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à perpétuité et à partir de leur décès, quelques messes par semaine, par mois ou par an, quelques services ou autres prières, ils donnaient aux églises tantôt des immeubles, tantôt des sommes qui d'ordinaire servaient à former des constituts, tantôt aussi des rentes sur des immeubles. Avec les siècles, ces fondations devinrent si nombreuses que les recteurs avec leurs seuls curés se trouvèrent insuffisants pour les desservir. Le plus souvent, il ne manquait pas de prêtres sur chaque paroisse pour y suppléer; mais ces ecclésiastiques, libres de se déplacer et aspirant à des positions stables, pouvaient faire défaut. Pour les attacher à la paroisse, il fallait autre chose que ces conditions précaires. On obvia à ces inconvénients par l'établissement des susdites communautés. Une fois constituées, elles eurent une existence légale et devinrent aptes à posséder, acquérir et aliéner. Les produits des biens formant leurs dotations étaient mis en commun et ensuite distribués entre les membres qui en faisaient partie. A l'origine, le nombre de ces membres se fixa sur les obligations à remplir et sur la position qui pouvait leur être faite. Ordinairement c'était des prêtres originaires de la paroisse, et presque partout ce privilége leur était attribué. Cette condition seule ne suffisait cependant point. Les membres des communautés de prêtres étaient nommés tantôt par les communautés de ville, tantôt par des corporations particulières. Ainsi à Pontivy et à SaintGilles-Hennebont, la ville donnait les places vacantes de ces communautés, tandis qu'à Saint-Patern et Saint-Michel, de Vannes, ces places étaient, pour la première de ces paroisses, à la nomination de l'abbé de la confrairie de Notre-Dame de la Chandeleur, et, pour la seconde, au choix de l'abbé de la confrairie des Trépassés desservie dans la chapelle de Saint-Michel, et plus tard dans celle des Lices. Ce droit était une conséquence et une réserve des fondations de ces communautés. Dans la suite, les fondateurs accordèrent la présentation aux recteurs ou aux vicaires perpétuels, comme c'était naturel, mais ils ne se dessaisirent jamais de la nomination.

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Les chapellenies sont de véritables bénéfices simples, c'est-à-dire sans charge d'âmes, et dont l'origine remonte aux premiers siècles de l'Église. Trois éléments les constituent un service religieux, une dotation temporelle et l'érection canonique par décret épiscopal. Elles sont : 1o séculières ou régulières, suivant qu'elles peuvent être conférées à des ecclésiastiques séculiers ou réguliers; 2° sacerdotales ou cléricales, suivant que leurs titulaires doivent être prêtres ou qu'il leur suffise d'être simples clercs. Il ne sera question ici que des chapellenies séculières, sacerdotales et cléricales; les autres appartiennent à l'ordre monastique.

en

La dévotion ou la charité, souvent ces deux causes réunies présidaient à la fondation de ces bénéfices. Pour s'assurer à perpétuité, dans des églises ou chapelles et à des autels déterminés, un certain nombre de messes par semaine ou par mois et à des jours ordinairement désignés, pour offrir, parfois aussi, à de pauvres ecclésiastiques des moyens d'existence, des personnes généreuses et douées des biens de la terre, le plus souvent des prêtres, consacraient à Dieu une partie de leur fortune. Pour être plus facilement compris et embrasser les cas les plus fréquents, je prends, comme exemple, une pareille fondation faite par un prêtre. Après avoir passé sa vie dans le saint ministère et avoir, par de sages économies, assuré à ses vieux jours une honnête existence, un vénérable ecclésiastique, quoique chargé de mérites déjà, voulait encore prévoir les besoins possibles de son âme dans la vie future, et laisser au service de l'autel ce que l'autel lui avait procuré. Avec le temps, il avait acquis une maison, petite et convenable, un jardin, quelques parcelles de terre et de prairie. En consacrant à Dieu ces immeubles, il fournissait les premiers et plus essentiels moyens d'existence à un pauvre et jeune confrère, auquel il demandait, retour, quelques messes à l'autel de sa prédilection dans son église paroissiale, peut-être à celui sur lequel il avait eu le bonheur d'offrir, pour la première fois, le saint sacrifice, et auquel il était demeuré fidèle le reste de sa vie. Un notaire dressait l'acte de cette consécration et y consignait soigneusement toutes les intentions du pieux fondateur. Ce document, appelé acte de fondation, indiquait les charges et la dotation du bénéfice, les conditions que devraient remplir les titulaires successifs, le patron auquel était réservée la présentation, et enfin le collateur qui était l'Évêque prié d'émettre son décret d'érection. A partir de l'édit du mois d'août 1749, il fallait des lettres-patentes et les faire enregistrer au Parlement. Ordinairement le premier titulaire était présenté par le fondateur lui-même. Le décret épiscopal donnait l'existence canonique au bénéfice, et des provisions ne tardaient pas à lui fournir un titulaire, à créer un chapelain. Muni de toutes ces pièces, ce dernier se faisait induire en possession par un notaire et jouissait de la susdite dotation, jusqu'à la fin de ses jours, s'il était fidèle à acquitter les charges de la fondation ou ne résignait son bénéfice, soit simplement, soit en faveur d'autrui. Les résignations des chapellenies étaient assez fréquentes et avaient pour cause la charité. Un chapelain, parvenu à un bénéfice plus important et à une position suffisante, cédait ses droits à un jeune confrère dans le besoin, le plus souvent à un clerc qui, à défaut de patrimoine, y trouvait le titre clérical requis pour l'élévation au sousdiaconat.

