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16. -20 Que toutes contestations qui ne sont pas entre associés, et qui n'ont pas pour objet des faits de sociétés, ne peuvent être déférées à des arbitres forcés. Cass. 28 août 1835, Bruxelles.

17. Cependant, si, par jugement passé en force de chose jugée, des associés en matière commerciale ont été renvoyés devant des arbitres-juges, qu'ils ont eux-mêmes accepté pour juges, il y a chose jugée sur ce point, et un arrêt ne peut, sans violer la chose jugée, déclarer que de tels arbitres ne sont qu'arbitres volontaires, et c'est à tort qu'on prétendrait qu'il n'y a là qu'une simple appréciation de l'intention des parties dans la constitution de l'arbitrage (C. civ. 1551). - 28 avril 1829. Civ. c. Paris.

On sait, en effet, que la chose jugée qui a lieu à la suite d'une contestation liée, produit une vérité judiciaire, qui devient irréfragable en matière de compétence comme en toute autre matière, qu'elle soit absurde ou non, ex curvo rectum. C'est l'un des principes dont l'inflexibilité doit être le plus maintenue. V. Chose jugée.

18.30 Que les associés peuvent renoncer à cette exception, puisqu'elle est établie en leur faveur, et rentrer dans la juridiction volontaire.-«Des membres d'une société commerciale, a très-bien dit la cour de cassation, ne peuvent être privés du droit essentiel et primitif qui appartient à tous les citoyens, de se faire juger par des arbitres volontaires. »> 16 juil. 1817, Civ. c. Orléans; 6 avril. 1818, Rouen; 13 mai 1818, Poitiers; 24 avril 1834, Req. Caen, Conf. Mongalvy, n. 14.

19.40 Que cette renonciation peut être implicite de la part des associés, et résulter de la constitution d'arbitres dont le caractère est essentiellement volontaire, tel que celui d'amiables compositeurs.

20. On appelle de ce nom ceux qu'on nommait autrefois arbitrateurs. Ce sont ceux qui ont pouvoir de juger sans formalité judicaire; ils peuvent tempérer la rigueur de la loi, écouter l'équité naturelle, que l'orateur romain appelle laxamentum legis (oratio pro Cluentio), et prononcer non pro ut lex, sed pro ut humanitas misericordia impellit regere (Senec., de Benef., t. 5. ch. 7).- La différence entre l'arbitre ordinaire et l'amiable compositeur est indiquée par un auteur en ces termes Differentia est inter arbitrum et arbitratorem; nam arbiter est qui judicis partes sustinet et qui cognoscit ordinario judicio, sicut judex... arbitrator est qui non servato juris ordine cognoscit et definit amicabililer inter partes (Rollandinus in summâ certis Notariæ, cap. 6; Argentræus, ad art. 18 veteris const. Britanniæ, p. 58 et 59).

21. Cette qualité d'amiables compositeurs ne peut donc être attribuée à des arbitres, qu'en matière d'arbitrage volontaire, et non au cas d'arbitrage forcé (C. pr. 1019). -4 décembre 1828, Paris.

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vient volontaire, s'il est donné aux arbitres, par l'acte de société, le pouvoir de juger comme amiables compositeurs. — 7 mai 1828, Montpellier. Autres décisions implicites : 14 juil. 1828, Lyon; 28 avril 1829, Civ. c. Paris; 7 mars 1832, Civ. r. Rouen; 25 avril 1851, Montpellier; 13 juil. 1855, Toulouse.

23. La création, par des associés, d'un arbitrage volontaire, ne résulterait pas de ce qu'ils auraient renoncé à toute voie d'attaque contre la décision des arbitres. Cette renonciation, en effet, peut exister en arbitrage forcé comme en arbitrage volontaire. C'est en ce sens, au reste, que, malgré quelque opposition, la jurisprudence s'est prononcée.

24. Il nous semble qu'il est de l'essence de leur qualité, que les amiables compositeurs soient dispensés des formes, et leurs décisions ne sont pas susceptibles d'appel. Dalloz, n. 124.

25. Mais ils doivent prononcer. dans le délai de trois mois, s'ils n'en ont pas été dispensés. Il faut en effet un terme à toute instance. — V. § 19.

26. Le caractère d'amiables compositeurs donné à des arbitres implique renonciation à l'appel; en effet, l'attribution de dernier ressort résulte virtuellement de ce que ces arbitres ne sont pas astreints aux règles du droit. Autrement, leurs décisions seraient exposées à une réformation presque certaine, puisque le tribunal, à qui l'appel serait dévolu, serait, lui, tenu de se conformer à la loi. La conséquence nous paraît forcée. Sans la juridiction en dernier ressort, l'amiable composition n'est qu'un non-sens. Ces expressions, d'ailleurs, impliquent l'idée d'un jugement d'équité, d'une sorte de transaction irréformable.

