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<< sur ce qui aura été produit. Le jugement sera signé par « chacun des arbitres; et, dans le cas où il y aurait plus de << deux arbitres, si la minorité refusait de le signer, les autres « arbitres en feraient mention et le jugement aura le même effet que s'il avait été signé par chacun des arbitres.

« Un jugement arbitral ne sera dans aucun cas, sujet à l'op« position» (C. pr. civ., art. 1016). »

La sentence arbitrale doit être motivée, comme tout jugement et signé par tous les arbitres comme preuve de leur coopération à l'œuvre commune et sauf l'exception prévue par l'article même, ou le cas de force majeure, si la sentence constate du reste que tous les arbitres y ont concouru (1). La validité de la sentence est subordonnée à ce qu'il soit fait mention du refus de la minorité.

Les jugements arbitraux font foi de leur date à l'égard des parties entre lesquelles ils ont été rendus.

1965. «En cas de partage, dit l'art. 1017, les arbitres au<< torisés à nommer un tiers, seront tenus de le faire par la « décision qui prononce le partage: s'ils ne peuvent en con<< venir, ils le déclareront sur le procès-verbal et le tiers sera « nommé par le président du tribunal qui doit ordonner l'exé«cution de la décision arbitrale. Il sera, à cet effet, présenté « requête par la partie la plus diligente. Dans les deux cas, les << arbitres divisés seront tenus de rédiger leur avis distinct et « motivé, soit dans le même procès-verbal, soit dans des procès« verbaux séparés. >>

« Le tiers arbitre sera tenu de juger dans le mois du jour de son acceptation, à moins que le délai n'ait été prolongé par « l'acte de la nomination: il ne pourra prononcer, qu'après « avoir conféré avec les arbitres divisés, qui seront sommés « de se réunir à cet effet. Si tous les arbitres ne se réunissent « pas, le tiers. arbitre prononcera seul; et néanmoins, il sera <<< tenu de se conformer à l'un des avis des autres arbitres » (C. pr. civ., art. 1018).

Le partage ne peut être déclaré qu'autant que le désaccord existant entre les arbitres a été régulièrement constaté dans

(1) Cass., 5 juill. 1832 (S. V.33.1.322).

la forme indiquée par l'art. 1017, C. pr. civ., et il est certain que si l'un des arbitres refuse d'émettre un avis et de déclarer le partage, les opérations du tribunal arbitral se trouvent forcément entravées, sauf à l'arbitre, qui a rendu impossible le jugement à intervenir, à répondre civilement du préjudice qu'il a pu causer aux parties.

La jurisprudence a admis que les formalités prescrites par l'art. 1017, ne le sont pas à peine de nullité; et qu'il suffit pour se conformer à la loi, que le désaccord soit établi d'une manière authentique ; qu'il ait été connu du tiers arbitre et qu'il soit prouvé que celui-ci a adopté, dans sa sentence, l'avis de l'un des arbitres divisés (1). Toutefois, il devient évident que les arrêts, dans ces termes, ne sont plus que des arrêts d'espèces; qu'il faut apprécier les circonstances, les faits et les preuves alléguées à l'appui; et que l'observation littérale de l'art. 1017 est la voie la plus sûre et la plus régulière pour éviter toute difficulté et constater, en premier lieu, le partage; en second lieu, que le tiers s'est conformé à l'avis de l'un des arbitres divisés.

Il semble superflu de faire remarquer qu'il n'y a partage qu'autant qu'il n'y a pas majorité; si deux arbitres sur trois, si quatre sur six ou sept, embrassent une opinion conforme, la majorité rend le jugement; mais s'il y a partage égal entre arbitres en nombre pair, comme deux sur quatre, trois sur six, l'intervention du tiers arbitre est nécessaire; clle ne l'est pas moins, si aucune opinion n'a même la moitié des suffrages, comme dans le cas où trois arbitres adoptent trois avis différents.

