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doit que des rentes, pouvoit, sans dénaturer sa fortune, déranger à son gré l'ordre des successions, en rendant sa propriété mobilière ou immobilière, suivant qu'il lui convenoit de fixer son domicile sous l'empire de telle ou telle cou

tume.

« Cette bizarrerie a dû disparoître; et, au moment où l'on créoit une législation fondée sur la nature même des choses, on ne devoit pas ranger dans la classe des immeubles des objets purement personnels, qui n'ont en eux-mêmes rien d'immobilier, et qui peuvent exister sans même leur supposer une hypothèque sur des immeubies.

«Que les rentes constituées aient été considérées comme immeubles, lorsqu'il étoit défendu de stipuler l'intérêt de l'argent, lorsqu'on ne pouvoit constituer une rente sans feindre, 1o. que celui qui en fournissoit le capital l'aliénoit à perpétuité; 2°. que celui qui constituoit la rente se dessaisissoit d'un héritage et en investissoit son créancier, qui, en percevant ensuite les arrérages de cette rente, n'étoit censé recevoir que les fruits de l'immeuble dont son débiteur s'étoit fictivement dessaisi, cela peut se concevoir; mais tant de subtilité n'est plus de notre siècle, il faut partir aujourd'hui de vérités généralement reconnues. L'argent peut pro

duire des intérêts très-légitimes, sans qu'il soit besoin de recourir à une aliénation fictive du capital, et une rente ne présentant dans son caractère rien d'immobilier, ne peut être déclarée que meuble dans nos lois » (1).

Cependant, on avoit fait l'observation sui

vante :

« La section, avoit on dit, a suivi, sur les rentes, la législation existante. La question de savoir s'il est utile de la changer, par rapport aux rentes dues par l'État, tient à des considérations politiques, et ne se lie pas à la discussion du Code Napoléon. Ce Code doit fixer la nature des rentes constituées sur particuliers.

» La section propose de les déclarer meubles, même quand elles représentent le prix d'un immeuble aliéné. Il seroit juste de laisser du moins aux particuliers le droit de convenir que les rentes qu'ils stipulent seront immeubles » (2)

La proposition fut renvoyée à la section (3), mais elle n'a pas été reproduite.

Toutefois, le décret du premier mars 1808, a dérogé, pour les majorats, au système général du Code. I porte :

-

(1) M. Treilhard, Exposé des motifs, Procès-verbal du 28 nivose an 12. tome IV, pages 54 et 55. — (2) Le Consul Cambacé1ès, Procès-verbal du 20 vendémiaire an 12, tome III, page 84. - (3) Décision, ibidem.

ART. 2. Les rentes sur l'état et les actions de la banque de France pourront être admises dans la formation d'un majorat, toutes les fois qu'elles auront été immobilisées; savoir, les actions de la banque, en la manière prescrite par l'article 7 de notre décret du 16 janvier dernier ; et les rentes, dans la forme réglée par les articles

suivans.

ART. 3. Les rentes seront immobilisées par la déclaration que fera le propriétaire, dans la méme forme que pour les transferts de rentes.

NUMÉRO II.

Des rentes constituées pour prix d'un immeuble, et question de savoir si les rentes foncières devoient être rétablies.

ARTICLE 530.

Toute rente établie à perpétuité pour le prix de la vente d'un immeuble, ou comme condition de la cession à titre onéreux ou gratuit d'un fonds immobilier, est essentiellement rachetable.

Il est néanmoins permis au créancier de régler les clauses et conditions du rachat.

Il lui est aussi permis de stipuler que la rente ne pourra lui être remboursée qu'après un certain terme, lequel ne peut jamais excéder trente ans : toute stipulatipu contraire est nulle.

Tome VII.

L'article 530 n'a été inséré dans le titre de la Distinction des biens, que par la loi du 30 ventose an 12 * à la suite d'une discussion qui avoit pour objet les rentes foncières, et dont je vais rendre compte.

I.

Discussion sur les rentes foncières.

Dans la séance du 7 pluviose an 12, la section de législation fut chargée « d'examiner la question de savoir s'il convenoit de rétablir l'usage des rentes foncières » (1).

Dans la séance du 15 ventose, et avant que la section eût fait son rapport, on revint sur cette question, et l'on observa 5 que le Code ne contenoit aucune disposition sur les rentes foncières, et que cependant il importoit d'examiner cette matière (2).

Alors la discussion s'engagea.

II.

Etat de la question.

Il est nécessaire de fixer d'abord l'état de la question.

(1) Procès-verbal du 7 pluviose an 12, tome IV, page 284. (2) Le Consul Cambacérès, Procès-verbal du 15 ventose an 12, tome V, page 239.

*

Voyez Tome 1er., Introduction, chapitre XXXI.

Le bail à rente foncière est un contrat par lequel un propriétaire qui a des fonds incultes, ou qu'il ne peut facilement cultiver, les cède à un autre, à la charge par celui-ci de lui payer, en argent ou en denrées, une rente convenue, pour tout le temps qu'il possédera le fonds » (1). Cette rente est essentiellement irrachetable, car si elle pouvoit être rachetée, elle perdroit son caractère qui est de représenter le fonds £ (2); ainsi le déguerpissement étoit le seul moyen qu'eût le détenteur pour s'en affranchir.

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Les rentes foncières avoient été supprimées par la loi du 18 décembre 1790, qui avoit déclaré rachetables celles qui existoient, et avoit défendu d'en créer à l'avenir.

La question étoit donc de savoir si l'on demeureroit dans les termes de cette loi, ou si l'on rentreroit dans la législation antérieure.

Elle fut traitée :

Sous le rapport des avantages et des inconvé→ niens du bail à rente considéré en lui-même ; Sous le rapport des principes généraux de la législation;

Sous le rapport de l'intérêt de l'État.

1 M. Malleville, Procès-verbal du 15 ventose an 12, tome V,

page 240.

(2) M. Tronchet, ibidem, pages 239 et 240.

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