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SUPPLÉMENT MENSUEL

DE LA

REVUE MILITAIRE SUISSE

Lausanne, le 15 Juillet 1865.

Supplément au n° 14 de la Revue.

SOMMAIRE. De l'organisation des carabiniers en bataillons. Aide-mémoire portatif de campagne à l'usage des officiers d'artillerie (suite). Du ferrage des sabots détériorés. ficiels.

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Etat des bouches à feu de l'armée.

Actes of

DE L'ORGANISATION DES CARABINIERS EN BATAILLONS.

Nous donnons ci-après à nos lecteurs le projet de loi élaboré par le Conseil fédéral sur l'organisation des carabiniers en bataillons, en le faisant précéder de l'exposé des motifs.

MESSAGE DU CONSEIL FÉDÉRAL A LA HAUTE ASSEMBLÉE FÉDÉRALE CONCERNANT L'ORGANISATION DE BATAILLONS DE CARABINIERS.

La loi du 8 mai 1850 sur l'organisation militaire établit la compagnie comme unité tactique de l'arme des carabiniers et en fixe la force à 100 hommes. La loi fédérale sur les contingents en hommes, etc., que les cantons et la Confédération doivent fournir à l'armée fédérale, complète cette décision en réduisant la force des compagnies de réserve des cantons à 70 hommes.

Voici, suivant cette dernière loi, le nombre des unités tactiques des carabiniers :

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auxquelles il faut ajouter les compagnies volontairement fournies à l'armée fédérale par quelques cantons:

Elite: 2 compagnies de Vaud à

100 hommes, 200.

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En sorte que cette arme compte actuellement 48 compagnies d'élite et 28 compagnies de réserve; en tout 76 compagnies d'une force réglementaire de 7390 hommes.

L'effectif actuel des carabiniers se compose de :

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Ainsi 1600 surnuméraires auxquels viennent encore s'ajouter: 4947 hommes de la landwehr.

En fourgons, les cantons ont à fournir à l'armée fédérale :

En ligne, 1 demi-caisson;

Au parc de division, par 2 compagnies, 1 demi-caisson;

Au parc de dépôt, par 2 compagnies, 1 demi-caisson;

En attelages ils doivent fournir deux chevaux pour chaque demicaisson, c'est-à-dire quatre chevaux par compagnie.

L'organisation des carabiniers en compagnies isolées en vigueur jusqu'ici, s'explique, en partie par l'histoire de leur origine, en partie par l'idée qui a longtemps prévalu sur le but de cette arme et la manière de l'utiliser.

Il est naturel que, lorsque vers la fin du siècle dernier, des corps de chasseurs volontaires se sont formés dans quelques cantons, ils aient pris la compagnie comme type de leur organisation militaire, la formation de corps plus nombreux étant rendue impossible par la difficulté de trouver dans les districts où les corps se formaient, le nombre nécessaire d'hommes aptes et volontaires. Outre cela, en prenant pour le recrutement des districts plus étendus, il eût été très difficile de réunir les hommes, et l'on eût bientôt manqué de chefs pour diriger des corps plus nombreux. Enfin, le but principal qu'ils s'étaient proposé était aussi plus facile à atteindre avec des

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l'art de bien tirer

effectifs restreints.

Tandis qu'à leur origine ces corps furent considérés comme l'élite de l'infanterie, et qu'on attachait une grande importance à leur mobilité, ils suivirent peu à peu une direction plus exclusive en prenant, comme but unique de leurs efforts, la justesse et la grande portée du tir, et acquirent plutôt le caractère d'artillerie légère.

Le règlement militaire général du 20 août 1817 donna aux compagnies qui existaient auparavant dans quelques cantons, une organisation distincte par compagnies de 100 hommes et les considéra déjà comme une arme spéciale. Un règlement pour les carabiniers de la Confédération, adopté par la Diète le 13 août 1822, va plus loin encore, en ce qu'il déduit du règlement militaire général ce principe, que les carabiniers doivent être considérés « non plus comme infanterie légère, mais plutôt comme artillerie légère. » D'après cette manière de considérer l'utilité de cette arme, il était naturel de maintenir son organisation par compagnies. Ce système passa ensuite dans l'organisation militaire actuelle, bien qu'en la discutant l'on sentit vivement l'urgence d'une réorganisation de l'arme, et qu'il fût prouvé déjà alors que l'organisation des carabiniers en bataillons était désirable.

Depuis lors cette idée a gagné du terrain, et cela soit ensuite des expériences faites ces dernières années dans les grands rassemblements de troupes sur l'emploi des carabiniers, soit ensuite de l'introduction d'armes de précision pour toute l'infanterie, introduction qui établit une sorte d'égalité entre les carabiniers et les fantassins, en ce sens que ceux-ci, à même distance, tirent avec une précision presque égale à celle des premiers.

La question d'organiser des bataillons de carabiniers a aussi trouvé un accueil favorable auprès des officiers. Nous rappellerons les réunions qui eurent lieu le printemps dernier en divers endroits, celle de Lucerne, entr'autres, composée d'officiers de carabiniers de plusieurs cantons. La plupart de ces réunions se prononcèrent pour la formation de bataillons de carabiniers. Celle de Lucerne formula ce vœu dans son procès-verbal, auquel nous renvoyons.

Se basant sur ces faits, le département militaire fédéral crut devoir prendre en main cette affaire, qui, l'année dernière déjà, avait été soumise à l'étude d'une commission.

Antérieurement aux réunions d'officiers de carabiniers dont il a été question, une nombreuse commission militaire, dans laquelle siégeaient les colonels divisionnaires, s'était déjà prononcée à propos d'une réorganisation de l'armée, en faveur de la formation de bataillons de carabiniers. Une commission spéciale nommée pour étudier cette question, présidée par le chef du département militaire fédéral, et composée de MM. les colonels fédéraux Isler, Barman, Schwarz et Scherz, des lieutenants-colonels Welti et Vonmatt, se prononça positivement pour la formation de bataillons de carabiniers, et présenta au département un rapport conforme.

