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plus vive, plus approfondie, plus utile peut-être que toutes les précédentes, chacun des articles qui composent cette loi étant adopté, on passe au scrutin sur l'ensemble, à l'appel nominal, et sur 206 votans, la loi réunit 176 voix contre 30, — majorité en faveur de la loi, 146.

CHAPITRE VI.

Demande faite par le gouvernement d'un crédit de 40 millions pour la liquidation des créances étrangères, et pour le paiement de la contribution de guerre, dans le cas de l'évacuation du territoire français. Discours de

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(25 avril.) La chambre des députés en était à la discussion de l'article des dépenses de la police, lorsque l'apparition de M. le duc de Richelieu, ministre des affaires étrangères, annonça une communication dont l'objet excitait depuis long-temps les inquiétudes publiques.

Son Excellence, après avoir rappelé en commençant son discours, les espérances que le Roi a données à l'ouverture de cette session pour la diminution des charges qui pèsent sur la France, et pour l'affranchissement de son territoire, dit qu'elle vient aujourd'hui, d'après les ordres de Sa Majesté, communiquer le résultat des négociations déjà terminées, et demande « les moyens de conclure celles qui le seront, les ministres osent s'en flatter, avant que les députés de la France se réunissent de nouveau dans cette enceinte.

<< En signant le traité du 30 mai 1814, les puissances contractantes renoncèrent réciproquement à la totalité des sommes qu'elles se devaient; mais en faisant cet abandon de leurs droits, les gouvernemens durent consacrer ceux des particuliers; des articles précis en prononcèrent la garantie. La France s'engagea formellement à faire liquider et payer les sommes qu'elle se trouvait devoir hors de son territoire à des individus ou à des établissemens particuliers, en vertu de contrats ou d'engagemens formels...

<< Cette partie de notre dette contractée envers des sujets étrangers n'a point été aggravée par le funeste événement et le traité de 1815. Elle n'a pas pour objet, comme quelques personnes ont affecté de le croire, de procurer des indemnités aux habitans des pays ravagés par la guerre, encore moins aux gouvernemens de ces

pays, mais seulement d'assurer légalement des dettes contractées en vertu d'actes positifs du gouvernement français, d'obligations légales... Ces dettes sont de la même nature que celles qui forment l'arriéré dont nos lois ont réglé le paiement et qu'on aurait été obligé, en tout état de cause, de liquider et de payer dans les divers ministères... L'obligation dérive d'un principe de droit civil indépendant de toute convention politique : aussi fut-il admis sans difficulté par le traité du 30 mars 1814 (art. 19.) Les deux conventions du 20 novembre, relatives, l'une au sujet des puissances continentales, l'autre à ceux de la Grande-Bretagne, ne firent que déterminer avec plus de précision les applications de ce principe et régler les formes de la liquidation.

<< Mais on avait été loin de prévoir l'immensité de cette charge. A un capital de 7 millions de rentes affecté d'abord au paiement des dettes de cette nature, la loi du 23 décembre 1815 avait ajouté un supplément de 2 millions... Cependant au terme expiré pour la présentation des réclamations, le 28 février 1817, leur récapitulation achevée formait une masse telle qu'en appliquant strictement à leur liquidation les règles prescrites par les conventions du 20 novembre, le montant s'élèverait de beaucoup au-dessus du capital assigné pour leur remboursement. C'est-à-dire 1600 millions, sur laquelle somme il y en avait eu 180 d'acquittés et 30 de rejetés.

« Ce déficit aurait formé une dette immense. S'il avait été impossible de le calculer et de refuser d'avance d'y satisfaire, c'était un devoir de représenter qu'elle excédait évidemment et la prévoyance des traités et les forces de la France... Le Roi parla le langage de la confiance et de la franchise à des souverains dignes de l'entendre... »

Ici le ministre fait sentir les difficultés d'une pareille négociation, sans exemple peut-être dans les annales politiques, où il s'agissait de lutter, non contre des vues générales, non contre des combinaisons politiques, mais de combattre les prétentions, souvent exagérées, d'une multitude de créanciers solennellement appelés à faire valoir leurs titres, qui de toutes les parties de l'Europe pressaient leurs gouvernemens de n'en abandonnner aucun, leur en contestant même pour ainsi dire le droit ; « obstacles peut-être insurmon

tables, dit-il, dans les sentimens d'équité qui animaient les ministres chargés de débattre et soutenir les intérêts des peuples, et sans l'impartialité et la modération de l'illustre médiateur que la confiance de l'Europe a appelé à présider à cette négociation (le duc de Wellington). »

Enfin, le ministre a la satisfaction d'annoncer qu'elle est terminée par trois actes séparés, dont voici la substance.

