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nous en offre cent modèles; notre comédie ancienne a largement exploité ce ridicule. Il fallait trouver d'autres ressorts, d'autres combinaisons; c'est sans doute par cette réflexion que M. Casimir Delavigne a été conduit à considérer son sujet sous un point de vue plus sé rieux, peut-être plus moral, en cherchant à l'égayer par tous les détails comiques dont il est susceptible.

Danville, riche armateur, a épousé à soixante ans, une jeune personne remplie d'attraits, de grâces, et même de qualités qui lui semblaient devoir le rendre heureux. Il ajoute bientôt à cette sottise, celle de l'envoyer à Paris, pour lui solliciter une place, avec sa grand'mère, vicille folle dont la vanité va l'entraîner dans mille inconséquences; il lui a même confié cinquante mille fraucs qu'elle devait déposer à la banque, mais qui sont déjà dissipés en dépenses de luxe, lorsque Danville arrive lui-même à Paris. Il la gronde bien un peu; mais on lui répond qu'il a fallu Jui monter une maison convenable à l'emploi (de receveur général) qu'il sollicite, et il se rend ou feint de se reudre à cette raison. Le pis de l'affaire, c'est que les deux dames ont été prendre leur appartement dans l'hôtel d'un jeune duc (d'Elmar), qui ayant vu dans un voyage en Normandie la belle Hortense, avait déjà conçu pour elle un goût fort vif, et qui se trouve ainsi tout à portée de le cultiver. Le jour où Danville arrive à Paris, on donne un bal chez un ministre oncle du jeune duc: il apporte des billets d'invitation à ces dames, grands débats pour savoir si l'on ira; Danville veut souper en famille avec l'ami Bonnard, qui lui est arrivé de la province Hortense déjà en toilette de bal, se résigne à lui faire ce sacrifice; mais le duc revient en l'absence de Danville, il presse Hortense, la grand'mère se joint à lui; elle cède, et part accompagnée de celle-ci, en laissant un mot d'excuse à son pauvre mari. Danville fort étonné de ne pas retrouver sa femme au logis, délibère s'il doit aller la rejoindre au bal ou faire compagnie à son ami Bonnard. Mille pensées l'agitent, la jalousie, la crainte de la faire voir; mille tourmens se partagent et déchirent son cœur; mais il cède au plus cruel, il se rend au bal.

De son côté, Hortense y était à peine arrivée que, déjà tourmentée du chagrin qu'elle allait causer à son mari, et

des poursuites du jeune duc, elle s'é-
chappe et revient chez elle avec sa mère,
Malheureusement sa voiture s'est croisée
avec celle de Danville qui la cherchait en
vain dans la cohue. Elle était rentrée
dans son appartement, sa mère dans le
sien, lorsque le bruit d'une voiture se
fait entendre dans la cour, Hortense
croyant que c'est son mari, se préparait
à lui faire des excuses, mais c'est le jeune
duc (dont l'apparition à cette heure est
inconvenante); Hortense en est dé-
concertée, mais elle ne fait pourtant au-
cun effort pour sortir de cette situation;
le duc n'était entré, lui dit-il, que pour
lai reprocher d'être sortie du bal si vite,
et pour lui remettre le brevet de la place
que Danville sollicitait. A ce moment,
celui-ci se fait entendre, il est sur l'esca-
lier, il n'y a plus moyen de lui cacher
la visite du duc; Hortense épouvantée
de sa situation, perd la tête, et comme
si elle eût été coupable, elle fait cacher
le duc dans un cabinet. Mais bientôt son
trouble apprend tout au mari : il veut étre
seul; il force le duc à sortir du cabinet.
Ici s'ouvre une scene admirable, presque
tragique, mais traitée avec un talent
supérieur, avec une énergie inexprima-
ble, et une égale élévation de sentiment
dans les deux personnages. Il s'ensuit un
duel, et pour que la leçon soit complète,
le malheureux Danville y est désarmé.
Mais à la fin il a la consolation d'ap-
prendre que sa femme n'a été qu'impru
dente; il en voit la preuve daus un billet
qu'Hortense écrivait au duc pour lui
ordonner de ne jamais la revoir : elle
met ensuite le comble à la consolation
en suppliant son mari de l'éloigner de
Paris, et de la reconduire au Havre, où
toute la famille va retrouver le repos,
et la sécurité, s'il est possible...

