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l'inégalité qui règne dans la législation civile. L'infatigable activité du roi, la force impulsive de la civilisation sont les gages certains d'une prochaine réorganisation de cette province. Cette année le gouvernement s'est vivement préoccupé de cette question. Sur le continent les germes déposés par la domination française continuent à se développer suivant une progression lente mais sensible. Le mouvement littéraire et philosophique semble quelquefois y prendre les allures de la liberté. La réduction de 50 pour cent sur l'importation des livres est une garantie des progrès de l'esprit de tolérance qui dirige l'administration dans ses rapports avec la pensée publique.

Des réclamations pécuniaires de peu d'importance, faites par les négociants hollandais au gouvernement napolitain, faillirent amener une collision entre la Hollande et Naples : déjà des précautions militaires avaient été ordonnées, mais les difficultés furent facilement aplanies.

En même temps, les négociations commerciales qui avaient précédé et amené la question des soufres furent reprises avec l'Angleterre, sans toutefois laisser de chances à une rapide et prochaine conclusion.

CHAPITRE VI.

ESPAGNE. Adresse en réponse au discours de la couronne. -Blâme au sujet de la mise en état de siége de Barcelone.-Annonce des travaux du congrès.-Faiblesse du ministère.-Incertitude dans la question du traité de commerce avec l'Angleterre.-Affaire de la cour de Rome.-Emprunt.— Vente des biens nationaux.-Loi sur les priviléges des provinces basques. - Proposition tendant à renverser le ministère. — Débats.— Adoption d'un vole de censure.-Retraite du ministère.-Ministère nouveau.-Son programme.-Clôture de la session des Cortès.-Convocation nouvelle. -Révolte de Barcelone.-Junte provisoire.-Révolte en Catalogne.-Arrivée de Van Halen. Départ du régent.- Prorogation des Cortès.Travaux de la session.-Blocus de Barcelone.-Junte consultative.-Menaces du régent.-Bombardement, soumission de Barcelone.-Conduite du consul Lesseps et du commandant Gatier.-Réaction militaire.-Mesures barbares.-Contribution extraordinaire.-État de siége.—Protestations.-Situation générale.

Les premiers débats du congrès, qui eurent pour objet l'adresse en réponse au discours de la couronne, témoignérent d'un assez bon accord entre le ministère et les cortès. Les séances ne furent empreintes de quelque animation que lorsqu'il s'agit de la récente mise en état de siége de la ville de Barcelone. (Voy, annuaire de 1841.) On se rappelle que le duc de la Victoire avait décrété de son chef cette mesure extrême.

Le congrès écrivit dans l'adresse un blâme formel à ce sujet. Après avoir passé en revue la situation extérieure, voici comment les représentants de la nation s'exprimaient sur les derniers troubles :

<«< Il était juste, mais inévitable, que les chefs ostensibles

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de la rébellion fussent punis suivant toute la rigueur des lois, comme il est à désirer que la justice, qui doit mettre à profit les premiers moments, parvienne à découvrir les principaux auteurs et complices, pour qu'on ne voie pas se répéter des crimes si scandaleux par l'impunité des conspirateurs. Le congrès desire voir soutenir avec fermeté les principes de l'égalité et de la justice; il sent que la complication et la gravité des événements mettaient dans la nécessité de recourir à des moyens exceptionnels.

» Il espère qu'on ne verra pas se répéter à l'avenir cette mesure inconstitutionnelle (la mise en état de siége), qui rappelle de si funestes souvenirs. »

D'autres paragraphes avaient trait à l'administration antérieure à propos des difficultés financières. Le Congrès sait très-bien, ajoutait l'adresse, que les souvenirs de l'arbitraire d'autrefois et quelques exemples plus récents sont peu faits pour tranquilliser et stimuler les capitalistes; mais il espère que ces exemples ne se renouvelleront plus, et il croit que le gouvernement saura inspirer la confiance pour continuer et mener à bien tant d'entreprises utiles, qui s'annoncent d'une manière si heureuse.

