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certaine tendance qui, pendant des siècles, les portent toujours vers le même but. L'Autriche était destinée, par sa situation et les pays qui l'avoisinent, à devenir un grand empire oriental; il semblait naturel qu'elle dirigeât ses vues vers ces belles contrées qu'un climat doux, des productions variées, des peuples jadis célèbres, et tous les moyens de commerce et de prospérité, devaient faire envier, et qui se trouvaient contigues avec ses frontières. Tel fut en effet, jusqu'au 14° siècle, le but de ses travaux et de sa politique. Mais détournée de ce point important par des succès et des acquisitions inespérés dans l'occident, elle s'abandonna à la fortune qui semblait lui épargner les peines, et ne pas même lui deman

der du talent. Des alliances successives la mirent en possession de royaumes que tout l'effort des combats n'aurait pu lui acquérir. Alors commença pour elle ce protectorat de l'Empire Germanique, qu'elle ne voulut jamais abandonner, et qui lui coûta bien des sacrifices. Ce fut pour conserver ce vain sceptre électif, qu'elle se sépara de la couronne d'Espagne, qu'elle perdit les trônes de Naples, de Sicile, qu'elle consentit au traité de Westphalie qui lui enlevait l'Alsace; qu'enfin elle renonça à la possession des Pays-Bas, de la Lombardie, de la Toscane. Sans doute les intérêts géné→ raux des souverains, principe de l'autorité monarchique, eurent beaucoup d'influence sur ses démarches dans les derniers temps; mais il y aurait eu

trop de générosité à elle d'embrasser seule leur défense, si d'autres motifs ne l'y avaient entraînée. Elle avait jadis sauvé la chrétienté en défendant ses états contre tous les efforts de la puissance ottomane; elle voulut sauver également les trônes en maintenant les prérogatives royales; et elle y serait parvenue si les efforts qu'elle faisait pour l'intérêt commun, dans sa propre cause, avaient été secondés par ceux qui devaient courir un jour les mêmes dangers; si chacun des princes menacés n'avait pas conservé ses anciens préjugés dans un système nouveau, et ne s'était pas borné à opposer seulement des digues impuissantes au torrent qui devait les engloutir tous.

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après avoir été obligée de signer la paix aux portes de sa capitale, l'Autriche, par le traité de Lunéville, en 1801, avait obtenu des compensations qui valaient mieux pour elle que les pays qu'elle avait perdus; elle se trouvait former une puissance plus compacte, plus solide, plus capable d'entreprendre un jour de grandes choses: mais le regret de sa prépondérance passée, le sentiment de ses forces actuelles, et surtout la douleur de voir s'élever près d'elle une puissance rivale qui la tenait toujours en échec, l'entraînèrent à former en 1805 la troisième coalition, qui ne fut pas plus heureuse que les autres. Deux mois et demi suffirent pour détruire ce beau rêve, et la bataille d'Austerlitz, livrée dans le coeur de cette monar

chie, au-delà de la capitale, la mit à la merci du vainqueur. Pendant ce temps, la Prusse qui n'avait point souffert depuis la campagne de Champagne, et dont l'étendue et la puissance étaient même fort augmentées par le partage de la Pologne, regarda ces événemens sans y prendre part. Suivant l'ancienne politique de la maison de Brandebourg, elle crut gagner tout ce que perdait son ancienne rivale, et ne vit pas qu'elle travaillait pour un autre ennemi plus dangereux; elle perdit l'occasion d'assurer sa tranquillité et son indépendance future, et même de saisir en Allemagne cette prépondérance qu'elle avait si long-temps enviée. Une armée qu'elle eût fait marcher à cette époque vers Mayence, aurait intercepté

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