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du roi. Il ordonna que les restes de la reine seraient enlevés de Brandebourg - House le 14, dans une voiture décorée de huit écussons, traînée par huit chevaux, avec une suite de voitures de deuil, et une escorte des gardes à cheval; que le cortége serait dirigé de manière à ne pas passer dans les rues de Londres, jusqu'à Harwich, où le corps, ainsi que les personnes du deuil qui devaient l'accompagner jusqu'à Brunswick, seraient transportés à bord de la frégate la Glascow, destinée à faire ce voyage.

Les amis de la reine réclamèrent auprès du ministère pour qu'il voulût bien accorder le temps nécessaire aux préparatifs da cortége funèbre... Ils représentèrent à l'officier chargé de le diriger que la volonté de la reine avait été qu'il n'y eût pas d'escorte militaire à son convoi, et qu'il s'exposait aux plus grands malheurs s'il persistait à la conserver et à suivre la route indiquée par les ministres. Après bien des pourparlers entre les exécuteurs testamentaires et les officiers du gouvernement, le cortége, composé des amis de la reine, d'un grand nombre de cavaliers en habit noir, et de députés de différentes corporations, quitta BrandebourgHouse. Il devait suivre des rues de faubourg, au nord de Westminster (New-Road), et au nord de la cité (City-Road), pour se rendre à Rumford et à Colchester, sans traverser la cité. Mais dans plusieurs endroits, auprès de l'église de Kensington, au coin de Hydepark, on avait barricadé les rues par des charrettes et des voitures. Une foule d'hommes à cheval, une populace immense, arrêtaient à chaque pas le cortége par des cris, des vociférations et des insultes contre les militaires, en sorte qu'on fut plusieurs fois obligé de changer de route et de repousser la force par la force. A la sortie d'Hydepark, comme on allait prendre la grande rue (New-Road), les cris et les insultes de la multitude recommencèrent avec plus de violence; elle jeta des pierres aux dragons, qui firent feu, et tuèrent ou blessèrent plusieurs personnes. Mais la foule devint si considérable au point où le New - Road est coupé par le Tottenham-Court-Road, qu'elle força la troupe, et que le cortége fut entraîné jusqu'à l'entrée de la cité, où, conformément à son privilége, le lord maire empêcha les soldats de

passer.... Alors on craignit les plus grands excès. Une multitude immense, animée par le triomphe qu'elle avait remporté sur la troupe, se répandait dans les rues en criant: La reine arrive! La reine assassinée !... On parlait de conduire le char funèbre devant la résidence du roi ( Carlton-House), et de lui faire une, espèce de sacrifice expiatoire; l'exaspération du parti était au comble. Cependant, grâce à la police pacifique des constables, le cortége suivit sa route directe sans autres désordres que des cris in jurieux pour les militaires; et après huit heures d'une marche si pénible, il arriva aux limites de la cité, à White-Chapel, d'où il suivit paisiblement la route de Colchester, où le corps fut déposé dans l'église pour y passer la nuit avec une garde.

le

Là encore, les exécuteurs testamentaires et plusieurs autres personnes du cortége (MM. Lushington, Wilde, lord Hood, comte Vassali, Sir Robert Wilson et l'alderman Hood), ayaut pénétré secrètement dans l'église vers minuit, firent clouer sur le cercueil une plaque qui portait l'inscription mentionnée dans un des codiciles de la reine: A la reine outragée d'Angleterre. Mais l'officier du gouvernement y fit substituer d'autorité celle qu'on y avait fait faire par le conseil héraldique (1), et les exécuteurs testamentaires (Lushington et Wilde) furent réduits, après une contestation vive, à protester solennellement contre la violation de leurs droits et des dernières volontés de la reine. Le lendemain le corps arriva vers onze heures à Harwick, où il fut reçu avec tous les honneurs militaires et embarqué sur la frégate la Glascow, qui mit aussitôt à la voile pour Stadt, où elle est arrivée le 20 août. De là le corps de la reine a été conduit par les personnes de sa suite, sous une nombreuse escorte, à Brunswick,

(1) La voici telle qu'elle est sur le tombeau de la reine à Brunswick : Depositum serenissimæ principissæ Carolina-Amelia-Elisabethæ, Dɩi gratid regine consortis augustissimæ potentissimi monarche, Georgiiquarti, Dei gratiá Britanniarum regis ; fidei defensoris, regis Hanoveria ac Brunsvici et Luneburgi ducis. Obiit V11 die mensis augusti anno Domini MDCCCXXI, ætatis suæ LIV.

où, après les cérémonies funèbres dues à son rang, il a été déposé le 25 août dans le tombeau de ses ancêtres.

A la suite des troubles qui avaient eu lieu au convoi de la reine, le major-général sir Robert Wilson fut rayé des contrôles de l'armée, comine ayant insulté les militaires de l'escorte dans la journée du 14. On fit une enquête sur la mort des deux individus tués le même jour (Francis et Honey) par des dragons de la garde, qui furent acquittés comme étant en état de résistance légale. La première décision excita surtout les plaintes et les réclamations des amis de la reine; c'est ce qui termine cette déplorable et scandaleuse affaire.

