empire; quand c'est toujours lui qui guide ses armées au milieu des combats; quand il partage avec ses soldats les dangers et les fatigues de la guerre, et qu'il est témoin des maux qu'elle entraine après elle, on ne le voit point prendre les armes pour satisfaire ses passions individuelles ou celles des personnes qui l'entourent. Il n'a jamais en vue que l'intérêt et la gloire de ses peuples; une paix solide et honorable est toujours pour lui le premier objet de la guerre, et quand il l'a obtenue, son premier soin est d'en réparer les désastres: tel est le héros qui fait le bonheur et la gloire de la nation française.

Lorsque, après avoir rempli l'univers de son nom et de ses exploits, il eut pris les rênes du Gouvernement auquel il était appelé par nos vœux, il s'occupa de rendre le calme à ceux de nos départements qui étaient en proie aux discordes civiles; il offrit la paix à tous nos ennemis, et lorsque, sur leur refus, il l'eut conquise par la force de nos armes et l'ascendant de son génie, toutes ses sollicitudes se portèrent vers la réparation des maux que la guerre avait causés.

Lyon, cette cité fameuse par son industrie et par ses malheurs, fixa d'abord son attention; il ordonna la reconstruction des édifices qui en faisaient l'ornement, et pour l'encourager, il vous proposa la loi bienfaisante qui exempte de la contribution foncière pendant dix ans toutes les maisons dont les murs auront été élevés à une certaine hauteur dans un délai déterminé.

Il porta ensuite ses regards sur ces contrées plus malheureuses encore, où le fer et la lamme avaient tout détruit; sur ces départements de l'Ouest, qui lui doivent une nouvelle existence, et où son nom sera toujours béni, mal · gré les efforts impuissants de quelques rebelles obscurs qui cherchent à abuser d'un ministère respectable pour lui aliéner des cœurs dont le déyouement lui est garanti par ses bienfaits.

Ce fut en faveur des villes de Bressuire et de Châtillon, que leurs malheurs ont trop fait connaitre, qu'il vous fut proposé et que vous accueillites un projet de loi qui exemptait aussi de la contribution foncière pendant dix ans les maisons qui, ayant été détruites pendant la guerre civile, seraient reconstruites et élevées au moins à un mètre de hauteur avant l'an XIV.

La même proposition yous est faite aujourd'hui en faveur d'Argenton-le-Chateau, département des Deux-Sèvres, et en faveur de la ville de Mayence et des villages de sa banlieue. MM. les orateurs du conseil d'Etat vous ont exposé les motifs de justice et de politique qui doivent vous engager à l'adopter.

Les siéges et les bombardements que la ville de Mayence a éprouvés pendant la guerre de la Révolution et les désastres qui en ont été la suite, sont des événements trop mémorables pour qu'il soit nécessaire de vous en retracer le tableau. Mais ce qui est beaucoup moins connu, et ce qui ne mérite pas moins votre attention, c'est le dévouement à la patrie que les habitants d'Argentonle-Château ont montré pendant toute la durée de la guerre de la Vendée; c'est la résistance coura

geuse qu'ils ont constamment opposée aux attaques dirigées contre leur commune, et qui a attiré sur elle tous les maux que la fureur des partis peut susciter.

Témoin presque oculaire de ces faits, je me plais à vous les rappeler pour l'honneur de mes concitoyens; mais quand même la fidélité des habitants d'Argenton-le-Château ne leur donnerait pas un titre à l'estime de tous les bons Français, il suffirait que, comme les habitants de la ville de Mayence, ils aient éprouvé les désastres de la guerre, pour exciter en leur faveur la bienveillante sollicitude du prince qui, après avoir mis un terme aux malheurs de la France, veut encore en faire disparaitre les traces. Pour vous, Messieurs, qui êtes animés du même esprit, et qui avez à consentir les sacrifices que les besoins de l'Etat exigent de vos concitoyens, vous vous féliciterez sans doute de commencer votre session par des actes de bienfaisance qui vous donneront des droits éternels à la reconnaissance de ceux qui en seront l'objet.

C'est dans ce sentiment que la section de l'intérieur du Tribunat, dont je suis l'organe, a voté l'adoption du projet de loi soumis en ce moment à votre délibération.

