Revue industrielle.

Mouvement du commerce des bois. Nous sommes heureux de pouvoir enfin constater une légère reprise des affaires en charpentes qui étaient complétement délaissées depuis si longtemps.

Quelques ventes se sont faites en bois de marrons dans la Côted'Or et la Haute-Marne, quelques lots ont été achetés pour sciage, et les charpentiers, menuisiers, charrons, dont les chantiers s'étaient dégarnis sans se remplir depuis deux ans, se sont décidés ou se décident à faire quelques approvisionnements devenus indispensables.

Ces achats sont tous pour la province, villes et villages; Paris n'a demandé rien encore. Cependant quelques maisons ont fait visiter les ports, ils se sont informés de l'état et de l'importance des dépôts, et l'espoir revient un peu aux détenteurs de charpentes.

La vente de détail a commencé, les demandes sont assez nombreuses pour que le commerce de Paris redoute cette concurrence, ressource précieuse pour les exploitants. Les prix sont encore bien bas en comparaison du cours élevé des autres produits forestiers. Cependant ils laissent d'assez beaux bénéfices, tant les cours étaient avilis, lors des adjudications des coupes.

Les bois de charronnage, orme et frêne ont repris faveur. Les hêtres sont recherchés par le commerce de Paris, les noyers sont revenus au prix de 1847.

Un article abandonné depuis longtemps et qui suit ordinairement les chances diverses du commerce de Paris, atteste une reprise considérable de ce commerce par la faveur avec laquelle il est recherché depuis un mois. Nous voulons parler des sciages de bois blancs employés par les ébénistes et layetiers de Paris. La fabrication ne va pas assez vite sur les bords de la Seine, le disponible se vend cher, tout est enlevé sec ou non sec.

Les exploitations en général retardées par la longueur de l'hiver sont poussées avec la plus grande activité. On craint cependant que le 15 avril vienne avant l'abatage de tous les bois d'hiver, et si la végétation commençait de bonne heure ainsi que le beau temps actuel porte à le croire, on se trouverait dans un véritable embarras pour les coupes à écorcer.

Le vote de l'Assemblée, qui affecte un crédit de 900,000 fr. pour l'établissement de nouvelles lignes télégraphiques, donnera quel

que écoulement aux produits des jeunes plantations de sapins. Cette essence sera exclusivement employée grâce à l'application du moyen de conservation de M. le docteur Boucherie.

Correspondance et Faits divers.

Forêts de l'Algérie.

Plusieurs lettres que nous recevons de l'Algérie concernant les richesses forestières de cette contrée, confirment en tous points les documents importants publiés déjà depuis quelques années dans les Annales (1).

Le cadre restreint de notre chronique ne nous permet pas de reproduire le récit intéressant d'une excursion faite dernièrement dans la forêt de Téniet-el-Haad, dite des Cèdres, à 2 journées de Milianah. L'auteur qui nous l'adresse, M. Marie France, n'a pu voir sans admiration un sol accidenté, couvert de rochers, peuplé de cèdres à tronc droit dépourvu de branches jusqu'aux 314, terminé en parasol, d'une hauteur moyenne de 15 mètres sur 4 de circonférence.

La forêt occupe 3 licues en longueur sur 1 de largeur.

Mais à côté de ces arbres magnifiques, des monceaux d'arbres morts gisaient sur le sol. L'auteur a mesuré un cèdre scié depuis. peu, qui avait 35 mèt. de longueur, et 7 mèt. 90 de circonférence.

Si nous reproduisons ces détails, c'est pour rappeler de nouveau l'attention du Gouvernement et de l'Administration sur les forêts de l'Algérie, sur les ressources qu'elles renferment et qu'on ne connaît pas assez, enfin sur la nécessité de soumettre ces forêts à un régime de protection et d'exploitation aussi rapproché que possible de celui qui régit celles de la métropole.

Nécrologie.

Il appartient aux Annales de ne pas laisser inaperçue la disparition de ceux qui ont honoré l'administration des forêts. Le défaut d'espace nous a fait ajourner jusqu'ici les quelques lignes que nous devons à leur mémoire. Aujourd'hui nous commençons par M. Cazin de Caumartin, et nous donnerons successivement les notices qui nous sont arrivées sur d'autres pertes également regrettables.

Le 8 septembre 1849, l'Administration forestière a perdu le doyen de ses agents, M. Cazin de Caumartin, chevalier de la Légion-d'Honneur, Conservateur des forêts en retraite. M. Cazin de

(1) Voir les articles sur ce sujet, 1re série, t. I, p. 412 et suiv.; t. II, p. 159, 728; t. III, p. 1, 631; t. IV, p. 136; t. V, p. 398, etc., etc.

Caumartin, né en 1767 à Boulogne-sur-mer, succéda encore jeune à son père, dans la charge de lieutenant général de l'Amirauté Après la suppression de cet emploi en 1789, M. Cazin entra comme lieutenant dans le régiment d'Auxerrois dans l'armée de Dumouriez dont il fut aide de camp; avec distinction il fit les campagnes de Belgique.

Rentré dans la vie privée après la mort de Louis XVI, il y resta jusqu'en 1801 où il commanda la Garde-d'Honneur, que la ville de Boulogne entretenait auprès du premier Consul.

Napoléon le vit et l'apprécia: sur son refus de rentrer dans l'armée, il fut nommé Conservateur du 24 arrondissement forestier dont le siége était à Lille.

Arrivé du premier pas au poste le plus élevé d'une administration spéciale, M. Cazin voulut dominer sa position. Il s'entoura d'agents habiles et instruits, se fit expliquer les principes de la science forestière, étudia, vit et compara tout par lui-même. — Déja familier avec les principes généraux d'administration, il sut en peu de temps rétablir l'ordre dans les forêts et resserrer les liens de la hiérarchie relâchés depuis longtemps.

Décoré en 1816, il fut appelé par Louis XVIII à la conservation de Nancy et justifia dans ce nouveau poste le choix qu'on avait fait de lui. Enfin en 1832, âgé de 65 ans et comptant 36 ans de service, il demanda sa retraite, qui ne lui fut accordée qu'avec regret.

M. Cazin se retira à la campagne où il s'occupa d'intérêts agricoles et de bien public; il aimait à recevoir chez lui les agents forestiers, s'entretenir avec eux du métier. Sa conversation interessait par des détails attachants sur les événements divers qu'il avait traversés. Exempt des infirmités de la vieillesse, il s'est éteint doucement, laissant le souvenir d'une vie honorablement remplie, emportant les regrets de tous ceux qui l'avaient connu.

Annonce.

M. Paul Laurent vient de publier la deuxième partie de son ouvrage intitulé: Du produit du sol forestier et de sa comparaison avec les autres biens-fonds. L'auteur a embrassé dans toute sa généralité la question de la conversion des taillis composés en fulaies * pleines, il la résout par la détermination de la révolution de futaie la plus avantageuse à substituer à celle de l'ancien aménagement.