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spéciale et distincte de celle relative au voyage de retour, sont acquis à l'équipage à l'arrivée au port de destination, et doivent, nonobstant la perte du navire pendant le voyage de retour, être pris et déduits sur le fret gagné et réalisé dans le premier voyage, encore bien qu'ils ne fussent payables qu'au retour du navire au lieu de l'armement; car les règlements sur cette matière, purement nautique et de simple police, ne disposent ainsi que pour prévenir la désertion des matelots (trib. de comm. de Marseille, 5 janv. 1830, aff. Signoret et Gazan); 3° Que, de même, lorsque des matelots ayant été engagés pour plusieurs voyages, le navire a péri ou a été pris pendant le dernier voyage, l'armateur est tenu de payer les loyers gagnés dans les voyages antérieurs à celui dans lequel a eu lieu le sinistre (trib. de comm. de Marseille, 11 sept. 1823, aff. Sery; trib. de comm. de Bordeaux, 27 juin 1831, aff. Hugens); 4° Qu'enfin, il n'y a pas perte entière dans le sens de l'art. 258, quand le navire n'a péri corps et biens qu'au retour d'un long voyage comprenant plusieurs expéditions distinctes, qui avaient été effectuées heureusement, et pour chacune desquelles un fret avait été ac⚫quis; et qu'en ce cas, l'équipage ne perd que les loyers du voyage de retour, et non ceux de l'aller et des voyages intermédiaires (Rennes, 1er avr. 1841) (1).

726. C'est seulement en cas de prise ou naufrage avec perte entière du navire et des marchandises, que les gens de l'équipage sont non recevables à prétendre aucun loyer. Si quelque partie du navire est sauvée, les matelots engagés au voyage ou au mois sont payés de leurs loyers échus sur les débris du navire qu'ils ont sauvés. Si les débris ne suffisent pas, ou s'il n'y a que des marchandises sauvées, ils sont payés de leurs loyers subsidiairement sur le fret. C'est ce que décide l'art. 259 c. com., dont la disposition a pour effet d'intéresser les gens de l'équipage à sauver tout ce qu'ils peuvent des débris du navire et des objets du chargement.

727. Cette disposition ne peut être invoquée que par les marins engagés au voyage ou au mois, et non par ceux engagés au fret, qui n'ont, comme on le verra plus bas, aucun droit sur les débris du vaisseau, ni par ceux engagés à la part du profit, qui n'ont rien à prétendre, soit sur ces débris, soit sur le fret des marchandises. Les matelots engagés au voyage ou au mois sont payés de leurs loyers échus, aux termes de l'art. 259, d'abord sur les débris du navire, et subsidiairement seulement sur le fret des marchandises sauvées. Les loyers échus doivent être calculés, pour les marins engagés au mois, d'après le temps qu'ils avaient servi jusqu'au moment du sinistre, et pour ceux engagés au voyage, d'après la portion du voyage qui se trouvait déjà effectuée à ce moment. Quant aux loyers à échoir, ils ne sont nullement dus.

728. Quelques auteurs, notamment Delvincourt, t. 2, p. 243, et Boulay-Paly, t. 2, p. 229, ont conclu de ces expressions de l'art. 259 sur les débris qu'ils ont sauvés, que les matelots qui n'ont pas voulu travailler au sauvetage ne peuvent rien réclamer sur les objets qu'ils n'ont pas concouru à sauver. A l'appui de

(1) (François C. Cornillier.) - LA COUR; Considérant que le navire le Dreux-Brézé, qui avait été armé à Nantes par la maison François aîné et Baudot du Carrey, partit en 1858, sous le commandement du capitaine Cornillier, et arriva heureusement à l'ile Bourbon où il déposa sa cargaison, pour laquelle un fret lui était dù; qu'il fit ensuite un voyage à Pondichery et retour à Bourbon, dans lequel il gagna un second fret, qui, ainsi que le premier, devint, aux termes de l'art. 271 c. com., le gage des loyers de l'équipage; que ce navire ayant fait un nouveau voyage de Bourbon à Pondichéry et Calcutta, repartit de cette derniere ville au mois d'octobre 1839, sans que l'on n'en ait eu aucune nouvelle depuis cette époque; Considérant que le capitaine Cornillier, suites et diligences de son épouse chargée de sa procuration, et l'administration de la marine, ne réclament aucuns loyers pour le second voyage de Bourbon à Pondichery., Calcutta et retour, dans lequel il y a tout lieu de craindre que le navire n'ait péri; qu'ils n'ont fait à ce sujet que des réserves; que l'art. 258 c.com., qui porte que les matelots ne peuvent prétendre aucun loyer en cas de perte entière du navire et des marchandises, ne peut recevoir, en effet, d'application qu'aux loyers dus pour ce dernier voyage, et que les intimés restent ainsi fondés à réclamer les loyers dus antérieurement sur le produit des frets que le navire avait gagnés dans les deux premières traversées ou voyages qu'il avait heureusement effectués; quo le montant de ces frets excede même le prix des loyers de l'équipage pen

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cette opinion, conforme d'ailleurs aux dispositions de l'art. 3 des jugements d'Oléron, de l'art. 44 de la Hanse teutonique, et de l'art. 15 de l'ordonnance de Wisby, on invoque, outre la lettre de l'art. 259, l'esprit dont a été animé le législateur qui a voulu intéresser les matelots au salut du navire et du chargement. Toutefois, Valin, sur l'art. 9, tit. des loyers, lequel était conçu dans les mêmes termes que l'art. 259, estime que, pour priver les matelots restés étrangers au sauvetage de tout droit sur les objets sauvés, il faudrait une disposition plus formelle que ne l'est le texte de la loi. Pothier et M. Dageville, sur l'art. 259, pensent, et c'est aussi notre avis, que les matelots dont il s'agit ne doivent du moins être payés qu'après ceux qui ont concouru au sauvetage. « Ceux des matelots, dit Pothier, qui ont travaillé à sauver quelques effets, ont un privilége avant tous les autres sur les effets qu'ils ont sauvés (Louage des matelots, n° 187).