On ne voit ici que le sérieux de cet ouvrage, et il y domine en effet, mais l'auteur a eu l'art d'y rattacher un rôle de vieux garçon (l'ami Bounard), qui se moque des complaisauces du mari pour sa femme, et qui veut ensuite profiter des bonnes grâces du due pour obtenir une recette génerale. En exami naut les premières données et la conduite de la pièce, dont nous avons omis plusieurs détails, on y trouve des inconvenances graves, un caractère, celui de la grand'mère, odieux et vil, sans être assez motivé; le choix de l'appartement, la visite nocturne du duc et l'impru dence d'Hortense en cette occasion soat des fautes choquantes, même dans les

règles et les mœurs du théâtre ; mais sans cela, il n'y aurait pas de pièce. Passons donc sur ces inconvenances, et nous y trouverons des caractères admirablement tracés. Hortense est imprudente, coquette même, sans être coupable, et Danville faible, sentant sa faiblesse, et offensé sans être avili. Sa scène avec le duc est une des plus belles qu'on ait jamais vues au théâtre; elle rappelle bien celle du second acte du Mariage de Figaro, et celle du paravent dans le Tartuffe de mœurs: mais elle est audessus de toute comparaison par le mérite d'une belle poésie, et d'une morale plus pure et plus énergique. Enfin M. Casimir Delavigne a montré dans cette pièce un talent de conduite et de style, dont ses premiers ouvrages n'avaient donné que l'espérance, et quoiqu'on ait attribué une partie du succès prodigieux qu'elle a obtenu aux talens de deux acteurs qui, seuls, font aujourd'hui la gloire et la fortune du théâtre (Talma et Mile Mars), ce n'en est pas moins, malgré les secours qu'elle a reçus et les critiques qu'elle a subies, une des plus belles productions dramatiques de notre temps.

Second Théatre Francais. - Là, comme à l'ordinaire, le zèle cherche toujours à suppléer à la supériorité du talent, et à l'avantage de l'ancienne possession. Il y a été donné cette année cinq tragédies en cinq actes. Mathilde, imitation malheureuse du roman de Mme Cottin; le Comte Julien (12 avril) de M. Guiraud, composition romanesque, prise de cet affreux événement, qui fut pour l'Espagne la cause de l'invasion des Maures, et la source de plusieurs siècles de guerre et de malheurs; pièce où les incidens, les imbroglios et les reconnaissances nuisent à l'intérêt, et détruisent l'effet d'un style plein de verve, d'éclat et de coloris; Maxime de M Draparnaud (17 mai), sujet pris dans cette période si justement nommée du Bas Empire, où l'histoire n'est qu'une suite de bassesse et de crimes; un beau caractère et des tirades éloquemment écrites n'ont pu lui donner un intérêt assez puissant pour en sauver le vice capital, et cependant elle a eu les honneurs d'une reprise plus heureuse que la première représentation : la Reine de Portugal de M. Firmin Didot (20 octobre), où l'auteur s'est tenu plus près de l'histoire et de la tragédie de Lamothe, à l'exception du dénoûment, où il a eu

l'audace de présenter le couronnement du cadavre d'Inès à la vue de l'assemblée Le Tribunal Secret de M. Léon Thiessé, piece composée dans le goût des Brigands de Schiller, déjà traus portée au Théâtre-Français, sous le titre de Robert, chef de Brigands, sujet qu'on a jugé plus digne du mélodrame que de la tragédie, et dont la première représentation a été fort orageuse.

En général, toutes ces tragédies portent plus que celles jouées au premier Théâtre Français, l'empreinte du goût moderne, et annoncent les progrès de l'invasion du romantisme. La comédie elle-même ne peut y échapper. Il a passé jusqu'à l'Opéra-Comique.