Aucun orateur ne prenant la parole, la discussion est fermée.

Le Corps législatif délibère sur les deux projets de loi.

Celui concernant la ville de Mayence est décrété à la majorité de 244 boules blanches contre 5 noires; celui concernant la ville d'Argenton-leChâteau, à la majorité de 236 contre 6.

MM. Cretet et Ségur, conseillers d'Etat, sont introduits.

M. Cretet présente un projet de loi relatif à la construction d'un pont à Paris, vis-à-vis l'Ecole militaire. En voici le texte et l'exposé des motifs :

Motifs.

Messieurs, les communications entre les deux rives de la Seine étaient incomplètes, et la capitale de l'empire manquait de plusieurs ponts. Le Gouvernement averti de ce besoin projeta la construction de trois nouveaux ponts. Elle a été exécutée avec rapidité par une association qui avait obtenu l'établissement d'une taxe destinée à l'indemniser des dépenses considérables qu'elle a faites.

Pour compléter le système des ponts de Paris, il reste à en établir un vis-à-vis de l'Ecole militaire; il ne servira pas seulement à lier les quartiers qui bordent les deux rives, il sera encore d'une grande commodité pour le commerce entre le midi et le nord-ouest de l'empire: les voituriers qui ont intérêt d'éviter Paris, ou de se soumettre aux difficultés du transit dans Paris, sont obligés d'emprunter le passage sur le pont de Sèvres, ce qui les détourné des directions les plus

courtes.

Du moment où un pout aura été construit visà-vis l'Ecole militaire, on pourra, en prenant quelques précautions en faveur de l'octroi de Paris, admettre le passage en transit sur ce pont; une place sera ouverte vis-à-vis ce pont, du côté de Chaillot; au fond de cette place une route nouvelle sera ouverte elle adoucira la pente de la montagne des Bons-Hommes, et les plus grosses voitures s'élèveront sans difficulté sur la hauteur de Passy, d'où elles poursuivront leur route par les boulevards extérieurs de Paris.

Le Gouvernement pense qu'en concédant une taxe au passage sur ce pont, des particuliers

pourront se charger de tout ou partie des dépenses de sa construction; s'il en était autrement, il serait pris d'autres mesures pour exécuter cette construction.

Projet de loi.

Art. 1er. Il sera construit un pont sur la Seine, vis-à-vis l'Ecole militaire.

Art. 2. Une taxe, semblable à celle statuée par la loi du 24 ventôse an IX, sera établie sur ce pont.

Art. 3. La perception de cette taxe pourra être concédée aux particuliers qui fourniraient tout ou partie des fonds nécessaires pour la construction du pont.

Art. 4. Les conditions de la concession et la durée de la perception seront déterminées par un règlement d'administration publique.

Art. 5. Si la construction du pont nécessite des achats, des démolitions de maisons, les propriétaires seront tenus de les céder au prix d'estimation, et à la charge du payement préalable, et en observant les conditions prescrites par les lois, pour le cas d'aliénation pour cause d'utilité publique.

Le Corps législatif arrête que ce projet de loi sera transmis au Tribunat par un message. La séance est levée.

CORPS LÉGISLATIF.

PRÉSIDENCE DE M. REINAUD-LASCOURS.
Séance du 18 mars 1806.

Le procès-verbal de la séance d'hier est adopté. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à l'institution et à la nomination des prud'hommes à Lyon.

MM. les orateurs du conseil d'Etat et ceux du Tribunat sont introduits.

M. le Président. La parole appartient à l'un de messieurs les orateurs du Tribunat.

M. Pernon. Messieurs, la ville de Lyon, pendant le siècle qui vient de s'écouler, renferma dans son sein une population nombreuse composée d'hommes industrieux dont une grande partie a péri en défendant avec énergie et courage des coutumes et des lois protectrices des mœurs et de la prospérité publique.

Leur industrieuse activité, leur probité sévère avaient donné au commerce dont ils s'occupaient une telle étendue, les produits de leurs manufactures jouissaient dans l'étranger d'une telle confiance, qu'on vit pendant cette période de temps les travaux de cette ville florissante ajouter chaque année à la richesse nationale 60 millions de numéraire. C'est ainsi qu'une cité, aussi célèbre par ses malheurs que par la loyauté de ses habitants, augmentait les ressources et la force de l'État, et s'acquittait envers lui de la protection sous laquelle s'exerçait son industrie.