729. On a vu que si les débris du navire ne suffisent pas, ou s'il n'y a que des marchandises sauvées, les matelots engagés au voyage ou au mois sont payés de leurs loyers subsidiairement sur le fret (259), c'est-à-dire qu'ils ne peuvent attaquer le fret qu'en cas d'insuffisance des débris du vaisseau. Du reste, la circonstance que le fret aurait été payé d'avance et déclaré acquis, n'apporterait, on le sent bien, aucun obstacle à l'exercice du privilége que la loi accorde sans restriction aux matelots.

730. Les matelots engagés au fret sont payés de leurs loyers seulement sur le fret (c. com. 260), lequel forme seul le fonds commun de la société. Leurs droits ne s'étendent point sur les débris du navire. Ils sont payés sur le fret à proportion de celui que le capitaine reçoit (c. com. 260), suivant la quantité des marchandises sauvées et suivant l'avancement du voyage (Delvincourt, t. 2, p. 244 ).

Le capitaine engagé pour voyager à la part ne peut, en cas de naufrage, avoir droit, pour le payement de ses salaires, que sur le fret et non sur le produit du sauvetage du corps et de la cargaison opéré par les soins du consul de France au lieu du char gement. Par suite, si aucun fret n'a été gagné, le capitaine ne peut prétendre à aucun salaire. Dans le même cas de naufrage, le capitaine n'a droit sur les fonds provenant du sauvetage, à l'encontre des assureurs sur corps et facultés, ui à une indemnité pour soins donnés à cette opération, ni à la conduite jusqu'au lieu de l'armement, s'il est reconnu qu'il a prolongé son séjour, au lieu du sauvetage, sans utilité pour les intéressés, et qu'il a négligé de profiter du passage procuré à l'équipage pour retourner au lieu de l'armement (trib. de Marseille, 9 oct. 1853, aff. Lemoine).

731. Quant aux matelots engagés au profit, ils n'ont, comme nous l'avons déjà dit, aucun droit à exercer sur les débris du navire ni sur le fret des marchandises. Hors le cas, peu probable, où les marchandises seraient sauvées et vendues avantageusement, ils n'ont rien à prétendre.

732. De quelque manière que les matelots soient loués, ils sont d'abord payés des journées par eux employées à sauver les débris et les effets naufragés (261), car, par le fait du naufrage,

dant ces deux premières traversées; qu'il importerait peu que le produit de ces frets eût été employé à pourvoir aux frais de la nouvelle cargaison que le navire portait pour le compte de l'opération lorsqu'il a dispare qu'en fùt-il ainsi, il ne pourrait en résulter que l'équipage, qui était payé au mois et qui ne devait pas profiter des bénéfices de l'opération, pût perdre ses droits, parce que les armateurs ou leurs agents dont ils doivent répondre, se seraient servis des fonds qui provenaient de ces frets pour cette opération dont, en cas de succès, les intéressés devaient seuls recueillir les avantages;

Considérant que le capitaine Cornillier n'a formé de demande que pour les loyers qui lui sont dus en cette qualité; que s'il y a lieu de croire qu'il a pris, ainsi qu'il en avait contracté l'engagement, un intérêt sur le navire qu'il commandait, cela n'est cependant pas actuellement prouvé; que la cour n'a pas même à statuer sur cette question; que s'il était en effet intéressé dans l'opération, il se trouvera supporter, dans le payement des loyers qui font l'objet du procès, une part propor tionnelle à son intérêt, lorsque les appelants rendront le compte de l'opé ration, dans lequel ils porteront nécessairement en dépense les loyers qu'ils auront payés; - Par ces motifs, adoptant d'ailleurs ceux des premiers juges, etc.

Du 1er avril 1841.-C. de Rennes, 3° ch.-MM. Legeard, pr.-Massabian, av. gén. c. conf.

DROIT MARITIME.CHAP. 4, SECT. 4.

l'engagement des matelots élant anéanti, les services qu'ils rer dent ultérieurement doivent leur être payés séparément et par privilége (c. civ. 2102). — Le règlement des journées de sauvetage doit être fait conformément à l'arrêté du 17 flor. an 9 et à l'art. 7 de l'arrêté du 5 germ. an 12.

Les frais de sauvetage et de justice sont privilégiés avant tout: Quia salvam fecerunt pignoris causam ( L. 6, D., Qui potiores).

Lorsqu'il y a des marchandises sauvées outre les débris du navire, le prélèvement des frais de justice et de sauvetage se prend par contribution sur la valeur des débris, sur les marchandises sauvées, et sur le fret dû par ces marchandises. En cas d'insuffisance sur les débris, les matelots ne sont payés que sur ce qui reste du fret dont il s'agit, après déduction des frais de justice et de sauvetage (Dageville, 2, 315).

733. Lorsqu'il a été sauvé quelques débris, dont le produit est resté aux mains du consul de France résidant au lieu du naufrage, le matelot qui réclame son payement sur ce produit doit s'adresser au consul plutôt qu'au capitaine et à l'armateur, Paction par lui formée, en ce cas, étant plus réelle que personnelle. C'est du moins ce qu'a décidé un jugement du trib. de Marseille, du 15 fév. 1831, aff. Martin.

734. En cas de naufrage du navire, les marins ont droit à une conduite de retour, sur les fonds provenant dudit navire (L. 5 germ. an 12, art. 7). L'État ne doit débourser les frais de rapatriement qu'autant qu'il y a insuffisance des débris.