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27.-La qualité d'amiable compositeur ne peut être conférée à un tribunal tout entier.-(V. n. 160.) Elle peut l'être à un juge.

§3.- Caractères de l'arbitrage forcé. — Renoncia

tion.

- Lois.

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28. Cet arbitrage est ainsi nommé parce qu'il est imposé par la loi.

Il n'a lieu que pour une espèce de contestation : c'est une juridiction exceptionnelle qui a été créée afin que le jugement des procès entre associés fût plus prompt, la justice plus éclairée, les frais moins considérables, la marche des tribunaux débarrassée de l'examen de comptes, de débats, de vérifications de pièces de toutes espèces qui embrassent presque toujours une longue période d'années, et dont les éléments seraient d'ailleurs rarement bien saisis à l'audience.

Mais, comme ces avantages peuvent être atteints par la voie de l'arbitrage volontaire, on a conclu justement qu'on pouvait renoncer à l'arbitrage forcé pour l'arbitrage ou l'amiable composition. - V. le paragraphe qui précède.

On combat en vain cette conséquence, en disant qu'il s'agit ici d'une disposition touchant aux juridictions, et par là même à l'ordre public. C'est là, en effet, une méprise; l'ordre public est intéressé, sans contredit, à ce que ces sortes de débats ne soient point portés devant les tribunaux, et l'on vient d'en dire la cause.

Mais quel tort fait à la chose publique la convention par laquelle des associés nomment des ar bitres qu'ils investissent de droits aussi étendus que pourraient le faire de simples particuliers? Aucun; et, loin de là, on rentre dans l'esprit de la loi. Priver des associés de cette faculté, ce serait les mettre hors du droit commun et créer une exception que rien ne

justifle.-Dalloz, n. 54. Conf. Mongalvy, qui a reproduit ce passage, n. 14.

29.-On a dit que cette renonciation à l'arbitrage forcé résultait virtuellement de l'institution seule d'amiables compositeurs, et que le caractère de cet arbitrage se trouvant dénaturé, il prenait celui d'arbitrage volontaire.

Mais cette dénaturation du caractère de l'arbitrage résulte-t-elle de ce que, dans un acte de société ou dans un compromis, les associés, sans constituer expressément une amiable composition, ont renoncé néanmoins à l'appel, au recours en cassation, à la requête civile et à toutes autres voies? Non évidemment, car l'art. 52 C. comm. autorise expressément la renonciation à l'appel, et s'il n'a pas parlé des autres voies extraordinaires de recours, c'est que c'était une surérogation, parce qu'on ne peut attaquer en cassation que des jugements en dernier ressort. et que l'action en nullité est de droit, dès que la sentence des arbitres porte sur chose non demaudée, ou contient un ultrà petita.

50.—Ainsi, l'arbitrage n'est pas converti en volontaire, soit parce que les associés ont renoncé à l'appel. -26 mai 1813. Civ. r. Rouen.-18 avril 1835, Paris. -Et à l'opposition.-12 janv. 1850, Montpellier.

31.-Soit parce qu'ils ont chargé les arbitres de juger souverainement ou en dernier ressort, sans appel ni recours en cassation. - 11 avril 1825, Paris; 6 mars 1829, Aix; 7 mars 1852, Civ. r. Rouen.

52.-Et en renonçant, en outre, à la requête civile et à toutes voies de droit.-8 août 1825, Civ. c. Aix; 7 mai 1828, Req. Montpellier; 14 juillet 1828, Lyon.

33. Soit parce qu'ils ont renoncé par compro» mis à toute voie de recours avec dispense pour les arbitres de toutes formalités.-21 nov. 1832, Req. Lyon, Puy.

Parce qu'ils ont conféré à des arbitres le pouvoir de les juger sans appel ni recours en cassation, conformément à l'art. 1010 C. pr....; car il importe peu qu'elles se soient référées au code de procédure, le pouvoir de juger en dernier ressort pouvant être conféré à des arbitres forcés comme à des arbitres volontaires.-28 avril 1829, Civ. c. Paris.-Conf. Mong., n. 15.

34.-Cependant, si l'on dispensait, en outre, les arbitres non-seulement des formes judiciaires, mais encore de toutes règles de droit, il est manifeste que ce serait une amiable composition que, dans la réalité. on établirait. Le mot manquerait dans la disposition, mais la chose y serait, ce qui est équivalent. L'arbitrage deviendrait volontaire.