A l'égard des puissances continentales (l'Espagne excepté) le supplément que la France doit encore fournir pour le paiement de ses dettes envers leurs sujets est définitivement fixé à 12,040,000 fr. de rentes... et la France renonce à tout remboursement qu'elle aurait eu à réclamer en vertu des traités de 1814 et 1815.

Par un arrangement particulier avec l'Espagne, un million est spécialement affecté à ce qui est dû à cette puissance; mais en vertu de la réciprocité stipulée par l'article additionnel du traité de 1814, les fonds destinés à ce remboursement resteront en dépôt jusqu'au moment où le gouvernement espagnol aura fait droit, d'après les bases et les principes posés dans les traités, aux réclamations des Français.

Enfin, une convention séparée conclue avec l'Angleterre, pour assurer l'exécution des traités de 1814 et 1815, fixe à 3 millions la rente à inscrire pour le complément définitif du fonds dont la création a été stipulée dans l'article 9 de la convention relative à la liquidation des créances des sujets de S. M. B.

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Le résultat de ces trois conventions est d'imposer à la France l'obligation de créer 16,040,000 fr. de rente; et le minitre, en présentant la loi qui doit ordonner leur inscription au grand livre, rappelle la difficulté des circonstances, la nécessité du sacrifice, conséquences du système désastreux qui avait accumulé sur la France des charges aussi exorbitantes, l'avantage d'avoir fait réduire à une rente de 16,040,000 fr. au capital de 300,200,000 fr.

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une dette réclamée de 1,390,000,000, fr. sur laquelle la liquidation n'eût opéré peut-être qu'une faible réduction: celui de ne donner les rentes qu'avec la jouissance du semestre courant, tandis que toutes les créances liquidées devaient être délivrées avec la

jouissance du 22 mars 1816, d'où résultait une différence de 32 millions en faveur de la France; de ne délivrer les rentes inscrites que par douzième, de mois en mois, à partir de l'échange des ratifications; de laisser aux puissances elles-mêmes le soin d'opérer les liquidations particulières entre leurs sujets, et de leur répartir les sommes destinées à acquitter nos dettes de manière à prévenir toute discussion de la France avec les étrangers...

>>

On s'est permis d'abréger jusqu'ici la plus grande partie de ce discours, mais la dernière est du domaine de l'histoire.

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Par l'empressement, dit Son Excellence, que vous apporterez, Messieurs, à mettre le Roi en état de remplir les engagemens qu'il vient de prendre au nom de la France entière, vous compléterez l'œuvre salutaire de l'affermissement du crédit national. Vous aurez consacré, au dehors comme au dedans, le principe trop long-temps méconnu de l'inviolabilité de la foi publique et du respect dû aux promesses des gouvernemens. Cet hommage rendu aux intérêts privés mettra le sceau à la réconciliation des peuples, et fera succéder aux préventions injustes, aux haines aveugles, des sentimens plus dignes de l'époque où l'Europe est parvenue. Nos sacrifices alors nous paraîtront moins pénibles, parce qu'il s'y mêlera quelque gloire.

« Dès ce moment, Messieurs, il n'existe plus de point de litige, il ne reste plus de sujet ni d'occasion de contestation. La France s'est acquittée de tous ses engagemens. L'époque est arrivée où elle doit recevoir le prix de sa courageuse résignation. Tenant à la main. ces mêmes traités dont elle a rempli les conditions les plus rigoureuses, elle ne deinandera pas en vain à l'Europe d'exécuter à son tour celles qui lui sont favorables.

Le traité du 20 novembre porte ses mots : « L'occupation militaire de la France peut finir au bout de trois ans. » Ce terme approche; et tous les cœurs français tressaillent de l'espérance de ne plus voir flotter sur le sol de la patrie d'autres bannières que les bannières françaises. Les souverains vont s'assembler pour prononcer sur cette grande question qui renferme les destinées de l'Europe. Ce ne sont plus ces conférences des rois que l'histoire a si souvent

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