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Il a été jugé qu'en cas de naufrage en pays étranger, les frais de retour ou de rapatriement de l'équipage sont à la charge de l'armateur, et qu'en conséquence est obligatoire pour ce dernier l'emprunt à la grosse, contracté par le capitaine pour assurer ce retour (Rouen, 29 déc. 1831, aff. Heurtault, V. no 449). Mais cette décision ne semble pas fondée. Aucune loi ne met à la charge de l'armateur les frais de retour des matelots naufragés, en quelque contrée que le naufrage ait eu lieu. C'est à l'administration qu'est imposé le devoir de rapatrier les marins, sauf à elle à se rembourser, autant qu'il lui est possible, sur les débris sauvés du sinistre; mais nulle action ne lui est ouverte pour ce remboursement contre l'armateur.- Tel est aussi l'avis de Valin (sur les art. 8, 9 et 10, tit. 4, liv. 3 de l'ordonnance de 1681). Ce jurisconsulte regarde comme un principe que l'armateur ne doit pas de conduite en cas de naufrage (à l'étranger ou en France). même doctrine est également enseignée par M. Beaussant, no 292: La « L'administration, dit-il, qui, dans tous les cas, pour toutes les causes, même celle de désertion d'un navire marchand, opère le rapatriement, ne peut, par cela seul, dans tous les cas, pour toutes les causes, même celle de désertion, se faire rembourser par l'armateur; elle pourrait toujours s'adresser au marin qui a reçu le service, mais souvent alors elle se heurterait contre une insolvabilité et manquerait d'ailleurs de générosité. Elle ne peut s'adresser à l'armateur qu'en se présentant comme subrogée aux droits du marin, ou comme ayant agi en qualité de negotiorum gestor; et, dans les deux cas, elle ne peut réclamer la conduite contre l'armateur qu'autant qu'il aurait dû la payer au marin. Elle peut agir, il est vrai, sur les loyers que l'armateur devrait au marin, soit par voie de saisie-arrêt, soit en exerçant les droits du marin son débiteur (c. civ. 1166); mais il faut que l'armateur soit débiteur des loyers. » Ajoutons que, loin de reposer sur aucun texte, l'opinion contraire blesserait les dispositions de la loi qui, pour encourager le commerce maritime, ont voulu que les désastres dont peuvent être frappés les armateurs fussent limités aux objets mêmes qu'ils ont exposés aux chances de la navigation et n'atteignissent point leur fortune de terre.

735. Maladie, mort, captivité ou congé des hommes de mer. - Le matelot est payé de ses loyers, traité et pansé aux dépens du navire, s'il tombe malade pendant le voyage, ou s'il est blessé au service du navire (c. com. 262. Conf. jugem. d'Oléron,

(1) Espèce: (Arrigunaga C. ministre de la marine.)- Arrigunaga, armateur des paquebots de la Havane à Bordeaux, avait déposé à l'nopital de la Havane son cuisinier atteint de paralysie pendant la traversée. L'armateur avait payé les frais de maladie pendant les vingt-sept jours du séjour du navire à la Havane, et au départ, avait consigné la somme nécessaire aux frais de quarante jours. Il considérait toutes ses obligations comme remplies à l'égard du marin malade. Celui-ci resta cent quarantesix jours de plus à l'hôpital de la Havane, et la maladie ayant été recon

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art. 7; Hanse teutonique, art. 45; ord. de Wisby, art. 19; ord.
de 1681, art. 11). C'est là une dérogation au droit commun,
suivant lequel le maître ne doit, à la rigueur, point de loyer pen-
dant la maladie du serviteur ou de l'ouvrier; mais l'intérêt du
commerce maritime exigeait celle dérogation en faveur des
marins.

736. L'art. 262 établit une distinction entre le matelot qui
tombe malade et celui qui est blessé au service du navire. Celui-
ci est traité et pansé aux dépens du vaisseau, soit qu'il ait été
blessé avant le voyage commencé, soit qu'il l'ait été après, dès
qu'il l'a été au service du bâtiment. Le traitement de celui-là
n'est, au contraire, à la charge du navire que lorsque la mala-
die est survenue pendant le voyage; de sorte que le matelot
tombé malade avant le départ, quoique depuis qu'il a été engagé,
ne peut réclamer que le payement des journées par lui employées
au service préparatoire du navire ( Boulay-Paty, t. 2, p. 232).
737. Il y aurait même exception à l'art. 262, pour le marin
faute, et-par exemple de ses débauches ou d'une rixe particulière:
tombé malade durant le voyage, si la maladie provenait de sa
ce serait alors le cas d'appliquer l'art. 264 ci-après.
gon, t. 1, p. 633. Conf. ord. de Wisby, art. 62.
- V. Éméri-

738. Locré prétend, t. 3, p. 172, qu'il faut, pour que la
maladie soit réputée survenue pendant le voyage, qu'elle se soit
déclarée après que le navire a déjà navigué au moins vingt-
quatre heures depuis qu'il a mis à la voile. Mais il nous paraît
difficile de justifier cette opinion rigoureuse.

739. Le commandant du navire doit juger, dans sa prudence,
et d'après l'avis du chirurgien du navire, s'il convient de laisser
de la route à cet effet.-Les capitaines qui laissent dans les
le malade dans quelque lieu de relâche, et s'il faut se détourner
hôpitaux des gens de mer qui ont été débarqués malades, sont
tenus, aux termes de l'arrêté du 5 germ. an 12, de pourvoir aux
soins desdits malades et à la dépense nécessaire pour les mettre
en état de se rendre dans leurs foyers, ou pour fournir, en cas
de mort, à leur sépulture. Ils sont tenus de déposer, à cet effet,
une somme suffisante, ou de donner une caution solvable qui
fait sa soumission: savoir, en France, au bureau de l'inscription
maritime, et, dans l'étranger, à la chancellerie du consulat.
V. au surplus l'ord. du 29 oct. 1853, art. 50.

740. Le matelot laissé malade en pays étranger, quoique
soigné et reconduit chez lui aux frais de l'armateur, a le droit de
réclamer ses loyers comme s'il avait continué le voyage (sen-
tence de l'amirauté de Marseille, 15 mai 1750).

741. Le matelot auquel le capitaine, après la rupture volontaire du voyage en pays étranger, a procuré le passage sur un autre bâtiment, doit être considéré, tant qu'il n'est point arrivé mement. En conséquence, l'armateur est tenu de supporter, au port de destination, comme étant encore au service de l'aroutre les frais de retour, ceux de la maladie survenue au matelot durant la traversée. Il ne peut invoquer, pour se soustraire à cette obligation, un règlement fait avec les gens de son équipage, au lieu de la rupture du voyage, si ce règlement n'a point été dressé en présence de l'administration. Et la même décision devrait être suivie, encore bien que l'ordre de rapatriement par voie de mer, délivré par le consul français, désignât le commissaire maritime du lieu de l'armement comme chargé de payer le prix du passage (trib. de com. de Marseille, 27 juin 1832, aff. Reynier).