Aussitôt que les lois et les coutumes qui avaient fait sa splendeur n'existèrent plus, des hommes pervers, prétendant introduire jusque dans la fabrication des étoffes la licencieuse liberté du temps, leur donnèrent des qualités trompeuses qui devaient leur faire perdre la confiance de l'ache

teur.

Dans cette situation, le chef auguste qui nous gouverne, dont l'oeil est partout, et qui sait que si les mœurs, l'ordre et l'économie n'existent pas dans les ateliers, aucune entreprise de l'industrie ne saurait avoir de succès permanents, s'est hâté d'y ramener ces institutions tutélaires qui, formant l'homme au travail et à la vertu, assurent le bonheur des individus et de la fortune publique. Déjà, par ses arrêtés du 20 floréal dernier, il a ordonné que les tissus principaux des fabriques de Lyon fussent revêtus de marques qui assurent dans les uns leurs qualités intrinsèques, dans

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d'autres la valeur des matières qui en font partie, de manière que le consommateur ne peut plus aujourd'hui être trompé par les étoffes qu'il achète sous cette garantie.

La loi que j'ai l'honneur de vous présenter en ce moment, Messieurs, est une suite de ces dispositions qui tendent à régénérer les manufactures françaises. Son premier et second titre établissent et organisent un conseil de prud'hommes dans la ville de Lyon, et règlent ses attributions. Ce conseil doit remplacer l'ancien corps des juges-gardes, débarrassé dans ses formes de tout ce que l'expérience a montré être nuisible au progrès de l'industrie et à la liberté du commerce.

Ce tribunal, par la nature de sa composition et dans l'exercice des pouvoirs qui lui sont délégués, a un avantage sur ceux qu'il remplace. Il doit être composé d'hommes qui, par leurs habitudes et leur éducation, auront acquis toutes les connaissances qui doivent faire présumer la justesse de l'équité de leurs décisions. Appelés à terminer les différends entre leurs égaux, il leur sera facile de gagner leur confiance, et souvent ils pourront s'en servir avec avantage pour les concilier entre eux par des invitations paternelles, en évitant de prononcer des jugements qui laissent fréquemment de l'aigreur entre les parties intéressées.

La surveillance qu'ils doivent exercer, les communications journalières et bienveillantes qu'ils doivent entretenir avec tous les artisans, redonneront aux membres de cette famille industrieuse cet esprit d'ordre qui lui convient, cette rigidité de principes nécessaire dans les transactions commerciales, et surtout cette émulation qui, fécondant le vaste et fertile domaine de l'imagination, multiplie les arts par lesquels les diverses substances de notre globe sont forcées à revêtir les formes et les qualités qu'exigent nos goûts ou nos besoins, et constituent l'ensemble de tous les objets commerçables.

La troisième section du second titre charge les prud'hommes des mesures conservatrices de la propriété des dessins. La propriété indéfinie des dessins que la loi permet d'acquérir a appartenu de tout temps aux manufacturiers qui les ont produits. Cet usage assurait à chacun le fruit de ses découvertes. Il faisait rechercher et permettait de payer les artistes les plus distingués : c'est à cet usage que les manufactures ont dù la faculté de varier à tel point leurs inventions, qu'elles ont pu satisfaire à tous les caprices de la mode, en même temps qu'elles ont contribué à les multiplier chez presque tous les peuples de l'ancien et du nouveau monde, au grand avantage de ces mêmes manufactures.

Vous observerez, Messieurs, que la facture d'un dessin ne saurait être assimilée aux inventions dans les arts pour lesquelles s'obtiennent des brevets d'invention. Ceux-ci sont toujours le résultat d'une découverte ou du perfectionnement d'un objet utile qu'il importe de faire connaître et de multiplier. Il n'en est pas de même du dessin d'une étoffe, qui n'a le plus souvent d'intéressant que de fournir au consommateur la facilité de faire un choix qui lui plaise davantage.

L'intention de la loi sur les brevets se trouve cependant remplie.