Opéra Comique. Entre toutes les pièces représentées à ce théâtre dans le cours de cette année, il faut distinguer Leicester ou le Chateau de Kenilworth, paroles de MM. Scribe et Melerville, musique de M. Auber (25 janvier), sujet emprunté à sir Walter Scott, mais accommodé par les spirituels auteurs aux lois de l'Opéra-Comique, et surtout la Neige ou le Nouvel Eginhard, en quatre actes, paroles de MM. Scribe et Germain Delavigne, musique du même compositeur, ouvrage plus digne que l'autre de la réputation de ses auteurs, par les heureuse combinaisons de son plan, Popposition des caractères, l'intérêt des situations, les formes piquantes du dialogue, et par une musique un peu babillarde, mais naturelle, expressive, pleine de fraîcheur, de goût et d'har

monie...

A cet égard, on doit encore ici le remarquer, l'établissement aujourd'hui naturalisé en France de l'Opéra-Buffa, a produit une révolution salutaire dans l'art musical. Le goût de la musique en France n'est plus une manie: on commence à goûter la boune; les jalousies individuelles ne passeront pas; on disputera encore long-temps sur la mélodie ou l'harmonie, comme sur le classique et le romantique, sur la saignée et l'émétique, sur la nature et l'idéal : toutes les doctrines humaines sont sujettes à contestation; mais les factions musicales se sont réunies à table autour de l'Orphée de Pesaro, et il faut espé rer qu'on ne s'égorgera plus pour des doubles croches.

Il n'est pas inutile, en terminant cette revue, au moment où l'amour des innovations égare tant de talens, dans la carrière des lettres et des arts, de leur rappeler un

ouvrage publié dans le cours de cette année par M. Quatremère de Quincy, intitulé: Essai sur la nature, le but et les moyens de l'imitation dans les beaux-arts (in-8° mars). C'est un cadeau précieux qu'il fait aux poëtes comme aux artistes.

D'après sa théorie de l'idéal dont il faudrait suivre tous les principes et les corollaires pour la faire bien comprendre, l'imitation dans les beaux-arts n'a pas pour but l'illusion, c'est-à-dire d'atteindre à la ressemblance extérieure ou matérielle des objets. L'artiste doit la chercher dans les inspirations de son génie : le poëte qui met un caractère sur la scène, ne doit pas le copier sur un individu quelconque; le peintre choisit-il la plus belle femme du monde pour modèle n'en ferait toujours qu'un portrait: un musicien qui voudrait imiter physiquement la tempête ne produirait que du bruit. Ce n'est donc pas à l'extérieur des objets qu'il faut chercher l'idéal... Il y a, dit le savant académicien, une manière d'imiter ce qu'on appelle à tort la nature, dans un modèle individuel ou partiel qu'on trouve partout; et il y a une manière d'imiter ce qu'il faut appeler vraiment la nature, dans ce qu'elle a de général, c'est-à-dire dans ce modèle qu'on ne saisit en aucun lieu séparé ni en entier sur aucun objet distinct, parce qu'il réside dans la région supérieure et invisible des principes, des causes et de cette raison intelligente, véritable source des effets qui agitent sur les facultés de notre âme.

Ainsi, loin de regretter ces prétendues privations de ressources imitatives dont se plaignent le mauvais goût et le faux talent, M. Quatremère de Quincy soutient que c'est de ces privations même que l'artiste sait tirer son plus grand avantage.

mérite

«Par exemple, dit-il, l'avantage de la poésie pour peindre est précisément de manquer de couleurs; c'est que son est de n'en avoir pas besoin. Est-ce que le prestige de ses tableaux ne consiste pas à les rendre sensibles, et l'on pourrait dire visibles sans matière, sans forme et sans coloris? S'est-on jamais plaint que les traits des personnages tracés par les grands poëtes restaient ignorés ou insaisissables? Qui est-ce qui ne connaît pas Achille, Hector, Ulysse, Énée ? Qui jamais dans les descriptions des batailles ou des enchantemens du Tasse s'est aperçu que de tels tableaux manquassent de mouvement on de réalité ? Qui donc a jamais douté de les avoir vus? Désire-t-on l'addition de la couleur dans les chefs-d'œuvre de la sculpture? Regrette-t-on que les belles scènes

de la peinture ne se présentent à nous que d'un côté, que ses figures soient immobiles?...

