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D. Etes vous resté long-tems à Paris ?

R. Je me suis occupé de me procurer del'argent, en réalisant les diamans que le marquis de Wellesley m'avait remis. J'ai fait acheter un cabriolet et un cheval de M. de Couvert, rue Filles-Saint-Thomas, hôtel d'Angleterre.

M. de Saint-Bonnel avait acheté deux chevaux de personnes dont je ne me rapelle pas les noms; il a dû depuis nom départ pour Valençay en acheter un de Franconi, et en faire acheter un autre chez la princesse de Carignan.

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D. Comment vous êtes-vous introduit dans le château de Valançay ?

R. Je me suis présenté au château comme ayant des objets curieux à vendre, etc. J'espérais par ce moyen pouvoir remettre au prince les lettres dont j'étais chargé, lui exposer tous mes moyens, obtenir son consentement. Je n'ai communiqué qu'avec le prince, D. Antonio et l'intendant. Le prince Ferdinand a refusé de m'entendre et de rien recevoir; j'ai même lieu de croire, d'après l'étrange accueil qui a été fait à ma proposition aussi glorieuse, qu'il a fait prévenir le gouver neur du château, et que c'est d'après cet avis que j'ai été arrêté.

D. Quels moyens aviez-vous disposés pour conduire le prince Ferdinand à la côte, dans le cas où il aurait consenti à vous suivre ?

R. Ma première apparition à Valançay avait pour but de faire connaître mon projet au priuce, de convenir avec lui, s'il l'avait accepté, d'un jour fixe anquel je serais revenu le prendre et de suite j'aurais été à la côte, prévenir de ce jour le commandant de ma flotte; je serais revenu à Paris pour me procurer les hommes et les chevaux dont j'aurais eu besoin pour les relais à établir sur la route. Le soir du jour convenų, le prince serait sorti de son appartement, et avec les chevaux disposés sur la route, nous aurious été déjà fort éloignés de Valançay quand on s'y serait aperçu de son départ ?

D. Ou aviez-vous le projet de conduire le prince après son. embarquement.

R. L'intention du Marquis de Wellesley était qu'il fût conduit en Espagne: le duc de Kent avait désiré qu'il fût de suite transporté à Gibraltar; mais ce parti me répugnait; c'eût été réellement le mettre dans une prison; mon intention était de lui proposer de choisir l'endroit où il voulait se rendre, et de l'y conduire; car on m'avait assuré que le commandant Cockburn avait ordre de suivre mes directions.

D. Quelles sont les personnes que vous deviez employer? R. Le sicur Samt-Bonnel est le seul qui ait eu connaissance de mon projet ; je ne me serais occupé de chercher des personnes pour concourir à son exécution, que lorsque j'aurais été assure des dispositions du prince Ferdinand; le nombre n'ey devait être que peu considérable.

D. Connaissez-vous les environs de Valançay et les pays que vous deviez parcourir?

R. Je ne connais aucun de ces pays; mais des cartes ex'cellentes que j'ai achetées à Paris, à mon arrivée, m'auraient procuré des indications suffisantes.

D. Quel motif avait pu vous déterminer à former un pareil projet ?

R. Il m'avait paru honorable.

D. Reconnaissez-vous le paquet que je vous représente?

R. Je le reconnais: il contient les papiers timbrés, cachets et autres objets dont je vous ai déjà parlé, et qui ont été saisis lors de mon arrestation.

Et de suite le sieur Kolli a paraphé les papiers.
Lecture, etc.

Pour copie conforme,

Le ministre de la police général.

No. IV.

KOLLI.

(Signé)

Duc d'OTRANTE.

Lettre du roi Charles IV, adressée au roi d'Angleterre, en 1802. (Elle avait été remise à Kolli avec une apostille du marquis de Wellesley, pour lui servir de titre de créance auprès du prince Ferdinand.