742. L'armateur est indéfiniment tenu des frais de traite-
ment des marins atteints, durant le voyage, d'une maladie,
même reconnue incurable; il ne satisfait point à son obligation
le montant de ces frais pour quarante jours (cons. d'Ét., 27 acût
en se bornant à consigner, suivant l'usage de quelques localités,
1839) (1).

743. Le matelot est traité et pansé aux dépens du navire ✔
nue incurable, le consul dirigea le malade sur la France, mais forma op-
position pour 2,190 fr., frais de cent quarante six jours d'hôpital, entre
les mains du ministre de la marine, sur les fonds dont le département de
la marine était débiteur envers Arrigunaga.
ordonne la retenue de la somme avancée par le consul.
Décision du ministre qui

Recours de l'armateur. Il soutient que les obligations imposées à l'ar-
mateur, par l'arrêté du 5 germ. an 12, ne peuvent s'étendre jusqu'au
payement des frais de maladies incurables: « Dans aucun pays, disait-il,

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du chargement, s'il est blessé en combattant contre les ennemis et les pirates (c. com. 263). On comprend, en effet, qu'à la différence du matelot qui est blessé en faisant le service ordinaire qu'exige le bâtiment et dont le traitement doit être à la charge du navire seul, celui qui a reçu une blessure en combattant pour le salut commun du navire et des marchandises, doit être traité et pansé aux dépens tant du chargement que du navire. Peu importe que le matelot ait été blessé en combattant ou en faisant la manoeuvre durant le combat; dans ce second cas, comme dans le premier, les frais occasionnés par sa blessure sont une avarie commune.. - Il n'y a, au surplus, nul motif pour restreindre aux matelots la disposition de l'art. 263; elle doit être étendue, par identité de motifs, aux passagers qui auraient été blessés en combattant les ennemis (Pothier, des Avaries, no 143).

-

744. Mais l'art. 263 n'est applicable qu'autant que le combat dans lequel le matelot a été blessé a procuré le salut du bâtiment et de la cargaison. Dans le cas contraire, le matelot n'a rien à réclamer (Pothier, Louage des matel., no 191; BoulayPaty, t. 2, p. 236).

745. Si le matelot sorti du navire sans autorisation (et par conséquent en contravention à la discipline) est blessé à terre (qu'il y ait ou non de sa faute), les frais de ses pansement et traitement sont à sa charge (c. com. 264), sa blessure, en ce cas, n'ayant point été reçue au service du navire, et étant la suite d'un acte d'insubordination; il peut même (cela est facultatif) être congédié par le capitaine (264), pourvu que ce soit en France, et non en pays étranger (270). Ses loyers, en ce cas, ne lui sont payés qu'à proportion du temps qu'il a servi (264).

746. Il ne faut pas induire de cet article que la faculté pour le capitaine de congédier le matelot, soit subordonnée à la double condition que celui-ci soit descendu à terre sans autorisation, et qu'en outre il y ait été blessé; la première de ces circonstances suffit.

747. Dans le cas où il ne serait pas congédié, mais où sa blessure l'empêcherait pendant longtemps de servir, ses loyers, suivant Delvincourt, ne courraient pas pendant ce temps. On doit supposer, dit cet auteur, que c'est par bienveillance qu'on ne l'a pas congédié. Mais cette solution paraît trop rigoureuse. « C'est sans doute par intérêt pour la navigation, dit BoulayPaty, t. 2, p. 238, qu'il n'a pas été congédié; c'est sous ce même point de vue qu'on ne doit pas le priver momentanément de ses gages. »

748. Valin prétend, sur l'art. 12, tit. des loyers, que le matelot qui, étant descendu à terre, même avec autorisation, y a été blessé, ne doit pas être pansé aux dépens du navire, si ce n'est point au service de celui-ci qu'il a reçu cette blessure. Mais celte solution est justement repoussée par Delvincourt, loc. cit., Locré, sur l'art. 264, Boulay-Paty, t. 2, p. 237,et M. Dageville,t. 2, p. 324. Le matelot qui a été blessé dans des circonstances où il n'était point hors des termes de son devoir, doit évidemment être assimilé à celui qui tombe malade pendant le voyage, alors, bien entendu, que sa blessure n'a point été provoquée par sa faute, et, par exemple, par son état d'ivresse, mais est la suite d'un accident fortuit. D'ailleurs, l'art. 264 appliquant spécialement sa l'armement n'est tenu indéfiniment des frais de traitement ou d'hôpital des gens de l'équipage. La législation des États maritimes de l'Europe limite en général les obligations du patron à l'égard du marin tombé malade à bord au jour où le navire quitte le lieu de débarquement, sauf la continuation des gages de ce marin. L'arrêté du 5 germ. an 12 ne peut pas imposer à l'armateur la charge indéfinie des frais de maladie. Cet arrêté porte que les capitaines.... déposeront une somme suffisante pour les frais de maladie et le retour des matelots dans leurs foyers. Puisqu'il permet une consignation, il autorise l'évaluation, au moment du départ du navire, de la somme à laquelle les frais doivent s'élever, et libère le capitaine, au moyen de la consignation de la somme qui est fixée. Elle consacre donc l'usage généralement admis pour ces évaluations. - Or l'usage est de consigner le prix de quarante journées d'hôpital, et telle est la somme dont ie consul français a imposé la consignation dans l'espèce. I est bien certain que cet agent pensait que le surplus des journées était à la charge de l'État. L'usage est encore attesté par plusieurs certificats qui sont produits au conseil. C'est à la caisse des invalides de la marine à suppléer à l'insuffisance du prix des quarante journées. »—Arrêt. LOUIS-PHILIPPE, etc.; - Vu la décision attaquée ; Vu l'arrêté du

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TOME XVIII.

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exclut

disposition au cas de sortie du navire sans autorisation, l'application que l'on voudrait en faire à d'autres cas. 749. Aux termes de l'ordonnance du 15 mai 1756, les matelots estropiés, même au service des corsaires, ou vaisseaux marchands, sont habiles à obtenir de l'État une demi-solde qui leur est assignée sur les fonds des invalides de la marine.