35.-L'institution de l'arbitrage forcé s'encadre dans notre organisation judiciaire; elle remplit le premier degré.-Les arbitres composent un tribunal légal qui a son individualité comme le tribunal de commerce (Mongalvy, n. 17). Aussi les arbitres sontils de véritables juges en matière de société. Ce principe, qui est incontestable, avait déjà été posé trèsformellement avant le code dans l'arrêt du 13 fruct. an vin, Civ. c. Ils sont des juges relativement à la contestation qui leur est déférée. Cela se vérifie par l'appel, la prise à partie, etc., etc.-Enfin l'arrêt notable du 7 mai 1817 a posé nettement le principe que les arbitres forcés sont de véritables juges, formant un tribunal de commerce et tenant leurs pouvoirs de la loi. -7 mai 1817, Civ. c. Limoges.

56.-Les dispositions relatives à l'arbitrage forcé se trouvent dans le Code de comm.; art. 51 et suiv. 37.-Au reste, le système que ce code renferme sur cette matière n'est pas tellement complet, que le besoin de recourir à d'autres règles ne se fasse pas souvent sentir. Aussi les dispositions du code de

procédure, en matière d'arbitrage, sont applicables aux tribunaux de commerce, lorsqu'il n'y a pas été dérogé par le code commercial.-2 mai 1827, Civ. c. Lyon, Aix.-Conf. Mongalvy, n. 15. Dalloz, n. 66.

4.-Des actes soumis à l'arbitrage forcé.-Compétence.

a

38.-L'art. 51 C. comm. porte: « Toute contestation entre associés, et pour raison de la société, sera jugée par des arbitres. -Cette juridiction « est exceptionnelle; elle doit être rigoureusement restreinte au cas des associés proprement dits: il n'est pas permis d'en étendre l'application, par voie d'analogie, a un autre cas non écrit dans ledit article, tel, par exemple, que celui du commis ayant pour traitement une part des bénéfices. »—31 mai 1831, Req. Paris; 30 mai 1838, Lyon.

39. Ces mots de l'art. 51, entre associés et pour raison de la société, ont donné lieu à un grand nombre de décisions.

40.-Lorsque la contestation entre associés ne porte pas seulement sur des difficultés pour raison de la société, mais encore sur l'existence même, la durée et l'étendue de la société, comme, par exemple, si, devant les arbitres choisis pour prononcer sur les comptes d'une société en participation, l'un des associés oppose, en compensation, la participation qu'il aurait eue à une entreprise de l'associé principal, et que celui-ci conteste la durée de la participation alléguée, ou qu'il prétend que l'association a porté sur quelques-unes seulement et non sur la totalité des opérations, c'est au tribunal de commerce, et non aux arbitres, qu'il appartient de prononcer. En conséquence, il y à excès de pouvoir de la part des arbitres, divisés sur l'incident, qui nomiment un sur-arbitre pour les départager. -30 juil. 1832, Lyon; 27 déc. 1810, 24 déc. 1818 et 9 mars 1822, Bruxelles.

41.-Et ce qu'on dit, relativement à l'existence de la société, s'applique aux contestations sur la qualité d'associé. En effet, avant de me renvoyer devant une juridiction exceptionnelle, à cause de ma prétendue qualité d'associé, il est indispensable que cette qualité soit préalablement fixée : c'est là une question préjudicielle qui est du ressort des juges ordinaires des parties. Or, cette contestation ne saurait être regardée comme une opération sociale donnant lieu à l'attribution des arbitres.-Dalloz, n. 74.

42. C'est, peut-on dire, au tribunal de commerce, et non aux arbitres forcés, qu'il doit appartenir de juger la question de savoir si une société est nulle pour inaccomplissement des formalités. Ici, c'est l'acte constitutif de la société, l'acte préliminaire à sa mise à exécution qui est mis en problème. Ce n'est point un fait de la société. Mais les mots pour raison de la société, sont bien généraux; et il sera, on n'en doute pas, souvent jugé que ces expressions ne permettent pas la distinction un peu subtile, que la proposition qu'on vient de poser tend à établir entre les faits se rattachant à l'exécution de l'acte de société, ou à un seul associé, et ceux qui ont trait plus particulièrement à la société, à l'être collectif nommé société. 21 juil. 1827 et 20 janvier 1841, Liége.