Pour décider s'il y a partage, il faut compter les voix des arbitres, sans tenir compte des intérêts communs ou opposés que ces arbitres représentent (2).

1966. Le Tribunat prévoyant les difficultés que n'a pas

(4) Agen, 10 juill. 1833; Nîmes, 20 mars 1839; Cass., 21 janv. 1840; Bordeaux, 9 mars 1880; Cass., 5 déc. 1810; Cass., 30 déc. 1834; Cass., 10 fév. 1835; Nimes, 20 mars 1889; Bordeaux, 20 avril 1839; Pau, 24 avril 1823; Grenoble, 1er juin 1831; Dailoz, Rép., v° Arbitrage, n. 779 à 785.

(2) Cass., 23 nov. 1824; Toulouse, 9 août 1833 (S.V.34.2.272); Mongalvy, n. 887; Chauveau, Lois de la proc., quest. 3345 bis.

manqué de faire naître l'exécution de l'art. 1018, proposait de le rédiger ainsi : « Le tiers arbitre sera tenu de juger dans le mois du jour de son acceptation, mais il ne pourra le faire qu'après que les arbitres divisés se seront réunis pour conférer avec lui ou qu'ils en auront été sommés. >>

La jurisprudence a consacré ces règles. Le Tribunat ajoutait:

<<< Si tous les arbitres divisés confèrent avec le tiers arbitre, le jugement sera rendu à la majorité des voix et les arbitres divisés pourront, dans ce cas, se départir de leur premier avis. S'ils ne se réunissent pas tous au tiers, celui-ci ne pourra prononcer que conformément à l'avis de l'un des arbitres divisés. Si les arbitres et le tiers jugent ensemble, le jugement sera signé par tous les arbitres et le tiers, sans préjudice de l'application de l'art. 1016 pour le cas où un arbitre refuserait de signer. Si le tiers arbitre est obligé de juger seul, il signera seul et fera mention de la sommation faite aux arbitres divisés ou du refus de conférer. Le tout à peine de nullité. >>

Le texte, qui a été définitivement adopté, diffère trop 'de celui qu'avait proposé le Tribunat, pour qu'il soit permis, selon nous, de le ramener, par la seule interprétation, au sens de la rédaction abandonnée. Dans l'usage, il est certain que l'art. 1018 a toujours été autrement appliqué et que le tiers arbitre, après avoir entendu les arbitres divisés, rend seul la sentence, ainsi que le veut le texte de la loi.

1967. Cependant quelques auteurs ont adopté une opinion contraire, et ont enseigné que les arbitres divisés et le tiers devaient, ainsi que le proposait le Tribunat, se réunir, délibérer, et décider en commun; le jugement serait ainsi rendu par la majorité et les arbitres procéderaient comme les juges des tribunaux ordinaires : « En cas de partage, dit l'art. 118 du « Code de procédure civile, en parlant de ceux-ci, on appellera « pour le vider un juge; à défaut du juge, un juge suppléant, « à son défaut un avocat attaché au barreau, et à son défaut, « un avoué, tous appelés selon l'ordre du tableau; l'affaire << sera de nouveau plaidée. » Il est évident que la loi en parlant des arbitres s'est exprimée tout autrement; il faut prétendre en outre, que l'art. 1018 est incomplet, quand il n'ordonne

au tiers que de conférer avec les arbitres divisés; il y a nécessité qu'il délibère puisqu'il ne serait plus qu'un nouveau juge ajouté aux autres pour vider le partage et ayant des droits égaux.

Des modifications aussi profondes admises sans qu'aucune expression du texte puisse les autoriser, nous paraissent devoir être repoussées. Sans doute, il arrive quelquefois qu'avant de commencer aucune opération, les arbitres en nombre pair et les parties conviennent de nommer un arbitre de plus, qui rendra impossible tout partage égal des voix ; mais ce troisième arbitre, sur le choix duquel les parties doivent s'accorder, sans que le tribunal puisse leur être substitué pour une semblable nomination, n'a rien de commun avec le tiers arbitre dont parle la loi et qui est nommé dans de tout autres circonstances.