L'un des articles de cette section ordonne le dépôt à faire au Conservatoire de Lyon, dans un temps déterminé, de tous les échantillons des inventions nouvelles. Cette disposition met tous les manufacturiers à portée de profiter de leurs découvertes naturelles, avec cet avantage pour les progrès de l'art que chacun se trouve forcé de

perfectionner ou de créer une nouveauté pour obtenir la préférence sur ses rivaux. Cet établissement précieux, fondé par Sa Majesté, et qui a pour but de rassembler toutes les découvertes anciennes et modernes relatives aux arts et manufactures, avec toutes les parties d'enseignement qui peuvent servir à les perfectionner, leur offre encore une ressource dont l'avantage est incalculable.

Le titre III de la loi est une interprétation ajoutée à celle sur les livrets, avec les changements qu'ont exigé les localités où elle doit s'exercer. Elle rétablit un usage dont l'expérience a démontré l'utilité. Cette loi fixe d'une manière précise les rapports de comptabilité entre les chefs d'atelier et les négociants qui les occupent. D'une part, ceux-ci se trouvent assurés dans le remboursement de leurs avances; d'autre part, l'ouvrier ne peut être privé, dans aucun cas, des ressources de son travail. Ce mode facilite, de plus, l'établissement d'un grand nombre d'hommes qui, par leur travail et leur bonne conduite, peuvent mériter la confiance des manufacturiers.

Enfin, Messieurs, le dernier article de la loi, en déclarant que ses principes, modifiés selon les circonstances, sont applicables aux autres villes de fabrique, proclame l'admission d'un système bien propre à les faire fleurir toutes. Ce système, en assimilant chaque cité à une grande famille qui a toujours un intérêt principal, dont les membres sont les meilleurs juges et les promoteurs les plus constants et les plus éclairés, qui s'achemine à devenir elle-même l'artisan de sa prospérité, la rend comme responsable de sa conduite et de sa réputation, et fait, en un mot, que ses citoyens exercent réciproquement, sur l'industrie qui leur est commune, une surveillance dont l'activité est garantie par l'intérêt direct de chacun d'eux. Une inspection ainsi organisée est le meilleur et peut-être l'unique frein qu'on puisse opposer efficacement aux sourdes suggestions de l'intérêt particulier et aux lâches combinaisons de la fraude.

Ainsi, quand Lyon surveillera ses soieries, Rouen ses toiles, Louviers ses draps, Genève ses bijoux et ses montres, alors la France et l'étranger pourront acheter avec sécurité les produits de l'industrie française, et la valeur commerciale de tous ces objets sera comme rehaussée par une prime équivalente à tout ce que leur fabrication a gagné en fidélité.

Ces motifs, Messieurs, ont engagé la section de l'intérieur du Tribunat à vous proposer l'adoption de la loi qui vous a été proposée.

Aucun autre orateur ne prenant la parole, la discussion est fermée.

Le Corps législatif délibère sur le projet de loi, qui est décrété à la majorité de 229 boules blanches contre une noire.

La séance est levée et indiquée à jeudi.

CORPS LÉCISLATIF. PRÉSIDENCE DE M. FONIANES.

Séance du 20 mars 1806.

Le procès-verbal de la séance du 18 mars est adopté.

MM. Lacuée et Gassendi, conseillers d'Etat, sont introduits.

M. Lacuée présente un projet de loi relatif aux mesures de répression des délits commis dans les établissements militaires. En voici le texte et l'exposé des motifs :

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sernes, hôpitaux, magasins, arsenaux et, en général, de tout ce qui constitue le domaine militaire de l'Etat, dans les places de guerre et la garnison de l'intérieur.

Motifs. Messieurs, vos prédécesseurs, ayant reconnu la nécessité de donner au Gouvernement le moyen de conserver les propriétés nationales civiles, ont rendu des lois qui ont pour but la conservation de ces propriétés; rendre ces lois applicables aux propriétés nationales militaires, tel est l'objet de celle que le Gouvernement présente aujourd'hui à votre approbation.

