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que son enfouissement, époque où les arts du dessin brillaient du plus vif éclat : nous devons convenir, toutefois, que les incrustations d'argent qui ornent la statue, et se font particulièrement remarquer dans les yeux, s'éloignant déjà de la simplicité antique, s'opposent à ce que nous reculions beaucoup l'époque où elle fut coulée.

Une circonstance digne de remarque, c'est que, dans le même coffre et pêle-mêle avec les médailles, on a trouvé, entre autres débris d'animaux, des défenses de sanglier. Ce trésor appartenait-il à un chasseur, qui avait offert à la divinité familière qui protégeait ses plaisirs, quelques nobles débris des animaux qu'il avait tués ? ou à quelque autre adorateur de la déesse, qui avait enfoui auprès d'elle les restes des sacrifices qu'il lui avait offerts? C'est ce que nous ne pouvons décider.

La statue n'était pas fixée sur un piedestal : les pieds sont intacts, et n'offrent aucune trace de soudure ou attache quelconque ; leur surface inférieure est lisse et calculée de manière que, placée debout sur un plan bien dressé, la statue se tient seule, sans qu'on puisse apercevoir dans sa pose rien qui soit contraire aux lois de l'équilibre et du dessin : cette particularité ne peut être dûe au hasard. Devons-nous lui attribuer une origine religieuse? Est-elle le résultat d'une fantaisie d'artiste, ou a-t-on voulu rendre moins lourd un objet destiné à être transporté en voyage ?

La fonte de la statue est fort bonne; il y avait cependant des soufflures, qu'on a corrigées au moyen de pièces encastrées avec soin. Ces pièces, soudées d'abord, puis ciselées avec beaucoup d'art, sont parfaitement dissimulées, et n'ôtent rien au charme de la statue. Les extrémités des mains ont malheureusement souffert; quelques incrustations d'argent n'existent plus.

MARCEL CANAT,

Conservateur de la Société

NOTA.

Nous apprenons que la statuette dont il est ici question, fait maintenant partie des collections de la Bibliothèque royale.

SUR L'EGLISE DE SAINT-DEZERT,

SES FORTIFICATIONS,

ET LES PEINTURES MURALES DÉCOUVERTES DANS UNE DE SES

CHAPELLES.

HISTOIRE.

Saint-Dezert' est un village pittoresque, assis au pied de la montagne, à l'entrée d'un riant vallon, et que son église, monument de peu d'apparence, domine et annonce au loin. C'est à la description de ce monument ignoré qu'est consacrée cette notice.

1 Saint-Dezert, village du département de Saône-et-Loire, arrondissement de Chalon-sur-Saône, canton de Givry.-En 1734, du diocèse, bailliage et recette de Chalon-sur-Saône, de l'archiprêtré de Jambles et de la justice du Chapitre de St-Vincent de Chalon-sur-Saône. En 1662, la prévôté de Buxy y tenait ses séances une moitié de l'année. Dans les anciens titres, il est souvent nommé Saint-Isidore ou Isidoire, Saint sous le patronage duquel l'église fut dédiée. Dezert serait-il un dérivé d'Isidore? Il est aussi nommé Saint-Serre, Saint-de-Serre, SaintDeserre, et définitivement Saint-Dezert.

L'extérieur de cette église est laid et monotone, et n'offre de curieux que la disposition de la façade. (Alb. Pl. XVII, nos 1 et 2). Celle-ci est flanquée de deux tours militaires, et sa porte centrale est surmontée de corbeaux et machicoulis d'un aspect singulier, qui donnent au monument un air guerrier, peu en rapport avec sa destination pieuse. L'esplanade qui l'entoure est adossée, du côté du midi, aux premières pentes de la colline, et se termine, au nord, par un escarpement qui domine le village et la vallée. De hauts murs l'entouraient. Quelques débris de muraille et la façade de l'église, voilà tout ce qui reste aujourd'hui d'un système de fortifications auquel rien ne manquait : tours élevées, créneaux, porte solide et fossés profonds. Aussi pouvait-on dire de cette église ce que St-Julien de Balleurre disait de l'abbaye de Tournus, que « la dicte abbaye semblait plutôt un «< chasteau ou une cytadelle qu'une religion '.»

Ces curieuses fortifications ont leur histoire comme les plus puissants châteaux, mais les commencements en sont obscurs. Tout ce que nous savons, c'est qu'en 1462, si ces murailles n'existaient pas ou étaient ruinées, du moins les habitants avaient-ils le droit de les élever; car, cette année, le maréchal Thibaut de Neuchâtel, grand bailli de Bourgogne, leur octroya des lettres portant privilége de fortifier l'église, et contenant, entre autres expressions remarquables, celles-ci :

1 Origine des Bourgongnons.

>> Que de si longtemps qu'il n'est mémoire du contraire, » l'église de Saint-Serre a été fortifiée pour servir de >> retraite aux manants durant les guerres et éminents » périls, durant lesquels on voit qu'ils désertèrent l'en» droit. » Ce vieux titre semble rappeler de récents malheurs; en effet, la contrée frémissait encore au souvenir des ravages causés par les écorcheurs et les tard-venus, sous la conduite de Gille de St-Simon, et par les déplorables guerres de la démence de Charles VI: on sentait le besoin de se créer des refuges contre l'avidité des gens de guerre, et il n'est pas étonnant que les manants de Saint-Serre aient alors songé à relever leurs vieux murs.

Pendant les démêlés de Charles-le-Téméraire avec Louis XI, la Bourgogne eut encore beaucoup à souffrir des excursions des bandes armées; mais nos pays furent alors protégés par leur éloignement des frontières. Après la mort du duc, la guerre de la succession de Bourgogne effraya encore la contrée, mais fut de courte durée; cette guerre finie, le pays respira, et alors commença une longue période de tranquillité, qui ne cessa qu'à l'époque des guerres de religion.

En 1562, Chalon-sur-Saône tombait au pouvoir des huguenots, voyait ses monuments détruits, ses églises pillées, et déplorait la chute de l'antique abbaye de Saint-Pierre, qui ne devait pas, comme ses sœurs, renaître de ses ruines. Toute la contrée subit alors le même sort : en 1567, la ville de Saint-Gengoux, voi

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