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"Dans ma position, j'ai bien des intérêts à concilier, et bien des devoirs à remplir. Si j'eusse régné lors du premier, du second ou du troisième partage de la Pologne, j'aurais armé tout mon peuple pour vous secourir. Aussitôt que la victoire m'a permis de restituer vos anciennes lois à votre capitale, et à une partie de vos provinces, je l'ai fait avec empressement, sang toutefois prolonger une guerre qui eût fait couler encore le sang de mes sujets.

"J'aime votre nation. Depuis seize ans j'ai vu vos soldats à mes côtés, sur les champs d'Italie, comme sur ceux d'Espagne.

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J'applaudis à tout ce que vous avez fait; j'autorise les efforts que vous voulez faire; tout ce qui dépendra de moi pour seconder vos résolutions, je le ferai.

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"Si vos efforts sont unanimes, vous pouvez concevoir l'espoir de réduire vos ennemis à reconnaître vos droits; mais dans ces contrées si éloignées et si étendues, c'est surtout sur l'unanimité des efforts de la population qui les couvre, que vous devez fonder vos espérances de succès.

"Je vous ai tenu le même langage lors de ma première apparition en Pologne: je dois ajouter ici que j'ai garanti à l'empereur d'Autriche l'intégrité de ses états, et que je ne saurais autoriser aucune manœuvre ni aucun mouvement qui tendrait à la troubler dans la paisible possession de ce qui lui reste des provinces polonaises. Que la Lithuanie, la Samogithie, Witepsk, Polotzk, Mohilow, la Wolhynie, l'Ukraine, la Poldolie, soient animés du même esprit que j'ai vu dans la grande Pologne, et la Providence couronnera par le succès, la sainteté de votre cause; elle récompensera ce dévouement à votre patrie, qui vous a rendus si intéressans, et vous a acquis tant de droits à mon estime, et à ma protection, sur laquelle vous devez compter dans toutes circonstances.

3 Octobre.

19e Bulletin.

Moscou, le 16 Septembre, 1812.

Depuis la bataille de la Moskwa, l'armée française a poursuivi l'ennemi sur les trois routes de Mojaïsk, de Svenigorod, et de Kalougo sur Moscou.

Le roi de Naples était le 9 à Koubinskie; le vice-roi à Rouza; et le prince Poniatowski, à Féminskoë. Le quartiergénéral est parti de Mojaïsk le 12, et a été porté à Peselina; le 13, il était au château de Berwska; le 14, à midi, nous sommes entrés à Moscou. L'ennemi avait élevé sur la Mon

tagne des Moinaux, à deux werstes de la ville, des redoutes qu'il a abandonnées.

La ville de Moscou est aussi grande que Paris; c'est une ville extrêmement riche, remplie des palais de tous les principaux de l'empire. Le gouverneur russe, Rostapchin, a voulu ruiner cette belle ville, lorsqu'il a vu que l'armée russe l'abaudonnait. Il a armé 3000 malfaiteurs qu'il a fait sortir des cachots; il a appelé également 6000 satellites et leur a fait distribuer des armes de l'arsenal.

Notre avant-garde, arrivée au milieu de la ville, fut accueillie par une fusillade partie du Kremlin. Le roi de Naples fit mettre en batterie quelques pièces de canon, dissipa cette canaille et s'empara du Kremlin. Nous avons trouvé à l'arsenal 60,000 fusils neufs, et 120 pièces de canon sur leurs affuts. La plus complette anarchie régnait dans la ville; des forcenés ivrés couraient dans les quartiers et mettaient le feu partout. Le gouverneur Rostapchin avait fait enlever tous le marchands et négocians par le moyen desquels on aurait pu rétablir l'ordre. Plus de quatre cens Français et Allemands avaient été arrêtés par ses ordres; enfui il avait en la précaution de faire enlever les pompiers avec les pompes; aussi l'anarchie la plus complette cette grande et belle ville, et les flammes la consument. Nous y avons trouvé des ressources considérables de toutes espèces.

L'empereur est logé au Kremlin, qui est au centre de la ville, comme une espèce de citadelle entourée de hautes murailles. Trente mille blessés ou malades russes sont dans les hôpitaux, abandonnés sans secours et sans nourriture.

