Page images
PDF
EPUB

ble à la jouissance des locataires des propriétés riveraines, dans le sens de l'article 1726 du Code civil.

L'obligation qui incombe au propriétaire d'entretenir la chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée ne s'étend pas à des travaux de reconstruction, même partielle, qui seraient les conséquences de l'abaissement du sol de la rue.

Le cas dans lequel les travaux de cette nature seraient jugés nécessaires doit être assimilé à la destruction partielle par cas fortuit, donnant seulement au locataire le droit de demander, suivant les circonstances, soit la résiliation du bail, soit une diminution de loyer, sans aucun dédommagement (Paris, 21 avril 1868, Gaz. des Trib., 3 juin 1868).

1011. Encore bien que la démolition d'une portion de l'édifice donné à bail ait eu pour motif la vétusté de cette portion, elle constitue, si elle a eu lieu par les ordres de l'autorité publique en vue de l'alignement, une destruction partielle causée par force majeure ou cas fortuit, dans les termes de l'article 1722 du Code civil. En conséquence, le locataire ne peut demander que la diminution du prix du loyer ou la résiliation même du bail; il n'a pas le droit d'exiger que le bailleur fasse les reconstructions nécessaires pour rétablir les lieux loués en même état qu'auparavant (Cass., 10 février 1864, S. 64.2.118).

1011. Lorsque les édifices loués sont détruits en partie par cas fortuit tel qu'un tremblement de terre, le propriétaire n'est tenu qu'à des réparations pour les immeubles qui subsistent et non à la reconstruction de ceux qui ont été détruits. Dans ce cas l'article 1722 du Code civil doit être regardé comme contenant une exception à la règle de l'article 1719 du même Code. Le locataire. a le droit, soit de résilier le bail, soit de réclamer une réduction proportionnelle du prix de location (Alger, 10 juillet 1868, Gaz. des Trib., 22 juillet 1868).

1012. Ce serait un cas de force majeure, pour lequel le bailleur ne devrait aucun dédommagement, que celui où, par l'effet des règlements de voirie, l'autorité aurait ordonné la démolition entière d'une maison sujette à reculement, sauf au propriétaire à reconstruire sur un nouvel alignement. Le locataire serait alors forcé de quitter cette habitation, sans attendre la fin du bail et sans

pouvoir réclamer aucune indemnité pour le dommage qu'il éprouve de cette privation de jouissance. Mais, si l'alignement ne retranchait qu'une partie de la maison, le locataire aurait le choix entre une diminution de loyer et la résiliation du bail (Bordeaux, 4 oct. 1831; D. 32.2.28).

Il en serait autrement si un ordre de la voirie empêchait de réparer un mur qui ne se trouve point à l'alignement, et dont la solidité a été compromise par les travaux du propriétaire lui-même : le fait de ce dernier deviendrait ici la seule cause originaire du préjudice occasionné au locataire qui serait privé d'une portion de la maison (même arrêt). Nous pensons avec M. Troplong, no 216, que le locataire pourrait obtenir, s'il y a lieu, des dommages et intérêts.

Il faudrait appliquer la même règle si l'autorité avait ordonné la démolition de la maison sur les instances du propriétaire lui-même, qui aurait provoqué l'alignement. Dans ce cas, le bailleur devra aussi des dommages et intérêts au preneur (Arrêt précité de la Cour de Bordeaux).

Mais la démolition et la reconstruction du mur de façade d'une maison, ordonnée par l'administration de la voirie, pour cause de vétusté, n'est pas un cas fortuit qui autorise le propriétaire à demander la résiliation du bail. Toutefois le locataire est fondé, dans ce cas, à demander l'indemnité du préjudice résultant d'abord des travaux dont la durée a excédé le temps prescrit par le bail pour le cas de grosses réparations, et ensuite des changements apportés dans les lieux (Paris, 8 mars 1841, Gaz. des Trib., 10 mars 1841).