(Voyages du roi.) Le roi était en route pour l'Irlande lors de la mort de la reine. Débarqué à Hought, le 12 août, il se rendit à la maison du vice-roi, où il resta en retraite et ne voulut recevoir personne jusqu'après les funérailles de la reine.... Le 17 août, il fit son entrée solennelle à Dublin. C'était le premier roi de sa race qui visitât cette île. Il y fut reçu par la population catholique surtout avec des acclamations unanimes de joie et de reconnaissance. Il accueillit le clergé de ce culte avec une considération particulière, et en lui témoignant quelque regret sur le résultat de l'affaire dernièrement soumise au parlement. Il visita les établissemens publics, passa des revues militaires, reçut les hommages ordinaires des autorités avec la cordialité la plus franche. Il semblait surtout s'attacher à faire renaître la concorde entre les partis qui divisent ce malheureux pays, et il en partit le 4 septembre dans la confiance d'y avoir réussi, noble espérance bientôt déçue.

(Troubles en Irlande.) S. M., quelques jours après son retour à Londres, sur le point de faire ce voyage d'Hanovre dont nous avons rendu compte (page 277), nomma, pour tenir les rênes da gouvernement en son absence, un conseil de régence, ou de lords justiciers, composé des premiers personnages de l'Etat. Ce conseil était à peine installé, que les troubles dont l'Irlande avait été agitée l'année dernière reprirent avec un caractère plus dangereux et plus alarmant. Le dénouement de l'affaire de l'émancipation des catholiques avait été une espèce de triomphe pour cette petite classe

de protestans établis en Irlande, enrichis par des confiscations, connus sous le nom d'Orange men (hommes du prince d'Orange, Guillaume III). Ils n'avaient pu le dissimuler, même en présence du roi. Cette classe, à qui profitaient les abus reconnus dans l'administration, tenait le reste de la population catholique dans un état voisin du servage aboli dans toute l'Europe: on en a dit les raisons. L'absence des grands propriétaires, l'avidité de leurs fermiers ou middlemen, et l'énormité de la dime exigée pour un culte étranger à celui de la masse de la population, réduisaient le paysan irlandais à la misère la plus profonde. Sa vengeance éclata tout à coup dans plusieurs contrées du midi (Cork, Limerick, etc....) par des excès affreux.... Il se forma des bandes qui, à la faveur de la nuit, allaient piller les maisons des gentilshommes ou des fermiers. Devenus plus redoutables par les armes qu'ils avaient enlevées, ils étendirent le cours de leurs brigandages et de leurs proscriptions. Toute personne condamnée dans une de leurs réunions mystérieuses était impitoyablement assassinée par des hommes étrangers au pays, et par cela même plus difficile à découvrir. A la première nouvelle de ces violences, la Yeomanri du pays s'était rassemblée, mais elle était trop peu nombreuse, les insurgés en devinrent plus audacieux. On fit venir des troupes, ils osèrent leur résister, et dans quelques rencontres ils les forcérent à reculer. Bientôt tous les petits cultivateurs firent cause commune avec eux, obligeant les riches fermiers, middlemen, à diminuer leurs baux, ou à reprendre les tenanciers qu'ils avaient chassés, sous peine de voir brûler leurs maisons et d'être euxmêmes assassinés, et l'exécution suivait de près la menace; on en a cité d'horribles exemples.

Au retour du roi, le gouvernement prit des mesures plus rigoureuses; il envoya en Irlande des renforts de troupes ; il nomma pour lord-lieutenant le marquis de Wellesley à la place du comte de Talbot, et pour secrétaire du gouvernement M. Goulburn. A la fin de l'année, il n'y avait pas moins de douze comtés du midi plus ou moins agités du feu de la révolte, et vingt mille hommes de troupes régulières pour la réprimer. Les insurgés allaient en

plein jour par bandes de douze à quinze cents; on leur faisait des prisonniers, on exécutait militairement ceux qui étaient pris les armes à la main; mais on espérait encore moins, pour la pacification du pays, de, la rigueur des moyens déployés que des talens du nouveau lord-lieutenant, qui n'en a pris le gouvernement que le 9 décembre.

Quant à l'Angleterre, elle venait aussi de subir quelques changemens dans son administration. M. Robert Peel avait remplacé lord Sydmouth au ministère de l'intérieur.—La détresse de l'agriculture continuait à se faire sentir; mais, suivant des documens officiels dont les détails ont été contestés par l'opposition, le commerce extérieur avait fait des progrès considérables (1); le revenu public, c'est-à-dire le produit des impôts, avait surpassé les espérances données dans la discussion du budget (Voy pag. 541 ); et les derniers récensemens faits dans le royaume uni en oot porté la population à vingt et un millions d'habitans, nombre qui excède les estimations les plus exagérées.

Colonies anglaises. Nous avons parlé des agitations des îles Ioniennes à l'occasion des Grecs. Le lord-haut-commissaire, sir Th. Maitland, y avait pris des mesures sévères contre les habitans, dont l'esprit national se manifestait par des mouvemens séditieux contre leurs protecteurs. C'est le seul point extérieur où l'administration britannique ait été sérieusement inquiétée cette

année....

Dans l'Inde, l'expédition préparée à la fin de l'année dernière contre la tribu Arabe, dite des Beni-Boo-Ali, pirates qui désolaient le golfe Persique, a été terminée au mois de mars par la prise de leurs forteresses, par le bombardement de Moka, et par

(1) D'après le relevé officiel des douanes, les importations ont été au taux moyen, ces trois dernières années à

Les exportations à ..

Et les exportations portées pour 1820, à.

36,759,000 liv. sterl.

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(Etat de l'Angleterre au commencement de 1822. )

se sont élevées, en 1821, à.

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