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dant tout le temps que ce bataillon a été sous mes ordres, les officiers, sous-officiers et soldats ont toujours montré le plus grand patriotisme, le plus grand zèle, et surtout la plus grande modération; que la discipline militaire a été aussi exactement observée que dans les troupes de ligne, et que, par la conduite de ce bataillon et sa tenue en général, il s'est acquis la confiance des chefs qui commandaient en Valais, l'estime et l'amitié de tous les citoyens. Je déclare en outre que ce bataillon, ayant toujours respecté les propriétés d'un chacun, je ne puis regarder que comme calomniateurs ceux qui, sans preuves, pourraient accuser quelques individus de s'être avilis en pillant leurs frères et leurs concitoyens.

L. BLANCHENAY, chef de bataillon.

Nous venons de mettre le lecteur en présence de témoignages contradictoires dont nous devons également tenir compte, et que nous regrettons de ne pouvoir concilier entièrement. Nous tirerons cependant de nos recherches cette conclusion sommaire, c'est que si l'histoire a dû enregistrer une tache à la charge des troupes vaudoises, le mémoire des artilleurs de Vevey et la protestation du commandant Blanchenay nous permettent, sinon de l'effacer entièrement, du moins d'en atténuer notablement l'étendue et la gravité.

Du reste, hâtons-nous de le dire en terminant, le pillage de Sion eut un douloureux retentissement dans la Suisse entière, et l'esprit de fraternité qui distingua de tout temps les confédérés, même au plus fort de leurs guerres civiles, se manifesta pleinement dans cette circonstance la main qui avait porté la blessure s'étendit la première pour la cicatriser; des collectes se firent un peu partout et particulièrement dans le district de Vevey pour venir en aide et secours aux frères du Valais. Le banneret de Mellet écrivait de Vevey à la Chambre administrative du Léman, en date du 7 juin, « que la collecte de Sion s'élevait déjà à L. 1717. 2 s., valeur dans laquelle n'était pas compris L. 500 que les citoyens Delom et Frey feraient parvenir incessamment. »

LE BÉLIER CUIRASSÉ LE TAUREAU.

Toulon vient d'assister à un spctacle imposant: le lancement du bélier cuirassé le Taureau. Le Taureau fut commencé, il y a dix-huit mois, sur les plans de

M. Dupuy de Dôme et sous la direction du vice-amiral Bouët-Willaumez, alors préfet maritime de Toulon. Nous empruntons les détails suivants au Spectateur militaire:

« Le Taureau peut approcher très près des côtes, soit pour s'y cacher en attendant l'ennemi à l'entrée de la rade, soit pour y prendre position sur un bas-fond, où il sera impossible de le suivre.

<< Son avant est terminé en pointe, et cette pointe est armée d'une sorte de cône massif en bronze qui constitue son éperon. C'est avec cet éperon que ce lourd bélier, animé d'une vitesse de 12 à 12 noeuds 1, que lui communique une machine de 500 chevaux, peut aller choquer et briser un navire.

« Le Taureau a de plus deux hélices qui lui permettront de tourner presque sur place et en quelques instants. Il aura donc la faculté, quelle que soit sa position à un moment donné, de pouvoir présenter son avant à l'ennemi.

« Qu'on suppose une frégate cuirassée ayant forcé l'entrée de la rade de Toulon et attaquée par le bélier. Celui-ci atteint 12 et 12,5 noeuds de vitesse et peut tourner dans un très petit rayon, grâce à ses deux hélices, tandis qu'à cette vitesse il faut à la frégate un cercle de 600 mêtres de diamètre pour évoluer.

• Dans des circonstances aussi désavantageuses, il sera bien difficile à l'ennemi d'éviter l'abordage. Il y a plus: sans essayer l'abordage, le bélier peut se servir avec succès de son gros canon; sa facilité d'évolution lui permet de se mettre à peu près où il veut par rapport à la frégate, derrière elle, par exemple, dans le prolongement de son axe, de manière à éviter le feu latéral de ses batteries.

