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MÉMOIRES DU ROI JEROME

faires prenaient une tournure fâcheuse. Privé de toute correspondance directe avec l'Empereur, Jérôme lui demanda la permission de se rendre auprès de lui à Paris et lui adressa la lettre suivante:

Sire, je désirais avant le départ de Votre Majesté pour l'Espagne, avoir le bonheur de passer quelques jours auprès d'Elle à Paris. J'y serais arrivé en même temps qu'Elle, si je n'avais craint que ma visite ne fût pas reçue avec plaisir.

« Je prie Votre Majesté de m'accorder la faveur que je lui demande, j'attendrai le retour de mon courrier pour me mettre en route. »>

L'Empereur consentit à ce voyage. Le Roi partit le 1er novembre, quelques heures seulement après qu'il eût reçu la réponse de son frère. Sa joie, celle de la Reine, furent des plus vives. Cette permission était le signe du retour de l'Empereur à ses anciens sentiments pour son frère. Les populations westphaliennes tressaillirent d'espérance à la nouvelle que leur souverain se rendait auprès de l'Empereur, tant était grand le prestige de ce nom, telle était la confiance dans ce pouvoir sans bornes. On crut qu'une parole tombée de la bouche de Napoléon, au milieu d'un embrassement fraternel, suffirait pour guérir les plaies du malheureux pays. Malheureusement le fàcheux état des affaires dans le royaume de Westphalie tenait à des causes trop générales pour qu'il fût possible de l'améliorer par des mesures partielles et locales.

CORRESPONDANCE

RELATIVE AU LIVRE XIII

Jérôme au duc

Monsieur le Maréchal duc de Valmy, je vous envoie copie d'une lettre écrite par l'intendant d'Er- de Valmy. Casfurt.

« Je donne l'ordre à cinq mille hommes qui sont à Brunswick, de se porter sans délai sur Gotha, et je me porterai moi-même vers Eisenach, sitôt que vous m'aurez fait connaître ce sur quoi je puis compter, quant aux forces dont vous pouvez disposer, et ce que vous comptez faire. »

a

sel, 13 juin 1809

Berthier à l'Empereur.

Sire, conformément aux ordres de Votre Majesté, j'écrivis le 4 mai à S. M. le Roi de Westphalie, Schoenbrunn, 13 pour l'engager à faire diriger sur Augsbourg le ré- juin 1809. giment d'infanterie du Grand-Duché de Berg qu'il avait retenu à Cassel et que Votre Majesté destinait à faire partie de la réserve du général Beaumont.

Reinhard au

a

Jusqu'à présent ce mouvement n'a pas été effectué, et les états de M. le maréchal duc de Valmy annoncent que ce régiment est toujours stationné à Cassel.

C Je demande à cet égard les ordres de Votre Majesté. »

Une estafette expédiée par la Cour au ministre comte de Cham- de Saxe, vient de nous porter de nouveaux sujets pagny. Cassel, 13 juin 1809. d'inquiétude. En même temps qu'elle nous annonce l'entrée en Saxe du duc d'Oëls et la détermination prise par la Cour Saxonne de se retirer à Eisenach, nous apprenons qu'un autre corps d'Autrichiens s'est porté sur Bayreuth. Il est très-possible en effet que ces mouvements soient combinés, et qu'ils aient pour objet le royaume de Westphalie, et cette opinion a prévalu même à Leipzig. Le Roi a déjà donné à la plus grande partie de ses gardes l'ordre de se porter sur Eisenach, et un régiment de cavalerie est déjà parti pour cette destination. Il a fait dire au roi de Saxe qu'il s'y rendrait lui-même dès qu'il serait informé de l'arrivée de Sa Majesté à Eisenach. Le général d'Albignac, qui n'est plus à Halle mais à Brunswick, et le général Gratien, qui est en marche sur Magdebourg, ont reçu l'ordre de se porter à marches forcées sur Gotha. J'apprends en même temps que le Roi a expédié un courrier à M. le maréchal duc de Valmy pour demander sa coopération.

« Je viens d'avoir une conversation avec M. le comte de Furtenstein qui sort de chez le Roi : elle m'a rassuré sur des inquiétudes que Sa Majesté ne

partage point. Le Roi, m'a dit ce ministre, a à sa disposition, quinze ou seize mille hommes au moins; cinq mille sous le général Gratien, autant sous le général d'Albignac; deux mille cinq cents hommes de sa garde; deux mille du cinquième régiment qui est à Magdebourg; quinze cents hommes du régiment de Berg et quinze cents Français appelés de Mayence lors de l'insurrection du mois d'avril. Le corps qui s'est montré vers Bayreuth lui paraît être les débris de celui du général Kolowrath à Linz, ce que je ne crois point (1). Le duc d'Oëls (et cela est vrai), est un homme sans talents, sans connaissance et plein de présomption. Le général Rivaud, d'ailleurs, commande une division de six mille hommes d'excellentes troupes.

« Les lettres de Leipzig et une conversation avec le général Éblé, m'avaient, je l'avoue, alarmé cette fois, et j'étais sur le point d'écrire de mon côté au duc de Valmy, pour lui représenter la situation de ce pays, dont l'esprit est peut-être plus mauvais aujourd'hui qu'il y a deux mois, et la nécessité de concourir au dedans et au dehors à sa défense. Plusieurs considérations me détournent de faire cette démarche de mon propre mouvement.

«Je faisais remarquer à M. le comte de Furtenstein la singulière succession des événements qui depuis quelque temps tracassent la Westphalie. « C'est, m'a-t-il dit, ce que me disait le Roi tout à l'heure; je ne sais pas si je dois partir ou rester, si je suis Roi,

(1) En effet, c'était celui du général Radiwowitz.

Le duc de

nistre de la guer

prince, sujet. » Ce n'était pas là tout à fait l'obser-
vation que je voulais faire, mais ce mot peint assez
la situation de l'esprit du Roi. De tous les ministres
d'État, M. de Furtenstein est le seul avec lequel je
n'ai pu établir des rapports de confiance et qui garde
toujours avec moi, et même assez bien, l'attitude
de ministre. Je dois dire que M. de Furtenstein a
gagné dans mon esprit ; ce n'est pas un homme supé-
rieur, et beaucoup de choses qu'il n'a point acquises
à temps lui manqueront encore longtemps; mais
M. de Furtenstein a et acquiert de la mesure : il
peut prendre de la maturité et il a des qualités d'un
homme de bien. Il a la confiance du Roi sans avoir
beaucoup d'influence, soit qu'il ne veuille pas user
son crédit, soit que le Roi ait trop le sentiment de sa
propre supériorité; mais il serait à désirer que tous
ceux qui entourent ce monarque valussent M. de
Furtenstein. »
D

Monsieur le Comte, j'ai l'honneur d'adresser à Valmy au mi- Votre Excellence copie d'une lettre du Roi de Westre. Hanau, 11 phalie, de M. l'intendant d'Erfurt; de S. Exc. le comte de Bosse, ministre des relations extérieures de S. M. le roi de Saxe, et de M. l'ambassadeur Bourgoing.

juin 1809.

« Le contenu de ces lettres fera connaître à Votre Excellence que deux colonnes autrichiennes ont pénétré, l'une dans le royaume de Saxe, l'autre dans la principauté de Bayreuth.

Votre Excellence connaît es ordres impératifs

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