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voyé à Londres, et il n'y a eu aucune autre communication entre les deux gouvernemens. La lettre où V. Exc. trouvera la copie ci-jointe, et que j'ai adressée au secrétaire d'état pour les affaires étrangères de S. M. Britannique, a été remise en mer au commandant de la station de Douvres.

La démarche que je fais auprès de vous, Monsieur le comte, est une conséquence des dispositions du traité de Tilsitt, auquel S.M. a la volonté de se conformer jusqu'au dernier moment. Si les ouvertures faites à l'Angleterre ont quelque résultat, je m'empresserai ds vous en prévenir. S.M. l'empereur Alexandre y prendra part, ou en conséquence du traité de Tilsitt, ou comme allié de l'Angleterre, si déjà ses relations avec l'Angleterre sont formées.

Il m'est formellement prescrit, Monsieur le comte, d'exprimer, en terminant cette dépêche, le vœu déjà manifesté par S. M. à M. le colonel Czernichen, de voir des négociation, qu'elle n'a cessé de provoquer depuis dix-huit mois, prévenir enfin des événemens dont l'humanité aurait tant à gémir.

Quelle que soit la situation des choses lorsque cettre lettre parviendra à V. Exc,, la paix dépendra encore des résolutions de votre cabinet,

J'ai l'honneur, Monsieur le comte, de vous offrir l'assurance de ma plus haute considération.

(Signé)

Pour copie conforme,

Le ministre des relations extérieures,

Le Duc de BASSANO.

Le Duc de BASSANO.

No. II.

-Copie d'une lettre addressée par le ministre des relations extérieures à lord Castlereagh, secrétaire d'état pour les affaires étrangères de S.M. britannique.

Monsieur,

Paris, le 17 Avril, 1812.

S. M. l'empereur et roi, toujours animé des mêmes sentimens de modération et de paix, a voulu faire de nouveau une démarche authentique et solennelle pour mettre un terme aux malheurs de la guerre. La grandeur et la force des circonstances dans lesquelles le monde se trouve aujourd'hui placé, déterminent S. M. Elle m'autorise, monsieur, à vous entretenir de ses dispositions et de ses vues.

Beaucoup de changemeus ont eu lieu en Europe depuis dis ans; ils ont été la suite nécessaire de la guerre qui s'était allumée entre la France et l'Angleterre. Beaucoup de changemens arriveront encore, et ils résulteront de la même cause. Le carac

tère particulier que la guerre a pris peut ajouter à l'etendue et à la durée de ces résultats. Des principes exclusifs et arbitraires ne peuvent se combattre que par une opposition sans mesure et sans terme, et le système de la préservation et de la résistance doit avoir le même caractère d'universalité, de persévérance et de vigueur,

La paix d'Amiens, si elle avait été maintenue, aurait prévenu bien des bouleversemens. Je renouvelle le vœu que l'expérience du passé ne soit pas perdue pour l'avenir.

S. M. s'est souvent arrêté devant la perspective des triomphes les plus certains, et en a détourné ses regards pour invoquer la paix. En 1805, toute assurée qu'elle était des avantages de sa position, et quelque confiance qu'elle dût à des présages que la fortune devait sitôt réaliser, elle fit au gouvernement de S.M. britannique des propositions qui furent éludées, sur le prétexte que la Russie devait être consultée. En 1808, de nouvelles propositions furent faites de concert avec la Russie. L'Angleterre allégua la nécessité d'une intervention qui ne pouvait être que le résultat de la négociation elle-même. En 1810, S.M. ne pouvant se dissimuler plus long-tems que les édits du conseil britannique de 1807 rendaient la conduite de la guerre incompatible avec l'indépendance de la Hollande, autorisa des ouvertures indirectes qui tendaient également à la paix; elles n'eurent aucun effet, et de nouvelles provinces durent être réunies à l'empire.

Le moment présent rassemble à la fois toutes les circonstances des diverses époques où S. M. montra les sentimens pacifiques qu'elle m'ordonne de manifester encore aujourd'hui.