«Eh bien! à quoi chacun de ces arts doit-il ses prestiges? Il les doit précisé ment à ce qui lui manque pour nous trom per complétement. Il les doit à l'effort même qu'il fait pour suppléer à ce que la nature lui refuse. Comment donc se plaindrait-on de privations auxquelles il doit ses richesses et d'une impuissance qui devient la cause de son pouvoir?... >>

Voilà qui ne plaira point aux amateurs passionnés du descriptif et du romantique. Ils persisteront, sans doute, dans leur engouement pour ce qu'ils appellent la nature. Ils ne daigueront pas consulter un livre qu'il faut bien étudier pour le comprendre, qui n'arrêtera, sans doute, point le torrent qui nous entraîne, mais qui n'en est pas moins une production aussi remarquable qu'utile dans l'état actuel des beaux-arts.

INDUSTRIE FRANÇAISE;

EXPOSITION de ses produits en 1823, (25 août.)

L'INDUSTRIE FRANÇAISE a pris depnis trente ans un essor prodigieux. L'abolition des jurandes et maîtrises a fait naître dans toutes les branches industrielles une foule de bons ouvriers qui fussent restés soumis an joug de la routine ou courbes sous le despotisme des corporations. Les sciences et surtout la chimie ont aggrandi et fécondé le domaine des arts de leurs découvertes. Une émulation ambitieuse a été imprimée à tous les esprits dans une période de malheurs et de gloire, et l'instruction répandue dans toutes les classes a éclairé le goût du simple artisan dans ses travaux : la division des fortunes a multiplié les consommations et par conséquent les produits. Enfin, dix années de paix et de sécurité, dix années d'ur gouverne ment paternel, protecteur éclairé des arts, ont élevé le crédit, l'opulence et l'industrie nationale à un point que n'osaient es pérer les plus chauds partisans de la perfectibilité. L'exposition de 1819 avait laissé de grandes espérances; celle-ci les a réalisées.

Des esprits chagrins, toujours portés à blâmer ce qui est, ont mis en question sì l'exposition des produits de l'industrie d'un pays n'était pas plus nuisible qu'utile à ses progrès; si cette institution ne don

nait pas trop d'influence au gouvernement dans la direction de l'industrie, qui n'a besoin, comme le commerce, que de liberté; si elle ne donnait pas trop d'avantage aux fabricans de la capitale, où ceux de la province ne pouvaient soutenir la concurrence et où viendraient ainsi se concentrer tous les bénéfices de l'industrie et du commerce. D'autres regardaient le moment de la guerre alors allumée comme mal choisi pour l'objet qu'on avait en vue et craignaient, ou feignaient de craindre, que l'esprit de parti n'influât sur le choix des objets admis à l'exposition; ils se plaignaient de ne voir figurer, dans le jury central chargé de cette mission, ni M. le duc de la Rochefoucauld - Liancourt, ni MM. Prony, Alexandre Delaborde, Ternaux, etc.C'était sans doute une perte, mais on n'a eu à se plaindre ni du défaut de lumières, ni de la partialité, ni de la rigueur du jury (1). Les produits industriels agréés par le jury n'ont peut-être été que trop abondans en certaines parties. L'exposition de 1819 avait offert 1593 articles: le catalogue de celle-ci en contient 1770. Tout le premier étage du Louvre, les deux vestibules de la grande colonnade, une vaste salle de l'est, et une partie de la cour en étaient remplis. Au premier aspect de cette immense collection, on était choqué de voir tant de petits objets de mode, de parfumerie ou de comestibles, et de superfluités plus dignes des étalages du jour de l'an que des honneurs du Louvre. Mais, comme tous ces objets entrent dans la balance du commerce, ils n'étaient pas indignes des regards du jury.