Dans cet état de choses, le Conseil fédéral n'a pas cru devoir tarder

plus longtemps de vous présenter un projet de loi tendant à donner une organisation nouvelle aux carabiniers.

et,

Avant d'examiner en détail les divers articles de ce projet, nous nous permettrons de justifier en général la nécessité de former des bataillons de carabiniers. En premier lieu, des raisons tactiques réclament d'une manière pressante une réorganisation de ce corps. La répartition de deux compagnies de carabiniers par brigade avait une signification aussi longtemps que toute l'infanterie était armée du fusil lisse; les carabiniers munis d'une arme à grande portée pouvaient ouvrir leur feu à de plus fortes distances que les autres tirailleurs, par des coups isolés et bien ajustés, faire du mal à l'ennemi, avant que l'infanterie pùt ouvrir un feu efficace. Il était donc utile de distribuer les carabiniers sur toute la ligne des tirailleurs. Mais du moment que chaque brigade posséda trois compagnies de chasseurs pourvues d'une arme d'une portée aussi grande et presque de la même précision que celle des carabiniers, ce mode d'employer ces derniers n'eut plus la même raison d'être et sera même complétement injustifiable lorsque toute l'infanterie sera munie du nouveau fusil. Une conséquence na-. turelle du fait que l'infanterie est devenue, pour l'effet de son feu, l'égale des carabiniers, c'est que le brigadier n'attachera plus une grande importance à ces petites unités tactiques, et qu'il dirigera toute son attention sur de plus grandes unités, les bataillons, comme cela se voit déjà dans les manoeuvres ordinaires en temps de paix; il résultera de là que les compagnies de carabiniers, abandonnées à elles-mêmes et à leurs capitaines, sans qu'on puisse leur demander, dans une bataille, une attaque indépendante et efficace comme on l'exigerait d'un bataillon, seront le plus souvent dans une fausse position, et d'un difficile emploi. D'après ce qui a été dit, d'un côté, il n'y a aucun doute que les carabiniers, répartis en petites unités dans les brigades, ne jouent qu'un rôle très secondaire; de l'autre, il est facile de comprendre que, massés en corps nombreux, malgré le changement opéré dans leur armement, ils répondront mieux à leur but primitif; ainsi le maintien de cette arme spéciale sera aussi bien justifié qu'auparavant. En effet, les carabiniers ne trouveront aujourd'hui un emploi conforme à leur spécialité qu'en se suffisant à eux-mêmes et en opérant indépendamment de l'infanterie. Ils pourront engager le combat à de grandes distances, pour lesquelles il est plus important de frapper juste que de produire un feu nourri, arrêter par ce feu la marche en avant de l'ennemi, et nous donner le temps de déployer nos forces tout en masquant nos mouvements.

Les carabiniers doivent savoir se maintenir dans les accidents de terrain qui forment la clef tactique de notre position, ou s'avancer

avec résolution sur un point donné. Tout cela exige l'emploi de carabiniers massés et une direction générale et sûre dans le combat, deux choses faciles à obtenir par la combinaison des carabiniers organisés en bataillons. Le commandant de la division a maintenant, il est vrai, la liberté de réunir les six compagnies de carabiniers de sa division sous le commandement d'un officier d'état-major; mais, outre la difficulté d'opérer, à un moment donné, la réunion des six compagnies, il est toujours dangereux, au moment du combat, d'enlever à un chef (ici le commandant de brigade) une partie des troupes qui, par leur organisation, lui ont été définitivement assignées. Il est facile de comprendre quel désavantage causerait chez des milices la nécessité de les organiser de nouveau au moment critique en les plaçant sous un commandement méconnu.

L'organisation actuelle présente les mêmes désavantages au point de vue de la discipline que sous le rapport tactique. A cet égard aussi, les compagnies isolées étaient trop abandonnées à elles-mêmes; - il ne restait au capitaine aucune autorité supérieure sur laquelle il pût s'appuyer, aussi cherchait-il autant que possible à vivre en paix avec ses hommes, et négligeait souvent pour cela la discipline. de la compagnie. Une autre cause pour laquelle jusqu'ici les capitaines n'ont pas dirigé leur service avec toute l'énergie nécessaire, doit être cherchée dans ce motif que tout avancement dans le corps leur était fermé, ce qui devait nécessairement refroidir leur zèle. Ce laisser-aller de quelques capitaines et aussi d'autres officiers, à d'honorables exceptions près, eut, dans l'arme des carabiniers, des conséquences d'autant plus fàcheuses que ce corps se compose d'hommes intelligents dont l'oeil clairvoyant découvre facilement les défauts de leurs officiers. Par la formation de bataillons, cette intelligence sera au contraire un puissant levier pour faire de nouveau des carabiniers une troupe d'élite, surtout si la plus grande fermeté est unie à une direction éclairée, chose beaucoup plus facile avec un commandant de bataillon qu'avec un capitaine.

Sous le rapport administratif, les compagnies de carabiniers avaient à traiter directement avec le commissariat. Ceci présente le désavantage que, d'un côté, le commissariat avait à faire avec de trop petites. unités, et que, d'un autre côté, ce travail était pour le capitaine un obstacle à l'accomplissement de ses autres devoirs.

Avec l'organisation par bataillons, ce travail serait, comme dans l'infanterie, le partage du quartier-maître, et certainement, en campagne, cet officier soignerait mieux l'entretien et le logement que ce n'est le cas maintenant, ces fonctions retombant le plus souvent;

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