Les calamités qui désolent la Peninsule, et les vastes contrées de l'Amérique-Espagnole, doivent exciter l'intérêt de toutes les 'nations et les animer d'une égale sollicitude pour les voir

cesser,

Je m'exprimerai, Monsieur, d'une manière que V. Exc. trouvera conforme à la franchise de la démarche que je suis chargé de faire, et rien n'en montrera mieux la grandeur et la loyauté, que Jes termes précis du langage qu'il m'est permis de tenir. Dans quelles vues et pour quels motifs m'envelopperais-je de formes qui ne conviennent qu'à la faiblesse qui, seule, a intérêt de tromper?

Les affaires de la Péninsule et des Deux-Siciles sont les différends qui paraissent les plus difficiles à concilier. Je suis autorisé à vous proposer d'en établir l'arrangement sur les bases suivantes :

L'intégrité de l'Espagne serait garantie, la France renoncerait à toute extension du côté des Pyrénées, la dynastie actuelle serait déclarée indépendante, et l'Espagne régie par une constitution nationale des cortès ;

L'indépendance et l'intégrité du Portugal seraient également garanties et la maison de Bragance régnerait;

Le royaume de Naples resterait au roi de Naples. Le royaume de Sicile serait garanti à la maison actuelle de Sicile ;

Par suite de ces stipulations, l'Espagne, le Portugal et la Sicile seraient évacués par les troupes françaises et anglaises de

terre et de mer.

Quant aux autres objets de discussion, ils peuvent être négociés sur cette base; que chaque puissance gardera ce que l'autre ne peut pas lui ôter par la guerre.

Telles sout, Monsieur, les bases de conciliation et de rapprochement offertes à S. A. R. le prince-régent.

S. M. l'empereur et roi ne calcule dans cette démarche ni les avantages, ni les pertes que la guerre, si elle est plus long-tems prolongée, peut présager à son empire. Elle se détermine par la seule considération des intérêts de l'humanité et du repos des peuples; et si cette quatrième tentative doit être sans succès, comme celles qui l'ont précédée, la France aura du moins la consolation de penser que le sang qui pourrait couler encore, retombera tout entier sur l'Angleterre,

J'ai l'honneur, &c.

(Signé) Le Duc de BASSANO.

Pour copie conforme,

Le ministre des relations extérieures,

Le Duc de Bassano,

No. III.

Copie d'une note du prince Kourakin au ministre des relations

Monsieur le duc,

extérieures.

Paris, le 18 (30) Avril, 1812.

Depuis l'entretien que j'ai eu mardi dernier avec V. Exc. et dans lequel elle m'a fait espérer que les communications que je lui ai faites verbalement d'après le contenu de mes dernières instructions, seraient admises comme base de l'arrangement dont nous avons à nous occuper, je n'ai pu la trouver chez elle et ob tenir de sa part de nouvelles conférences pour la discussion de cet objet et la rédaction du projet de cette convention.

Il m'est impossible, M. le Duc, de différer davantage de rendre compte à l'empereur mon maître de l'exécution des ordres qu'il m'a donnés. Je m'en étais, acquitté verbalement envers S. M. l'empereur et roi, dans l'audience particulière que S. M. m'a accordée Lundi. Je m'en suis acquitté aussi et de la même manière envers V. Exc. daus mes entretiens avec elle de Ven

dredi, de Lundi et de Mardi. Je me flattais que l'envoi d'un projet de convention fondé sur les bases que j'ai eu ordre de proposer, et qui, à ce que j'espérais, devaient être agréables à S. M. I. et R. me mettrait à même de prouver immédiatement à S. M. l'empereur mon maltre que j'avais rempli ses intentions, et avais eu le bonheur de le faire avec succès. Privé depuis deux jours de la faculté de voir V. Exc., de poursuivre et de termiher avec elle le travail si important et si pressant par les circonstances dont nous avons à nous occuper, pour lequel il n'y a pas un seul jour à perdre, et voyant s'évanouir la certitude dont je n'étais flatté, que cet ouvrage serait achevé sans délai et pourrait conduire au but qu'il devait avoir, de prévenir encore les conséquences malheureuses de l'extrême rapprochement où les armées de S. M. l'empereur et roi sont parvenues de celles de S. M. l'empereur mon maître, il me reste à pourvoir à ma responsabilité envers ma cour, en m'acquittant officiellement des communications que j'ai reçu ordre de faire à V. Exc., et qui jusqu'à présent ne lui ont été données de ma part que de vive voix.