Sans doute, législateurs, ces places fortes, ces remparts, ces bastions, qui nous furent il y a peu d'années nécessaires pour arrrêter les efforts de nos ennemis, nous seront inutiles pendant que le génie de la victoire, pendant que la victoire elle-même guidera nos armées, pendant que nos troupes seront, comme aujourd'hui, composées d'hommes à qui le sentiment de l'honneur et la soif de la gloire rendent tout facile; mais devonsnous pour cela négliger la conservation de ces anciens boulevards de la France? Non, sans doute: ne pussent-ils devenir pour jamais utiles, nous devrions encore les conserver avec soin comme des monuments du génie et de la puissance des Français. Edifier et conserver, c'est là ce qui distingue le plus éminemment les peuples civilisés de ceux qui sont encore barbares, ou qui ont été replongés dans la barbarie.

Pendant le temps où la jouissance de la plupart de nos propriétés militaires a constitué une partie assez considérable des émoluments de quelques fonctionnaires publics, le Gouvernement a pu, sans danger, se reposer de leur conservation sur l'intérêt privé; il n'en est plus de même depuis qu'il a cru devoir en faire entrer le produit dans le trésor public: depuis ce changement, qui, sous tous les rapports, a procuré des avantages à l'Etat et aux citoyens, il est devenu indispensable de donner une attention plus particulière à la conservation de ces propriétés; en effet, soit par l'incurie de ceux qui en recueillent les produits, soit par l'impunité de ceux qui les dégradent, elles éprouvent journellement des atteintes dont la réparation est indispensable, et qui, nuisant à leur solidité et à la régularité de leurs formes, pourraient n'être pas sans danger, si aux jours les plus prospères succédaient jamais des temps calamiteux.

Pour mettre fin à ces abus, le Gouvernement pouvait se borner à placer toutes les propriétés militaires sous la sauvegarde de la force armée ; il pouvait aussi vous demander de confier aux agents de l'administration la poursuite et la répression des délits commis contre cette classe des propriétés publiques; mais il a préféré les mettre sous l'égide de la justice civile et d'en confier la poursuite et le jugement aux tribunaux ordinaires. Cette option, faite par Sa Majesté l'Empereur et Roi, ne peut manquer, législateurs, d'obtenir votre approbation, parce que vous la considérerez comme une nouvelle preuve de l'inviolable respect de l'Empereur pour les formes conservatrices des droits des citoyens, et comme le garant de la confiance de Sa Majesté dans l'attachement des cours de justice ordinaire pour tout ce qui peut contribuer à la gloire et à la prospérité de l'empire français.

Je demande acte de la remise que je fais sur le bureau du projet de loi dont je viens, au nom du Gouvernement, vous donner communication.

Projet de loi.

Art. 1er. Les lois qui ont pour but la conservation des domaines nationaux des eaux et forêts, édifices et établissements publics, seront applicables à la conservation des fortifications et de leurs dépendances, des ca

Art. 2. Les gardes du génie seront, pour l'exécution du précédent article, assimilés aux gardes forestiers et champêtres et autres agents conservateurs. Leurs procèsverbaux feront foi auprès de toutes les autorités jusqu'à inscription de faux. Les procureurs impériaux sont chargés, sous leur responsabilité personnelle, de poursuivre, au nom du Gouvernement, par voie de police correctionnelle et sans préjudice de poursuites extraordinaires, s'il y a lieu, la réparation des délits constatés par ces procès-verbaux, sur la simple transmission qui leur en sera faite par le directeur des fortifications,

Ar. 3. Tous les procès-verbaux que les gardes du génie dresseront dans les cas prévus par l'article 1er, relateront, afin d'être admis en justice, la date du jour et du lieu de l'enregistrement et de la prestation de serment: ces procès-verbaux seront visés pour timbre et enregistrés en débet, ainsi que les actes et jugements qui interviendront sur lesdits procès-verbaux, conformément à la loi du 13 brumaire an VII, et à l'article 70, paragraphe 1er, nos 4 et 5 du titre II de celle du 22 frimairé suivant.

Le Corps législatif arrête que ce projet de loi sera transmis au Tribunat par un message. L'ordre du jour appelle la discussion de trois projets de loi relatifs :

1° A la réunion de la commune de Chirens au canton de Voiron;

2o A la réunion du canton de Poncin à celui de Nantua;

3o A la distraction du canton de Durtal de l'arrondissement de Segré, pour être réuni à celui de Baugé.

MM. les orateurs du Gouvernement et ceux du Tribunat sont introduits.