་་ Ce gros canon, le seul qu'aura le Taureau, pèsera, dit-on, 20 tonneaux. «Le bélier marin est destiné, non-seulement à se battre dans la rade, mais encore à en défendre l'entrée, et aussi à poursuivre un navire qui en serait chassé. Or, sa puissante artillerie lui permettra d'attaquer le premier l'ennemi à son arrivée et de le poursuivre encore dans sa fuite à une distance à laquelle il sera devenu impossible à celui-ci de riposter.

«En résumé, le nouveau bélier avec son formidable éperon et son canon de gros calibre est une machine de guerre offensive des plus terribles. Au point de vue de la défensive, il n'est pas moins redoutable.

« Le Taureau n'a qu'un pont; il est blindé d'un bout à l'autre. Latéralement, sa coque est également blindée dans toute la longueur, depuis un mètre audessous de la flottaison jusqu'au pont.

« Le pont et les flancs du navire forment comme une boite en fer à l'abri de tout projectile; c'est dans cette boîte blindée que se trouvent la machine et au moment du combat, tous les hommes qui ne sont pas dans la tour.

་་

«Le pont du Taureau est encore couvert dans toute sa longueur par une sorte de dôme cylindrique à l'abri de la balle; la surface de ce dôme est inclinée de telle manière qu'il n'est pas possible de se tenir et de marcher dessus. Il en résulte qu'en cas d'abordage il serait impossible à l'ennemi de sauter sur le pont du bélier pour le prendre d'assaut. »

Ajoutons que les dimensions du bélier sont de 60 mètres de long sur 14 à 15 de large, et que l'équipage de cette étrange machine sera de 100 hommes Plus de 20,000 personnes assistaient au lancement, qui a parfaitement réussi.

LAUSANNE.

IMPRIMERIE PACHE, CITÉ-DERRIÈRE, 3.

SUISSE

dirigée par

MM. F. LECOMTE, lieut.-colonel fédéral; E. RUCHONNET, capitaine fédéral d'artillerie; E. CUÉNOD, capitaine fédéral du génie.

N° 19.

Lausanne, le 1er Octobre 1865.

Xe Année.

SOMMAIRE. Le bataillon de Neuchâtel pendant l'empire (suite).Quelques considérations militaires à propos des chemins de fer des Alpes. Réunion des corps de cadets vaudois à Lausanne.Nouvelles et chronique.

LE BATAILLON DE NEUCHATEL PENDANT L'EMPIRE.

SOUVENIRS D'HISTOIRE NATIONALE.

(Suite.)

Le roi Joseph adresse de Madrid le 17 octobre 1811 une lettre au général Dorsenne, qui commandait la division dont le bataillon de Neuchâtel faisait partie.

« Monsieur le comte,

« Je vous félicite de l'heureux résultat qu'a eu votre opération sur Ciudad-Rodrigo, j'en ai lu les détails avec un vif intérêt, et je ne doute pas qu'elle n'ait une influence sur les opérations de la campagne.

◄ JOSEPH. >

L'histoire de la campagne d'Espagne et de Portugal est une des plus multiples que l'on puisse imaginer, elle se passe dans toutes les provinces à la fois, chaque corps d'armée, chaque régiment, chaque ville, chaque bourgade a son histoire, chaque soldat a son épisode à raconter. De là l'intérêt des mémoires sur cette campagne et la difficulté de l'étudier. Les combats partiels sont si nombreux que les bulletins officiels ont à peine le temps de les inscrire. Certain fait mentionné au long dans un rapport est omis dans un autre comme

s'il n'existait point.

Les historiens français ont été obligés d'avoir

recours aux documents anglais pour certaines parties de la fin de cette guerre. Nous avons eu grande peine à suivre les marches du bataillon de Neuchâtel depuis son retour de Burgos vers CiudadRodrigo et la frontière du Portugal. Les ordres de l'empereur et des généraux sur sa mobilisation nous font défaut. Mais nous espérons compléter un jour les lacunes de cette histoire.