Les siècles virent se multiplier ces pieuses fondations dans presque toutes les paroisses, et c'est ce qui explique la présence partout d'un clergé dont le nombre nous étonne aujourd'hui. Sauf les cas assez

rares et consignés dans les actes de fondation, les chapelains n'étaient pas plus tenus à la résidence qu'à desservir personnellement ces béněfices; ils pouvaient en faire acquitter, à leurs frais, les charges par d'autres prêtres; ils le devaient même, lorsqu'ils n'avaient point encore été élevés au sacerdoce. Ce n'était cependant pas tout. A côté des chapellenies, il y avait des prestimonies, qui n'en différaient que par l'absence du décret d'érection et des provisions délivrées par l'Ordinaire. C'est dire assez que ces dernières ne constituaient pas de véritables bénéfices, mais seulement des fondations pieuses. Elles pouvaient néanmoins servir de titre clérical.

IV.

Titulaires des Églises et patrons des paroisses.

Le titulaire d'une église est la personne divine, le mystère ou le saint en l'honneur duquel elle est dédiée à Dieu. C'est lui qui lui donne son nom. Il est choisi par les fondateurs de l'église ou par les paroissiens à la pose de la première pierre, et établi par l'Évêque à la bénédiction ou à la consécration de l'église. Institué de la sorte, il ne peut plus être changé sans l'autorisation du Souverain Pontife. Il reste attaché à une église polluée et qui n'a besoin que d'une réconciliation; mais il se pert, si l'église est profanée ou détruite de façon à exiger une nouvelle bénédiction ou une nouvelle consécration. Une même église peut avoir deux, titulaires un principal et un secondaire. Ces deux titulaires peuvent même avoir le même rang per modum unius, ainsi que se rencontrent souvent saint Pierre et saint Paul, saint Gervais et saint Protais, saint Cyr et sainte Julitte, dont aucun n'est secondaire. La fête du titulaire, lorsqu'il est unique, du titulaire principal, lorsqu'il y en a deux, et de chacun des titulaires per modum unius, est du rit double de première classe et avec oclave pour l'office canonial et les ecclésiastiques attachés à cette église, mais non de précepte pour les paroissiens; tandis que celle du titulaire secondaire n'est que double majeure ou mineure et sans octave. Cette fète se célèbre au jour assigné par la liturgie ou, si la liturgie ne l'assigne pas, à celui qu'indique le martyrologe romain. Lorsqu'une église a pour titulaire le Saint-Sauveur ou la sainte Vierge, sans autre désignation, la fête est celle de la Transfiguration, le 6 août, ou de l'Assomption, le 15 du même mois. Les chapelles ont aussi des titulaires.

Le patron d'une localité ne peut être qu'une créature: un ange ou un saint, puisque le mot patron réveille l'idée d'intermédiaire entre les hommes et Dieu. Il en résulte que tout patron peut être titulaire d'une église, mais non vice versa. Le plus souvent, ce titulaire est aussi patron de la paroisse. Il y a cependant des exceptions nécessaires. Tel est le cas de la paroisse de Saint-Goustan, d'Auray; l'église est sous le vocable du Saint-Sauveur, tandis que la paroisse a pour patron le saint dont elle

porte le nom. Sous peine de nullité, le patron doit être élu par les paroissiens en assemblée générale, d'accord avec l'Évêque diocésain et le clergé paroissial, et l'élection approuvée par la Congrégation des Rites. C'est ainsi que l'a prescrit un décret de cette Congrégation, promulgué par le Pape Urbain VIII, le 23 mars 1630. Les patrons établis avant cette époque et auxquels on avait de temps immémorial reconnu cette qualité, furent considérés comme légitimes, malgré l'impossibilité d'en prouver l'élection. Une paroisse peut aussi avoir deux patrons un principal et un secondaire, ou d'égale dignité et per modum unius, comme les titulaires. Le patron secondaire doit être lui-même élu et approuvé de la même façon que le principal. Une fois régulièrement établis, les patrons ne peuvent plus être changés qu'avec l'autorisation du Souverain Pontife. Leurs fètes se célèbrent aux jours désignés par la liturgie ou par le martyrologe romain, ou par l'usage des temps anciens. Celle du patron principal est de 1re classe avec octave, et, autrefois, de précepte pour les paroissiens. Dans le cas de deux patrons égaux, les deux fêtes sont pareillement de 1re classe et avec octave, mais une seule était de précepte.