Carolus, Dei gratiâ, Hispaniarum, utriusque Siciliæ, Hierusa lem, Indiarum, etc. rex, archi-dux Austria, dux Burgandiæ, et Mi diolani, etc. serenissimo et potentissimo principi domino Georgio III, Magna Britanniæ regi, etc. Fratri et consanguineo nostro carissimo, salutem et utramque felicitatem. Faustissimum hodiernâ die ad nos delatum est nuntium. Neapoli, die 25 mensis Augusti, ritè initum peractumque fuisse matrimonium carassimi filii nostri admodum dilecti utriusque Siciliæ regis filiâ. Quantum inde gaudium, quantamque perceperimus lætitiam frustrà majestatis vestræ describere conaremur; id solum asserimus nullam aliundè ei posse accessionem fieri nisi ex testimonio quod nobis reddatur, eventum hunc majestati vestræ gratum extitisse. Id certè sperare nos facit majestatis vestræ in nos perpetuus amor, firmaque, in quâ majestatem vestram esse volumus opinio nihil fortunatum majestati vestræ accidere posse, quod voluptati nobis nom sit futurum. Cæterum Deux. Opt Max. majestatem vestram quam diutissime servet incolumem. Dabantur in Opido de Ignaladu, die nonâ Septembris, anno millesimo octingentesimo secundo.

Majestatis vestræ frater amantissimus,

Subscription de la lettre.

CAROLUS.

Serenissimo et potentissimo principi ac domino Georgio III

Magnæ Britaniæ regi, fratri et consanguineo nostro cariss

mo.

Au revers de cette lettre est écrit ce qui suit de la main du marquis de Wellesley.

"Le soussigné, principal secrétaire d'état de S. M. B. pour Je département des affaires étrangères, atteste que cette lettre est véritablement la même que S. M. C. le roi Charles IV adressa à S. M. B. le roi George 111 sur l'événement du mariage du prince des Asturies, actuellement le roi Ferdinand VII. Čette pièce authentique est confiée aux personages qui auront l'honneur de la soumettre aux yeux de S. M. C. Ferdinand VII pour verifier leur mission."

Downing-street, ce 26 Février, 1810.

(Signé)

No. V.

WELLESLEY.

Lettre du roi George III, et signée de sa main, au prince Ferdinand, dont était chargé Kolli.

Monsieur mon frère, il y a long tems que je cherche l'occasion de faire remettre à V. M. une lettre signée de ma propre main, pour lui faire parvenir les sentimens du vifintérêt et de la profonde douleur que je ne cesse d'éprouver depuis que V. M. est éloignée de son royaume et de ses fidèles et bons sujets. Non-obstant la violence et la cruauté dont l'usurpateur du trône de l'Espagne accable la nation espagnole, ce doit être une grand consolation pour V. M. que de savoir que son peu. ple conserve toujours sa loyauté et son attachement envers la personne de son roi légitime, et que l'Espagne fait des efforts continuels pour maintenir les droits de V. M., et pour rétablir l'indépendance de la monarchie. Les ressources de mon royaume, mes flottes et mes armées, ne décessent d'aider les sujets de V. M. dans cette grande cause, et mon allié le prince régent de Portugal y a contribué avec tout le zèle et toute le constance d'un fidèle ami.

Aux de bons sujets V. M., ainsi qu'à vos alliés, il ne manque que la présence de V. M. en Espagne, où sa personne ne pour Tait qu'inspirer une nouvelle énergie.

Ainsi, avec toute la franchise de l'amitié et de l'alliance qui me lie aux intérêts de V. M., je la prie de réfléchir, sur les moyens les plus sages et les plus efficaces, pour s'arracher aux indignités qu'elle éprouve, et pour se montrer au milien d'un peuple, qui ne respire qu'un sentiment universel pour le bonheur de V. M. et pour sa gloire.

J'ajoute à cette lettre une copie de celle de crédence que mon ministre en Espagne doit présenter à la Junte centrale qui y gouverne au nom et par l'autorité de V. M.

Je prie V. M. de ne pas douter de ma véritable amitié, étant l'attachement le plus invariable.

Monsieur mon frère,

Votre bon frère,

(Signé) GEORGE R.

Par ordre de S. M. (Signé) WELLESLEY.

Au palais de la reine, à

Londres, ce 31 Janvier, 1810.

No. VI.

Lettre en Latin du roi George III. au prince Ferdinand, dont était chargé Kolli. (Elle était sous la même enveloppe que celle, No. 2.)

Georgius Tertius, Dei gratia Britanniarum rex, fidei defensor, duc Brunsvicensis, ac Lunenburgensis, et princeps elector, &c. serenissimo et poteatissimo principi Domino Ferdinando septitno, eâdem gratiâ Hispaniarum utriusque Siciliæ et Indiarum regi catholico, &c. Fratri et consanguineo nostro carissimo salutem! Serenissime, et potentissime princeps, frater et consanguinee carissime! Cùm nihil nobis magis cordi atque curæ sit, quam ut antiquam illam inter coronas nostras amicitiam jam feliciter restitutam, omni modo sustentemus atque augeamus, et solitam istam, inter subditos nostros consuetudinem et commercium, ex quibus in omni tempore utrique. genti utilitates quam maximè extiterunt, mutuis officiis iterum florere faciamus; quin etiam et ut mutuâ ope et consilio bellum quod adversus communem hostem gerimus, ad faustum exitum perducamus; virum aliquem idoneum nostrâ ex partie in majestatis, aulam vestræ legare, qui tam nobilitate generis, quam animi dotibus insiguis, propensam insuper, que in nobis est erga majestatem vestram volontatem palam

manifestaret.