750. En cas de mort d'un matelot pendant le voyage, si le matelot est engagé au mois, ses loyers (étant acquis jour par jour) sont dus à sa succession jusqu'au jour de son décès (c. com. 265; ord. 1681, tit. des loyers, art. 13), sans qu'on puisse en retrancher ceux qui ont couru durant sa maladie (arg. de l'art. 262).

751. Si le matelot est engagé au voyage, la moitié de ses loyers est due s'il meurt en allant ou au port d'arrivée. Le total de ses loyers est dû s'il meurt en revenant (c. com. 265; ord. 1681, tit. des loyers, art. 13), et cela quand même son décès arriverait presque aussitôt que le navire aurait mis à la voile. Il semble qu'il en devrait être autrement, puisque l'engagement au voyage constitue un forfait. Mais, comme le fait observer Locré, «< ce forfait n'est pas de ceux où rien n'est dû tant que le travail entrepris n'a pas été achevé: il n'a pour objet que d'empêcher le matelot de réclamer une somme plus forte quand le voyage se prolonge, et le propriétaire de lui en donner une moindre quand le voyage s'effectue très-promptement. Le prix du travail fait par le matelot jusqu'à son décès doit donc être payé dans la proportion que le forfait a été par lui exécuté. Le conséquence de tout cela serait de ne donner aux héritiers du matelot qu'une portion du salaire égale à la portion du temps pendant lequel leur auteur a effectivement servi. Rien ne serait plus juste si le matelot, en s'engageant, avait pu évaluer la durée précise du voyage, car alors le salaire convenu eût été réglé exactement sur les services. Mais une telle évaluation était impossible, vu la multiplicité des événements de mer. Et puisque le matelot courait le risque de perdre en cas de prolongation du voyage, il était équitable de compenser cette chance par quelques avantages. C'est pourquoi la loi a décidé qui le voyage serait réputé achevé aussitôt qu'il serait commencé, en divisant toutefois, pour ne pas trop grever le propriétaire, le voyage en deux parties et pour ainsi dire en deux voyages, l'aller et le retour. >>

Il est évident, d'après ce qui vient d'être dit, qu'en cas de décès, pendant la traversée, du matelot engagé au voyage pour l'aller seulement, ou seulement pour le retour, la totalité de ses loyers est due à ses héritiers, le voyage de l'aller ou celui du retour n'étant pas divisible comme celui combiné d'aller et de retour (Pothier, Louage des matelots, no 192; Delvincourt, t. 2, p. 251; M. Dageville, t. 2, p. 327).

Si un marin venait à mourir dans l'intervalle écoulé entre sa location et le départ du navire, ses héritiers ne seraient pas tenus de rendre ce qu'il aurait reçu d'avance, et pourraient même exiger ce qu'il aurait gagné. — V. M. Pardessus, no 689.

752. Si le matelot est engagé au profit ou au fret, sa part entière est due s'il meurt, le voyage commencé (c. com. 265; ord. 1681, tit. des loyers, art. 14), quand même sa mort ar-◄ riverait le jour même du départ. Cette disposition est exorbi

5 germ. an 12, relatif à la conduite des gens de mer naviguant pour le commerce, ou patrons qui laisseront dans les hôpitaux des gens de mer qui auront été débarqués malades, seront tenus de pourvoir aux frais des maladies contractées pendant le voyage, et à la dépense nécessaire pour mettre lesdits gens de mer en état de se rendre dans leurs foyers, ou pour fournir, en cas de mort, à leur sépulture; ils déposeront, pour cet effet, une somme suffisante, ou donneront une caution solvable qui fera sa soumission au bureau de l'inscription maritime; Vu le code de commerce

art. 262;

Considérant que l'art. 5 de l'arrêté du 5 germ. an 12, et l'art. 262 du code de commerce ci-dessus visés, mettent à la charge de l'armement tous les frais de traitement des matelots ou gens de mer tombés malades pendant le voyage, et que l'usage qui se serait introduit dans quelques localités, de n'exiger du capitaine du navire que la somme nécessaire pour subvenir pendant quarante jours aux frais des maladies des hommes de l'équipage, n'a eu et n'a pu avoir pour effet de poser aux dis positions desdites lois une limite qui n'y est pas exprimée;

Art. 1. La requête du sieur Arriganaga est rejetée.
Du 27 août 1839.-Ord. cons. d'État.-M. Brière, rap.

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lante du droit commun, en ce qu'elle fait participer les hérlliers du décédé aux bénéfices de travaux auxquels leur auteur n'a pu contribuer. C'est sans doute pour encourager les matelots à former des engagements au profit ou au fret que la loi s'est ainsi écartée des règles ordinaires (Conf. Valin, sur l'art. 14, tit. des loyers).

753. Comme la société résultant de l'engagement au profit ou au fret continue de subsister, nonobstant le décès du matelot, jusqu'à l'achèvement du voyage, et comme c'est seulement à cette époque qu'on peut apprécier si la société a procuré des bénéfices ou des pertes, il s'ensuit que si, après avoir gagné jusqu'au jour du décès, la société avait éprouvé des perles dans la suite du voyage, les héritiers du matelot décédé participeraient à ces pertes, comme ils eussent participé aux bénéfices s'il y en avait eu (arrêt du 21 fév. 1736, rapporté par Bonnet, p. 273.-- Conf. Valin, eod.; Boulay-Paty, t. 2, p. 242; M. Dageville, t. 2, p. 327).