1013. Les loyers sont des fruits civils qui s'acquièrent jour par jour (art. 586, C. c.) ; ils ne cessent d'être dus que du jour de la perte. Il n'y a lieu à aucun dédommagement, parce que nul n'est responsable d'un cas fortuit (art. 1148, C. c.), sauf stipulation expresse, ou s'il y avait faute de la part du bailleur, ou encore si la perte provenait de vices existant lors du contrat. Au reste, le preneur ne peut demander la résiliation qu'autant que la perte partielle le priverait d'une jouissance suffisante pour son usage; car, s'il lui en reste assez, il n'a droit qu'à une réduction. Remarquez que, quand la perte n'est que partielle, et que cependant elle est assez considérable pour donner lieu à la résiliation du

bail, c'est le preneur seul qui a droit de demander cette résiliation, puisqu'en effet lui seul éprouve un préjudice quant à sa jouissance. Si donc le preneur, désirant rester dans les lieux loués, préfère demander une diminution sur le prix du bail, le bailleur ne peut s'opposer à ce qu'elle lui soit accordée en offrant de résilier le bail; et les juges excéderaient leurs pouvoirs en ordonnant la résiliation contre le veu du preneur. C'est en faveur de ce dernier que l'option entre la résolution du bail et la diminution du prix est établie ; la prononcer malgré lui serait une atteinte portée à ses droits, et une violation de l'article 1722 du Code civil (Cass.,23 juill. 1827, S.-V. 27.1. 490).

Mais si, au lieu de demander la résiliation du bail, le locataire qui est privé, par cas fortuit, d'une partie de la chose louée, prend le parti de rester, peut-il exiger que le bailleur remette les lieux en état ? Voyez, pour la solution de cette question, no 319.

1014. Le bail cesse aussi par le mutuel consentement des parties; sauf les droits des tiers, par exemple, ceux du sous-locataire dont le bail aurait acquis date certaine au moment de la convention de résiliation.

1015. La preuve de la résiliation verbale d'un bail à loyer non écrit résulte suffisamment de l'acceptation sans protestation ni réserve par le bailleur des clefs des lieux loués à l'expiration d'une période déterminée; cette acceptation le rend irrecevable à prétendre ultérieurement à la continuation du bail pour cause de défaut de congé (Trib. de paix de Lille, 4° arrond., 24 mai 1893, Moniteur des juges de paix, 1894, p. 72).

1016. La résiliation d'un bail peut être prouvée par témoins, s'il existe un commencement de preuve par écril (Pau, 21 mars 1893, Sirey, 93.1.168).

1017. La règle de l'article 1715 du Code civil d'après laquelle la preuve d'une convention de bail ne peut être faite que par écrit, s'applique également à la preuve d'une convention de résiliation de bail.

Cette règle doit être entendue en ce sens que la preuve testimoniale n'est admissible, en pareille matière, qu'appuyée d'un commencement de preuve par écrit (Orléans, 8 janvier 1886, Gaz. Pal., 25 avril 1886).

1018. La résiliation d'un bail peut être tacite et la preuve de cette résiliation résulte suffisamment des circonstances d'où l'on peut induire avec certitude la volonté des parties. Spécialement, lorsqu'un bailleur, après avoir obtenu une ordonnance de référé l'autorisant à expulser le locataire pour défaut de paiement de loyers, a procédé à cette expulsion et a repris possession des lieux loués, sans que le locataire ait demandé à y rentrer, le bail doit être considéré comme ayant été résilié d'un commun accord entre les parties (Paris, 22 novembre 1897, Sirey, 98.2.243).

1019. La résiliation verbale d'un bail offre l'inconvénient de ne pouvoir être prouvée par témoins; il est préférable de faire une résiliation écrite qui peut être libellée dans les formes suivantes, soit à la suite du bail s'il y en a un, soit par acte séparé sur papier timbré :

Modèle de résiliation amiable.

