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et quelquefois contradictoires. Voy. infrà, nos 48, 59, 76, 80, 116, 119, 134, 153, 251 ct 306. Voy. aussi J. A., t. 25, p. 344, t. 12 v° exceptions, p. 454, no 33 bis; t. 28, p. 91 ; t. 34, p. 29; 144 et 271. Ne pourrait-on pas dire qu'il importe peu que ces diverses demandes soient comprises dans le même exploit, si elles n'en sont pas moins distinctes, qu'elles aient ou n'aient pas la même cause, et que c'est à la demande et non à sa cause qu'il faut s'attacher pour fixer le dernier ressort? On peut voir au surplus MM. F. L., t. 3 p. 201, 2e col. 5 alin.; MERL Rép., t. 3, p. 583, 2o col., §7; PR. FR., t. 1, p. 106, 4o alin.; H. D. P. compét. des juges de paix, p. 90, ch. 14; et CARR. Comp., ubi suprà.

M. Carré pense aussi que le fait de la jonction par le tribunal,.de diverses demandes isolées, ne devrait rien changer à la solution qu'il a donnée; dans ce cas encore les demandes, ainsi réunics ne devraient point être cumulécs. La jonction des causes a pour but d'économiser le temps et les frais, d'éviter la pluralité et la contrariété des jugemens; mais elle ne doit pas dénaturer la compétence du dernier ressort, fixée par la demande. Voy. CARR. COMP., t. 2, p. 23, art. 281, no 295. Mais ce point n'est pas mieux fixé que le précédent par la jurisprudence, et l'on trouvera infrà, noo 118 et 119, deux arrêts qui l'ont diversement résolu. Voy. aussi J. A. t. 30, p. 137, l'arrêt de la Cour de Montpellier du 9 décembre 1825.

Ce que nous avons dit plus haut ne s'applique pas au cas où la demande formée contre plusieurs a pour objet l'acquittement d'une obligation solidaire. On sent assez combien cette hypothèse diffère des précédentes. Ici l'on ne retrouve pas plusieurs dettes distinctes; il n'y en a qu'une, et par conséquent c'est d'après le montant intégral que doit se fixer le dernier ressort. Tel est l'avis de M. CARR. COMP. t. 2, p. 27; art. 281, no 297. Toutefois si le créancier divisait son action, s'il faisait, à l'un des co-débiteurs remise tacite de la solidarité, il est clair que vis-à-vis de celui-ci la compétence ne pourrait se déterminer que par la somme à laquelle s'élèverait sa part. M. Carré admet cette distinction, ajoutant cependant que si le créancier ne divisait ainsi son action, que pour priver ses débiteurs des deux degrés de juridiction, l'appel n'en serait pas moins recevable; c'est ce qui résulte de deux arrêts des 25 avril 1808 et 29 novembre 1819. Voy. infrà, nos 104 et 259. 47. La demande réconventionnelle en dommages-intérêts pour ouse de nullité de saisie doit-elle être jointe à la demande principale, pour fixer le taux du dernier ressort?

PREMIÈRE ESPÈCE. Gémon, créancier d'une somme de 210 f. forme saisiearrêt, pour avoir paiement de cette somme; la veuve Bossier, saisie, eņ demande la nullité et 1,200 fr. de dommages-intérêts; jugement qui la condamne au paiement du montant de la saisie et la déclare régulière; -appel, et le 25 prairial an 11, arrêt de la Cour de Grenoble ainsi conçu ;

— « La Cour............. Considérant que la prononciation du jugement n'a pu être rendue appellable par la demande en dommages de la veuve Boissier, par la raison que, d'une part, la saisie n'était que d'une somme égale au montant de la promesse, et que, de l'autre, il résulterait un grand abus de s'arrêter à des appellations basées sur de tels motifs, qui, dans tous les cas, et si elles étaient accueillies, rendraient illusoire le droit qu'ont les tribunaux de première instance de prononcer en dernier ressort, jusqu'à 1,000 f. de principal;— Rejette ledit appel. » DEUXIÈME ESPECE. La dame Gautier, femme Leconte, autorisée par le jugement qui prononçait la séparation de corps à prendre les moyens conservatoires nécessaires, fait saisir une récolte de fruits; le sieur Brisard prétend que le sieur Leconte la lui a vendue; il demande la nullité de Ja saisie et 1,200 fr. de dommages-intérêts; un jugement du tribunal de Mortagne rendu en dernier ressort déclare la saisie valable; pourvoi en cassation, et le 30 juin 1807, arrêt de la section des requêtes par lequel: -«LA COUR... Considérant que le prix de la vente de la récolte d'ont il s'agit formait le principal de la contestation portée devant le tribunal de première instance, et que les dommages-intérêts demandés à raison des obstacles apportés à l'exécution de cette vente n'étaient évidemment qu'un accessoire à l'objet principal; que par conséquent la demande principale n'excédait pas la valeur de 1,000 fr.; Rejette. »