Hunc igitur in finem per quam fidelem et dilectum consiliarium nostrum Henricum Wellesley armigerum, ex nobile stirpe natum, seleximus; atque oblegati nostri extraordinairii et ministri plenipotentiarii ad majestatem vestram dignitate ornavimus confisi non nisi gratam majestati vestræ futuram esse talem electionem. Quod super est majestatem vestram precamur, ut hunc oblegatum nostrum extraordinarium et ministrum plenipotentiarium propitio animo accipiat, neque quidquam ei magis impense mandatum credat, quàm et omnibus modis studium et amicitiam nostram erga majestatem vestram exhibeat. Denique divini numinis tatelæ majestatem vertram domumque suam regiam commendamus, et ut sospitem incolumemque ab omnibus periculis conservet enixè ex animò pre

camur.

Dabantur in castello nostro regali Windsoriæ, die tertio mensis Januarii, anuo domini millesimo octingentessimo decimo, regnique nostri quinquagesimo.

Majestatis vestræ frater amantissimus,

(Verâ copiâ.)

GEORGES R.

WELLESLEY.

No. VII.

Lettre de M. de Barthemy, a S. Exc. le ministre de policë generale.

Monseigneur,

J'ai l'honneur de rendre compte à V. Ex. que le 25 Mars dernier, LL. AA. RR. les princes d'Espagne me firent l'honneur de me communiquer par M. de Amezaga, leur premier écuyer, des notes, par lesquelles LL. AA. me manifestaient qu'elles avaient à cœur d'exprimer la joie vive et pure que leur faisait éprouver le mariage de S. M. l'empereur et roi avec S. A. I. et R. Madame Marie-Louise, archiduchesse "d'Autriche; et dans cette occasion, de donner des témoignages éclatans de l'amour et de l'attachement parfaits qu'elles ont voués à la personne auguste du grand Napoléon, LL. AA. RR. ayant bien voulu me manifester de vive voix les sentimens qu'elles avaient démonstrés par écrit, je me suis entendu avec le premier écuyer de LL. AA. pour régler cette auguste cérémonie, aussi bien que les localités pouvaient le comporter.

Le 1er Avril, à six heures du matin, une décharge d'artillerie a annoncé le jour de cette fête solennelle. A huit heures il y a én parade dans la première cour du château; j'ai été content de la tenue des troupes. A dix heures, je me suis rendu, avec le premier écuyer de LL. AA. et les autorités civiles de Valançay, à l'église de cette ville, dans trois magnifiques voitures. Les habitans s'y étaient rendus en foule. La garnison formait une double ligne du portail à l'autel. La grand-messe et le Te Deum d'après la permission de l'archevêque du département de l'Indre ont été chantés en musique. Le très-saint-sacrement a été exposé, et l'office divin a été terminé par des prières pour LL. MM. II. et RR. Sur mon passage et à l'église, on n'a cessé de crier vive l'empereur! vive l'impératrice! avec le plus grand enthousiasme.

Le cortége s'est rendu de l'église de Valençay à la chapelle du château. Les autorités placées, et la troupe rangée en haie des appartemens de LL. AA. à autel, je me rendis avec le premier écuyer dans le grand salon, où je trouvai les princes, que j'eus l'honneur de conduire aux places qui avaient été marquées. L'artillerie s'est fait entendre, et s'est répétée d'heure en heure. A midi, l'aumônier de LL. AA. officia; un Te Deum fut chanté en musique, et la cérémonie fut terminée par des prières pour la conservation de LL. MM. II. et RR. Avant de quitter la chapelle, le prince Ferdinand s'est tourné vers les assistans, et a crié à plusieurs reprises, vive l'empereur! vive l'impératrice! Nous avons aussi répété ces cris avec allégresse et enthousiasme.

A une heure, j'ai reconduit, accompagné du premier écuyer de LL. AA. les princes, dans leurs appartemens. A une heure et demie j'ai fait exécuter quelques manœuvres devant LL. A A.

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