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vous jouissez comme tous de ses bienfaits; et comme tous, sous le règne d'un prince ami des arts, vous êtes citoyens d'un Etat libre. Votre profession est honorée; elle est largement rétribuée, quelquefois trop, dans votre propre intérêt ainsi que dans celui de la durée des théâtres. Les jouissances de la famille et du toit domestique vous attendent, à la seule condition d'y arriver par des talents acquis et par une moralité dont personne n'a le droit de ré clamer l'exemption. Continuez donc à vous rendre dignes de cet avenir, en méritant bien de vos maîtres; car ce n'est que par de longues et pénibles veilles qu'ils sont parvenus eux-mêmes à bien mériter de leur pays!

Après ce discours, accueilli par les applaudissements unanimes de l'assemblee, la distribution des prix a commencé ; elle s'est faite dans l'ordre suivant :

Composition. - Premier grand-prix de composition musicale, remporté à l'Académie royale des Beaux-Arts de l'Institut de France, par M. Roger. Premier second grand-prix, remporté à la même Académie, par M. Massé.Deuxième second grand-prix, remporté à l'Académie royale des Beaux-Arts, par M. Gautier.

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Harmonie et accompagnement pratique réunis. Classe des hommes.Premier prix: M. Charlot. Second prix: M. Moreau.-Accessit: M. Bazille. Classe des femmes. - Premier prix Mlle Lorotte.-Second prix: Mlle Mercier-Porte. Accessit : Mlle Brocard. Solfége. Classe des hommes. Premier prix, partagé entre MM. Vital, Cohen, Portéhaut. - Second prix, partagé entre MM. Charmoux, Roy.Accessit MM. Saintiquet, Boverie. Classes des femmes. - Premier prix partagé entre Miles Morize, Pajni, Coudehou, Petitot. Second prix partagé entre Miles Labonne, Carié de la

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Premier prix: M. Marx.- Second prix: M. Jacquart.Accessit: M. Laussel.

Contre-basse. (Le jury n'a pas jugé qu'il y eût lieu de décerner un premier prix.)-Second prix : M. Gauthier. Accessit: M. Bouché. Flûte. - Premier prix: M. Allés. (11 n'y a pas de second prix ni d'accessit.)

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Premier prix: M. Grigny. Second prix: M. Bernard. — Accessit: M. Jacobe.

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poléon. Pendant les préparatifs de l'opération, tous les regards étaient fixés sur ce joli bâtiment, qui, droit sur son ber, laissait admirer dans tous ses détails son élégante construction. On ne se lassait pas de remarquer la grâce de ses lignes, la finesse de ses formes et le fini du travail poussé à un point de perfection qui pourrait, à bon droit, passer pour du luxe. Chacun, émerveillé de la légèreté et de l'harmonie de ses proportions, se demandait si vraiment c'était bien là un bateau à vapeur.

C'est qu'en effet rien de ce qui distingue d'ordinaire ces sortes de bâtiments ne se remarquait dans le Napoléon. Son bord, franc de bout en bout, ne présentait ni ces énormes baux faisant saillie, ni ces lourds tambours coupant si disgracieusement les lignes de carène. On n'y voyait pas ce renflement du ventre qui indique le point où se fait tout l'effort de l'impulsion, et rien ne génait le coup d'œil. qui, d'une extrémité à l'autre, glissait le long de ses courbes élégantes. C'était le parfait modèle d'un fin voilier, et l'on aurait pu prendre le Napoléon pour la plus élancée de nos corvettes, si à l'arrière une disposition particulière de l'étambot n'avait révélé une destination mécanique. On sait que le Napoléon est le premier navire français auquel sera appliqué le nouveau système de propulsion, consistant en une vis ou hélice mue par la vapeur, et qui, placée à l'arrière et immergée, tourne avec une vitesse considérable. Cette vis, fixée à un axe mis en rapport avec la machine, est adaptée entre deux étambots qui supportent les extrémités de l'axe et sont séparés seulement par l'épaisseur de l'instrument. Cette ins. tallation de l'arrière, invisible quand le navire flotte, est la seule disposition qui révèle à l'extérieur ses moyens de propulsion. Sa force est de 120 che

vaux.