45.-Le tribunal de commerce, auquel on demande une nomination d'arbitres forcés, pour statuer sur des contestations relatives à une société, ne peut, quoique l'acte qui constitue cette société soit nul, sur le seul motif de cette nullité, s'empêcher de nommer des arbitres forcés, et y substituer des arbitres volontaires si les parties n'ont pris aucunes conclu

sions à cet égard (C. comm. 52).—16 déc. 1829, Bordeaux.

44.-L'acte constitutif d'une société en commandite ne perd pas, à défaut de publicité, son caractère d'être social pour tous les faits accomplis antérieurement à la demande en nullité.-En conséquence, les contestations qui s'élèvent entre associés, à raison de ces faits, doivent être nécessairement soumises à la juridiction arbitrale, seule compétente pour les juger (C. comm. 42).-23 juin 1832. Req. Paris.

45.-Les mêmes questions se présentent lorsqu'il s'agit de dissolution et de liquidation de société, et appellent une solution analogue. 22 août 1825, Lyon; 15 fév. 1827, Corse; 18 mai 1823, Lyon.

46.-L'art. 51 C. comm. s'applique-t-il aux associations en participation (C. comm. 26)? Le doute naît de ce que le code les distingue des sociétés ordinaires; qu'il les dispense des formalités établies pour celles-ci, et qu'au titre de l'arbitrage il parle des sociétés seules, et ne dit rien des associations en participation. D'un autre côté, l'association n'a pas de siége d'où la conséquence que si les cointéressés ont des domiciles différents, aucun tribunal ne serait compétent pour nommer les arbitres, et en tout cas il faudrait que l'un soit contraint de prendre un arbitre hors de son domicile.-Conf. 29 déc. 1808, Gênes. Vincens, t. 1er, p. 200.

Mais il faut répondre, 1o que l'association en participation est une véritable société (V. Société), ce qui la place dans les termes généraux de l'art. 51 C. comm.; que le plus ou moins de formes dans la publication d'une société est ici indifférent, parce qu'il s'agit de compétence, et non de prouver la société ; que ce sera le tribunal du défendeur qui, suivant la règle générale, en cas de désaccord, nommera les arbitres; que c'est ce qui arrive lorsque des parties sont convenues d'attribuer leurs contestations à des arbitres. Ce dernier système est généralement admis. 27 déc. 1810, Bruxelles; 26 fév. 1814, Turin ; 28 mars 1815, Civ. c. Bordeaux; 7 janv. 1818. Civ. c. Montpellier; 4 juill. 1831, Bordeaux ;-Conf. Berriat, p. 46.-24 déc. 1818 et 9 mars 1822, Bruxelles.

47. Toutefois, les actes individuels d'un associé, passés avec la société, les engagements personnels qu'il aurait contractés, ne devraient point, en général, être gouvernés par l'art. 51 C. comm. C'est aussi ce qui s'induit des arrêts suivants, quoiqu'il puisse se présenter des cas où la limite sera souvent difficile à tracer.-29 avril 1817, Metz; 31 août 1831, Bordeaux.

48. Les contestations élevées, sur un projet de liquidation de société, par les créanciers de l'un des associés, agissant en leur nom personnel, ne sont point de la compétence des arbitres forcés (C. civ. 1167).-17 déc. 1853, Paris.

49. Quoique l'action que le gérant d'une société en commandite intenterait contre les commanditaires, à raison de la société, fût de la juridiction des arbitres, il n'en est pas de même de l'action directe et personnelle qui serait formée contre lui par les créanciers de la société tombée en faillite.-25 fév. 1855, Paris.

50.-La décision portant que tels débats entre associés sont étrangers à la société, est-elle souveraine et irréfragable devant la cour de cassation?-Cette question est délicate il nous semble que si le débat avait été mu sur ce point devant la cour royale et nettement fixé par les conclusions des parties, il entrerait dans l'attribution de la cour régulatrice de déclarer si ces actes, soumis à son appréciation, présentent le caractère d'actes relatifs à la société, dans le sens de l'art. 51 C. comm. En un mot, la constatation des faits est irréfragable leur qualification

:

tombe sous la censure de la cour de cassation.Contrà, Mongalvy, n. 25.-V. Cassation.

51.

L'incompétence du tribunal de commerce étant absolue, l'affaire doit être renvoyée devant des arbitres, lors même que la demande n'en aurait pas été faite aux juges par les parties (C. comm. 51).— 7 janv. 1818, Civ. c. Montpellier.

52.-Cette incompétence est matérielle, et n'est couverte ni par le défaut de conclusions des parties, à fin de renvoi, ni même par les conclusions des parties tendantes à lui attribuer le jugement de la cause... Cette incompétence est proposable en tout état de cause, même en appel (C. pr. 464).—5 janv. 1824, Toulouse; 21 mars 1852, Bordeaux.

