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qu'après le 1er janvier 1822, la banque de Norwège échangerait ses billets contre de l'argent en barres, suivant certaines proportions établies. Cette proposition fut rejetée le 28 juin, par la crainte que l'argent ne sortît du royaume; mais il fut arrêté, sur la motion de M. Meltzer, que si le cours du change sur Hambourg allait à 200 ou au-delà ( le taux de 100 est le pair), la banque serait autorisée à échanger des billets de a species de banque contre species en argent, mesure de défiance qui explique assez bien la cause du rejet de l'autre ; et en même temps on arrêta qu'à l'avenir il serait levé de forts droits d'entrée en argent sur tous les objets de luxe, et que le produit en serait appliqué à l'extinc tion de la dette norwégienne envers le Danemarck; et quant i cette dette, fixée, par la convention du 1er septembre 1819 (Voyez l'Annuaire historique pour 1819, page 590 ), à trois millions de rixdalers de banque de Hambourg (15,990,000 fr. ), la diète y donna son adhésion (29 mai ), en suppliant le roi de s'intéresser auprès des cours étrangères garantes du traité pour que le terme de dix ans fixé au paiement total de cette dette fût porté à trente ans.

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A cette adresse,.dans laquelle étaient déduits les motifs de l'insuffisance des moyens de la Norwège pour pouvoir entièrement solder sa dette avant trente ans, le roi répondit (message du 28 juin) qu'il ne pouvait admettre ces argumens ni ces motifs, en ce qu'ils augmentaient le discrédit, qu'ils portaient un préjudice réel aux rapports politiques et commerciaux entre les parties contractantes; ajoutant qu'il paraîtrait par-là que les ressources de la Norwège sont insuffisantes pour former un Etat indépendant. Enfin le roi, insistant sur les mesures qu'il avait proposées (d'ouvrir des emprunts partiels et successifs à 6 p. c. d'intérêts), qui donneraient la possibilité de reculer à trente ans, et même au-delà, le terme de l'acquittement, ne dissimulait point à la diète, que si elle n'adoptait point ces mesures, il pourrait se voir forcé à prendre des précautions pour conserver la propriété communale des sujets norwégiens, jusqu'à ce que les opinions de la partie intéressée lui fussent connues.

Ces conseils, qu'on pouvait prendre pour des menaces, appuyés par des préparatifs militaires et maritimes, par l'établissement d'un camp à Etterstadt, près de la capitale ; et le bruit généralement répandu qu'il devait être fait des changemens à la constitution norvégienne, reconnue trop démocratique, agitaient les esprits et faisaient craindre une rupture prochaine entre les deux nations unies sous le même sceptre. Au milieu de ces craintes et de ces soupçons, bien ou mal fondés, le roi, qui avait annoncé l'intention de faire un voyage en Norwège, se résolut enfin à s'y rendre avant la clôture de la session encore prolongée; et après avoir laissé l'administration des affaires de Suède à un conseil de régence, il partit de Stockolm le 17 juillet. Il vit sur sa route le canal de Goetha, les travaux de la forteresse centrale de Warna (21); il passa en revue les régimens campés près d'Axwall et de Wenersborg; il visita l'escadre suédoise à Stromstadt, extrême frontière des deux royaumes, et se rendit par le Swine-Sund à Christiania, où il fit son entrée le 29 juillet, à cheval, entouré d'un brillant et nombreux cortége militaire.

A l'arrivée du monarque, l'inquiétude de la diète norwégienne était visible.... On y craignait un coup d'Etat. Elle alla en corps présenter ses félicitations. Le président, rappelant dans son discours l'antique fidélité des norwégiens à leurs monarques absolus, dit à S. M. que cette fidélité serait encore plus inébranlable pour les rois constitutionnels. Et en complimentant le roi sur la convalescence du prince Oscar, il ajouta que ce prince, élevé pour être le premier citoyen et le premier soldat des deux royaumes scandinaves, était l'espoir de leur avenir.... Le roi répondit à ces félicitations du ton le plus cordial. Aidons-nous, entendons-nous, dit-il, et n'oublions jamais que les assemblées nationales qui ont cherché à s'emparer de l'autorité de la puissance exécutive ont donné naissance à des troubles dont le résultat a été ou l'anarchie, ou le despotisme. Evitons ces deux maux, et remplissons l'attente de la nation. Elle ne veut que jouir en paix d'une liberté qui garantisse l'exercice de ses droits.

<< Jamais les peuples du nord n'ont donné le titre de bon à un

souverain qui manquait de force; jamais des armées n'ont marché avec confiance sous un général faible et timide.

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Soyez convaincus, messieurs, que mon bonheur est inséparable de celui de la nation. »>

Cette première entrevue laissait entendre que le roi n'abandonnerait ni ses propositions, ni ses desseins. En effet, trois jours après (le 2 août), il fit porter au storthing un message qui réalisait les bruits répandus depuis long-temps sur les changemens à faire à la constitution : on y lit ce qui suit.

