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lique dominante, car le clergé de ce pays est avide de ressaisir ses bénéfices.... » Suivant le comte Harrowby, l'admission des catholiques romains dans les deux chambres n'y produirait pas d'autre effet que celle des presbytériens d'Ecosse contre laquelle on avait aussi réclamé....

Tout semblait dit sur cette question, mais la division qu'elle excitait dans le gouvernement comme dans la société inspirait un intérêt extraordinaire; plusieurs des membres les plus influens de la chambre voulaient encore se faire entendre, et par un cas assez rare, on ajourna au lendemain la discussion.

Dans l'intervalle, il n'était bruit dans le public que de la dislocation du ministère, de la retraite du comte de Liverpool et de ceux qui étaient opposés à un bill qu'on supposait avoir l'assentiment personnel du roi. Cependant il n'en fut rien, et la discussion reprit le lendemain avec autant de chaleur que la veille.

17 avril. L'évêque de Saint-David combattit le bill en tant que contraire à l'acte d'union, à la loi commune qui regardait le roi d'Angleterre comme le chef de l'église, etc....-S. A. R. le duc d'York déclara que, malgré sa répugnance à parler sur cette matière, il regardait comme un devoir impérieux d'exprimer hautement son opinion <«< sur une mesure qui tendait à produire une grande altération dans les principes qui avaient signalé la révolution de 1688, et mis la famille de S. M. sur le trône.... Milords, s'écria S. A. R., je regarde l'église d'Angleterre comme partie intégrante de la constitution de notre pays, et puisse-t-il en être toujours ainsi! » S. A. R. exposa d'ailleurs qu'elle n'était pas ennemie de la tolérance, mais qu'il y avait une grande différence entre la liberté des cultes et l'exercice du pouvoir politique. - C'est en ce sens surtout qu'il rejetait le bill.

Une telle opposition, de la part du plus proche héritier du trône, en harmonie sur tout le reste avec le gouvernement de S. M., était d'un facheux augure pour le sort du bill. Cependant le comte Darnley, tout en déplorant la nécessité où il était de combattre l'opinion de l'illustre duc, et en blâmant l'irritation qui se réveillait contre les catholiques, représenta que l'admission

de 15 à 16 membres catholiques dans les communes, en supposant qu'ils eussent la majorité dans les élections d'Irlande, n'était pas d'un grand danger pour l'église anglicane ni pour la constitution.

Le lord chancelier, quittant son siége (the woolsack), attaqua les principes du bill avec moins de ménagement que tout autre. Il rappela qu'il s'était constamment opposé aux demandes des catholiques, malgré des autorités imposantes, telles que celles de M. Pitt et de lord Grenville, par l'impossibilité de les accorder sans des garanties peut-être impossibles à faire accepter par les catholiques si elles sont jugées suffisantes par l'église anglicane. « Dans mon opinion, dit le lord chancelier, c'est le devoir du gouvernement de protéger la religion du pays. Heureusement pour celui-ci, la religion établie est non-seulement le plus pur système de la foi chrétienne, mais elle offre aussi au plus haut dégré la sécurité de la liberté civile et religieuse, même pour les dissidens contre lesquels il a été reconnu utile de la défendre. A cet égard une religion constituée est le plus grand bienfait pour un peuple, non pour y faire l'église politique, mais pour y faire l'état religieux. C'est le premier lien des sociétés... » Sous ce rapport S. S. défend l'établissement de la religion anglicane, par l'impossibilité d'en concilier la sécurité avec le bill proposé, dont il regarde les dispositions restrictives comme inexécutables ou destructives des droits qu'on prétend établir.

Ici lord Grenville, dont l'opinion venait d'être invoquée ou plutôt combattue d'avance par le lord chancelier, commence par faire un tableau effrayant du système d'oppression suivi depuis Elisabeth, surtout sous le règne de Georges II, contre les catholiques d'Irlande. On voulait les priver de toute espèce de propriété foncière, les réduire à l'état d'ilotes, et même les priver de leurs prêtres, afin de les contraindre à se faire protestans. Il prouve par des documens officiels que la masse des terres confisquées en Irlande pendant un siècle, pour cause de religion, surpasse de 700,000 acres l'étendue du sol, parce que les mêmes propriétés ont été confisquées deux ou trois fois. Il rappelle les concessions Annuaire hist. pour 1821.

