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être måles et majeurs, comme l'exige l'art. 980 du Code civil pour les testaments, cette condition est renfermée dans le mot citoyen.

Ce mot suppose, d'après quelques auteurs, que le témoin doit jouir non-seulement des droits civils, mais encore des droits politiques. (Toullier, t. 1, no 257; Grenier, no 247, et Merlin, Rép., vo Témoin instrumentaire, § 1er, no 3.) Et, d'après l'auteur de la dissertation insérée au journal le Conseil des notaires, sous l'article 505, les droits politiques consisteraient dans le droit d'éligibilité à toutes les places, et surtout dans le droit de suffrage dans les assemblées du peuple.

Nous allons nous attacher à démontrer la fausseté de cette définition en ce qui concerne la Belgique, car si elle y était admise, nous serions amenés à cette conséquence absurde que les notaires belges ne peuvent employer comme témoins dans leurs actes que des éligibles au sénat ou tout au plus des électeurs.

La preuve que les Belges jouissent des droits politiques indépendamment de tout cens, et par conséquent sans être électeurs, résulte clairement de l'art. 50 de notre constitution, qui détermine les conditions d'éligibilité pour la chambre des repré

sentants.

On ne pourrait donc pas soutenir que les membres de cette chambre, quoique non électeurs, ne soient pas des citoyens, lorsqu'ils exercent la plus belle prérogative du peuple, celle de concourir directement à faire les lois.

Les conditions nécessaires pour acquérir ou perdre la qualité de citoyen ne se trouvent que dans l'acte constitutionnel du 22 frimaire an 8; les voici :

«Titre Ier. De l'exercice des droits de cité.

» Art. 2. Tout homme né et résidant en France, qui, âgé de 21 ans accomplis, » s'est fait inscrire sur le registre civique de son arrondissement communal, et » qui a demeuré pendant un an sur le territoire de la république, est citoyen fran»çais.

» Art. 4. La qualité de citoyen français se perd,

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par la naturalisation en pays >> étranger; par l'acceptation de fonctions ou de pensions offertes par un gouver»nement étranger; par l'affiliation à toute corporation étrangère, qui suppose» rait des distinctions de naissance ; par la condamnation à des peines afflic

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»tives ou infamantes.

» Art. 5. L'exercice des droits de citoyen français est suspendu par l'état de dé» biteur failli, ou d'héritier immédiat détenteur à titre gratuit de la succession » totale ou partielle d'un failli; - par l'état de domestique à gages, attaché au » service de la personne ou du ménage; par l'état d'interdiction judiciaire,

» d'accusation, ou de contumace (1), »

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L'art. 7 du Gode civil renvoie aux dispositions qui précèdent pour ce qui concerne la qualité de citoyen, en disant : « L'exercice des droits civils est indépen»dant de la qualité de citoyen, laquelle ne s'acquiert et ne se conserve que confor» mément à la loi constitutionnelle. »

Aucune de nos lois postérieures ne fixe les conditions nécessaires pour obtenir cette qualité; la loi fondamentale des Pays-Bas, du 24 août 1815, ne s'en occupe même pas, et la constitution belge du 7 fév. 1831, abrogative de celle des Pays-Bas, tout en reconnaissant dans ses art. 47 et 53 qu'il y a encore des citoyens, se borne

(1) . les art. 28, 32, 489 et 512, C. civil; 437, C. commerce; 241, 465 et 633, C. d'inst. crim., et 7, 8, 9, 28, 29, 34, 42 et 43, C. pénal.

à statuer par son art. 4 : « La qualité de Belge s'acquiert, se conserve et se perd d'après les règles déterminées par la loi civile.

» La présente constitution et les autres lois relatives aux droits politiques dit » quelles sont, outre cette qualité, les conditions nécessaires pour l'exercice de ces » droits. >>

Il résulte de cet article et de celui qui le suit, qu'avant tout il faut être Belge (jouissant des droits civils), par la naissance ou par la grande naturalisation, pour pouvoir exercer les droits politiques (1). Inutile d'ajouter que l'exercice de ces droits présuppose toujours la qualité de citoyen.

Examinons maintenant ce qu'on doit entendre aujourd'hui par le mot citoyen employé dans l'art. 9 de la loi sur le notariat.

Nous croyons qu'on peut réputer tel, une personne måle, âgée de 21 ans accomplis (age requis pour les électeurs communaux, art. 7, L. 30 mars 1836), Belge de naissance ou ayant obtenu la grande naturalisation, qui a demeuré pendant un an sur le territoire de la Belgique, et qui ne se trouve pas dans l'un ou l'autre des cas prévus par les art. 4 et 5 de la constitution de l'an 8 ci-dessus transcrits.