» Le Congrès réglera, d'après la constitution et d'après les circonstances, les forces de terre et de mer que le pays devra entretenir; il coopérera de même à une meilleure organisation de la milice nationale. Il a appris avec plaisir que l'on travaille à la composition des codes. Il examinera avec sollicitude les évaluations et comptes concernant l'administration des finances. Il avisera à compléter la loi sur les tarifs, et, ce qui peut contribuer à augmenter le crédit, à faciliter la vente des biens nationaux. Enfin, le Congrès s'occupera avec zèle de la loi qui modifie les priviléges des provinces basques et de la fiberté de la presse, qu'il saura concilier avec le respect dû à la constitution. »>

C'était là, aussi bien qu'une réponse au manifeste du régent, un beau programme des travaux de la session, pro

gramme qui ne fut pas absolument rempli; seulement on voit que ce document parlementaire ne manquait ni de fermeté, ni de précision: il est daté du palais du congrès, le 23 février.

Le premier acte du congrès fut d'autoriser le gouvernement à continuer de percevoir les contributions.

Puis on s'occupa de la loi relative à la mobilisation de la garde nationale.

Cependant le ministère se soutenait difficilement; était-ce faiblesse de sa part? était-ce mauvaise disposition du congrès? Il faut reconnaître que les projets du cabinet étaient mal digérés, précisément parce qu'il n'osait agir; c'est ainsi qu'après avoir présenté une loi relative aux ayuntamientos, il la retira ensuite.

Sa conduite était remplie d'incertitudes en présence des questions pressantes. On voulait un réglement du tarif, tel que tout espoir de traité avec le royaume-uni s'évanouit. Rien ne fut décidé, et déjà on pouvait penser qu'un traité de commerce avec l'Angleterre avait les sympathies secrètes du gouvernement.

On ajournait à dessein la solution de la querelle avec la cour de Rome. Cependant l'opinion politique finit par forcer le ministère à un blâme contre les hostilités du Saint-Père. Ce blâme fut exprimé dans une circulaire du ministre de grâce et de justice aux évêques diocésains. (Voy. les documents historiques.) Des mesures furent prises pour paralyser l'effet des lettres apostoliques ordonnant des prières publiques en faveur de la religion en Espagne. (Voy. États-Romains.) Enfin le ministère tenait d'une main molle les rênes du gouvernement.

Cependant il eut son bill d'indemnité dans l'affaire de l'ambassadeur de France. (Voy. Ann. 1841.) On le félicita même d'avoir sainement interprété la constitution de 1837, et d'avoir opposé aux inspirations du dehors une résistance toute nationale. Ce fut à peu près son seul succès. Toutefois

le congrès lui accorda quelques-unes des demandes qu'il lui avait faites, notamment l'autorisation d'emprunter 160 millions de réaux. Un projet de loi fut adopté qui accordait plus de latitude pour la vente des biens nationaux ; chacun s'y trouvait autorisé à acquérir. Un député, à propos des abus auxquels avaient donné lieu certains marchés, avait demandé que la signature du régent ne fût pas valable si elle était apposée au bas d'actes qui porteraient sur des opérations financières. Cette proposition fut repoussée (avril). Enfin les provinces basques eurent la loi qui réglait leurs priviléges, de manière à les harmonier avec la loi fondamentale. Voici les dispositions qu'on y rencontre :

Un chef supérieur, nommé par le roi, gouvernera chacune des trois provinces. Alava, Guipuscoa et Biscaye, auront chacune une élection provinciale.

La loi générale réglera l'élection des membres, leur nombre et le mode de renouvellement.

Les attributions de la députation provinciale seront:

1o D'exercer les fonctions qui, aux termes de la loi, sont dévolues aux députations des autres provinces de la monarchie; 2o D'administrer les revenus provinciaux de la même manière que les juntes générales et particulières, et les députations forales, qui n'existent plus;

3o De recueillir les dons, encaisser les sommes dues à I'État pour le sel et le tabac, et fournir le contingent qui, lors du recrutement, devra tomber à la charge de la pro

vince;

5 Deux membres de la députation, nommés par elle, régleront, aux époques où elle ne siégera point, toutes les affaires économiques du pays;

6o Il sera établi des ayuntamientos dans les communes pour tout ce qui concerne leur gouvernement municipal ou intérieur. La loi générale détermine le nombre et le mode d'élection de ces conseillers municipaux;

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