754. Le capitaine engagé au profit qui s'est volontairement suicidé durant le voyage, ne peut être assimilé ni à celui qui, étant mort naturellement, transmet à sa famille sa part entière, aux termes de l'art. 265 c. com., ni à celui qui, ayant déserté doit, au contraire, être privé pour ce fait de sa part du profit, en exécution du § 7 de l'art. 4 de la loi des 30 avril-13 mai 1791. Il y a lieu, en pareil cas, d'accorder aux héritiers du suicidé une part pour la fixation de laquelle il faut avoir égard, d'un côté, aux services rendus par leur auteur, et d'un autre côté, au préjudice qu'il peut avoir causé aux armateurs en n'exécutant pas jusqu'au bout ses engagements (Rouen, 8 déc. 1841) (1). 755. Au surplus, dans tous les cas, les frais d'enterrement du défunt doivent être déduits de la somme qui peut être due aux héritiers (Valin, loc. cit.; Boulay-Paty, t. 2, p. 243). 756. Les loyers du matelot tué en défendant le navire sont

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(1) Espèce: (Duroselle C. Prentout.) En 1839, le capitaine Prentout avait été engagé au profit par Duroselle et compagnie, du Havre, pour commander le navire baleinier le Vaillant. Après une pêche heureuse, et pendant le retour du navire, Prentout se suicida à Valparaiso, où le navire était en relâche. Le navire revint en France, sous la direction d'un autre capitaine nommé par le consul de France à Valparaiso. Les héritiers Prentout, se fondant sur l'art. 265 c. com. qui porte que la part du matelot engagée au profit est due tout entière, s'il meurt le voyage commencé, réclamèrent de Duroselle et compagnie, armateurs, la somme de 12,293 fr., montant de la part du profit revenant à leur auteur.-Les sieurs Duroselle opposèrent à cette demande: 1° que le suicide du capitaine devait être assimilé à la désertion prévue par le § 7 de l'art. 4 de la loi des 50 avril-15 mai 1791, qui fait perdre au capitaine ou matelot qui déserte sa part du produit; 2° que, dans tous les cas, le capitaine suicidé, s'étant mis volontairement dans l'impossibilité d'achever le voyage pour lequel il était engagé, devait être condamné, conformément à l'art. 258 c. com., a des dommages-intérêts qu'il était juste de porter à une somme au moins équivalente à sa part du profit.

Ce système fut rejeté par jugement du tribunal de commerce du Havre, conçu dans les termes suivants: «Attendu que si l'ancienne législation de la France condamnait et fléirissait le suicide; que si les lois encore en vigueur chez plusieurs nations étrangères attachent à cet acte de désespoir une idee infamante, la législation actuelle de notre pays ne fait aucune mention du suicide; qu'elle ne le prévoit pas; que le code pénal du 25 sept. 1791 avait abrogé par sa disposition finale toutes les lois antérieures, et que le code pénal de 1810 ne les a pas rétablies; qu'ainsi la loi qui nous régit aujourd'hui reste muette sur le suicide, ne fait aucune différence entre cet acte de destruction volontaire et la mort naturelle; que l'intention bien formelle du législateur à cet égard ressort évidemment des dispositions de l'art. 85 c. civ., qui ne permet pas que, quel que soit le genre de mort, il en soit fait aucune mention sur les registres de l'état civil; qu'ainsi le suicide ne saurait entrainer d'autres conséquences que celles qui résultent de la mort elle-même, quelle qu'en soit la cause; qu'il est donc inutile de rechercher si Prentout, au moment où il a mis fin à ses jours, était ou n'était pas sain d'esprit ; que vouloir voir dans la mort du capitaine Prentout, et dans les circonstances qui l'ont déterminée, un acte de désertion ou d'abandon du navire dont le commandement lui avait été confié, serait créer une distinction qui n'existe pas dans la loi et qu'il est interdit aux tribunaux d'établir; qu'il n'y a donc lieu à invoquer ici l'art. 238.c. com. ; qu'au contraire, les dispositions de l'art. 265, § 4, même code, sont seules applicables à l'espèce.........., etc. » — Appel par les armateurs.-Arrêt

LA COUR Attendu que si l'art. 263 c. com. attribue à la famille du capitaine engagé au profit, et mort pendant le voyage, la part entière de plui-ci, celte disposition de loi ne doit recevoir son application qu'au cas

dus en entier pour tout le voyage, si le navire arrive à bon port (c. com. 265; ord. 1681, tit. des loyers, art. 15); et cela, sans qu'il y ait à distinguer quel a été le mode d'engagement de ce matelot, ni si c'est pendant le voyage d'aller ou celui de retour qu'il a péri; ainsi, soit qu'il fût engagé au mois ou au voyage, ou à la part du profit ou du fret, soit que sa mort ait eu lieu en allant ou en revenant, le matelot qui a péri en defendant le navire, ou même en faisant la manœuvre pendant le combat, car la manœuvre est une espèce de défense, même très-périlleuse alors, transmet à ses héritiers tous les avantages dont il aurait joui luimême, aux termes de son engagement, s'il avait fait durant tout le voyage le service du navire (Valin, sur l'art. 15, tit. des loyers; Boulay-Paty, t. 2, p. 215; M. Dageville, t. 2, p. 327).

757. Il est à remarquer que les loyers échus jusqu'au moment de la mort sont dus par le navire seul, et le surplus par le navire et le chargement. Tout ce qui excède les loyers qui auraient été dus au matelot dans le cas où il serait mort de mort naturelle, est une avarie commune, et, à ce titre, tombe à la charge de la cargaison aussi bien qu'à la charge du bâtiment (arg. de l'art. 263. Conf. mêmes autorités).

758. Du reste, ce n'est qu'autant que le navire est arrivé à bon port, qu'il y a lieu d'attribuer aux héritiers du matelot mort en le défendant, soit les avantages résultant de son engagement, soit les avantages accidentels (tels que ceux provenant de prises faites après son décès) dont il aurait profité s'il eût survécu; car la perte du bâtiment est un événement de force majeure dont les effets retombent sur tous les intéressés. Celle perte néanmoins ne doit leur nuire que dans la proportion où elle existe; ainsi le matelot dont il s'agit sera payé sur les débris du navire ou sur le fret des marchandises sauvées, pour ses loyers échus jusqu'au jour de sa mort, conformément à l'art. 259, et sur les marchandises sauvées et les débris du vaisseau, par applica