Les Russes avouent avoir perdu 50,000 hommes à la bataille de la Moskwa. Le prince Bagration est blessés à mort. On a fait le relevé des généraux russes blessés ou tués à la bataille: il se monte de quarante-cinq à cinquante.

7 Octobre, 1812.

21e Bulletin.

Moscou, le 20 Septembre, 1812. Trois cents chausseurs ont été arrêtés et fusiilés. Ils étaient armées d'un fusée de six pouces, contenue entre deux morceaux de bois; ils avaient aussi des artifices qu'ils jettaient sur les toits. Ce misérable Rastopchin avait fait confectionner ces artifices en faisant croire aux habitans qu'il voulait faire un ballon qu'il lancerait plein de matières incendiaires sur l'armée française. Il réunissait sous ce prétexte les artifices et autres objets nécessaires à l'exécution de son projet.

Dans la journée du 19, et dans celle du 20, les incendies ont cessé. Les trois quarts de la ville sont brûlés, entre autres le

beau palais de Catherine, meublé à neuf. Il reste au plus le quart des maisons.

Pendant que Rastopchin enlevait les pompes de la ville, il laissait 60,000 fusils, 150 pièces de cannon, plus de 100,000 boulets et bombes, 1,500,000 cartouches, 400 milliers de poudre, 400 milliers de salpêtre et de souffre. Ce n'est que le 19 qu'on a découvert les 400 milliers de salpêtre et de souffre, dans uu bel établissement situé à une demi-lieu de la ville; cela est important; nous voilà approvisionnés pour deux campagnes.

On trouve tous les jours des caves pleines de vin et d'eaude-vie.

Les manufactures commençaient à fleurir à Moscou; elles sont détruites. L'incendie de cette capitale retarde la Russie de cent ans.

Le tems paraît tourner à la pluie. La plus grande partie de l'armée est casernée dans Moscou.

24 Octobre.

Ministère de la police générale.

Trois ex-généraux Mallet, Lahorie et Guidal ont trompé quelques gardes nationales, et les ont dirigés contre le ministre de la police générale, le préfet de police et le commandant de la place de Paris. Ils ont exercé des violences con tr'eux. Ils répandaient faussement le bruit de la mort de l'empereur.

Ces ex-généraux sont arrêtés; ils sont convaincus d'impos ture; il va en être fait justice.

Le calme le plus absolu règne à Paris; il n'a été troublé que dans les trois hôtels où les brigands se sont portés.

Le présent ordre sera publié et affiché à la diligence de M. le conseiller d'état, préfet de police.

Paris, ce 23 Octobre, 1812.

Le ministre de la police générale de Rovigo,

(Signé)

30 Octobre.

Le Duc

Commission militairé.

Jugement qui condamne les nommés Malet, Lahorie, Guidal, ex-généraux de brigade; Rabbe, colonel; Soulier, chef de bataillon; Steenhower, Borderieux et Picquerel, capitaines; Fessart, Lefèvbre, Regnier et Beaumont, lieutenants; Rateau, caporal; et Boccheiampe, prisonnier d'état, à la peine de mort: le premier en réparation de crime contre la sûreté inté - TOME IV.. PPPPP

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rieure de l'état, par un attentat dont le but était de détruire le gouvernement et l'ordre de successibilité au trône, et d'exciter Iss citoyens ou habitans à s'armer contre l'autorité impériale; et les autres de complicité avec ledit Malet.

Le même jugement acquitte les sieurs Gomont, Lebis, Provost, Godard, Viallevielhe, Caron, Limogin, Julien, Caumette, et Rouff, du crime de complicité.

Napoléon, &c. &c.

La commission militaire, séante à Paris, a rendu le jugement suivant.

De par l'empereur et roi. Cejourd'hui, vingt-huitième jour du mois d'Octobre, l'au mil-huit-cent-douze,

La commission militaire créée le 23 du présent mois, par arrêté du conseil des ministres, présidée par S. A. S. Mgr. le prince archi-chancelier de l'empire, conformément aux ordres de S. M.; la dite commission formée par S. Exc. le ministre de la guerre, et composée, conformément au décret impérial du 17Messidor an 12, de.