L'art. 5 de la loi électorale du 3 mars 1831, modifié par celle du 1er avril 1843, et l'art. 12 de la loi communale du 30 mars 1836, déclarant incapables d'être électeurs les condamnés à des peines afflictives ou infamantes et ceux qui sont en état de faillite déclarée ou d'interdiction judiciaire, trois classes de personnes que cette constitution suspend de leurs droits de citoyen, les notaires doivent surtout éviter de les prendre pour témoins.

La prudence commande, en outre, de ne pas employer comme témoins dans les actes ceux qui ont fait cession de leurs biens, aussi longtemps qu'ils n'ont pas payé intégralement leurs créanciers; les condamnés pour vol, escroquerie, abus de confiance ou attentat aux mœurs; et les individus notoirement connus comme tenant maison de débauche ou de prostitution, les mêmes articles de loi les ayant privés du droit de voter dans les élections.

Quant à la condition de s'être fait inscrire sur le registre civique de son arrondissement, comme elle est devenue impossible à remplir, les registres civiques n'existant plus depuis longtemps, il doit suffire d'être habile à se faire porter sur ces registres. (Merlin.)

Nous savons que quelques-uns soutiennent que la constitution de l'an 8 est abrogée chez nous, tant pour ce qui concerne la définition du mot citoyen, que pour les autres dispositions qu'elle renferme. Mais nous leur demanderons de vouloir nous dire quel autre statut détermine les conditions nécessaires pour être citoyen, qualité dont la constitution belge reconnaît encore l'existence (art. 47 et 55), et si l'art. 4 de cette constitution ne s'y est pas référé à cet égard?

(1) La grande naturalisation seule assimile l'étranger au Belge pour l'exercice des droits politiques. (Art. 5, const. belge.) Ainsi l'art. 3 de la constitution de l'an 8, qui exigeait de l'étranger un stage de dix ans, pour devenir citoyen, est aboli.

Voy. pour l'obtention, la conservation et la perte de la qualité de Belge, les art. 9, 10, 17, 18, 19, 20 et 21 du Code civil; les art. 8, 9 et 10 de la loi fondamentale des Pays-Bas; le traité de Paris du 30 nov. 1815; l'art. 10 de l'arrêté du gouvernement provisoire de la Belgique du 10 oct. 1850; les art. 4, 5 et 135 de la const. belge; le décret du 11 avril 1831, les lois des 22 et 27 sept. 1855, sur les naturalisations; et celle du 4 juin 1839, concernant les habitants des parties cédées du Limbourg et du Luxembourg.

Nous terminerons ce que nous avions à dire sur la signification du mot citoyen, par rappeler quelques arrêts rendus sur ce point important.

La cour de Rouen a jugé, le 15 mai 1839, qu'un individu en état de faillite ne peut être témoin dans un acte authentique. (Art. 1954, J. B. Contrà, un arrêt de la même cour du 23 août 1823; cass. Fr., 10 janv. 1824, et C. d'appel Liége, 15 fév. 1827; art. 1988 du Rec.) Le dernier arrêt cité à décidé qu'un failli peut être témoin dans un acte notarié, même dans une province où il ne peut, d'après les règlements des états provinciaux, être membre de ces états.

La dénomination de failli s'applique au failli concordataire, comme au failli non concordataire. (Cass., 19 juillet 1832.)

Sauf le cas de la réhabilitation. (Art. 604, C. commerce.)

Un domestique à gages ne peut être employé comme témoin, même dans les testaments. (C. Rennes, 25 juin 1827.) Nous ne pouvons approuver cette décision en ce qui concerne les testaments, aucune loi ni aucun article de nos Codes n'ayant ôté aux domestiques la jouissance des droits civils dont l'art. 980 du Code civil se contente pour les témoins testamentaires.

L'arrêt cité de la cour de Rouen, du 23 août 1825, et un arrêt de la cour de cass. de France, du 10 juin 1824, ont jugé que les domestiques à gages peuvent être témoins, même dans les actes notariés entre-vifs. (V. cass. 10 mars 1809, et C. Bourges, 19 août 1824; Merlin, Quest. de droit, t. 15, p. 258 et suiv.)

