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2e Section.

Navigation maritime.

3e Communication.

Ponts. Ponts à transbordeur. Tunnels sous les voies hydrauliques desservant la navigation maritime. Etude économique et technique.

COMPTE RENDU

PAR

M. BATARD-RAZELIÈRE, Ingénieur en Chef des Ponts et Chaussées.

L'étude des moyens employés pour faire franchir les voies d'eau affectées à la navigation maritime par les voies de circulation. terrestre a fait l'objet des rapports suivants :

:

Pour l'Allemagne Rapport de M. Wendemuth, Baurat, à Hambourg;

Pour la Belgique: Rapport de MM. Zanen, Ingénieur en Chef, Directeur des Ponts et Chaussées et L. Descans, Ingénieur des Ponts et Chaussées, à Anvers ;

Pour les Etats-Unis: Rapport de M. G. Lindenthal, Ingénieur Conseil, à New-York;

Pour la France: Rapport de MM. Babin, Ingénieur en Chef, Coblentz et Tartrat, Ingénieurs des Ponts et Chaussées, à Rouen. Pour l'Italie: Rapport de M. Angelo Forti, Ingénieur, à Milan; Pour la Russie; Rapport de M. A. Rojdestvensky, Ingénieur des voies de communication, à St-Pétersbourg;

Pour la Suède

Rapport de M. E. J. Nilsson, Ingénieur de la Direction des ports, à Stockholm.

Rapport général de M. William H. Burr, Ingénieur Conseil, Professeur à l'Université de Colombie, à New-York.

Les rapporteurs particuliers ont traité la question, les uns avec

des vues d'ensemble, les autres d'après les exemples existant dans leurs pays respectifs; leurs rapports sont analysés dans le rapport général. Dans le présent compte rendu nous essaierons de grouper méthodiquement les intéressants renseignements contenus dans ces divers documents et d'en dégager, sinon des conclusions que ne comporte pas un aussi vaste sujet, du moins des indications sur les sujets d'étude qui s'y rattachent et qui pourraient être utilement soumis aux prochains Congrès.

Classification.

La classification des différents modes de traversée est très bien définie dans le rapport de MM. Babin, Coblentz et Tartrat; elle comprend trois modes principaux, savoir:

1° Traversée inférieure par souterrain;

2o Traversée supérieure par viaduc;

3o Traversée à niveau par ponts mobiles: ponts tournants, ponts levants à bascule ou à soulèvement, ponts roulants, ponts à transbordeur et transbordeurs sur radier.

Ces trois modes principaux et même certains des ouvrages classés dans la troisième catégorie comportent en outre, suivant leurs dispositions ou leur système de construction, plusieurs types distincts que nous examinerons successivement.

Enfin, comme modes de traversée appartenant à la troisième catégorie, on peut encore citer les ponts flottants et les bacs; ces ouvrages ou appareils ne rentrent évidemment pas dans le programme correspondant au titre de la troisième communication; les ponts flottants ou ponts de bateaux sont d'ailleurs assez rares et doivent être considérés comme une solution peu satisfaisante et plutôt provisoire du problème posé; mais il n'en est pas de même des bacs qui, notamment aux Etats-Unis, ont pris une telle extension et rendent de tels services qu'ils ne nous paraissent pas pouvoir être passés sous silence. Nous en ferons donc l'objet d'un paragraphe spécial avant d'aborder l'examen des autres ouvrages.

Ferries. Les bacs ou pontons transbordeurs, décrits dans le rapport de M. G. Lindenthal, sont désignés aux Etats-Unis sous le nom de « Ferry-boats » ou plus simplement de « ferries ». Ce mode.

de traversée offre d'abord l'avantage que la dépense de premier établissement et les frais d'exploitation sont sensiblement proportionnels au trafic à desservir, puisqu'on est maître de composer le matériel et de faire varier son importance suivant les besoins, tandis que les tunnels et viaducs et même, dans une certaine mesure, les ponts mobiles exigent généralement une mise de fonds plus ou moins élevée, qui n'est justifiée que lorsque le trafic est suffisamment intense. Il permet, en outre, de relier entre eux les points les plus convenablement choisis sur les deux rives, sans être tenu par l'obligation de franchir la nappe d'eau suivant la plus courte distance ou avec une faible obliquité, comme dans le cas des autres ouvrages dont le coût augmente en même temps que la longueur. Il est vrai de dire que les circonstances locales aux Etats-Unis s'y prêtent admirablement, par suite de la faible amplitude des marées et de la vitesse négligeable des courants dans les vastes estuaires où sont situés les principaux ports maritimes; le brouillard et les glaçons flottants y occasionnent toutefois, mais à de rares intervalles, quelques interruptions de service.

Les ferries accostent dans des débarcadères spéciaux, dénommés slips » qui sont le plus souvent disposés perpendiculairement à la rive et dont la forme encadre celle des ferries. Un slip est constitué, de chaque côté, par deux ou trois rangées de pilots entretoisées entre elles; la rangée antérieure comprend des pilots espacés de huit à quinze pieds et sur lesquels sont boulonnées des poutres horizontales s'élevant de six à quinze pieds au-dessus du niveau de l'eau; des planches verticales en bois dur sont clouées sur ces poutres et forment une surface lisse contre laquelle le ferry-boat peut glisser en abordant le slip. La caractéristique de cette construction est sa grande élasticité ; le ferry-boat, entrant dans le slip et venant en contact avec les parois flexibles, ne subit aucun choc et arrive doucement jusqu'au ponton dout il sera parlé plus loin.