Il m'est ordonné de déclarer à V. Exc. que la conservation de la Prusse et son indépendance de tout lien politique dirigé contre la Russie est indispensable aux intérêts de S. M. I.; pour ar*river à un véritable état de paix avec la France, il faut néces sairement qu'il y ait entre elle et la Russie un pays neutre qui ne soit occupé par les troupes d'aucune des deux puissances; que comme toute la politique de S. M. l'empereur mon maître ne tend qu'à établir des rapports solides et stables avec la France, et que ceux-ci ne sauraient subsister tant que des armées étrangères continueraient à séjourner dans une telle proximité des frontières de la Russie, la première base de toute négociation ne peut être que l'engagement formel de l'entière évacuation des états prussiens et de toutes les places fortes de la Prusse, quels qu'aient été l'époque et le fondement de leur occupation par les troupes françaises ou alliées, d'une diminution de la garnison de Dantzick, de l'évacuation de la Poméranie Suédoise, et d'un arrangement avec le roi de Suède, propre à satisfaire réciproquement les deux couronnes de France et de Suède.

Je dois déclarer que, quand les demandes ci-dessus énoncées seront accordées de la part de la France, comme base de l'arrangement à conclure, il me sera permis de promettre que cet arrangement pourra contenir aussi de la part de S. M. l'empereur mon maître les engagemens suivans.

Sans dévier aux principes adoptés par l'empereur de toutes les Russies pour le commerce de ses états et pour l'admission des neutres dans les ports de sa domination, principes auxquels, S.M. ne saurait jamais renoncer, elle s'oblige, par un effet de son attachement pour l'alliance formée à Tilsitt, à n'adopter aucun changement aux mesures prohibitives établies en Russie, et sé TOME IY. MM MM M

vèrement observées jusqu'à présent contre le commerce direct avec l'Angleterre ; S. M. est prête, de plus, à convenir avec S. M. l'empereur des Français, et roi d'Italie, d'un système de licenses à introduire en Russie, à l'exemple de la France; bien entendu qu'il ne pourra être admis qu'après qu'il aura été reconnu ne pouvoir augmenter par ses effets le préjudice qu'éprouve déjà le commerce de la Russie.

S. M. l'empereur de toutes les Russies s'engagera aussi par cette convention, à traiter, par un arrangement particulier, de certaines modifications que la France peut désirer pour l'avantage de son commerce dans le tarif des douanes de Russie de 1810.

Enfin, S. M. consentira aussi à s'engager de conclure un traité d'échange du duché d'Oldenbourg contre un équivalent couve nable, qui sera proposé par S. M. l'empereur et roi, et dans le quel S. M. I. déclarera retirer la protestation qu'elle a été dans le cas de donner pour mettre en réserve les droits de sa maison sur le duché d'Oldebourg.

Telles sont, M. le duc, les bases qu'il m'a été ordonné de présenter ici, et dont l'admission dans ce qui regarde l'évacuation des états prussiens et de la Pomeranie Suédoise, la réduction de la garnison de Dantzick sur le pied où elle était avant le 1er. Janvier, 1811, et la promesse d'une négociation avec la Suède peut seule rendre possible encore un arrangement entre nos deux cours. C'est avec un vif regret que, malgré l'intervalle qui s'est écoulé depuis que je les ai communiquées verbalement à V. Exc., je me vois encore dans une incertitude complette sur les effets qu'auront mes démarches, malgré les augures favorables que je m'étais plu à tirer de l'entretien que S. M. I. et R. a bien voulu m'accorder Lundi, et des assurances que V. Exc. y a ajoutées de son côté. Je ne puis ne pas renouveler à V. Exc. ce que j'ai déjà pris la liberté de porter moi-même à la connaissance de S. M. l'empereur, et ce que j'ai eu l'honneur de vous dire aussi à vousmême, M. le duc, que si, à mon grand regret, la nouvelle me parvenait que M. le comte de Lauriston eût quitté Pétersbourg, il serait de mon devoir de demander sur-le-champ, que mes passeports me fussent délivrés et de quitter aussi Paris,

(Signé)

Que V. Exc. reçoive, &c.

Le prince ALEXANDRE KOURAKIN. Pour copie conforme,

Le ministre des relations extérieures,

Le Duc de BASSANO.

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