53.-Jusqu'ici, et par la force du principe que les tribunaux de commerce ne sont que des juges d'exception, on les a regardés comme radicalement incompétents pour juger les contestations relatives à la société.

54. Le tribunal arbitral constitué en exécution de l'art. 51 C. comm. remplace, pour les matières qui lui sont attribuées, le tribunal de commerce, et remplit le premier degré de juridiction Ainsi, lorsqu'une sentence arbitrale, rendue en matière dé société commerciale, est annulée sur l'appel pour cause d'incompétence, en ce qu'il ne s'agissait pas de contestations nées de la société, mais de savoir si la société avait existé, la cour d'appel peut statuer au fond, sans renvoyer la cause devant les premiers juges (C. comm. 51; C. pr. 473). — 6 déc. 1821. Req. Paris.

55. Mais les tribunaux civils peuvent connaître des contestations qui leur sont soumises, et si la partie qui a succombé n'a pas proposé leur incompétence, elle est non recevable à s'en faire un moyen de cassation: la nullité est couverte. 9 avril 1827. Civ. r. Bourges.

56. - La raison de cette décision est que le juge civil ou ordinaire a une attribution générale; tandis que la compétence des tribunaux de commerce est limitée; qu'elle doit être sévèrement restreinte aux affaires qui leur ont été attribuées, et que, hors ces cas, ils sont absolument sans pouvoirs.-Dalloz, n. 115. 57. Le droit d'être jugé par arbitres forcés estil un droit personnel aux associés, et incessible? Si le pacte social défend cette instrusion, le cessionnaire a la qualité d'ayant-cause A ce titre, il semble qu'il doit pouvoir réclamer la juridiction arbitrale ou la subir (C. comm. 62). La difficulté se complique lorsqu'il y a plusieurs ayants-cause (cessionnaire ou créancier); mais elle ne change pas de nature. Mongalvy, n. 18, convient que le droit des associés est personnel. Dalloz, n. 117.

58. - La clause de l'acte de société, qui soumet à des arbitres en dernier ressort les contestations entre associés, est obligatoires pour les syndics, représentant l'un des associés faillis, comme elle l'eût été pour l'associé lui-même. Ainsi, l'appel du jugement arbitral est non recevable de la part des syndics, encore que l'acte qui nomme les arbitres ne contienne aucune renonciation à l'appel (C. pr. 1010; C. comm. 52). 20 juin 1817, Paris.

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vent compromettre sur les droits dont elles ont la libre disposition; » et l'art. 2, tit. 1er de la loi du 24 août 1798, disait déjà: « Toutes personnes ayant le libre exercice de leurs droits et de leurs actions pourront nommer un ou plusieurs arbitres pour prononcer sur leurs intérêts privés, dans tous les cas et en toutes matières, sans exception. » C'est là, malgré la trop grande généralité des expressions, la reproduction de ces mois, qui contrahere nequit nec compromittere potest, et de ceux-ci de Jousse (Administration de la justice, t. 2, p. 689, n. 13) : « tous ceux qui sont en état de s'obliger et de procéder de leur chef en justice, ont la liberté de se soumettre à des arbitres, et de compromettre sur toutes sortes d'affaires, pourvu que le roi et le public n'y aient aucun intérêt; d'où il suit que ceux qui ne peuvent aliéner, ne peuvent compromettre, parce que le compromis tend à l'aliénation.»- V. aussi Pig., t. ler, p. 13.— Dalloz, n. 128.

60. Sont incapables de compromettre, mais sous certaines exceptions qui seront indiquées :

61.1o Le mineur non émancipé (C. 481, 1124; C. pr. 1004), « minores si in judicem compromiserunt, et, tutore auctore, stipulati sunt, integri restitutionem adversus talem obligationem jura desiderant. » (L. 34, § 1er, de Min.; Domat, liv. 4, t. 6, sect. 2, n. 13. Il fut dit au conseil d'Etat : « A l'égard du mineur, il ne peut y avoir de difficultés. Il est évident qu'il ne peut compromettre. »

62.- Le principe d'après lequel le mineur ne peut entrer daus les voies de l'arbitrage, reçoit exception, 1o dans le cas où des associés qui étaient convenus de faire juger toutes leurs contestations par des arbitres, viennent à décéder laissant des enfants mineurs. La convention lie ces derniers; 20 dans le cas d'émancipation. (V. n. 65) mais on ne pourrait convertir l'arbitrage forcé en arbitrage volontaire (Merson, n. 18), ni renoncer à l'appel. Delv., 1, 497; Carré, 3, p. 391, note; Mong., n. 270.