Jugé encore que les repris de justice ne peuvent être témoins dans les testaments. (C. Limoges, 22 janv. 1858; art. 1630, J. B.) Mais l'art. 28 du Code pénal, n'étant pas applicable aux peines militaires, ainsi qu'il résulte de l'art. 5 du même Code, la présence comme témoin instrumentaire dans un testament, d'un homme précédemment condamné à la peine du boulet, pour fait de désertion, n'invaliderait pas le testament. (Trib. Abbeville, 12 juillet 1837; art. 773, Conseil des not.) b. ÊTRE

TRE MALE ET MAJEUR; NE PAS ÊTRE CONDAMNÉ A DES PEINES Afflictives OU INFAMANTES, ET NE PAS ÊTRE FAILLI, HÉRITIER D'YN FAILLI, DOMESTIQUE, INTERDIT, ACCUSÉ NI CONTUMAX. Toutes ces conditions se trouvent renfermées dans le mot citoyen. (V. litt. a. ci-dessus.)

Nous devons ajouter qu'un furieux, un imbécile ou une personne qui ne jouit pas de toutes ses facultés intellectuelles, quoique non interdits, ne peuvent être témoins dans les actes; il suffit qu'ils soient dans le cas d'être interdits.

c. SAVOIR SIGNER. (Art. 9, L. 25 vent. an 11.)

d. ÊTRE DOMICILIÉ DANS L'ARRONDISSEMENT COMMUNAL OU L'ACTE EST PASSÉ. (Même article.)

e. NE PAS ÊTRE PRIVÉ PAR LES TRIBUNAUX CORRECTIONNELS DU DROIT D'ÊTRE TÉMOIN. (Art. 42, 7o, Code pénal.)

f. NE PAS AVOIR D'INTÉRÊT A L'ACTE. (V. le no 2o, notes 20 et 21.)

g. NE PAS ÊTRE PARENT OU ALLIÉ SOIT DU NOTAIRE, SOIT DES PARTIES CON TRACTANTES EN LIGNE DIRECTE A TOUS LES DEGRÉS, ET EN LIGNE COLLATÉRALE JUSQU'AU DEGRÉ d'oncle et de neveu INCLUSIVEMENT. (Art. 8 et 10, L. 25 ventose an 11.)

h. NE PAS ÊTRE CLERC NI SERVITEUR DU NOTAIRE, OU DES PARTIES CONTRACTANTES. (Art. 10, même loi.)

¿. Ne pas être inconnu du notaIRE. D'après l'art. 12 de la loi de ventòse, le notaire doit énoncer les noms et demeure des témoins, il doit donc les connaître.

k. NE PAS ÊTRE SOURD. Un témoin sourd n'entendrait pas ce dont les parties conviennent.

1. NE PAS ÊTRE AVEUGLE. Un aveugle ne pouvant voir les parties ni le notaire. m. NE PAS ÊTRE MUET. S'il ne sait écrire il ne peut déclarer ce qu'il a vu et entendu.

A l'égard des quatre dernières conditions, comme elles ne se trouvent pas écrites dans la loi, nous devons dire qu'il est au moins douteux si les tribunaux prononceraient la nullité d'un acte auquel un témoin inconnu, sourd, aveugle ou muet, aurait coopéré, s'il réunissait d'ailleurs les conditions exigées par la loi.

n. Il est encore douteux si les témoins doivent connaître les parties et la langue dans laquelle l'acte est rédigé.

La loi du notariat se bornant à exiger des notaires, sans même y attacher la peine de nullité, que le nom, l'état et la demeure des parties leur soient connus, ou leur soient attestés dans l'acte par deux citoyens connus d'eux (art. 11), nous pensons qu'on peut en conclure que les témoins ne doivent pas connaître les parties. Quant au second point, la cour de Metz a jugé, le 50 avril 1833 (art. 508, J. B.), que les témoins doivent connaître la langue des parties lorsqu'elles n'ont pas d'interprète. Mais le contraire résulte de cinq arrêts de la cour de Bruxelles, rapportés par Merlin, basés sur ce que les nullités sont de stricte interprétation. (Quest. de droit, t. 15, p. 418-450.)

Si la partie ne comprend pas la langue dans laquelle l'acte est rédigé, il suffit que lecture en soit faite par le notaire dans l'idiome parlé par la partie (C. Douai, 2 mars 1842; art. 2579, Conseil des not.); à plus forte raison il doit en être ainsi pour les témoins.

12. Les conditions que doivent avoir les témoins dans les actes ordinaires, diffèrent en plusieurs points de celles requises dans les témoins testamentaires. Nous les indiquerons à la section II ci-après.

