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gers, que s'accomplissaient au Chili ces progrès industriels.

Aussi le président, M. Manuel Monti, a-t-il pu, dans son Message d'ouverture, faire avec une juste fierté, et dans le langage le plus simple et le plus digne, du pays confié à ses soins ce tableau satisfaisant : « La république jouit de la paix extérieure et intérieure; sa prospérité s'accroît, les diverses branches du service public s'améliorent; aucun accident imprévu n'est venu troubler la marche tranquille et normale de l'administration, ni les entreprises qui développent l'agriculture, l'industrie et le commerce. »

ÉQUATEUR.

Sous la présidence du général Jose Maria Urbina, cette petite république a passé quelques mois à redouter l'invasion, hautement annoncée aux États-Unis, du général Florès. Ces terreurs ont servi à justifier les violentes réactions et les vengeances particulières du président.

NOUVELLE-GRENADE.

La dictature du 17 avril 1854 avait supprimé la Constitution et les Chambres, suppression peu regrettable à vrai dire, car cette Constitution était tout un programme d'anarchie démagogique, et ces Chambres ne renfermaient que bien peu d'éléments sérieux d'ordre et de gouvernement. Le vaincu de la révolution de Bogota, c'était le président légal, le général Obando; le vainqueur, c'était le général Jose Maria Melo. Le vaincu resta prisonnier aux mains du vainqueur, mais les traitements honorables qu'il reçut du dictateur nouveau, les égards infinis dont on entoura sa captivité semblaient prouver que le mouvement de Bogota n'avait pas, autant qu'on pouvait le croire, pris le général Obando à l'improviste.

Au reste, la dictature inaugurée le 17 avril fut un Gouver nement de violences, d'exactions, de spoliations sans contrepoids. Elle alla jusqu'à menacer l'existence et la fortune des

étrangers, et le corps diplomatique dut réclamer énergiquement en faveur de ses nationaux divers, dont des assassins menaçaient incessamment la sécurité. Les représentants des nations étrangères, et à leur tête l'énergique ministre de France, M. le Baron Goury de Roslan, coururent eux-mêmes danger de mort.

Maître dans Bogota, qu'opprimait sa dictature sanguinaire, le général Jose Maria Melo vit bientôt s'amasssr contre lui au dehors un orage terrible. Les Chambres dissoutes se reconstituaient dans les provinces, et un acte d'accusation allait être lancé. Dans le Sud, le général Hilario Lopez; dans le Nord, le général Mosquera; partout, le général Herran, organisaient la résistance armée et se rapprochaient de Bogota, qu'ils allaient envelopper dans un cercle de fer. Le dictateur fut vaincu, sous les murs de sa capitale, en décembre 1854.

Le parti conservateur avait eu, après huit mois, raison de ce gouvernement insensé, mais M. Manuel-Maria Mallarino, élu vice-président le 1er avril, en l'absence du président déchu, M. Obando, n'a pas su rétablir, par ce déplacement de pouvoir, un ordre légal que ne connait plus depuis longtemps cette malheureuse république.

VENEZUELA.

Le 20 janvier, jour fixé par la Constitution comme terme des fonctions du président de la république, le général Jose Gregorio Monagas remit à midi le pouvoir exécutif au docteur Joaquin Herrera, vice-président. Les Chambres se réunirent pour ouvrir la session de 1855, à une heure après-midi. Ce jour-là même, le Congrès fit le dépouillement du scrutin des colléges. électoraux pour l'élection du nouveau président. Le général Jose-Tadeo Monagas obtint l'unanimité des suffrages, et fut en conséquence proclamé président de la république.

Les ministres du président sortant avaient aussi, le même jour, donné leur démission. Remplacés provisoirement par leurs sous-secrétaires d'État, ils reprirent bientôt leurs portefeuilles.