65. — La nullité peut être demandée par le mineur, sans qu'il soit tenu de prouver qu'il a été lésé. On ne s'arrête pas au brocard, nullité sans griefs, dit Brillon. Le mineur est censé lésé, par cela seul qu'il a compromis. C'est, remarque Mongalvy, t. 1er, n. 267, la raison que Barthole, Mornac et Brunneman donnent sur la loi 35, Dig. de Recept.-Mong., t. 2, n. 262, se borne à rappeler, en passant, la doctrine des auteurs.-Cette doctrine nous paraît juste tant que le jugement n'a pas été rendu; mais lorsqu'il l'a été, la lésion doit être prouvée. Il est alors vrai de dire, avec Proudhon, t. 2, p. 282; Toul. 6; n. 106, que la rescision pour minorité n'a lieu qu'au cas de lésion.

64. La distinction qu'on propose ici entre le cas où il y eu jugement et celui où aucune décision n'est encore intervenue, rentre dans la doctrine de Carré, n. 3259 et du Praticien, p. 34, qui enseignent que, tant que la sentence n'est pas rendue, la partie capable a le droit de demander que le compromis soit rectifié d'une manière légale, où qu'il reste sans effet. Il est toujours permis de régulariser une procédure, lorsque les choses sont entières.-Dalloz, n. 134; Mong., n. 282.-Mais on objecte que les choses ne sont plus entières dans le cas dont il s'agit; que le consentement de la partie capable est acquis à son adversaire; que le contrat est parfait, et qu'il n'existe pas plus de raison pour le rompre avant qu'après la sentence. C'est aussi ce qui paraît implicitement jugé par l'arrêt Dewisscher, du 4 fruct. an XII.-On doute que ce rigorisme soit admis en matière d'arbitrage. 65.-2o Le mineur, même émancipé, sur les droits dont il n'a pas la libre disposition, car, à l'égard des au

tres, son incapacité cesse (Pig, 1,13; Carré, n. 5252; Dalloz, n. 135; Mong.; n. 267.)—En effet, il s'obligé par achat ou autrement; seulement on réduira l'obligation en cas d'excès.-Goub., p. 43.

66. Si le mineur est émancipé pour faire le commerce, il y a moins de doute encore (C. 487).— Mong., n. 267.

67.-50 L'interdit (C. 509).

68. Mais l'individu qui n'est pourvu que d'un conseil judiciaire peut compromettre sur les biens dont il a le droit de disposer librement (C. 513).— Carré, n. 3252; Mong., n. 271.

69.-40 Les femmes, sous quelque régime qu'elles soient mariées, si elles n'ont pas l'autorisation spéciale de leur mari, ou, à défaut, celle de la justice. Mong., n. 272; Carré, n. 3252, exceptent les femmes séparées de biens. Elles peuvent compromettre, suivant eux; car compromettre, ce n'est pas, dit Carré, ester en jugement (C. 217). Mais on répond que des arbitres sont de véritables juges, puisque leur sentence devient exécutoire, et qu'en procédant devant eux, la femme est censée ester en jugement (Mong., eod.). On peut ajouter que l'autorisation est exigée par déférence pour le mari; qu'on ne sait jusqu'où l'on s'engage quand on entre dans la lice judiciaire, et que les femmes n'ont pas, comme le mineur émancipé, le bénéfice de la restitution en cas d'excès.— Mais on répliquera qu'elles ne sont tenues que jusqu'à concurrence de ce dont elles ont la libre disposition; qu'autrement on devrait interdire à la femme de compromettre, même sur le revenu de ses paraphernaux. Le système qui soumet la femme à l'autorisation parait préférable.-Conf. Goub., p. 45.

70.-Mais, en tout cas, il est sensible que la femme, même séparée de biens, ne peut, sans l'autorisation de son mari ou de justice, compromettre sur une demande en délaissement d'un immeuble ou d'un droit immobilier (C. civ. 215.-17 juil. 1827, Montpellier. Mongalvy n'excepte pas même la femme marchande publique (C. 220).

71.-Et il exige une autorisation spéciale; car toute autorisation générale, même stipulée par contrat de mariage, doit, selon lui, être regardée comme non avenue. C'est la disposition de l'art. 223. C. c.

72.-5° La femme mariée sous le régime dotal sur ses biens dotaux, quoiqu'elle se soit réservé la faculté d'aliéner ses biens, et de contracter tous les engagements qu'elle jugera convenables. - 20 août 1828, Lyon. Mongalvy, n. 274, critique cet arrêt, qui maintient la généralité de l'art. 1004, en faisant observer qu'il rend inutile la faculté accordée par l'art. 1557 C. civ.

