Page images
PDF
EPUB

a eu l'évesché de la ville despuis peu de temps, lequel est proche parent et toutallement affecté au susdict sieur de Bussy.

Et, d'aultant que le prêcheur Protasius gagé par son devantier évesque y rend les affères de Sa Majesté grandement incommodes, ses salaires accostumés luy hont esté incontinent déniés par le dit évêque si présent estably 1.

3

Pour à quoy pourvoir, le sieur de la Vacherie' et aultres de la ditte ville s'estans mis en debvoir de faire quelque cuylete de deniers pour l'entretènement du dit Protasius prêcheur, le dit Se Solenne et madame de la Trinité tante du dit sieur de Bussy les ont querellés là-dessus. Despuis la querelle du dit S Solenne et du descédé lyeutenant, les huguenaulx de la ditte ville luy estions fort mal affectionnés, pour à quoy remédier, il a faict venir diverses fois le s' de S' Gelais dans sa maison au dit Poytiers, qui a tout accommodé, estant souvent visité des dits rebelles, en dangier que tous ensamble n'ayent comploté quelque sinistre affère.

5

La Coste Mésières se vient tenir en la maison du feu lyeutenant, au dict Poytiers. Il a espousé sa femme pour fortifier les intentions du dict S" Solenne raliant peu à peu soubz sa faction les amys du dit feu lyeutenant avec plusieurs aultres qu'il y a.

La nuict, La Salle Montmorillon qui a du bien d'amis et de parents dans la ditte ville, commence à y aller complotant de mesmes que les aultres.

Le dit Ste Solenne s'en va souvent par les boutiques

1. Porthaise avait sans doute été puni pour avoir prêché sans l'autorisation épiscopale. Il devint bientôt le favori de Saint-Belin qui le logea à l'évêché. (Ouvré, La Ligue à Poitiers.)

2. René Mouraud de la Vacherie, conseiller assesseur au présidial, maire en 1578-1579.

3. Françoise de Rohan.

4. Jean de la Haye.

5. Louis de Saint-Gelais-Lusignan.

6. Jean de la Rye, sgr de la Coste-Mésière, avait épousé Marię Cathus, veuve de Jean de la Haye.

du dit Poytiers marchander des estoffes, treuvant par là moyen de parler des douhannes des Ytaliens, disant que mon dit seigneur a bien délibéré de y donner hordre.

1

Le sieur de Bussy estant assuré d'Angiers et de Bourges, le sieur de Drou qui en est gouverneur en absence du sieur de la Chastre, tenant la ditte place à serment de luy et non du dit La Châtre, tâche de mesme par moyen du dit Se Solenne, madame de la Trinité, sa tante, La Coste Mésières et La Salle Montmorillon, de s'asseurer aussy du dict Poytiers.

Et, à cause que sur ung commencement de guerre il y pourroit venir divers accidentz qui luy pourroient troubler l'entreprinse de la dicte ville, il a tâché sependent pour plus grande seurté de fère qu'en temps de nécessité, Sa ditte Majesté, par amour, par craincte ou par mescontentement, n'y treuve poinct ung homme à sa dévotion. Et quant au château de la dicte ville, les soldats qui y sont dépendent plus du visconte de la Guierche que non poinct de son beau père le sieur de Boisseguin.

5

Le sieur de Puguilon qui est cappitaine en chef du chasteau de la ditte ville, congnoyssant le dangier d'icelle, y est allé exprès pour vandre la ditte capitainerie, laquelle est marchandée du sieur de Royan, on ne sait à quelle fin et de madame la duchesse de Rouhannois, pour son fils'.

1. Gouverneur du château d'Angers.

2. Jean de Chamborant, écuyer, sgr de Droux, ligueur battu par Abain à Chauvigny vers le 11 juin 1585.

3. Claude de la Chastre, gouverneur du Berry.

4. Françoise de Rohan."

5. Georges de Villequier, gouverneur de la Marche, révoqué en mai 1589, gouverneur de Poitiers pour la Ligue, tué au passage de la Vienne près du château d'Ile en 1592.

6. Jean Jay, sr de Boisseguin, gouverneur de Poitiers depuis 1568 et du château depuis octobre 1577, mort le 8 octobre 1592.

7. Gilbert de là Trémoille, marquis de Royan, grand sénéchal du Poitou en 1586, mort en 1603, fils de Georges de la Trémoille, gou verneur du château de Poitiers, mort en 1584.

8. Louis Gouffier, duc de Roannez, fils de Gilbert duc de Roannez et de Jeanne de Cossé, né le 25 février 1575.

Ceste capitainerie comprend l'estat de sénéchal et metre des eaulx et forestz, ce qui doibt donner à pencer à Sa Majesté aux fins qu'elle ne tumbe en mein suspecte. La Coste Mésières, de nouveau, s'y est mis après.

La dicte ville n'est point de moindre pois que Lyon pour avoir ung gouverneur bien fiable qui fera beaucoup, quand ce ne sera que fere contrequarre à l'autorité du dit Ste Solenne qui n'a aulcun esgal, sy ce n'est que de bien loing, dans la ditte place. Il seroit besoing que Sa Majesté mit un gentilhomme bien fiable pour commander au dit chasteau en la place du sieur de Boisséguin qui, à cause de son eage et travail que luy donne le dit chasteau, sera bien ayse d'en retirer seulement la rente, sy mieulx ne luy semble le remettre ès meins des sitoyens, comme ils en font très instante requeste.