M. le Président. La parole appartient à l'un de messieurs les orateurs du Tribunat.

M. Duvidal, Messieurs, la section de l'intérieur du Tribunat, a l'honneur de vous présenter, par mon organe, son vœu sur trois projets dé loi dont la communication officielle vous a été faite par le Gouvernement.

Le premier de ces projets à pour objet de distraire la commune de Chirens, département de l'Isère, du canton de Saint-Geoire, arrondissement de la Tour-du-Pin, pour la réunir au canton de Voiron, arrondissement de Grenoble.

Le second retire le canton de Poncin, département de l'Ain, de l'arrondissement de Belley, pour l'incorporer à l'arrondissement de Nantua.

Le troisième distrait le canton de Durtal, département de Maine-et-Loire, de l'arrondissement de Segré, pour le réunir à celui de Baugé.

Ces lois, Messieurs, sont un nouveau témoignage de la sollicitude constante de Sa Majesté pour amener toutes les parties de l'administration au degré de perfection dont elles sont susceptibles. La division territoriale n'est pas une des moins importantes; elle détermine le ressort des différentes autorités et leur point de contact avec les citoyens. Si ces points sont trop éloignés ou d'un accès difficile, les communications languissent; les administrés sont réduits à abandonner beaucoup d'intérêts qu'ils ne pourraient suivre, par le sacrifice d'intérêts plus précieux. La perception des impôts devient moins prompte, plus coûteuse et plus incertaine; l'administration de la justice criminelle et correctionnelle occasionne plus de frais au trésor public, et sa marche est en même temps ralentie.

Ce travail, aussi étendu que la division territoriale de la France, n'a pu être achevé sans quelques erreurs que les leçons de l'expérience doivent ensuite redresser.

On ne saurait cependant être trop en garde contre les suggestions de l'intérêt privé, qui souvent provoque des changements dont lui seul doit recueillir tout le fruit. La section de l'intérieur du Tribunat a eu lieu de se convaincre, par l'examen des pièces, avec combien de précautions le Gouvernement accueille les demandes de cette nature; elles ne sont prises en considération qu'autant qu'elles sont appuyées par l'approbation motivée des fonctionnaires des différents ordres, et seulement lorsqu'une expérience assez prolongée a donné la conviction que le temps ne pourra faire disparaître les inconvénients qui ont suggéré ces réclamations.

La commune de Chirens, qui est l'objet de la première loi, n'a aucun rapport de commerce avec Saint-Geoire, son chef-lieu de canton, ni avec Bourgoin, son chef-lieu d'arrondissement. Elle est a un myriamètre de Saint-Geoire, à quatre myriamètres de Bourgoin, et ne communique avec tous les deux que par des chemins très-difficiles. Ses relations habituelles sont avec Voiron et Grenoble; elle n'est éloignée du premier lieu que d'un quart de myriamètre, du second que de deux myriamètres, et y communique par des routes faciles et praticables en toute saison.

Le canton de Poncin, objet de la seconde loi, pour chef-lieu actuel Belley. Les communes de ce canton, les plus rapprochées de Belley, en sont encore éloignées de 50 kilomètres, tandis que les plus distantes de Nantua, proposé pour nouveau chef-lieu, n'en sont séparées que par 20 kilomètres. Toutes les relations de commerce du canton de Poncin sont avec Nantua; enfin la disposition proposée tendra à rendre plus égale la population des deux arrondissements de Belley et de Nantua. Celle du premier est de 74,969 habitants; celle du second de 51,000. Ce transport de la population du canton de Poncin, qui est de 7,956, réduira le premier à 67,013 et portera le second à 58,959.

Durtal, chef-lieu de canton, que la loi proposée distrait de l'arrondissement de Segré, pour l'unir à celui de Baugé, est à 55 kilomètres de Segré. Les habitants du canton ne peuvent se rendre à Segré que par des chemins de traverse, impraticables pendant la plus grande partie de l'année; ils ont en outre à passer trois rivières sur lesquelles il n'existe point de pont; et lorsque ces rivières débordent, ce qui a lieu fréquemment en hiver, ils sont forcés de faire par Angers un circuit qui augmente de moitié la longueur du chemin.

Ils communiquent, au contraire, avec Baugé par une belle route praticable dans toutes les saisons, et ils n'en sont éloignés que de 20 kilomètres.