TROISIÈME ESPECE. Jugée en sens contraire, le 6 juillet 1810, par la Cour de Grenoble ; voici le texte :-« LA COUR.....Considérant que, quoique la demande en validité de saisie, des mariés Terrat, faute de paiement de la somme de 378 fr. formât le principal de la contestation, les dommages-intérêts demandés par Latour à l'occasion de cette saisie excédaient 1,000 fr.; qu'ainsi le tribunal de Reims n'a pu statuer en dernier ressort. >>

QUATRIÈME ESPÈCE. Le sieur Giraud fait saisir le mobilier des sieur et dame Ledieu, pour le paiement d'une créance de 260 fr. et des intérêts courus depuis plus de vingt ans. Les saisis demandent la nullité du titre en vertu duquel la saisie est faite et 1,200 fr. de dommages-intérêts. Jugement qui, sans statuer sur les dommages-intérêts, prononce la nullité de la saisie. Le sieur Giraud appelle de ce jugement, et le 22 juin 1812, arrêt de la Cour de Riom, ire chambre,. par lequel : «La COUR.. Attendu que Ledieu et sa femme avaient euxmémes formé une demande principale de 1,200 fr. de dommages-intérêts, laquelle, réunieà la créance, excédait évidemment le taux du dernier ressort ;-Reçoit l'appel, et infirme le jugement de prem. instance.»> CINQUIÈME ESPÈCE. Le sieur Ranvier père avait conclu à 1,000 fr. de dommages-intérêts, pour une saisie pratiquée sur ses meubles par le sieur Mallet, créancier de son fils, qui habitait avec lui. Jugement qui

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maintient la saisie. — Appel, et le 25 août 1812, arrêt de la Cour de Riom, 2 chambre, par lequel: :- « La Cour... Attendu que l'objet de la créance et de la saisie qui a été faite pour parvenir au paiement de cette même créance n'excède pas la compétence du dernier ressort telle qu'elle est fixée par la loi ; — Déclare l'appel non recevable. »

SIXIÈME ESPÈCE. Le 11 mars 1813, arrêt de la Cour de Rennes dont voici les termes : « LA COUR... Considérant que la saisie exercée Lepar baillif sur les meubles de Bertrand Lemême avait pour objet le paiement d'une somme de moins de 200 fr., et que la question de savoir si elle était régulière et valide était conséquemment susceptible d'être jugée en dernier ressort ;- Considérant que la demande de dommages et intérêts, formée par Lemême, n'était qu'un accessoire dérivant de l'objet principal de la contestation, et ne pouvait pas avoir l'effet de soumettre le jugement qui en a prononcé le déboutement à l'appel; Par ces motifs, faisant droit sur l'appel relevé par Lemême, du jugement rendu au tribunal de St-Malo, le 12 mai 1812, dit qu'il a été statué entre parties en dernier ressort, déclare, en conséquence, l'appelant non-recevable dans son appel, et ordonne que le jugement du 12 mai 1812 sortira son plein et entier cffet. »

SEPTIÈME ESPÈCE. Jugé au contraire le 20 mai 1813, par la Cour de Grenoble, que la demande en main-levée de saisie-exécution, avec 1,200 fr. de dommages-intérêts, ne donne pas lieu au dernier ressort, encore que la cause de la saisie fût moindre de 1,000 fr.

HUITIÈME ESPÈCE. Jugée par la Cour de Rennes, le 9 mars 1815, par un arrêt dont voici les termes : « LA COUR... Considérant que la demande principale soumise à la décision des premiers juges était une demande en réjection d'une saisie formée pour une somme au-dessous de 1,000 fr.; que la demande de dommages-intérêts n'était que purement accessoire; que cette vérité peut d'autant moins être contestée, que cette demande ne prend point sa source d'aucun fait antérieur à celui qui est l'objet de la demande principale, 'ni dans un fait indépendant; mais que formée par la même partic, elle était tellement liée au sort de la première demande que, celle-ci tombant, elle tombait nécessairement avec elle; que, de ces faits une fois reconnus, il suit, aux termes de l'art. 5 du tit. 4 de la loi du 24 août 1790, et d'après la jurisprudence des arrêts, que la demande principale, c'est-àdire celle de la réjection de la saisie, doit fixer la compétence, et qu'ainsi, l'objet de cette demande étant d'une valeur au-dessous de 1,000 fr., le jugement attaqué est en dernier ressort; - Par ces considérations déclare l'appelant non-recevable dans son appel du juge, ment du 15 février dernier. »

NEUVIÈME ESPÈCE. Lc 18 juillet 1817, arrêt de la Cour de Metz ainsi conçu :-«La Cour... Sur l'exception d'incompétence;-Attendu qu'en

formant sa demande en opposition au jugement rendu par défaut contre lui, l'appelant a en même temps formé opposition à la saisie-exécution qui fut la suite de ce jugement;-Attendu qu'il fondait sa seconde opposition ou sa demande en nullité de la saisie sur des contraventions au Code de procédure civile, qu'il eût pu faire valoir lors même que l'opposition au jugement par défaut, recevable dans la forme, cût dû être rejetée au fond; Attendu que cette seconde demande était ellemême une action principale qui, renfermant à la fois la proposition de nullité de la saisie, contenait, comme conséquence, celle en dommages-intérêts; dès lors on ne peut dire que la demande en dommagesintérêts avait pour but d'échapper à la juridiction définitive des premiers juges, d'où il suit que cette demande, dans la forme, n'a pu être jugée par les premiers juges qu'à la charge de l'appel; Au fond, attendu qu'il ne s'agit, dans la cause sur l'appel, que de savoir si l'on devait accorder des dommages-intérêts à l'appelant; Attendu... juge qu'il n'en est point dû ;-Par ces motifs, sans s'arrêter aux moyens d'incompétence sur l'appel, met l'appellation au néant avec amende et dépens. »