S. Exc. le comte Dejean, grand officier de l'empire, grandaigle de la légion d'honneur, premier inspecteur-général du génie, président;

M. le général de brigade, baron Deriot, commandant les dépôts de la garde impériale, l'un des commandans de la légion d'honneur, et chevalier de la couronne de fer, juge: M. le général baron Henry, major de la gendarmerie d'élite de la garde impériale, officier de la légion d'honneur, et chevalier de la couronne de fer, juge;

M. Géneval, colonel de la 18e. légion de gendarmerie impériale, officier de la légion d'honneur, juge;

M. le colonel Moncey, premier aide-de-camp du premier inspecteur-général de la gendarmerie impériale, officier de la légion d'honneur, juge;

M. Thibault, major du 12e régiment d'infanterie légère, membre de la légion d'honneur, juge;

M. Delon, capitaine-adjoint à l'état major de la lère division militaire, juge nommé par décision de la commission militaire, pour remplir les fonctions de rapporteur;

Assistés de M. Boudin, greffier nommé par le rapporteur ; Lesquels, aux termes des lois, ne sont parens ni alliés entr'eux, ni des prévenus, aux degrés prohibés par la constitution.

La commission susdite, convoquée par S. Exc. le comte Dejean, président, s'est réunie dans la salle des séances du 1er conseil de guerre permanent de la 1ère division militaire à Paris, à l'effet de juger les nommés.

Claude-François Malet, né le 28 Juin, 1754, à Dôle, département du Jura, militaire de profession, sans domicile fixe,

ayant été aux armées, fils de feu Jean Marie, (ancien capitaine de cavalerie) et de feue Gabrielle Fèbvre, actuellement général de brigade depuis son arrestation qui date de quatre ans et demi, l'un des commandans de la légion d'honneur; taille d'un mètre 72 centimètres, cheveux et sourcils châtains, front étroit yeux roux, nez gros, bouche moyenne, menton rond, visage ovale, figure pleine, teint un peu jaune;

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Victor Claude Alexandre Fanneau Lahorie, né le 6 Janvier, 1766, à Javron, département de la Mayenne, ex-général de brigade, fils de feu Charles Julien et de Marie Lemeunier Dubignon, domiciliée en la susdite commune; taille d'un mètre 69 centimètres, cheveux et sourcils châtains, front haut, yeux rous, nez long, bouche grande, menton pointu, visage ovale, marqué de petite vérole;

Maximilien Joseph Guidal, âgé de 47 ans, natif de Grasse, département du Var, fils de feu Honoré et de feue Marie Marthe Moujins, domicilié à Marseille, ex-général de brigade, jouissant de la réforme depuis environ dix ans ; taille d'un mètre 82 centimètres, cheveux et sourcils blonds, yeux gris, nez effilé et mince, bouche moyenne, menton alongé, figure longue et maigre;

Gabriel Soulier, né le 2 Décembre, 1767, à Carcassonne, département de l'Aude, fils de Pierre et de feue Cécile Beraigne, le père domicilié à Carcassonne, actuellement chef de bataillon; commandant la 16e cohorte des gardes nationales, membre de la légion d'honneur;

Gomont, dit Saint-Charles (qui est son nom de baptême) né le 27 Mars, 1768, à Metz, département de la Moselle, miiitaire de profession, domicilié à Paris habituellement; fils de feu Jean et de feue Henriette Seguin, actuellement sous-lieutenant à la 10e cohorte, 1er compagnie, casernée à Paris ;

Antoine Picquerel, né le 11 Novembre, 1771 à Neufmarché, département de la Seine-Inférieure, fils de feu Guillaume Si mon et de feue Marie Anne Vigureux, domicilié, avant son entrée au service, à Pontoise, département de Seine et Oise, actuellement adjudant-major à la 10e cohorte, membre de la légion d'honneur;

Louis Charles Fessart, né le 22 Février, 1769, à Méru, canton du dit lieu, département de l'Oise, fils de feu JeanCharles et de Marie Marthe Desmarest, domicilié à Méru, actuellement lieutenant à la 10e cohorte, 3e compagnie casernée à Paris;

Louis Joseph Lefêbre, né le 2 Juin, 1767, à Lille, département du Nord militaire de profession, en retraite, à Nojent le Rotrou, département d'Eure et Loir, fils de Charles Joseph et de Gertrude Bernard, domiciliés à Lille, actuellement souslieutenant à la 10e cohorte, 2e compagnie, casernée à Paris, membre de la légion d'honneur ; PPPPP 2

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