En nous bornant à considérer cette exposition dans ses grandes divisions (car on juge bien que nous n'avons pas la prétention de la juger dans ses détails), nous y remarquons une amélioration incontestable. L'industrie a fait presque partout des conquêtes sur le domaine des sciences et des beaux-arts, quoique nous soyons encore, sous quelques rapports, inférieurs à nos rivaux. Ils nous ont ouvert la carrière: ils excellent dans l'invention, la construction, l'emploi des machines: mais nous les surpassons dans la connoissance et l'appli

cation des procédés chimiques, et surtout dans le goût qui préside à la confection des étoffes, des meubles et des objets d'art. L'emploi des machines, en multipliant les produits, est une source abondante de commodités, de jouissances et de bien-être ; mais il n'a apporté aucun perfectionnement à la mise en œuvre de la matière. Il n'en est résulté aucun progrès réel sous le rapport de l'industrie considérés comme faculté de l'homme.

Cette idée trouvera son application en suivant les grandes classes de nos produits industriels.

Métaux. La France a des richesses minérales immenses; mais, soit défaut de théorie, soit négligence de l'administration, elle n'est point avancée dans leur exploration. Une mine de sel gemme est découverte depuis plusieurs années à Vic (département de la Meurthe); on en voit à l'exposition un bloc énorme qui a la transparence et l'éclat du cristal; ce sel ne demande aucun affinage pour servir aux besoins de la consommation; et cependant il est à peine connu dans le commerce. Les Pyrénées et quelques autres montagnes recèlent les marbres les plus précieux : ce n'est que d'hier que les arts viennent de s'en emparer. Dans plusieurs cantons du sol frauçais, le minerai n'est pas d'une qualité inférieure à celui d'Angleterre ; l'aveugle routine nous a longtemps fait négliger les perfectionnemens introduits au dehors dans cette fabrication; enfin on a demandé des secours à la science; on a été prendre des leçons à l'étranger. Deux anciens élèves de l'école polytechnique, MM. Dufaut et Gallois sont allés en Angleterre, avec l'appui du gouvernement, observer les procédés suivis, la preparation faite pour épurer le charbon fossile, et l'emploi du laminoir substitué au marteau pour épurer le fer fondu en masse, et le réduire en barres de toutes dimensions. Ce procédé qui rend le fer plus compact, plus homogène et moins cassant, a été introduit successivement dans les forges les plus renommées des départemens de la Nièvre et de la Moselle. Il a été envoyé à l'exposition

(1) Voici quelle était la composition de ce jary; on n'y voit pas un nom qui ne rappelle ou une illustration personnelle, ou des services éminens rendus aux arts, au commerce, ou à l'industrie nationale:

MM. le duc de Doudeauville, le vicomte Héricart de Thury, Lemoine-Desmares, Héron de Villefosse, Guillard-Sinainville, le baron Gérard, peintre du Roi; Christan, Darcet, Oberkamp, Arrago, Molard, de Moléon, Tarbé de Vaux-Claire, Fontaine, architecte; Breguet, Brogniard, directeur de la manufacture de porcelaine de Sèvres; Biot, Quatremère de Quincy, GuayLussac, Thénard et Migneron.

par les usines de Romilly et d'Imphy des feuilles laminées de tôle et de cuivre d'une dimension énorme (de cinq mètres de long sur un mètre et demi de large).

Presque toutes les grandes machines à filer et les cardes employées dans les fabriques anglaises ont été importées en France, et y ont reçu des perfectionne mens. On peut en dire autant de la fonte des fors coulés dans les établissemens de MM. Périer à Chaillot, de MM. Wilson et Manby à Charenton (V. la Chronique, p. 793), etc. La fabrication des aciers, étendue à plus de vingt-cinq départemens, fait des progrès marques. Nous ne sommes plus tributaires de l'Allemagne, ni de l'Angleterre pour les faulx, limes, scies et autres instrumens de l'agriculture. Les fabriques de plusieurs départemens, et même celle de M. d'Herbecourt, à Paris (à l'Orme Saint-Gervais), en offrent d'une qualité supérieure aux besoins de l'agriculture.

métalliques que l'iaventeur, M. Allard, a perfectionnés; les jolis ouvrages de treftlerie dont on fait des paniers aussi legers que ceux d'osier et les nouveaux meubles culinaires (casseroles, robinets) en zinc (de M. Talabot), nouveau métal qui n'a pas le danger d'oxidation du cuivre et da plomb, et que M. Mosselman de Valogne (Manche) a mis en feuilles pour des usages non moins utiles.