Le mayre de la ditte ville se fera dans peu de jours, sur quoy il importe grandement pour les affères de Sa Majesté que ce soit quelque homme de cœur bien affectionné à son service et ennemy du dit Ste Solenne, pour lequel faict, je luy en nomme trois, assavoir : Palustre, trésaurier de France', Vidar procureur de la ditte ville et La Brueille advocat. Et quant à ces deux premiers, ilz sont en ceste ville.

1. Jean Palustre, s' de Montifaut, trésorier de France de 1576 à 1594, maire de Poitiers en 1560 et en 1589 pour terminer l'année majorale de Joseph Le Bascle, décédé, et membre du conseil de la Ligue à Poitiers.

2. Jean Bernegoyau ou Bernegoue, écuyer, s' de la Breuilhe, enquêteur en Poitou en 1562, échevin de Poitiers en 1564, gouverneur du château en 1575. (Dict. hist. des fam. du Poitou, 2 éd., I, 478.) ́ C'est lui qui est l'auteur de la lettre au roi, du 29 juillet 1562, reproduite ci-dessus, p. 62. Plus tard, en mars 1580, il fut chargé d'une mission à Paris pour un procès entre la ville et le chapitre de SaintHilaire. (Reg. 42 des délib.)

3. On voit que Sainte-Soline est classé dans ce rapport, peu antérieur à l'élection de Scévole de Sainte-Marthe, le 1er juillet 1579, parmi les partisans du duc d'Alençon, les politiques ou malcontents, et ce fait pourrait bien n'être pas étranger à son arrestation le 29 novembre 1584.

152.

18 octobre 1579. Lettre de Henri III à M. du Lude. (D'après l'original.)

Monsieur le conte, J'ay esté bien ayse de sçavoir votre arrivée à Poictiers par votre lettre du ш de ce mois et semblablement d'entendre, par le rapport que m'en a faict le conseiller Brulart de la part de sa compaignye1, la bonne assistance que vous leur avez offerte en l'exécution de leur commission', vous asseurant que vous ne me sçauriez faire service qui me soit plus utille et agréable que de vous y randre très soigneux et dilligent pour le bien et soullagement que je espère que mes subgectz recevront de leur allée par delà, mesmement quand leurs ordonnances se verront embrassées et soubtenues par mes principaulx ministres et serviteurs et qu'en cela vous monstrerez l'exemple à ung chacun, car, encores que il semble que la force y feust très nécessaire pour mieulx faire exécuter leurs arrestz, touteffois celle qui accompaigne la justice administrée en toute sincérité est de telle vertu et efficace que je m'en puis promectre beaucoup de fruict, sans qu'elle apporte aucun meslange de jalousye et deffience, sinon à ceulx qui en redoubtent la lumière par leurs maléfices ; touteffois je n'ay laissé de commander à ceulx de mes finances de adviser au payement de votre compaignye affin que j'en puisse estre servy si l'occasion s'en présente et selon les commandemens que je vous en feray. Priant Dieu qu'il vous ayt, Monsieur le conte, en sa sainte garde. Escript à Paris le xvn jour d'octobre 1579. HENry. De NEUFVILLE.

A Monsieur du Ludde, chevalier de mon ordre, gouverneur et mon lieutenant général en Poictou.

1. Nicolas Brulart de Sillery, conseiller au Parlement de Paris. 2. Les Grands Jours de Poitiers en septembre-décembre 1579.

153. - 5 novembre 1579.

Lettre du comte du Lude aux maire

et échevins de Poitiers. (Reg. 42 des délib., p. 859.)

A MESSIEURS LES MAIRE ET ESCHEVINS DE LA VILLE DE

POICTIERS.

Messieurs, Il n'y a celluy de vous qui ne sache les volleryes, brigandaiges, assassinats et violances commises en tout ce pays qui ne juge le grand besoing que le pauvre peuple peult avoyr d'une bonne et ferme justice, laquelle ne se peult faire sans qu'elle soyt appuyée et fortiffyée d'hommes ordonnez et conduictz soubz l'auctorité de quelque personnage d'auctorité et valleur qui puisse vertueusement mectre la main à exécution et ses mandemens deubz et pareillement à ceulx esmanez, tant des juges et officiers constituez au pays, que autres souverains, dont pour cest effect j'ay eu divers advis de supplier le Roy ériger en ceste généralité ung visséneschal général avecques auctorité de commander aux prévostz de ce pays, lieutenans et archers, oultre lesquelz il fust acompagné de quelque nombre d'hommes suffisans pour les exploictz susdictz, stipendiés aux despens du peuple du dit pays qui, à mon advis, l'aura très agréable. Mais, considéré l'importance de cest affaire, je ne l'ay voulu entreprendre sans avoyr la vostre que me ferez entendre au plutost et selon que jugerez la nécessité des affaires présentes la requérir, espérant que, s'il plaist à Sa Majesté favoriser ce pays de telle érection, qu'il sera soulagé et rellevé d'infiniz meurtres, volleryes, brigandages qui règnent ordinairement en icelluy, à la ruyne et foule du pauvre peuple assassiné par la violante vye d'un grand nombre d'hommes résidans en icelluy, desquelz l'extirpassion est nécessaire pour y restablyr chacun en ce qui est sien et y veoir régner la piété et justice en sa première liberté. Sur ce, attendant ung advis, je voys de bon cueur

1. Voir une lettre du roi à M. du Lude, du 25 nov. 1579, relative à la sûreté publique. (Arch. hist. du Poitou, XIV, p. 126.)

« PreviousContinue »