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faites jusqu'à la franchise électorale, cédée en 1793, et en déduit la convenance et la nécessité de compléter le bienfait, parce qu'il n'est pas dans l'esprit de la constitution britannique de dégrader et d'opprimer les hautes classes de la société. Il représente que le serment d'allégeance exigé des catholiques, avec les restrictions nouvelles, est une garantie suffisante de la fidélité envers le monarque; que quant aux autres garanties désirables, que, suivant le lord chancelier, ni M. Pitt, ni lui (lord Grenville), n'avaient pu expliquer, la plus désirable était d'abord dans la justice du gouvernement, dans la modération du clergé de l'église établie, dans la justice absolue pour toutes les parties et les classes de la population. Ici tout se réunit en faveur des catholiques, l'Europe entière est en paix, on n'a pas besoin de réclamer leurs bras pour une guerre étrangère, ni pour la protection de la tranquillité intérieure, le bill peut passer maintenant comme un acte de grâce et de bonté : il rattache toute la population de l'Irlande non seulement au trône et à la monarchie, mais même à la personne du souverain protestant, tandis que, dans l'hypothèse du réjet, il serait incessamment reproduit et peut-être arraché au parlement sous l'empire de circonstances moins favorables. »

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Sur ce discours, lord Liverpool, dont l'opposition au bill était connue d'avance, fait observer que les argumentations du noble pair qui vient de parler sont fondées sur la confusion de deux choses entièrement distinctes.

« Il nous a rappelé, dit S. S., les injustices et les horreurs qui ont été les résultats d'un code civil et pénal, tendant à l'oppression des catholiques sous le rapport de leurs propriétés et de leurs personnes. Ensuite il cherche à représenter les lois qui excluent les catholiques du parlement comme des restes de ce code barbare. Je veux bien convenir que ces lois civiles et pénales sont un monument honteux d'injustice et d'inhumanité; mais je nie que l'exclusion des catholiques du parlement ait aucun rapport avec ces lois. Autre chose est la liberté civile, la sûreté des propriétés et des personnes, que la législation doit à tous les sujets; autre chose est le pouvoir politique, privilége qu J'Etat peut accorder ou refuser, d'après des considérations de nécessité ou de convenance. Il est absurde de punir un citoyen à cause de sa croyance; mais personne n'est puni, ni opprimé, ni flétri, pour ne pas recevoir de l'Etat de pouvoir politique; je suis convaincu qu'il y a parmi les catholiques autant d'hommes honnêtes, vertueux el consciencieux que dans aucune autre com

munion religieuse. Si par hasard le catholicisme se fût trouvé être la religion constituée de l'Irlande, lorsque ce pays formait un royaume distinct, je suis persuadé que les devoirs religieux des catholiques envers le siége de Rome ne les auraient pas empêchés de remplir scrupuleusement leurs devoirs politiques envers le trône britannique. Mais nous sommes dans une situation tout-à-fait différente à l'égard de l'Irlande; l'église anglicane y est la religion constituée. Peut-on croire que si les catholiques entraient au parlement, ils ne cherchassent pas à obtenir de nouveaux avantages pour leur église ? Qu'est-ce qu'on leur répondrait s'ils demandaient à ne plus payer de dimes à un autre clergé que le leur? Toutes les autres sectes en Angleterre réclameraient le même principe. Alors les liens qui unissent l'église anglicane à l'Etat seraient dissous. Il y a plus: les 49 cinquantièmes des propriétés dans l'Irlande ne sont possédées qu'à la suite des confiscations sur les catholiques; d'un autre côté, les 4 cinquièmes de la population sont catholiques. Si vous donnez aux catholiques une plus grande part au pouvoir politique, vous risquez de voir provoquer des discussions qui amèneraient une guerre entre la religion et la propriété.... On parle d'exceptions, de garanties, jointes au bill; si je me bornais à considérer ces exceptions, comme trop nombreuses, ces garanties comme trop faibles, je consentirais à discuter le bill en comité général; mais c'est au principe même que je m'oppose. Dès qu'on reconnaitrait que les catholiques peuvent posséder du pouvoir politique, il n'y a plus de limites, et le trône même ne pourrait rester excepté du principe..... Tenons-nous-en donc à la loi fondamentale, qui veut non-seulement que le roi soit protestant, mais qu'il ait un parlement, un conseil et des juges protestans........ »