de mort naturelle, et nullement au cas de suicide volontaire; qu'on ne peut admettre, en effet, que la loi ait voulu assimiler l'une à l'autre deux hypothèses aussi dissemblables, et accorder indistinctement la même faveur à celui qu'on peut supposer mort victime de son zèle, et à la famille de celui qui cause un préjudice à l'armement en le privant des services qu'il lui avait engagés; Attendu qu'il résulte des documents du procès que depuis quelque temps le capitaine Prentout avait formé la résolution de mettre fin à ses jours, lorsque, le 25 déc. 1859, il a réalisé ce fatal projet, et que son suicide, médité et volontaire, n'est point par conséquent le résultat d'une insanité d'esprit; - Attendu toutefois qu'aucun texte de loi n'autorise un armateur à retenir la part entière du capitaine du navire engagé au profit, lorsque l'inexécution de son engagement est le résultat d'un suicide exécuté pendant le voyage;-Attendu que l'art. 4, § 7, de la loi des 30 avril-15 mai 1791 est sans application à la cause; que ceite loi, relative seulement au cas de désertion, est d'autant moins applicable à l'espèce, qu'indépendamment de ce qu'il ne s'agit pas de désertion, la sanction pénale dont elle est pourvue ne permet pas d'en étendre l'application, par analogie, du cas qu'elle prévoit à un cas imprévu;

Mais attendu qu'il résulte de l'art. 238 c com. que tout capitaine de navire engagé pour un voyage est tenu de l'achever, à peine de dommagesintérêts envers les propriétaires et les affréteurs;-Attendu que cet article doit recevoir son application toutes les fois que l'inexécution de l'obligation est le résultat de la volonté de celui qui s'y soustrait; que, par suite, un capitaine de navire ne peut pas plus se soustraire à ses engagements par le suicide que de toute autre manière; - Attendu qu'il importe donc de rechercher quelles conséquences dommageables a pu avoir pour l'armement le suicide du capitaine Prentout; - Attendu, en ce qui concerne le remplacement du capitaine Prentout par le capitaine Devitray, que quelque indiscipliné que fût l'équipage du navire le Vaillant, tout prouve que le capitaine Prentout, s'il eût vécu, aurait pu ramener en France ce navire, surtout après l'emploi des moyens de correction auxquels ont été soumis plusieurs hommes de l'équipage; que le suicide de Prentout est donc le fait qui a donné lieu à la nomination du capitaine Devitray; que, dès lors, ses héritiers doivent tenir compte aux sieurs Duroselle et comp. de la somme par eux payée au capitaine Devitray; que, toutefois, il y a lieu de déduire de cette somme, s'élevant à 3,114 fr., celle de 562 fr. payée pour frais de nourriture au capitaine Devitray, ce capitaine ayant pu prendre sa nourriture sur le navire comme l'eût fait le capitaine Prentout;-Attendu, en ce qui concerne les 351 fr. réclamés par les sieurs Duroselle et comp. pour les frais occasionnés par l'inhumation de Prentout, que celle somme n'est pas contestée; — Dit que la somme de 12,573 fr. 29 c., dont la décision des premiers juges prononce condamnation sur Duroselle et comp., il sera déduit: 1° 2,752 fr., montant de l'indemnité à laquelle avait droit le capitaine Devitray; 2° 551 fr. 60 c. pour frais d'inhumation... Du 8 déc. 1841.-C. de Rouen, 1 ch.-M. Renard, rap.

tion de l'art. 401, pour ce qui excède les loyers auxquels il aurait eu droit s'il fût mort naturellement (Locré, t. 3, p. 180; Boulay-Paty, t. 2, p. 245).

759. Si, malgré sa résistance, le bâtiment avait été pris par l'ennemi, il n'y aurait pas lieu, alors même qu'il serait parvenu plus tard à lui échapper, d'appliquer la disposition finale de l'art. 265; les loyers du matelots tué dans le combat ne seraient pas dus en entier pour tout le voyage, car, dès que le combat n'a pas sauvé le navire, les dommages qu'il a causés n'ont pas le caractère d'avaries communes; c'est d'après les premières dispositions de ce même art. 265 que se régleraient les droits des héritiers du matelot (Pothier, Louage des matelots, n° 197).

760. Le matelot pris dans le navire et fait esclave ne peut rien prétendre contre le capitaine, les propriétaires ni les af fréteurs pour le payement de son rachat (c. com. 266; ord. 1681, tit. des loyers, art. 16). La prise du matelot n'ayant pas sauvé le navire, est un malheur particulier, un événement de force majeure dont celui qui en est frappé subit seul les conséquences. Mais il est payé de ses loyers jusqu'au jour où il a été pris et fait esclave (c. com. 266), si toutefois le navire a été relâché par les capteurs, car, autrement, le matelot ne pourrait réclamer aucun loyer, aux termes de l'art. 258 ci-dessus. V. Valin, sur l'art. 16, tit. des loyers; Pothier, Louage des matelots, n° 221.

761. Le matelot pris et fait esclave, s'il a été envoyé en mer ou à terre pour le service du navire, a droit à l'entier payement de ses loyers. Il a droit au payement d'une indemnité pour son rachat si le navire arrive à bon port (c. com. 267; ord. 1681, tit. des loyers, art. 17). On comprend que le matelot, ainsi fait prisonnier dans l'accomplissement d'une mission particulière, ait droit à la totalité de ses loyers (quel qu'ait été d'ailleurs le mode de son engagement), à tous les bénéfices qui lui auraient appartenu s'il eût continué ses services, et, en outre, à une indemnité pour son rachat. Exposé à un péril qui ne menaçait pas le reste de l'équipage, il ne doit pas être traité comme il le serait s'il avait été frappé dans un malheur commun. Du reste, il ne peut prétendre à une indemnité pour son rachat qu'autant que le navire arrive à bon port.

762. L'indemnité est due par les propriétaires du navire, si le matelot a été envoyé en mer ou à terre pour le service du navire, par exemple pour faire de l'eau, acheter des victuailles, faire réparer des agrès. L'indemnité est due par les propriétaires du navire et du chargement, si le matelot a été envoyé en mer ou à terre pour le service du navire et du chargement (c. com. 268), par exemple, pour décharger des marchandises, pour aller en prendre d'autres en échange.