Le paragraphe 112 de la constitution, du 4 novembre 1814 ayant indiqué le moyen d'opérer un changement dans les stipulations de ce pacte fondamental, le roi croit remplir un devoir constitutionnel en appelant l'attention du storthing sur des questions du plus grand intérêt, autant pour la marche paisible des affaires générales que pour le maintien des libertés de la nation, libertés que l'expérience à prouvé ne pas pouvoir exister sans un changement ou interprétation claire et précise de plusieurs articles de la constitution....... Le veto absolu du roi entre en première ligne dans la série de ces questions importantes.... Là où il existe un roi et une législature, il faut que leurs pouvoirs se balancent, pour que l'une de ces deux autorités ne vienne pas à empiéter sur les attributions de l'autre..... Tout est mobile lorsque la législature peut faire des lois indépendamment du concours et de l'assentiment du roi. Dans ce cas, les répétitions de la loi adoptée, répétitions qui ont lieu parce que la sanction a été refusée, n'invalident en rien tout ce qu'il y a de pernicieux dans le principe: car il n'est point présumable que, lorsqu'un roi rejette ce que trois législatures différentes lui ont proposé, ce rejet ne soit basé sur des considérations tellement majeures, que, pour l'intérêt de l'Etat, dont le roi juge toujours plus impartialement que la législature, puisqu'il est au-dessus de tous les intérêts personnels, cette loi n'ait été de nature à ne jamais devoir être adoptée.

Outre le veto absolu, le message proposait de rendre ou de donner au roi le droit de dissoudre la représentation nationale, celui de révoquer les fonctionnaires publics à l'exception des des juges, et celui de nommer les présidens du storthing et de ses deux fractions; propositions motivées sur l'exemple des monarchies constitutionnelles les mieux établies, et sur des raisons d'ordre qu'il serait superflu de reproduire ici.

Quant à l'organisation du storthing, le roi ne se dissimulait point tout ce qu'elle offrait de contraire aux vrais principes d'un gouvernement mixte, en ce que la législature y est composée de deux fractions homogènes dans sa formation, et, ce qui pis est,

dans le résultat définitif de son autorité légistative. Il était donc proposé, pour en modifier les inconvéniens, que le storthing choisirait dans son sein un quart de ses membres pour former le lagthing en haute chambre; que les autres trois quarts composeraient l'odelsthing; que chacune de ces deux chambres aurait ses assemblées particulières... ; que le storthing ordinaire s'assemblerait le premier jour ouvrable du mois de juin tous les trois ans dans la capitale ou autre ville du royaume ; qu'il s'occuperait d'abord des propositions faites par le roi,- des affaires transmises constitutionnellement parle storthing précédent, enfin des propositions faites dans son sein; -que dans les storthings extraordinaires convoqués par le roi, il ne pourrait être mis en discussion que les seules affaires transmises de la part du gouvernement.... Ainsi, S. M. se bornait pour le moment à indiquer ce qui lui paraissait le plus essentiellement dangereux, d'après sa conviction, pour la jouissance paisible des droits accordés à la nation norwégienne. Cette communication royale, dont la discussion est remise au storthing de 1824, fut reçue avec froideur. Peu de jours après, un député, M. Ploën, fit une motion relativement à la présence d'une escadre suédoise dans la baie de Christiania, qui coïncidait avec l'arrivée de trois mille Suédois par terre. Il demandait dans quel bat ces troupes avaient été réunies; mais le gouvernement ayant donné des explications rassurantes, la motion n'eut pas de suite, et le storthing termina paisiblement ses discussions financières. En arrêtant son budget, il autorisa la banque à délivrer pendant les trois années prochaines au gouvernement 200,000 écus species par an, ce qui, avec l'excédant du revenu arriéré et à venir jusqu'au 1er juillet 1824, servirait à payer les effets tirés sur la Norwége, pour l'acquit de sa dette avec le Danemarck; et dans le cas où ces fonds ue suffiraient pas, on autorisa le roi à ouvrir un emprunt à six pour cent, conformément à sa proposition.

Ces difficultés levées, l'horizon politique prit un aspect plus calme, et le roi fit en personne (le 21 août) la clôture de la diète par un discours qui rappelle en partie ce qu'on avait fait, en partie ce qu'on devait faire. (V. l'Appendice.)

Les derniers jours de la résidence du roi à Christiania se passèrent dans des fêtes et des revues militaires; on y porta des toasts à la concorde, et au bonheur des deux nations; on entendit des chants à la gloire des deux armées. A son retour, le roi trouva presqu'à chaque relai de nombreuses troupes de paysans propriétaires qui l'escortèrent à cheval d'une poste à l'autre; il se fit entendre partout à son passage des acclamations qu'en Norwège, plus qu'ailleurs, on peut regarder comme des témoignages sincères du dévouement des peuples; et après avoir passé la revue ordinaire des camps de Scanie, S. M. rentra, avec le prince Oscar, le 20 scptembre dans la capitale de Suède, où la fin de l'année n'offre aucun événement à remarquer.

RUSSIE.

Cet empire, pour qui la nature fait chaque année des conquêtes en hommes, quand la modération de son cabinet refuse de la faire en territoire, offre dans son intérieur le malaise qui se fait sentir plus ou moins dans toutes les nations, par la difficulté de maintenir sur un pied réciproquement avantageux leurs relations commerciales extérieures, à mesure qu'elles font des progrès dans la civilisation, qu'elles veulent produire et donner plus de denrées en recevoir moins.

pour

Quoique le résultat de la balance du commerce, plus trompeuse en Russie qu'ailleurs, ne soit pas aux yeux des économistes un symptôme certain de la prospérité ou de la richesse relative des États, cependant elle présentait à la fin de 1820, dans le seul commerce de Pétersbourg, un excédant d'importation si énorme (1), que le gouvernement en fut effrayé... C'est sans doute le véritable motif de l'ukase rendu à Laybach le 10 février 1821, où il est dit que, dans le dessein de donner plus d'encouragement à l'industrie

(1) En voici le relevé :

Importations.....

190,388,897 roubles.

Exportations.......... 105,085,920.

Excédant des importations. 85,302,977 ·

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