Le marquis de Lansdown, lord Melville, lord Somer, parlérent encore en faveur du bill; lord Sydmouth et lord Ashburton s'y opposèrent. Il faudrait donner de longs extraits de leurs discours pour en tirer quelques lumières sur une question déjà si longuement développée. Enfin, les étrangers retirés, et la seconde lecture du bill mise aux voix, elle a été rejetée à une majorité de39 voix. (Nombre des votans 279.-Pour la seconde lecture, 120.Contre, 159)

Affaires d'Italie. Nous avons déjà rendu compte de quelques motions faites dans les deux chambres, soit pour obtenir des renseignemens sur la politique extérieure adoptée par le ministère britannique, soit pour arrêter la marche des Autrichiens et des Russes, et faire intervenir la médiation de la Grande-Bretagne en faveurs des Napolitains ou des Piémontais. On a vu que le ministère, tout en désavouant les principes établis à Troppau et à Lay-` bach, évitait soigneusement de blâmer leur application et déclinait toute espèce d'intervention entre l'Autriche et Naples ou le

Piémont, attendu que c'était sortir de la stricte neutralité qu'il s'était imposée, et offenser gratuitement l'Autriche, « dont l'Angleterre devait, suivant une expression du comte d'Aberdeen, préserver le pouvoir et la tranquillité. »

Pour répondre à toutes ces questions, lord Castlereagh, maintenant marquis de Londonderry par la mort de son père, donna le 7 mai, à la chambre des communes, une déclaration dont il faut recueillir la substance. Après lui avoir annoncé que l'armée russe qui était en marche pour l'Italie ne dépasserait pas ses propres frontières, S. S. ajouta :

• En donnant cette information, je crois qu'il est de mon devoir, non-seulement envers la chambre et la nation, mais aussi envers les deux grandes puissances qui ont été traitées de la manière la plus inconvenante, la plus illiberale et la plus injuste, dans cette chambre, de déclarer qu'elles n'ont jamais eu les desseins qui leur ont été attribués. Dans une occasion précédente, j'ai protesté, à la face de cette chambre, contre l'imputation faite à ces puissances d'être mues par un esprit d'agrandissement, parce que la connaissance que j'ai de leur caractère m'était un sûr garant que cette accusation était entièrement dénuée de fondement.

« J'ai déjà exposé les raisons qui m'induisaient à croire que l'armée russe s'arrêterait dans sa marche. Je puis maintenant donner une explication plus positive. Dans l'état où se trouvaient les domaines du roi de Sardaigne, une grande partie de son armée ayant été licenciée en conséquence de son dernier mouvement insurrectiounel, il était naturel que ce souverain s'adressât aux puissances alliées, et leur demandât des troupes pour occuper ses Etats. Cette demande a été faite en premier lieu à l'empereur d'Autriche, par l'entremise du comte de Bubna. L'empereur d'Autriche répondit que, malgré le désir qu'il avait d'acquiescer à cette demande, il tenait encore plus à éviter qu'on le soupconnât de vouloir s'agrandir en Italie aux dépens de ses voisins, et contre la foi des traités qu'il avait observés religieusement. Il ajouta cependant qu'il demanderait à l'empereur de Russie de consentir à ce qu'un corps de 25 à 30 mille hommes de son armée de 100 mille hommes, si elle avait été mise en mouvement, se dirigeât vers le midi de l'Europe, afin de remplir un objet pour lequel on s'était adressé à lui-même. L'empereur de Russie, animé du même esprit que l'empereur d'Autriche, répondit qu'il était en butte aux mèmes soupçons d'agrandissement, et qu'il priait instamment que l'on prit toutes les mesures nécessaires pour empêcher que le mouvement de ses troupes ne donnât lieu à aucun soupçon de cette nature. »

Mais bientôt la circulaire de Laybach (12 mai) réveilla le zèle de l'opposition dans les deux chambres en faveur des Italiens et de leur Dans la séance des communes du 20 juin, M. Hutchinson, exposant les agrandissemens des diverses puissances de

cause.

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