Il existe deux types de ferry-boats, l'un pour le transport des passagers et des véhicules ordinaires, l'autre pour le transport exclusif des wagons de chemin de fer.

Le type adopté pour le transport des passagers et des véhicules ordinaires consiste dans une longue plateforme, à extrémités étroites

et arrondies, toutes deux identiques. Les cabines ou abris pour passagers sont aménagés de chaque côté de cette plateforme, la partie médiane étant réservée aux véhicules. Le plus souvent, le bateau est surmonté d'un deuxième pont supportant une vaste cabine à l'usage des passagers. La machinerie est placée sous le pont principal; la propulsion est obtenue au moyen de roues ou d'hélices. Certains de ces ferries sont de véritables navires; le ferry municipal << Bronx » du port de New-York a 250 pieds (76,25) de longueur, 66 pieds (20m, 13) de largeur et 12 pieds (3,66) de tirant d'eau ; il peut contenir 2.000 personnes et 18 voitures; il est pourvu d'une machine de 4.000 chevaux et a fait aux essais 18 noeuds de vitesse; il a coûté 380.000 dollars (1.976.000 francs). Le transbordement du ferry-boat à la terre ferme s'effectue au moyen d'un tablier de pont dont un bord est articulé à la rive et l'autre bord repose sur un ponton qui monte et descend suivant les variations du niveau de l'eau et qui est disposé au bout du slip; la longueur du tablier de raccordement est calculée de manière que son inclinaison ne dépasse pas trois pour cent. Ces engins fonctionnent d'une manière parfaite et les manoeuvres d'accostage sont extrêmement rapides.

Le type adopté pour le transport des wagons est plus communément désigné sous le nom de « car-float ». Certains de ces floats sont capables de recevoir des trains entiers soit de voyageurs, soit de marchandises; ils sont rarement munis d'un système d'autopropulsion; en règle générale, ils sont mus à l'aide de puissants remorqueurs. Les wagons passent, par l'intermédiaire de tabliers de raccordement, directement sur les car-floats, où ils sont solidement amarrés puis transportés à leur destination sur l'autre rive. Au port de Québec (Canada), la marée est trop sensible pour qu'on puisse opérer de la sorte; les car-floats se placent, par suite, parallèlement au quai au lieu de se placer en bout et sont munis d'une plateforme qu'on élève mécaniquement jusqu'au niveau du quai pour recevoir un wagon; puis la plateforme est ramenée au niveau du pont et le wagon est conduit au moyen d'un chariot à la place qu'il doit occuper sur le pont. Les car-floats les plus récents ont jusqu'à 270 pieds (82,35) de longueur, 32 pieds (9,76) de largeur et 7 pieds (2,14) de tirant d'eau en charge; ils sont pourvus de trois voies

permettant l'accès de 15 à 17 wagons de marchandises. La puissance des remorqueurs varie de 300 à 850 chevaux.

A New-York seulement le nombre total des car-floats est supérieur à 200; le trafic total par chemin de fer qui franchit le North River et qui est compris entre 11 et 12 millions de tonnes par an comporte d'ailleurs exclusivement ce mode de traversée. Un pareil trafic justifierait évidemment la construction d'ouvrages fixes, de tunnels par exemple, même au prix des plus lourds sacrifices; la force de l'habitude et la difficulté de raccorder directement les deux rives par suite de leur encombrement ont fait reculer jusqu'à présent devant cette solution.

Tunnels.

L'Angleterre est le premier pays où il ait été construit des tunnels sous-marins pour la traversée des fleuves larges et plafonds, tels que la Severn, la Mersey et la Tamise; mais c'est aux Etats-Unis où il a été fait le plus d'applications de ce mode de traversée, (*) qui n'est à envisager que lorsque le trafic à desservir est très important en raison de la dépense extrêmement élevée des travaux de premier établissement. Dans ce cas, en effet, il n'y a pas seulement à considérer la construction de la traversée proprement dite, mais aussi celle des raccordements à chaque extrémité avec le niveau de la terre ferme; or, pour une ligne de chemin de fer à grand trafic, on ne peut guère dépasser une déclivité de 10 "/m par mètre; étant donné, d'autre part, que les nécessités de la navigation maritime obligent à conserver ou à prévoir la possibilité de donner dans les chenaux d'accès aux grands ports, une profondeur de 12 mètres au moins au-dessous des basses eaux, on arrive nécessairement à placer les rails à une vingtaine de mètres au moins en contrebas de ce même niveau; telle est la hauteur totale à racheter dans les circonstances les plus favorables et non compris la hauteur des rives au-dessus des basses eaux, ce qui exige des raccordements

* Il existe actuellement à New-York, sous le North-River: six tunnels à simple voie, dont deux à section normale pour le service de la Compagnie des chemins de fer de Pensylvanie et quatre à section réduite pour le service local, et sous l'East-River: huit tunnels analogues dont quatre à grande section et quatre à section réduite; tous ces tunnels sont exclusivement réservés au trafic des voyageurs.

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