13. Il nous reste à parler d'une question importante soulevée par l'art. 9 de la loi du 25 ventose an 11, à savoir si le notaire en second ou les témoins des actes notariés doivent assister le notaire en premier, tant à la rédaction de l'acte, qu'à la lecture et à la signature, comme dans les testaments.

Un arrêt de la cour de Bruxelles, du 8 mai 1824, a décidé qu'il suffit pour la validité des actes notariés, autres que les testaments, que les témoins assistent à la lecture et à la signature de l'acte. Cette décision est conforme à l'usage général.

Cependant, la cour de cassation de France, par son arrêt du 2 juin 1842, a admis le pourvoi contre un arrêt de la cour de Nancy, qui avait repoussé l'inscription de faux formé contre un acte de donation, lu aux parties, signé par elles, mais non écrit en présence des témoins, et un auteur assez estimé, Favard de Langlade, est aussi d'avis que les témoins doivent assister à la rédaction de l'acte de donation (Rép. de la nouvelle législation, vo Donation entre-vifs, sect. 2, § 1er, p. 197); mais cette opinion se trouve repoussée par l'interprétation que les chambres françaises ont donné à notre article dans la loi du 21 juin 1845 sur la forme des actes notariés.

4° « Les actes qui seraient reçus par deux notaires parents ou alliés » au degré prohibé par l'article 8, de même que ceux dans lesquels les

» parents ou alliés au degré prohibé soit du notaire, soit des parties con> tractantes, leurs clercs et serviteurs seraient pris pour témoins. » (Art. 10 et 68.)

APPLICATIONS.

1. Voyez d'abord ce que nous avons dit de la parenté et de l'alliance entre les notaires et les parties, au no 2o du présent paragraphe.

2. L'art. 10 de la loi du 25 ventòse an 11 porte que deux notaires parents ou alliés au degré prohibé ne peuvent concourir au même acte; mais il n'étend pas cette prohibition aux témoins, de sorte que deux frères, ou le père et le fils, peuvent être pris pour témoins dans les actes notariés, même dans les testaments. (C. Bruxelles, 25 mars 1806; Merlin, Rép., vo Témoin instrum.; et lettre du min. de la justice du 7 oct. 1809.)

3. Les prohibitions relatives à la parenté ne concernent pas les parents et amis des futurs qui, par honneur et politesse, apposent leur signature au bas d'un contrat de mariage. Ordinairement ces personnes ne sont pas présentes à la passation de l'acte ; elles en ignorent le contenu et se bornent à y apposer leur signature. Par suite, si un témoin instrumentaire se trouvait incapable, le contrat de mariage resterait toujours nul, quoique parmi les témoins honoraires, il s'en trouvât un qui réunit les qualités nécessaires pour être témoin instrumentaire. (C. Colmar, 16 mars 1813.)

4. L'art. 10 de la loi de ventôse paraît ne pas être applicable aux témoins certifi cateurs de l'individualité des parties au prescrit de l'art. 11, même loi, il suffit qu'ils réunissent les qualités requises par l'art. 9, savoir, qu'ils soient citoyens belges, signataires, et domiciliés dans l'arrondissement communal où l'acte est passé. A l'appui de cette opinion nous citerons un arrêt de la cour de cassation de France, du 6 avril 1809, qui décide que la défense de l'art. 975 du Code civil, de prendre pour témoins dans les testaments les parents des légataires jusqu'an quatrième degré inclusivement, ne concerne que les témoins instrumentaires, et qu'un testament est valide, encore que l'individualité du testateur ait été certifiée par le père et l'oncle de l'un des légataires.

5. Jugé encore que les témoins certificateurs peuvent être en même temps témoins instrumentaires. (Cass. Fr., 7 juin 1825.)

V. litt. f, p. 43, et b et e, p. 52.

6. Qu'entend notre article par clercs et serviteurs?

Les clercs sont ceux qui travaillent habituellement dans l'étude d'un notaire, d'un avoué ou de tout autre officier public ou ministériel, le plus souvent dans la vue d'acquérir l'aptitude nécessaire aux fonctions de ces divers officiers.

Les employés des greffes, des administrations publiques, des négociants, banquiers et marchands, se nomment commis, et n'en sont pas moins compris dans la prohibition de l'art. 10 de la loi de ventôse.

7. Les serviteurs sont ceux qui sont au service, aux gages d'autrui, pour quelque fonction subalterne, et se dit surtout des domestiques. (Dict. de l'Académie.)

Nous pensons que l'on ne pourrait réputer serviteurs, dans le sens de cet article, les gens de journée et ouvriers que l'on n'emploie pas journellement.

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