763. Cet article, on le voit, ne parle que de l'indemnité due pour le rachat et non des loyers du matelot fait esclave. En général, les loyers ne sont dus que par le navire et le fret (c.com. 239), et cette règle est certainement applicable aux loyers qui étaient échus au moment où le matelot a été fait esclave. Mais quant à ceux qui ont couru depuis ce moment jusqu'à la fin du voyage, ils doivent, suivant la plupart des auteurs, être considérés comme faisant partie de l'indemnité due au matelot, et en conséquence être supportés par la chose pour le service de laquelle le matelot avait été envoyé à terre ( Valin, sur l'art. 17, tit. des loyers; Delvincourt, t. 2, p. 245; M. Dageville, t. 2, p. 331).

764. Lorsque l'indemnité pour rachat est due à la fois par les propriétaires du navire et par ceux du chargement, et lorsque, y ayant eu naufrage, on a sauvé les débris du bâtiment et des marchandises, ce n'est pas seulement sur le fret de la marchandise sauvée, mais sur sa valeur réelle, que la contribution doit être établie; la rançon doit être répartie, comme en matière de jet et de contribution, sur la valeur des débris du bâtiment et sur celle des marchandises sauvées indistinctement, déduction faite du fret, le tout au marc le franc (Valin, sur l'art. 17, tit. des loyers; Delvincourt, t. 2, p. 246; Boulay-Paty, t. 2, p. 249; M. Dageville, t. 2, p. 331).

765. Il arrivera rarement qu'un matelot soit envoyé en mer ou à terre dans l'intérêt seul de la cargaison, le service de la cargaison n'étant presque jamais distinct et indépendant de celui

du navire: cependant ce cas, que l'art. 268 n'a pas prévu, peut se présenter: par exemple, un matelot peut être envoyé à terre pour s'assurer si telle marchandise se vendrait dans le pays, telle autre pourrait s'y acheter : l'indemnité devrait être alors supportée par le chargement seul (Delvincourt, t. 2, p. 246; Boulay-Paty, t. 2, p. 250).

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766. Le montant de l'indemnité est fixé à 600 fr. -Le recouvrement et l'emploi en seront faits suivant les formes déterminées par le gouvernement, dans un règlement relatif au rachat des captifs (c. com. 269). L'indemnité dont il s'agit est, comme on le voit, la même pour tout marinier fait esclave, quel que soit, d'ailleurs, le prix attaché à sa rançon, et quel qu'ait pu être son grade à bord (Boulay-Paty, t. 2, p. 251; M. Dageville, t. 2, p. 333). — Quant au règlement annoncé par l'art. 269, il n'a point encore paru.-Au surplus, le capitaine a qualité pour demander le règlement des sommes destinées au rachat, ce qu'il doit faire avec la plus grande diligence. V. ord. de 1681, tit. des Loyers, art. 18.

767. Les gens de l'équipage peuvent-ils être congédiés sans cause valable, en France ou dans les pays soumis à la domination française? La négative est enseignée par Boulay-Paty, t. 2, p. 252, qui pense que le contrat passé entre le capitaine et le matelot une fois formé par la clôture du rôle d'équipage, ne peut être rompu par le capitaine sans une cause valable. Mais il nous, paraît plus exact de dire avec M. Beaussant, no 278, qu'il est de l'essence du contrat de louage que le maître puisse renvoyer à son gré son salarié, saufà lui payer, s'il a lieu, une indemnité, La disposition contraire de l'art. 15 du tit. 14 de l'ord. de 1784 ne nous semble plus devoir être suivie.

768. Dans aucun cas le capitaine ne peut congédier un matelot dans les pays étrangers (270). C'est là une disposition dictée par un motif évident d'humanité. Le matelot qui trouble l'ordre est passible de peines que le capitaine a le droit d'infliger, mais le pouvoir de le congédier ne peut être exercé avant qu'on ait atteint le territoire français.

769. Il n'est pas permis au capitaine de congédier, en pays étranger, même pour une cause valable, un homme de l'équi-* page, fût-re du consentement de celui-ci, sans l'autorisation du consul, sous peine d'encourir, aux termes de l'art. 15 précité de l'ordonn. de 1784, encore en vigueur sur ce point, une amende de 300 fr. pour chaque homme débarqué sans permission. La même peine est applicable en cas de débarquement d'un homme de l'équipage dans les colonies, même avec cause valable, sans l'autorisation du commissaire des classes. Hors de ces cas, le commissaire ne peut s'opposer au débarquement, qui, du reste, doit toujours lui être déclaré, à peine de 60 fr. d'amende (Déclar. 18 déc. 1728), pour qu'il en fasse mention sur le rôle d'équipage (M. Beaussant, no 278).

770. On voit, d'après ce qui vient d'être dit, que, par exception au droit commun qui veut que l'engagement des gens de mer, de même que tout autre contrat de louage, puisse être rompu, comme il a été formé, par le consentement libre et respectif des parties, cette rupture de contrat ne peut, par des motifs. d'ordre public, avoir lieu, à l'étranger, qu'avec la permission de l'autorité. La conduite est réglée dans ce cas par les conventions amiables des parties.

1. Tout matelot qui justifie qu'il est congédié sans cause valable, a droit à une indemnité contre le capitaine (c. com. 270).— Il résulte des termes de la loi que la cause du congé est toujours présumée valable. C'est au matelot à prouver le contraire, et ses récriminations ne doivent pas être légèrement admises. Il ne suffit pas qu'il prouve n'avoir commis aucun délit, il faut qu'il établisse qu'il n'est point indocile, querelleur, qu'il sait sn métier, qu'il n'a pas hésité, dans le danger, à exécuter une manœuvre hardie (Valin, sur l'art. 10, tit. 4, liv. 3 de l'ord.; Boulay-Paty, t. 2, p. 253; M. Dageville, t. 2, p. 335).

772. A l'égard des officiers-majors, Valin dit « qu'ils peuvent être congédiés pour cause d'inexpérience, et, en outre, pour des causes moins graves que les matelots, parce qu'on exige d'eux plus de politesse; qu'ainsi s'ils manquent considérablement au capitaine, s'il survient de l'inimitié, par leur faute, entre quelques-uns d'entre eux et lui, dans ces cas, et autres semblables qu'il n'est pas possible de détailler, le congé est donné avec cause

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