DIXIÈME ESPÈCE. La Cour de Grenoble a jugé le 1er mars 1823, que lorsque la saisie-arrêt et la demande en validité, formant l'objet de la demande principale, ne portent que sur une somme moindre de 1,000 fr. la demande en nullité et dommages-intérêts n'empêche pas le jugement d'être en dernier ressort.

OBSERVATIONS.

On a vu suprà, no 10, Observ., que les dommages-intérêts ne doivent être cumulés avec la demande principale pour déterminer la juridiction du dernier ressort, qu'autant qu'ils ont une cause antérieure à cette demande, de telle sorte qu'ils ne puissent en être considérés comme l'accessoire. Il en est de même, en matière de saisie. Remarquons cependant que, dans ce cas, il est très-difficile que l'action en dommages-intérêts ait son fondement dans un fait antérieur à la demande principale, soit que le saisissant assigne en validité, soit que le saisi prenne l'initiative et demande la nullité de la saisie; il est vrai de dire, en thèse générale, que les conclusions à fin de dommages-intérêts ne sont qu'une conséquence et un accessoire de la demande originaire. Au reste cela dépend beaucoup des circonstances; il y aura toujours un peu d'arbitraire dans cette appréciation. Cela est si vrai, que les tribunaux ne sont pas encore bien d'accord sur ce qu'on doit entendre par demande principale, en matière de saisie. Est-ce le commandement qui introduit l'instance, ou bien ne commence-t-elle qu'à l'opposition au commandement, ou même à la demande, soit en nullité, soit en validité? Voy, infrà, no 231. Quoi qu'il en soit, nous penchons à croire

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qu'en matière de saisie, sauf quelques cas particuliers, la demande en dommages-intérêts n'est qu'un véritable accessoire de la demande principale, et qu'elle ne doit presque jamais servir à déterminer le dernier ressort. Ce qui nous porte surtout à embrasser cette opinion, c'est le peu de fondement de la plupart de ces demandes récriminatoires, si multipliées dans les tribunaux. Toujours repoussées par le juge, on ne les soumet pas moins à son examen, parce qu'elles ont l'effet de ralentir la procédure : que serait-ce donc si elles offraient au débiteur de mauvaise foi la chance de l'appel? On peut le dire sans crainte, il n'y aurait pas de cause de cette nature qui ne dût subir les deux degrés de juridiction. La jurisprudence incline à ne pas prendre en considération la demande en dommages-intérêts, Voy. J. A., t. 30, p. 381; t. 23, p. 71,2o espèce, t. 28, p. 88,t. 32, p. 197 et 199; t. 34, p. 285, in fin.; t. 35, p. 43; t. 24, p. 150; et infrà, no 84. Voy. cependant suprà, noo 34 et 38. 48. Un tribunal de première instance peut prononcer en dernier ressort sur les demandes respectives de plusieurs individus, ayant chacun un intérêt distinct, quoique toutes ces demandes réunies dans un même exploit et fondées sur les mêmes moyens, excèdent, dans leur ensemble, le taux du dernier resŝort (1).

Les divers chefs de demande ne doivent être cumulés, pour fixer le taux du dernier ressort, qu'autant qu'ils sont dirigés, soit contre une même personne, soit contre plusieurs personnes ayant le même intérêt ; ou bien, lorsque des héritiers ou co-propriétaires forment, en leur nom collectif, des demandes sur lesquelles ils ont le même intérêt ; car toutes les fois qu'en vertu d'un même titre, plusieurs personnes se réunissent et introduisent une même instance contre leur débiteur commun, cette instance se subdivise en autant de demandes distinctes qu'il y a de personnes ayant des intérêts différens; et chacune de ces demandes doit être considérée comme si elle avait été formée séparément et indépendamment de toutes les autres (Coff.).

Le 11 fructidor an 11, arrêt de la Cour de cassation, section civile, par lequel : - « LA COUR... Attendu que la réunion des sicurs Barrat et Jourdan, Albert et Vernier, Pontrel et Durand', n'a pu avoir pour objet que de diminuer les frais, et n'a pas dû conséquemment tourner contre eux, à l'effet de leur faire crdre l'avantage du dernier ressort, qui leur était acquis de plein droit, par la modicité de leurs demandes particulières, parfaitetement indépendantes et bien distinguées dans leurs exploits, ainsi qu'elles l'ont été avec raison dans les jugemens attaqués; — Rejette. »

49. İl faut cumuler la demande principale avec la demande réconven

(1) Voy. suprà, n° 46, l'arrêt du 7 prairial an 11.

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