73.-6o Le mari, sur la dot de sa femme mariée sous le régime dotal, quoiqu'il ait seul l'administration des biens dotaux; qu'il ait seul le droit d'en poursuivre le détenteur, d'en percevoir les fruits et les intérêts (C. pr. 13, 1004; C. civ. 1554).

74.-S'il ne s'agissait que d'une question d'administration des biens dotaux avec un fermier ou tout autre, Mongalvy, p. 415, accorde que le mari, administrateur et usufruitier, pourrait compromettre.— Néanmoins, la sentence à laquelle ce compromis donnerait lieu ne nuirait pas aux droits de la fenime; dans ce cas, soit parce que le mari ne satisferait pas aux charges du ménage, soit parce que la dot serait en péril, la femme ferait prononcer la séparation de biens. Dalloz, n. 151.

75.-Le mari a qualité aussi pour compromettre sur les contestations relatives à une société d'acquêts stipulée par son contrat de mariage entre son épouse et lui d'une part, et ses père et mère, d'autre part.22 mai 1852, Bordeaux.

76.-7o Le tuteur, quoiqu'à son égard divers systèmes soient produits.

77.-S'il s'agit d'immeubles, l'incapacité du tuteurest généralement admise sous le droit nouveau comme sous l'ancien.-Dalloz, n. 154.

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78.-S'il s'agit de meubles et de droits mobiliers, on distingue ou le tuteur n'est pas autorisé par la famille, et dans ce cas le compromis est nul; c'est l'avis des auteurs. Ou bien il est autorisé à compromettre, et il a de plus rempli les formalités exigées par l'art. 467. C. civ., pour les transactions. Dans ce cas. Demiau et Boucher estiment que le compromis est valable.Mais Berriat, p. 58, le Praticien, Carré,n. 5251, Toullier, 2, n. 1242, el Dalloz, n. 155 qui résume toute la doctrine ancienne et nouvelle, annulent le compromis. La généralité des termes des art. 1003, 1004 C. pr.. l'éventualité des résultats du compromis, tandis qu'on connait ceux de la transaction, la difficulté de distinguer toujours ce qui est mobilier de ce qui ne l'est pas tels sont les motifs de cette nullité. Conf. Goubeau, t. 1er, p. 56 et suiv.; Mongalvy, n. 269.

79.-On a proposé deux modes pour faire jouir les mineurs, dans les affaires peu importantes et compliquées, des avantages du compromis. Suivant Toullier, 2, n. 1242, on convient respectivement de remettre les pièces à un ou plusieurs jurisconsultes, pour s'en rapporter à leur avis, qui est rédigé en forme de jugement, qu'on passe ensuite par expédient sur les conclusions du ministère public.→ D'après Carré, Anal. rais., n. 2976, les jurisconsultes devraient rédiger un modèle de transaction pour être soumis au conseil de famille, ensuite à l'homo'logation du tribunal sur les conclusions du ministère public et après nouvel avis de trois jurisconsultes.-Ces deux modes ont été signalés comme peu sûrs et comme violant indirectement une disposition que le législateur a voulu rendre inflexible.-Mongalvy reproduit en partie cette critique, n. 269.-L'arrêt du 4 fruct. an XII, n. 156, peut paraître contraire au mode qu'indique Carré, lequel sera, au reste, rarement suivi.

80.-80 L'héritier bénéficiaire, sous peine de perdre sa qualité de bénéficiaire. Mais le compromis est valable, car, disent très-bien Merlin et la cour de cassation, on peut toujours abdiquer la qualité de bénéficiaire pour prendre celle d'héritier pur et simple; et la renonciation résulte de ce que le bénéficiaire a fait un acte en opposition avec cette qualité.-(C. comm. 784, 803: C. pr. 1003, 988, 989). Merl., Rép. vo Bénéf. d'invent., n. 26; Delv.. 2, 96; Berriat, p. 720; Carré, n. 5253.-20 juill. 1814, Req. Paris.Conf. Mongalvy, n. 276, qui ne cite aucune de ces autorités selon son usage.

Il importe peu que le bénéficiaire ait pris ou non, dans les actes, la qualité d'héritier.-Carré, eod.; Dalloz, n. 160.

