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dans le budget de l'État, ne permet pas d'en modifier le tarif, sans s'exposer à déranger l'équilibre de notre situation financière, et ce sera toujours une mesure difficile et embarrassante que de proposer une réduction de taxe, qui pourrait considérablement affaiblir cette ressource indispensable, et forcer ensuite le gouvernement à redemander de plus onéreux sacrifices à ceux-là même qui auraient obtenu un dégrèvement dont les conséquences auraient trompé sa prévoyance.

RÉSULTATS GÉNÉRAUX DES PRODUITS ET DES FRAIS
DE RÉGIE.

On appréciera mieux les effets de la législation des douanes sur toutes les parties de notre situation économique, en parcourant les résultats de l'application de son tarif. Les droits à l'importation, qui n'étaient que de 44,461,000 francs en 1816, sont maintenant accrus de 60 millions, et portés à 104,164,000 francs, dont 45,582,000 francs, pour les produits coloniaux; ceux qui concernent la navigation ont éprouvé une augmentation graduelle qui les a élevés de 2,844,000 francs à 2,972,000 francs. En réunissant à ces deux articles principaux les droits à l'exportation, qui donnent 1,447,800 francs, et les recettes accessoires de douanes, leur montant annuel est de 109,982,000 francs, au lieu de 51,458,000 francs. Les taxes perçues sur les sels, par la même administration, ont été portées de 42,748,000 francs à 54,243,000 francs. Le Trésor reçoit donc désormais, chaque année, de cette régie financière, une ressource totale de 153,525,000 francs.

La dépense du service des douanes est toute de pro

tection et de défense pour l'agriculture, le commerce, l'industrie et la navigation. Ces grands intérêts de notre existence sociale ne sauraient être garantis par des moyens trop puissants, et nous souffririons bien davantage des atteintes portées au développement de ces forces vitales de la France, que nous n'aurions à profiter des épargnes imprévoyantes qui troubleraient la sécurité de nos ateliers, et arrêteraient les mouvements de notre activité commerciale et industrielle. Les frais s'accroissent toujours en raison de la nécessité de la surveillance; l'énergie et les précautions du service se proportionnent constamment aux prescriptions plus ou moins nombreuses et plus ou moins restrictives de notre législation nouvelle. C'est la population laborieuse elle-même qui réclame l'assistance de cette armée d'observation, qui la met chaque jour à l'abri d'une ruine certaine, par la vigilance de ses brigades sur tous les points de la frontière et des côtes. La seule portion du travail des douanes, qui ait pu se réduire par l'analyse et par la méthode, est celle qui s'exécute à l'administration centrale les décisions de mes prédécesseurs et les miennes, ont réduit ces dépenses de 835,000 fr. à 545,000 fr.; les retranchements faits aux emplois supérieurs, sur les fonds des sels, s'élèvent aussi à 400,000 francs; mais la garde du territoire contre l'invasion des produits étrangers, et l'exécution toujours plus difficile des dispositions rendues en faveur de nos diverses industries, ont élevé les besoins du service extérieur de 2,500,000 francs.

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La proportion de la recette à la dépense brute serait donc de 16 p. 100; si l'on reconnaît que la solde de la force armée entretenue pour la défense de notre agriculture et de nos fabriques, ne doit pas être considérée

comme des frais de régie et de perception, la somme à comparer avec le revenu des douanes ne sera plus que de 6,944,010 francs, au lieu de 23,804,547 francs, et leur rapport proportionnel avec ces produits ne sera pas au-dessus de 4 francs 6/10 p. 100.

DIRECTION GÉNÉRALE DES CONTRIBUTIONS
INDIRECTES.

RÉGIME ET ORGANISATION.

La régie des contributions indirectes fut établie en 1804, sous le titre de droits réunis.

L'erreur funeste qui avait fait supprimer les taxes sur les consommations dans un de ces moments d'effervescence, où les meilleures institutions succombent devant les préventions populaires, était généralement sentie.