1968. Le tribunal arbitral d'ailleurs peut être composé de plus de deux membres; lorsqu'ils sont au nombre de six et partagés entre trois avis, l'adjonction du tiers arbitre, si le jugement n'est pas prononcé par lui seul, ne pourra mettre fin au débat; trois voix sur sept ne formeront pas la majorité absolue exigée dans ce cas pour prononcer un jugement.

Il faudrait donc aller plus loin encore, et décider que, s'il se forme parmi les arbitres plus de deux opinions, les arbitres plus faibles en nombre seront tenus, avant de déclarer le partage, de se réunir à l'une des deux opinions émises par le plus grand nombre, ainsi que l'art. 117 du C. de proc. civ. en impose encore l'obligation aux juges. Cette opinion a été soutenue (1); mais il nous est impossible de l'admettre en présence d'un texte ou inapplicable ou contraire. Sans doute, l'art. 1009 du C. de proc. civ. veut que les arbitres suivent dans la procédure les formes établies pour les tribunaux, si les parties n'en sont autrement convenues; mais il est impossible d'admettre que le principe posé par l'art. 117, C. pr. civ., soit une forme de procéder; c'est évidemment une règle de discipline pour les tribunaux, à laquelle les conventions des parties ne

(1) Berriat St-Prix, p. 44 ; Boucher, p. 529, n. 1062; Carré, Lois de la proc., n. 3345.

pourraient porter aucune atteinte. Revenant à l'exemple que nous avons posé tout à l'heure, si trois opinions distinctes partagent également six arbitres, quelle est donc l'opinion qui devra être sacrifiée ? Sans doute les jugements doivent être rendus non à la pluralité, mais à la majorité des suffrages; la loi y a pourvu en décidant que si cette majorité ne se rencontre pas, les arbitres ne peuvent juger, et que la décision appartient au tiers qui devient juge unique et elle impose à celui-ci, comme garantie, qu'il sera contraint d'adopter l'une des opinions précédemment émises: la loi semble par là tout concilier (1).

1969. Deux systèmes complets qui ne peuvent être scindés, acceptés ou rejetés en partie, sont donc en présence. L'un, qui ne tenant aucun compte des règles particulières écrites pour les arbitres, décide qu'ils seront obligés de procéder absolument comme les juges, soumis aux mêmes règles de discipline, agissant en cas de partage comme les tribunaux euxmêmes. L'autre, qui s'appuyant sur le texte n'y ajoute rien, mais n'en retranche rien; qui laisse toute liberté aux arbitres, ne leur demande pas le sacrifice de leur opinion; et, en cas de partage, dit avec l'art. 1018: « Le tiers arbitre pronona cera seul; et néanmoins il sera tenu de se conformer à l'un « des avis des autres arbitres. » Quant à nous, c'est ce dernier système que nous adoptons sans balancer.

<< Considérant en fait, dit un arrêt de la Cour de cassation, ....... que le tiers arbitre a déclaré qu'il en serait par lui ultérieurement délibéré, et a rendu seul là sentence du 26 décembre 1827, en déclarant adopter les motifs et l'avis de l'un des deux arbitres. Considérant en droit, qu'en procédant ainsi, le tiers arbitre n'a fait que se conformer littéralement aux termes des art. 1017 et 1018, C. pr. civ; que d'après ces articles la sentence arbitrale ne doit pas nécessairement être rendue par tous les arbitres à la pluralité des voix ; que lorsque les arbitres et le tiers arbitre ne peuvent s'accorder, celui-ci prononce seul, et qu'il lui suffit de conférer préalablement avec les arbitres divisés, qui sont sommés de se réunir à

(1) Malpeyre et Jourdain, p. 416; Mongalvy, n. 113.

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