Tandis que les spectateurs se com. muniquaient l'un à l'autre ces renseignements, l'heure avançait, et la mer atteignait le niveau placé à l'extrémité du plan incliné au haut duquel se pavanait le Napoléon. Au signal donné, les masses retentissent, les coins, enfoncés sur les tins, soulagent insensible. ment le bâtiment. Les accores tom

bent par couples, et, immobile sur sa quille, il n'attend plus, pour s'élancer, que la levée du seul obstacle qui le retient encore. Un dernier coup de hache fait sauter la clé, et le Napoléon, s'ébranlant avec lenteur, prend majestueusement sa course, qui, de plus en plus rapide, le conduit jusqu'à la mer, dont le sein s'entr'ouvre pour le recevoir.

A midi précis, le Napoléon était à flot, et il prenait la remorque d'un bateau à vapeur qui l'attendait en rade pour l'entrer dans le port. Toutes les autorités maritimes étaient présentes à cette solennité, à laquelle assistait M. Moissard, ingénieur de la marine et membre du comité du service des paquebots de la Méditerranée, arrivé ce matin même au Havre pour en être témoin.

8. Paris. Académie française. Réception de M. Pasquier. Discours du récipiendaire.

a Messieurs,

» Prés de dix mois se sont écoulés depuis le jour où vos suffrages m'ont appelé a l'honneur de prendre place au sein de cette illustre compagnie, et ce long retard dans l'usage d'un droit aussi précieux me fait éprouver le besoin de Vous en dire les motifs. Des devoirs impérieux m'ont d'abord commandé d'attendre la fin de la session législative, et depuis une tristesse trop juste, trop profonde, trop universellement sentie a plané sur la France, pour qu'il me fût possible, sans un nouveau dé. lai, de me livrer, avec une suffisante liberté d'esprit, au cours des idées qui me doivent inspirer en ce moment. Je n'hésite pas, d'ailleurs, à penser que, si j'avais voulu me hâter davantage, vous n'auriez pas été plus disposés à m'entendre que je ne me serais alors trouvé en état de m'exprimer comme il convient dans cette enceinte.

» Je ne m'arrêterai pas longtemps, messieurs, sur la reconnaissance que je vous dois, et dont personne ne sau. rait douter. Cet honneur que je tiens de vous, et dont je jouis en ce moment, n'a-t-il pas toujours été et ne sera-t-il pas toujours l'un des plus justement en

viés ?

. Depuis plus de deux siècles il est

la digne récompense des travaux aux. quels se sont livrés les esprits éminents qui ont brillé tour-à-tour dans la carrière des lettres, et dont les précieux ouvrages, après avoir charmé les contemporains, sont destinés à vivre dans la postérité et à traverser les âges. Tels sont, en effet, les titres qui abondent dans les œuvres de vos devanciers, et qu'on se plaît à retrouver dans les vôtres. Il est donc juste et simple que vous vous demandiez, alors qu'il s'agit de réparer l'une des pertes qui vous affligent trop souvent, si celui qui se hasarde à solliciter vos suffrages se recommande suffisamment par quelques mérites qui ne seraient pas à une trop grande distance de ceux que je viens de rappeler.

. Mais ces mérites, vous ne les renfermez point dans les limites que pourraient vouloir leur assigner des aperçus trop étroits. Vous suivez l'esprit humain dans sa marche, vous l'encou ragez sur toutes les voies où vous le voyez s'avancer avec succès. Dans les luttes de la vie publique, comme dans celles du barreau, comme dans les paroles que la chaire fait entendre, partout enfin où vous reconnaissez le talent de bien dire, de bien écrire ce qui a été bien pensé, partout où ce talent se recommande par les résultats auxquels il parvient, vous trouvez bon qu'il puisse espérer que vos rangs ne lui seront pas toujours fermés.

> Quelquefois même vous avez encore été plus loin, et vous avez pensé que de certaines situations honorablement acquises et qui témoignaient de quelques services rendus dans des carrières où le bien public veut qu'aucun encouragement ne soit refusé, ponvaient être dignes de la palme dont vous seuls avez le droit de disposer. En agissant ainsi, vous avez rendu plus sensible, je ne craindrai pas de le dire, la puissance que vous exercez au nom d'une littérature assez haut placée dans l'estime universelle pour qu'il lui ap partienne de mettre un dernier sceau à toutes les existences comme à toutes les renommées.