Entre les soussignés, M.... d'une part, et M...., d'autre part,
A été convenu et arrêté ce qui suit:

Les parties déclarent résilier purement et simplement, à partir de ce jour, le bail consenti par M. . . . . à M. . . . . d'une maison ou d'un appartement sis à (s'il y a bail écrit on ajoute: suivant acte, en

date du. . . . .).

En conséquence, le preneur devra vider les lieux le. ... à midi au plus tard, en se conformant à toutes les obligations imposées par la loi aux locataires en général (s'il y a bail on ajoute et à celles prévues par le bail).

[ocr errors]

Cette résiliation est faite moyennant une somme de que M. devra payer à M. . . . et en outre aux conditions et charges sui

vantes.

(Enoncer ici toutes les conditions de la résiliation.)

Fait double à.

le..

Signature des deux parties.

1020. Le bail finit également par la consolidation, c'est-à-dire par la réunion dans la même personne de la qualité de proprié. taire ou d'usufruitier et celle de locataire; soit que le locataire hérite du propriétaire, soit que le propriétaire hérite du locataire. Mais le contrat de louage n'est point résolu par la mort du bailleur, ni par celle du preneur (C. c., art. 1742). On est censé ici, comme en général, avoir traité pour soi et pour ses héritiers (Arg. de l'art. 1122, C. c.).

Cependant les parties peuvent stipuler dans le bail qu'il prendra fin par la mort, soit du bailleur, soit du preneur, ou par la mort de l'un ou de l'autre.

1021. Autrefois, on décidait que quand le bail n'était pas fait pour un temps déterminé, mais pour durer tant qu'il plairait au bailleur, il finissait par la mort de celui-ci, et qu'il cessait aussi par la mort du locataire, s'il avait été fait pour durer à son plaisir et volonté (Despeisses, Du louage, titre II, section V, nos 19 et 20; Pothier, Du louage, no 317). Ces clauses sont aujourd'hui d'un usage peu fréquent. Cependant, si les parties avaient jugé à propos de s'en servir, nous pensons qu'il faudrait les entendre dans le sens donné ci-dessus, et leur attribuer le même effet; car, dans les conventions, on doit rechercher quelle a été la commune intention des parties (C. c., art. 1156), et comme celle-ci n'a rien d'illicite, elle peut donc être fidèlement exécutée. Toutefois, on devra observer, quant à la sortie des lieux, les délais ordinaires pour donner le congé. Telle est aussi l'opinion de MM. Duvergier (t. III, no 517) et Troplong (n° 471). Au reste, un arrêt de la Cour de Paris, 3 ch., 20 juillet 1840, a décidé dans le même sens (P. 40.2.213).

1022. Est valable la clause par laquelle il est stipulé dans le bail que le locataire pourra rester indéfiniment dans les lieux, à moins qu'il ne convienne au propriétaire de les reprendre pour les occuper lui-même. Si donc le locataire, par suite du congé à lui signifié a quitté les lieux, et que le propriétaire sans les occuper personnellement les annonce à louer au moyen de l'écriteau d'usage, cette infraction à la clause du bail peut donner lieu à des dommages et intérêts contre le propriétaire (Trib. de la Seine, 28 fév. 1862 (1), Gaz. des Trib., 5 mars 1862).

1023. Si le bailleur vend la chose louée, l'acquéreur ne peut expulser le fermier ou le locataire qui a bail authentique, ou dont la date est certaine, à moins qu'il ne se soit réservé ce droit par le contrat de bail (C. c., art. 1743) (2). Cet article a abrogé les

(1) Dans l'espèce une somme de 3.000 fr. fut accordée au locataire à titre de dommages et intérêts.

(2) Quelques auteurs soutiennent que l'innovation introduite par les dispositions de cet article a eu pour résultat de changer la nature du droit du preneu

« PreviousContinue »