Le seul énoncé de ces motifs, Messieurs, suffira sans doute pour vous convaincre de l'utilité des changements effectués par les trois projets de loi dont j'ai l'honneur de vous proposer l'adoption.

La discussion est fermée.

Le Corps législatif délibère simultanément sur les trois projets de loi, qui sont tous trois décrétés à la majorité de 227 boules blanches contre une noire.

La séance est levée.

SENAT CONSERVATEUR.

PRÉSIDENCE DE S. EXC. M. FRANÇOIS DE NEUFCHATEAU.

Séance du 21 mars 1806.

Le Sénat conservateur, réuni au nombre de

membres prescrit par l'article 90 de l'acte des constitutions de l'an VIII,

Vu le projet de sénatus-consulte rédigé en la forme prescrite par l'article 57 de l'acte des constitutions, en date du 16 thermidor an X;

Après avoir entendu, sur les motifs dudit projet, les orateurs du conseil d'Etat et le rapport de sa commission spéciale, nommée dans la séance du 15 de ce mois;

L'adoption ayant été délibérée au nombre de voix prescrit par l'article 56 de l'acte des constitutions, en date du 16 thermidor an X,

Décrète ce qui suit :

Art. 1er. La caisse d'amortissement est autorisée à acquérir du Sénat les domaines qui ont été affectés à sa dotation dans les départements de la Doire, de Marengo, de la Sésia, de la Stura, et dans le territoire qui composait le département du Tanaro.

Elle en acquittera le prix par une concession de rentes en 5 0/0, et aux conditions suivantes :

Art. 2. La caisse d'amortissement cédera au Sénat une rente de 555,000 francs en 5 0/0 constitués, et recevra,en échange, tous les biens du Sénat dans les départements ci-dessus désignés.

Art. 3. La jouissance des rentes à 5 0/0, qui seront cédées au Sénat par la caisse d'amortissement, lieu à compter du 1er janvier 1806.

aura

Réciproquement, la caisse d'amortissement recouvrera, pour son compte, sur les domaines qui lui seront cédés par le Sénat, tous les produits dont l'échéance sera postérieure au 1er janvier dernier.

Art. 4. Le traité qui sera fait entre le chancelier du Sénat et le directeur de la caisse d'amortissement, en exécution des articles ci-dessus, subrogera la caisse d'amortissement à la propriété, possession et disponibilité des domaines mentionnés en l'article 2.

Art. 5. Les rentes qui seront transférées au Sénat par la caisse d'amortissement seront déclarées inaliénables. Le présent sénatus-consulte sera transmis par un message à Sa Majesté Impériale.

Les président et secrétaires:

FRANÇOIS (DE NEUFCHATEAU), président.
CANCLAUX et DEPÈRE, secrétaires.

Le Sénat conservateur, réuni au nombre de membres prescrit par l'article 90 de l'acte des constitutions de l'an VIII,

Vu le projet de sénatus-consulte rédigé en la forme prescrite par l'article 57 de l'acte des constitutions, en date du 16 thermidor an X ;

Après avoir entendu, sur les motifs dudit projet, les orateurs du conseil d'Etat et le rapport de sa commission spéciale, nommée dans la séance du 15 de ce mois;

L'adoption ayant été délibérée au nombre de voix prescrit par l'article 56 de l'acte des constitutions, en date du 16 thermidor an X,

Décrète ce qui suit :

Art. 1er. L'Empereur, sur la demande d'un sénateur titulaire d'une sénatorerie, pourra le faire passer à une autre sénatorerie dont le titulaire sera décédé.

Art. 2. La sénatorerie, devenue vacante par la translation, cera conférée dans les formes prescrites par les constitutions de l'empire.

Art. 3. Le présem natus-consulte sera transmis par un message à Sa Majesté Impériale.

Les président et secrétaires :
FRANÇOIS (DE NEUFCHATEAU), président.
CANCLAUX et DEPÈRE, secrétaires.

CORPS LÉGISLATIF.
PRÉSIDENCE DE M. FONTANES.

Séance du 21 mars 1806.

Le procès-verbal de la séance d'hier est adopté. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à la taxe pour les réparations et re construction du port de Puer.

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