. Cette faveur si grande n'a été accordée cependant que sous une con dition dont ne furent jamais dispensés aucuns de ceux qui l'ont obtenue; il a toujours fallu qu'aucun doute ne pût

être élevé sur leur amour pour les lettres, sur leur zèle pour tout ce qui doit en assurer, en accroître la splendeur. Cette condition du moins n'est pas de celles qui m'auraient effrayé, et si, pour y satisfaire, des témoignages m'avaient été nécessaires, je serais venu, messieurs, les chercher au milieu de Vous avec la confiance que de bienveillants souvenirs ne m'y seraient pas refusés.

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Mais c'est assez parler de moi, et je me hâte d'arriver à la partie de mon sujet où votre intérêt ne peut manquer de m'encourager, de me soutenir. Il est des circonstances qui se remarquent peu dans la vie d'un homme ordinaire, mais qu'on se plaît à recueillir quand elles, laissent apercevoir les premiers indices d'une belle destinée, d'un grand avenir.

. M. l'évêque d'Hermopolis était originaire du département de l'Aveyron, de l'une de ces contrées où une nature forte et sévère donne volontiers aux hommes qu'elle produit un caractère sérieux et méditatif qui les rend éminemment propres aux fonctions du saint ministère et à l'accomplissement des devoirs qu'il impose. Aujourd'hui mème, à l'heure où je parle, l'Eglise de France ne compte-t-elle pas dans son sein trois archevêques, dont l'un est revêtu de la pourpre, et quatre évèques, qui tous sont nés et ont reçu leur première éducation dans les mêmes lieux où s'écoula la studieuse jeunesse de M. Frayssinous?

» Issu d'une famille honorable et l'aîné de cette famille, il était naturellement appelé à profiter des avantatages que lui assurait cette situation; mais aussitôt qu'il fut en âge de faire un choix, sa vocation se declara pour l'état ecclésiastique, et elle le conduisit à Paris où il entra dans une communauté que dirigeaient les prêtres de Saint-Sulpice. Il fut ordonné prétre en 1789, a la veille par conséquent du rude combat qui allait bientôt s'engager en. tre l'esprit novateur de cette époque et l'attachement aux principes et aux devoirs religieux dont le clergé ne pouvait se départir. On ne sait que trop à quelles persécutions ce combat vint aboutir.

» M. Frayssinous n'avait encore rempli aucune des fonctions pour les

quelles le serment demandé au nom de la constitution civile du clergé fut alors exigé, et lorsque l'orage révolutionnaire éclata dans toute sa violence, il put y échapper en regagnant sa terre natale; les montagnes du Rouergue lui offrirent, au sein de sa famille, un asile qu'il partagea avec un parent, avec un ami, ecclésiastique comme lui, qui fuyait devant les mêmes dangers; dont la vie (M. Frayssinous me saurait gré de rappeler ce souvenir) s'est dès lors presqu'entièrement associé à la sienne, et qui déjà l'a rejoint dans un autre monde. C'était M. l'abbé Boyer, dont la modestie n'a jamais voulu franchir les bornes de l'enceinte où il s'est, avec tant de succès, consacré aux travaux de l'enseignement ecclésiastique. Dans cet asile, dans cette profonde retraite et dans la société d'un tel ami, les méditations du jeune prêtre durent prendre naturellement le caractère qui s'est depuis manifesté dans tous les actes de sa vie. Quel temps en effet, et quelle matière n'offrait-il pas aux reflexions d'un esprit qui était encore capable de le considérer d'un œil ferme et de le juger avec toute la plénitude de sa raison! Il était impossible que la férocité toujours croissante de tant de scènes à jamais déplorables et répétées en tant de lieux, au nom d'une liberté qu'elles déshonoraient, ne soulevât pas dans les âmes indignées des ressentiments qui iraient enfantant chaque jour de nouvelles calamités. Contre de tel: maux, contre un tel danger. aucun secours ne pouvait être plus efficacement invoqué que celui de la religion; oppresseurs et opprimés, elle parlerait a tous au même titre, avec même autorité, avec même bonté. Ne devait-elle pas toujours en effet, cette religion de paix, se montrer patiente et miséricordieuse? Ne devait-elle pas toujours tendre la main aux faibles, courir après les égarés et tenter de ramener même les plus coupables; ne voulait-elle pas surtout que rien ne fût épargné pour préserver les ceurs dont Pinnocence n'était point encore pervertie?

Ce peu de mots doit suffire pour indiquer la voie qui s'offrit aussitôt à la pensée de M. Frayssinous, et où la solidité de son esprit, où les lumières de sa conscience n'ont jamais cessé de l'affermir.