Quelles garanties de progrès pacifique, de stabilité féconde présentait le nouveau détenteur de l'autorité suprême, le frère du président et général Gregorio Monagas, le général Tadeo Monagas. Ses précédents politiques consistaient dans cette chasse au Congrès qu'il dispersa à coups de fusil le 24 janvier 1848; ses idées politiques se composaient de ces doctrines démocratiques dont l'exagération s'allie si bien avec les prétentions à la plus absolue dictature. Et cependant le général Tadeo Monagas apparaissait comme un conservateur, comme un réparateur. Quel éloge singulier de son prédécesseur à la présidence! L'élection même du général Tadeo Monagas était due à l'opposition qu'on supposait qu'il avait dû faire à son frère, auquel il prodiguait, disait-on, pendant l'exercice de son pouvoir, des conseils rarement écoutés.

Une des tendances les plus dangereuses de la dictature du général Gregorio Monagas avait été la recherche d'une popularité dans l'élément noir. Il avait fait, sans préparations, sans restrictions, proclamer l'affranchissement des noirs : il leur avait ouvert toutes les portes, celles de l'armée comme celles de l'administration. Cet élément redoutable, indiscipliné, était devenu pour le reste des populations une continuelle menace. La terreur d'un mouvement nègre avait un moment dominé Caracas, et si ce mouvement n'éclata pas, c'est que tout n'était pas prêt encore lors de la brusque élection du général Tadeo Monagas.

Mais on sait ce que deviennent les libérateurs dans 1 Amérique du Sud. Tadeo reprit bientôt les traditions de Gregorio, et la scission devint chaque jour plus profonde entre la nouvelle administration et le parti oligarque. On ne parla plus d'oubli du passé les anciennes passions, les vieilles haines se réveillèrent plus ardentes que jamais.

La session du Congrès fut close à Caracas le 19 mai, et l'année s'écoula sans qu'une amnistie eût été proclamée.

PARIS, IMPRIMERIE DE J. CLAYE, RUE SAINT-BENOIT, 7.

APPENDICE.

DOCUMENTS HISTORIQUES.

PARTIE OFFICIELLE.

DOCUMENTS RELATIFS A LA QUESTION D'ORIENT.

Pièces relatives au rôle de l'Alle

magne.

DEPECHE adressée par le cabinet de Vienne aux représentants de l'Autriche près les diverses cours allemandes, pour demander la mobilisation des contingents fédéraux (Traduite de l'anglais sur l'allemand).

Vienne, le 14 janvier.

Après la résolution prise par la Confédération germanique le 9 décembre, nous avons regardé comme étant de notre devoir le plus rigoureux de conférer avec le gouvernement royal de Prusse sur les résultats pratiques à tirer de la décision de la Confédération.

Les instructions données à cet effet à notre ministre de Berlin vous ont été communiquées par ma dépêche du 26 décembre. Il est évident, par la réponse que nous avons reçue maintenant, et dont j'ai l'honneur de vous joindre une copie, que les vues des cabinets de Vienne et de Berlin ne coincident pas sur plusieurs points essentiels.

Toute la Confédération a reconnu l'état menaçant des affaires, mais la Prusse met en doute le bien-jugé de la

décision prise par la Confédération, en se fondant sur les assurances réitérées de la Russie, assurances qui n'ont aucune garantie, de se borner à la défense de son propre territoire. Nous ne voulons pas affaiblir la valeur d'une pareille promesse faite par une puissance belligérante, ni nier l'effet qu'elle peut avoir pour abréger la durée de la guerre; mais aucun caractère obligatoire, aucune puissance de garantie qui pourrait exercer une influence positive sur l'exécution de la résolution prise par la Confédération germanique ne peuvent être attribués soit par les gouvernements allemands, soit par l'Autriche, à une promesse qui n'a été acceptée par personse. S'il était besoin d'une preuve pour montrer que la Russie elle-même ne croit pas que cette promesse puisse être accommodée aux nécessités de sa position militaire, on la trouverait dans la conduite que la Russie tient en ce moment à l'égard de la Turquie, sur la rive droite du Danube.