Tissus. On s'est plaint de ne pas voir à l'exposition assez de machines, d'ouvrages de mécanique; mais l'immense quantité, la belle qualité des tissus offerts à nos regards attestent, autant que la présence des machines elles-mêmes, l'heureux emploi que l'industrie française en a fait.

En commençant par les tissus les plus précieux, les plus nécessaires à la consommation, on ne peut se défendre d'un sentiment d'admiration et de reconnaissance pour le zèle des honorables citovens qui contribuent à cette amélioration touLa coutellerie aussi a fait quelques pro-jours croissante de nos produits. La congrès; mais les fabricans qui s'y sont fait distinguer ne peuvent encore suffire aux demandes de la consommation. M. Bréant, vérificateur à la Monnaie de Paris, a faitdes recherches et des tentatives heureuses sur la fabrication des aciers damassés par refroidissement; mais ce ne sont encore que des essais.

L'orfévrerie est une des branches de l'industrie française où sa supériorité n'est point contestée. On admire généralement les pièces exposées cette année par M. Odiot; elles ont été modelées sur des chefs - d'oeuvre de l'antiquité, et la main d'œuvré y est bien supérieure à celle des anciens. On peut en dire autant des bronzes dorés de M. Thomire on y reconnaît le goût de l'école de David. A cet égard les ateliers de Londres n'offrent rien de comparable. Malheureusement la bijouterie française se laisse aller davantage aux influences ou aux inspirations de l'étranger. La plupart des bijoux nouveaux, colliers, bagues, bracelets, chaînes de montres, etc., imitées de l'Orient ou du quinzième siècle, travaillées en broderies et en filigrane, offrent une bigarrure d'or et de couleurs dont le bon goût est of fense... On dirait que c'est une consolation que l'industrie française veut bien donner à ses rivaux.

Après avoir vu les beaux ouvrages de l'orfévrerie, comment s'arrêter aux ouvrages plaqués dont le luxe ne peut se conten. ter, et dont l'économie domestique n'a guere à profiter? mais on doit citer les moirés

quête des belles races, l'éducation des troupeaux, les soins apportés à leur tonte, au lavage des laines, au perfectionnement des procédés dans nos fabriques ont mis la France au point de ne plus rien envier à ses voisins, ni même à l'Asie. L'exemple de M. Ternaux a trouvé des imitateurs jusque dans la haute noblese, où tant d'autres soins occupent l'ambition. M. le comte de Polignac à exposé de nombreux échantillons de la laine la plus fine, tires d'un troupeau de sept mille brebis et de deux mille agneaux; M. le duc de Luvnes et plusieurs autres personnages de distinction ont montré le même zèle pour la propagation des plus belles races d'Espagne. M. Bourgeois nourrit à Rambouillet un troupeau dont les laines égalent celles de Saxe; nous ne parlous pas du beau troupeau de chèvres kirghises de la bergerie royale de Perpignan: on verra tout à l'heure ses produits. En général l'amélio ration des laines a apporté dans la fabrication des draps un perfectionnement sensible, et dans leur prix une réduction considérable.

M. Ternaux, qui avait obtenu une médaille d'or à l'exposition de 1819, est encore sous ce rapport à la tête de celle-ci: on sait les services qu'il a rendus par l'introduction des chèvres du Thibet en France. On ne sait pas si bien ce qu'il a fait comme fabricant; la variété des produits de ses douze manufactures est prodigieuse. On voyait entassés, dans l'endroit qui lui a été donné

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