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Lorsque le terme fut enfin venu de l'époque la plus violente dans la terrible crise où se voyait engagée la société française tout entière. ¡il lui fut permis de se consacrer aux modestes fonctions d'un vicariat dans la commune qu'il habitait; son séjour n'y fut pas de courte duréc, huit années de sa vie s'y sont écoulées ; et il ne faudrait pas se plaindre de la longueur d'une retraite aussi profonde, car elle a été très-favo rable aux études qui l'ont si bien préparé à la mission qu'il devait incessamment remplir. On croit que le plan de ses conferences fut, dès cette époque, arrêté dans son esprit.

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Rappelé dans la capitale pour concourir, en 1801, avec les prêtres du séminaire de Saint-Sulpice à l'instruction supérieure qui se réorganisait au sein des études théologiques, M. Frayssinous y arriva dans des circonstances qui ressemblaient peu à celles où il s'était vu obligé d'en sortir. Le pouvoir était enfin redevenu protecteur, et il offrait un abri à tous ceux qui consentaient à le reconnaître, à se ranger sous sa loi. Un besoin de pacification genérale avait pénétré dans le plus grand nombre des esprits; mais les moyens pour y parvenir laissaient encore beaucoup à désirer.

Dans cette France, où tout était si admirablement disposé pour le développement de la force des armes et de la puissance qui allaient incessamment marcher de conquêtes en conquêtes, le prodigieux génie que la gloire et la fortune portaient avec tant de rapidité à un rang déjà si voisin du rang su prême, n'avait rien trouvé qui fût préparé, je ne dirai pas suffisamment, mais avec la moindre apparence d'efficacité pour le rétablissement de cet ordre tutélaire, premier besoin des sociétés, et dont l'absence, depuis dix années, se faisaient si cruellement sentir. L'incurie ou l'impuissance avaient donc été completes sur ce point capital jusqu'au jour où le premier consul entreprit enfin la grande œuvre de porter remède à un si grand mal; il y avait déployé la vigueur qui le caractérisait dans toutes les résolutions où sa conviction était forte et profonde, et le succes n'avait pas manqué a ses efforts; mais il avait bientôt compris que ce succès courrait le risque de n'être que

très-éphémère, si les principes qui pouvaient seuls en assurer la durée n'étaient incessamment remis en honneur. Lorsque, pour construire le nouveau gouvernement qu'il entrepre nait de fonder, il travaillait avec tant de persévérance à réunir les éléments de force et de vie qu'il trouvait épars çà et là dans les ruines, comment ne se serait-il pas aperçu que le couronne. ment manquait à son édifice, et que les conditions d'une véritable solidité ne seraient point acquises à ses nouvelles créations, que le chef de l'Etat lui-même serait mal assis dans son palais aussi longtemps que le culte de Dieu, remis en possession de ses temples, n'y serait point placé sous la sauvegarde de l'engagement le plus solennellement juré? On dut à cette heureuse conviction le concordat qui fut, en 1801, conclu entre la France et le Saint-Siége. Ce traité, dont la valeur a été si grande, qui a si heureusement résolu la plus grave des difficultés qui pesaient alors sur l'exercice de la religion que professait, qu'a toujours professée l'in.mense majorité des Français, est une des gloires de Napoléon, et il est d'autant plus juste de la lui reporter tout entière, qu'aucun des actes de sa vie politique ne lui a peut-être, à aucune époque, plus complètement appartenu; que parmi les hommes qui tenaient la première place dans ses conseils, le nombre fut très-petit de ceux qui consentirent à entrer dans ses vues, qu'il eut même à surmonter des résistances assez vives, assez puissantes, et qu'il lui fallut ne tenir aucun compte de quelques dangers qui n'avaient pa échapper à sa vigilante attention.

» Cette observation n'est point étran gère à mon sujet, car elle dénote une situation qui ne saurait être trop remarquée. Le mal qui travaillait à cette époque la société française était de telle nature que le chef de l'Etat, si haut qu'il fût placé, ne pouvait, alors qu'il entreprenait d'y porter remede, se suffire à lui-même; pour obtenir l'o beissance, il fallait d'abord qu'il fût suffisamment compris de ceux qu'il voulait soumettre à ses commandements; et comment y parvenir, aussi longtemps que de puissantes erreurs n'auraient pas été efficacement com. battues? que de pernicieuses doctrines

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