On reconnaissait que l'impôt territorial, qui repose uniquement sur la propriété foncière, était loin de peser également sur tous les habitants, et d'opérer une répartition suffisamment juste des charges de l'État; que l'impôt personnel et mobilier lui-même n'était supporté que par une partie de la population, et qu'assis sur une base qui n'est pas toujours le véritable signe du revenu, il devait être renfermé dans de certaines limites, et ne pouvait être porté au degré nécessaire pour que toutes les fortunes fussent atteintes dans une égale proportion; enfin, que l'impôt sur les mutations d'immeubles et les

transactions civiles n'étaient pas de nature à compléter, sous ce rapport, le système de nos perceptions pu. bliques.

Cette lacune ne pouvait être bien remplie que par l'impôt indirect, car s'il est assis sur des objets d'une consommation générale, il doit atteindre tous les contribuables dans la proportion de leurs dépenses, qui sont ordinairement l'indice le moins trompeur de leurs facultés.

C'est dans cette vue que le rétablissement de l'impôt des boissons fut d'abord essayé au moyen d'un faible droit perçu, à la production, sur les vins et les cidres, et à la fabrication sur les bières. Ce nouveau droit, celui qui existait déjà sur le tabac, mais qui fut assis sur de meilleures bases, la taxe d'entretien des routes et quelques autres perceptions de moindre importance sur les cartes, la garantie, les voitures publiques, les bacs, la navigation, etc., qui, depuis plusieurs années, étaient confiées à l'administration des domaines, formèrent, à son origine, la consistance de la nouvelle régie.

Deux ans après, en 1806, ses attributions furent complétées par le développement donné à l'impôt des boissons, c'est-à-dire par l'établissement de droits sur le commerce en gros et sur la vente en détail, ensuite par un accroissement de la taxe sur les tabacs, et enfin par la perception, sur les sels fabriqués à l'intérieur, du droit qui fut créé en remplacement de la taxe des routes. (La régie des douanes fut chargée de la perception du même droit à l'extraction des marais salants et à l'importation.)

Ce n'est donc réellement qu'à l'année 1806 que remonte la véritable organisation de l'administration des contributions indirectes. La suppression, en 1808, de

l'inventaire des boissons, la création, à la même époque, d'un droit aux entrées des villes, ensuite la substitution d'un droit de mouvement au droit de vente en gros, et l'élévation successive des tarifs; d'un autre côté, l'établissement du monopole des tabacs au 1 janvier 1811, sont les changements les plus notables qui furent apportés au régime de ces perceptions jusqu'à la restauration.

Longtemps accoutumée à ne figurer aux budgets de l'État que pour ses produits nets et à prélever ses frais de perception sur ses recettes, la régie avait une grande latitude pour ses dépenses, et son organisation dut inévitablement s'en ressentir. D'ailleurs l'établissement successif de nouvelles perceptions, la création du monopole des tabacs, l'accroissement continuel du terriritoire et la nécessité d'introduire rapidement dans les pays conquis un régime qui n'y était pas connu, furent de continuels obstacles à ce qu'elle entrât dans des voies d'économie que plus d'expérience, un ordre de choses plus stable et de quelque durée, ont pu seuls lui ouvrir par la suite.

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En effet, jusqu'en 1813, les comptables de la régie, isolés de ceux du Trésor, versaient les produits de l'impôt de caisse en caisse jusqu'à la caisse générale à Paris, qui seule apportait tardivement au Trésor les recettes nettes qui lui étaient parvenues. Indépendamment d'un directeur dans chaque département, qui était en même temps receveur général et jouissait à ce titre de grands avantages, on comptait alors plusieurs inspecteurs par direction et un chef de service par arrondissement sous le nom de contrôleur principal, dont les divers traitements étaient tous fort élevés. Le monopole occupait dans les

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