81.-En conséquence, l'héritier bénéficiaire n'est pas fondé à demander la nullité du jugement arbitral, sous le prétexte qu'il n'a pas eu capacité pour compromettre (paramiable composition) sur un solde de compte concernant l'hérédité.-Seulement, dans ce cas, il perd sa qualité d'héritier bénéficiaire, et il devient héritier pur et simple (C. pr. 1003, 988, 989; C. civ. 784, 805).-20 juill. 1814. Req. Paris.

82.- Des mots comme administrateur, que renferment les motifs d'un arrêt de la cour de Paris du 5 juin 1808, Carré, n. 5253, conclut que lorsque ce n'est qu'en qualité d'administrateur qu'il a été compromis, le bénéficiaire ne devient pas héritier pur et simple. Mais il n'en conclut pas, comme l'avance à tort Mongalvy, n.277, qu'il ait qualité pour compro

mettre comme administrateur ; il dit, au contraire. très-expressément, que le compromis doit être annulé ainsi que tout ce qui l'a suivi. En cela, Carré ne fait que reproduire l'opinion de Demiau qui, pour déterminer si le bénéficiaire doit, par suite de ses actes, être réputé avoir perdu sa qualité, veut qu'on examine si c'est en qualité de maître ou d'administrateur qu'il a entendu agir (V. le résumé de cette discussion D. A. 1. 613, n. 1). Et cette théorie, en thèse générale, ne présente rien qui ne puisse se justifier. Car il serait par trop rigoureux de dépouiller le bénéficiaire de sa qualité, à cause d'un acte qui ne serait d'aucun intérêt pour lui, et qu'il aurait expressément dit et entendu ne faire que comme administrateur. -- Or, le compromis passé dans l'espèce avec le régisseur, devait-il comporter un tel effet? Non, dit Carré, car ce n'est que comme administrateur que le bénéficiaire a compromis.

84. Toutefois, Carré commet une erreur lorsqu'il présente l'arrêt qu'on vient d'analyser comme jugeant d'une manière absolue « qu'un héritier bénéficiaire peut compromettre sur les comptes que lui doivent les fermiers ou régisseurs de la succession, sans perdre pour cela sa qualité de bénéficiaire, e --D'abord, cela serait contraire à la doctrine retracée n. 160. Ensuite, cette décision n'aurait pu être prise qu'autant que cette question aurait été agitée avec des créanciers de la succession.-Or, c'est ce qui n'a point eu lieu dans l'espèce, puisque le litige n'existait qu'entre des hérïtiers, et seulement sur la demande en nullité du compromis formé par le compromettant lui-même.-C'est donc sous ce rapport que les observations de Carré prêtent à la critique, plutôt que sous celui indiqué par Mongalvy. 85-9o Le curateur aux biens d'un absent, s'il n'a une autorisation spéciale. 5 octobre 1808, Req. Rouen.

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Et c'est à tort qu'on opposerait l'art. 1575 C. civ., aux termes duquel le maître dont l'affaire est bien administrée, est tenu des engagements pris en son nom. Car. par cela qu'il y a compromis, il y a mauvaise gestion.-Pigeau, 1, 57; Carré, sur l'art. 1003; Demiau, p. 672; Berriat, p. 4, n. 9; Mong., n. 280; Dalloz, n. 165.

86.-Ajoutons même que l'autorisation spéciale dont parle l'arrêt précédent ne serait d'aucun effet, puisque le ministère public doit être entendu dans les causes intéressant les absents (C. civ. 114; C. pr. 83.§6).

87.-10o Les envoyés en possession des biens de l'absent ou ses parents (C. civ. 128; Praticien, n. 354); quoique le compromis ne porterait que sur les meubles de l'absent.

88.-11 Un fils pour son père sans mandat exprès de ce dernier, et le vice de la nomination d'arbitre n'est pas couverte par la comparution du père devant l'arbitre.-29 avril 1820, Toulouse.

89.-12° Les syndics à l'égard des intérêts du failli.-Carré, 2, p. 248; Boulay, 1, 450; Pardessus, t. 5, p. 95.

90. - Ils ne peuvent non plus renoncer à l'appel, ni convertir un arbitrage forcé en arbitrage voloutaire, sans l'autorisation des créanciers et du failli. Il n'y aurait pas, en effet, garantie suffisante pour les intérêts de ce dernier. · Dalloz, n. 170. 91. — 15o L'associé gérant, relativement aux intérêts de la société, s'il n'a un mandat spécial. 92. Il importe peu qu'il soit nommé liquidateur, car, comme tel, il n'a qu'un simple mandat qui ne donne pas le droit de compromettre (C. pr. 1003; C. civ. 1989; C. comm. 64). - 15 janv. 1812. Civ. c. Paris.

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