Même en ne refusant pas de nous associer aux espérances que l'Europe attache aux concessions que la Russie vient de faire dans la conférence du 7 de ce mois, l'objet que l'on poursuit est encore trop éloigné, les opinions sur la

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réalisation pratique et l'application des quatre points préliminaires peuvent varier de trop de façons, et les chances de la guerre peuvent exercer trop de d'influence pour que la cour impériale cède à l'espérance que, dans les résultats préliminaires qui ont déjà été obtenus, elle trouvera une garantie certaine du rétablissement de la paix.

Nous en appelons au bon sens des gouvernements allemands, et nous demandons s'ils peuvent se tromper en imaginant que la situation des affaires a jusque aujourd'hui rien perdu de ce caractère menaçant que la Confédération elle-même a reconnu. S. M. l'Empereur, notre illustre maître, considère qu'il est nécessaire de se tenir prêt pour toutes les éventualités, et par conséquent les négociations pour la paix qui approche n'exerceront, aussi longtemps qu'on n'aura pas la certitude d'obtenir un résultat favorable, aucune influence sur les mesures militaires de l'Autriche, et dans l'opinion de l'Empereur elles ne peuvent intervenir dans les engagements pris par S. M. avec ses alliés allemands pour l'obtention d'objets communs. Une pareille attitude ne peut que servir les intérêts de la paix et augmenter les chances d'une issue favorable des négociations.

C'est notre conviction bien arrêtée que nos alliés allemands doivent aussi mettre maintenant toute l'Allemagne sur un pied qui commande le respect. Il nous paraît que les intérêts de la nation allemande et de ses princes exigent impérieusement que l'Allemagne soit, aussi bien que nous, prête à toutes les éventualités. Quelque forme que l'on donne aux résolutions de la Confédération, en sa qualité de puissance politique, nous devons proposer de nouveau que tout ce qui est nécessaire au développement de ses forces militaires soit fait sans retard.

Vous comprenez aisément que sous l'inspiration de ces idées, nous ne pouvons répondre aux communications du cabinet de Berlin sur les armements de la Russie et de la Confédération germanique autrement que par les instructions que nous adressons au comte Esterhazy, et dont nous vous envoyons ci-joint copie.

Le ministre impérial près de la

Diète proposera donc aux comités respectifs qu'il soit fait dans la Diète la motion que la moitié au moins des divers contingents soit mobilisée, à moins qu'il ne paraisse plus convenable de mettre toute l'armée fédérale sur le pied de guerre. La question de savoir si dans le premier cas il faudra former deux corps d'armée, combinés, ou un seul corps complet auquel la seconde moitié du contingent devrait se reunir en cas de besoin, devra, ainsi que d'autres questions de la même nature, devenir le sujet de conférences qui devront se tenir aussitôt que possible et de résolutions à prendre par les autorités de la Confédération.

L'élection d'un général en chef fédéral est aussi nécessaire, pour que les divers éléments de l'armée fédérale soient, aux termes des actes fédéraux, réunis sous un seul commandement. En conséquence, nous pensons que la Diète devra s'occuper immédiatement de ce soin et prendre les dispositions nécessaires pour élire un général en chef des armées de la Confédération, tandis que dans les divers Etats on prendra les mesures convenables pour mettre les corps fédéraux destinés au service actif à la disposition du général à élire.

Vous communiquerez ces instructions et les documents qui les accompagneut à la cour de..., et vous la prierez de nous faire connaître les résolutions auxquelles cette communication donnera lieu, aussi bien que les instructions qu'il pourra lui convenir de douner à sou représentant à Francfort, afin qu'il puisse prendre sa part dans l'accomplissement des devoirs importants que l'organe de la volonté de toute l'Allemagne a à remplir.

Agréez l'assurance, etc.

Signé: comte BrOL.

DEPECHE confidentielle adressée par le cabinet de Vienne à ses agents près les Cours allemandes.

Vienne, le 14 janvier 1855. Il nous est toujours permis de considérer l'entrée de la Prusse dans l'alliance conclue par le traité du 2 décembre comme une éventualité vraisemblable,

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