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Du 10 juillet 1810 le bataillon continua à se distinguer dans cette guerre de montagne si célèbre contre Mina, Julian et leurs guérillas. Mais ici il faut noter un fait que nous ne pouvons passer sous silence, depuis cette époque, la désertion se mit dans le bataillon, et le nombre de nos soldats disparus est considérable. Les souffrances des troupes, la faim, le manque de vêtements, de souliers surtout, la barbarie des habitants, les maladies, le mécontentement que les chefs français ne cachaient point et qui gagnait les soldats, l'indifférence de la cause pour laquelle il combattaient, et peut-être aussi l'exemple que leur donnaient les Espagnols au service du roi Joseph, qui désertèrent pendant son règne au nombre de 20,000, sont des causes qui pallient un peu les désertions de Neuchâtelois.

L'Espagne avait plusieurs régiments suisses à son service, ils s'étaient signalés en plusieurs rencontres, entr'autres à Walls, dans la campagne de Gouvion St-Cyr en Catalogne, où le général Reding fut mortellement blessé.

Ces régiments passèrent au service de Joseph; lors de la campagne d'Andalousie ils devaient renforcer la division du général Dupont, 'mais ils prirent parti pour les insurgés. (')

Un historien consciencieux de cette campagne (2) dit que les guérillas étaient composés outre la partie espagnole, de Polonais, de Wurtembergeois, de Suisses, de Français même, déserteurs mécontents des différents corps au service de France.

Il n'y a rien de bien étonnant à ce que ces régiments formés de tant d'éléments divers, ne fussent pas enthousiastes de la cause qu'ils défendaient, et que, éloignés de leurs pays, ils aient préféré la cause d'un peuple qui défendait sa nationalité et qui jouissait du bien-être matériel toujours envié du soldat. -L'armée de l'insurrection trouvait des vivres et des sympathies partout, et ce fait n'avait pas peu contribué à grossir le nombre des guérillas.

La situation de l'Espagne, dit Joseph, était désespérée, et celle des troupes françaises n'était que la conséquence de la première.

() Le roi Joseph. (Mémoires.)

(*) Ed. Lapène. Conquête de l'Andalousie.

Joseph écrivait à Napoléon le 31 juillet 1808:

« Les paysans brisent les roues de leurs voitures pour ne pas être obligés aux transports. >

Et plus tard:

L'armée vit au jour le jour avec la plus grande difficulté par le moyen de réquisitions. Le pays est épuisé, le matériel des ambulances est presque nul, l'armée est absolument dénuée de magasins. »

Les choses ne s'étaient pas améliorées jusqu'en 1811, et c'est depuis cette époque que l'on signale cette plaie de laquelle le bataillon de Neuchâtel ne fut pas exempt, la désertion.

(A suivre.)

QUELQUES CONSIDÉRATIONS MILITAIRES A PROPOS DES
CHEMINS DE FER DES ALPES.

Le passage des Alpes en chemin de fer préoccupe de plus en plus l'Europe et la Suisse. Les progrès du percement du Mont-Cenis et de la construction du Brenner d'une part, ceux de la navigation d'autre part joints au perfectionnement des réseaux français et autrichiens, menacent de déshériter la Suisse de son transit entre l'Allemagne et l'Italie. Les chemins de fer de ces deux pays tendent à se joindre sur plusieurs points et de plusieurs façons en évitant notre territoire. On comprend que la Suisse s'émeuve de cette perspective, et il est temps pour elle en effet de mettre la main à l'œuvre si elle veut tenir la concurrence contre ses voisins.

Malheureusement les chemins de fer, ceux des hautes montagnes surtout, coûtent beaucoup plus que les routes ordinaires; et si l'on n'a pas les capitaux pour changer nos trois principaux passages actuels, Simplon, Gothard, Splügen, en voies ferrées, lesquels seront transformés les premiers? lesquels entr'autres auront les subsides fédéraux que la Constitution autorise à fournir aux constructions d'une importance militaire nationale?

Dès l'ouverture de la discussion en Suisse sur cette matière, deux combinaisons, deux partis se sont formés. Un parti du centre, du StGothard, et un parti des ailes, du Simplon et du Luckmanier. Depuis quelques années déjà on se bombarde de brochures techniques et financières. Dans ces derniers temps les projectiles ont sensiblement augmenté de calibre: on a de vrais livres, de beaux livres en vérité,

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