Comme mon travail n'embrasse que l'ancien diocèse de Vannes et s'arrête à 1790, je ne m'occupe que des titulaires des églises et des patrons des paroisses dans ces temps passés. Je les ai recherchés avec soin et consignés ici. Dire le sort qui leur fut fait par la bulle de Pie VII du 29 novembre 1801 et le décret du Cardinal Légat du 9 avril 1802; si tous furent alors éteints et supprimés; si les changements opérés furent légitimes, ce serait sortir du cadre que je me suis tracé et toucher à une question encore controversée.

V. Dimes, prémices, neûmes, oblations.

La dime, dont il s'agit, était une portion des fruits de la terre, non nécessairement la dixième, bien que ce nom l'indique, mais cette portion fut ainsi appelée, parce que le droit de dîme s'était introduit dans l'Église à l'imitation de ce qui se pratiquait, sous la loi mosaïque, en faveur des Lévites. On distinguait plusieurs sortes de dimes: l'ecclésiastique, l'inféodée, la féodale, le champart ou terrage. La première était due aux ministres de l'Église. Les dimes inféodées, ecclésiastiques dans leur principe, prirent ce nom qui exprime leur passage, à titre de fiefs, en des mains laïques, et pouvaient être, en la même qualité, possédées par des ecclésiastiques, mais non à titre de bénéfices. Ce passage avait eu lieu avant le concile de Latran qui, en 1179, le constate et le blâme, sans toutefois obliger les détenteurs de ces dimes à les restituer. La dîme féodale était celle que le vassal payait au seigneur qui avait afféagé son domaine à cette condition. Le champart ou terrage était une espèce de dîme purement foncière, stipulée, à l'afféagement de son domaine,

par un propriétaire qui n'avait point de princiqe de fief. Nous n'avons à nous occuper que des dimes ecclésiastiques.

Elles se divisaient en personnelles, qui se levaient sur les produits de l'industrie humaine; réelles ou prédiales, qui se percevaient sur les fruits de la terre; mixtes, qui s'imposaient aux produits dûs simultanément à la terre et aux soins de l'homme; tels étaient les animaux. En Bretagne, on ne connaissait que les dimes réelles avec les mixtes, mais celles-ci sur les agneaux seulement. Les dîmes prédiales se subdivisaient elles-mêmes en grosses, vertes et menues. Les grosses étaient celles qui se levaient sur le froment et le seigle; les vertes étaient celles des lins, chanvres, etc.; les menues, dites aussi dimes de charnage, n'avaient dieu que sur les animaux et se confondaient ainsi avec les dîmes mixtes. Dans ce pays, la dénomination de menues dimes s'appliquait également aux dîmes vertes, et ces deux dernières sortes faisaient partie des dimes locales, auxquelles étaient sujettes, en certains lieux, les espèces de grains et de produits exemptes de la grosse dime, appelée aussi alors et par oppositien díme de droit, parce qu'elle avait cours sur toute terre qui ne s'en trouvait affranchie par un titre spécial. Ces dîmes locales ou d'usage, payées dans certaines paroisses et non dans d'autres ou à des quotités différentes, étaient celles de l'avoine, de l'orge, du blé-noir, du raisin, du sel, des pommes, des légumes, de la laine. Enfin, les dîmes se divisaient encore en anciennes et novales, suivant que la terre, sur laquelle elles se levaient, était cultivée de temps immémorial ou avait été récemment défrichée.

Ceux qui avaient le droit de percevoir la grosse dime portaient naturellement le nom de gros décimateurs; les autres n'étaient que de simples décimateurs, à l'exception de ceux qui ne jouissaient que des novales et qui, en conséquence, s'appelaient décimateurs novalistes. On nommait dimeurs ou collecteurs ceux que les décimateurs chargeaient de recueillir leurs dimes. La quotité de la dime déterminait la portion des fruits à laquelle avait droit un décimateur; elle était très variable: ici, à la 6o, 8e, 12 gerbe; là, à la 20o, à la 30o, etc. A défaut de concordat entre les décimateurs et les paroissiens, elle était fixée par l'usage de chaque localité. Quoique de droit et jusqu'à l'édit de mai 1768, la quotité des novales ne fût pas différente de celle des dimes anciennes, dans le but visible de favoriser les défrichements, l'usage de presque toutes les paroisses de ce diocèse la réduisit à la 30° gerbe sur les terres roturières et à la 33 sur les terres nobles. La quotité de la dime de charnage fut fixée à un agneau sur dix et tout autre nombre supérieur, et à un denier tournois par chaque agneau d'une bergerie qui ne comptait pas dix têtes. Dans le premier cas, l'agneau perçu pour la dîme devait être enlevé à l'époque de la Saint-Jean-Baptiste.

L'article 49 de l'ordonnance de Blois, de 1579, prescrivait de payer la dîme sur le champ et en espèce, sans déduire, au profit du décimable,

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