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rain.... Qnelques princes enclavés, ceux de Schwartzbourg-Sunderhausen, Schwartzbourg-Rudoldstadt, etc., avaient accédé an système prassien le duc d'Anhalt-Köthen seul, yoyant dans les prétentions de la Prusse une atteinte aux droits de sa souveraineté, une perte réelle pour le commerce de ses sujets, se refusait à tout accommodement.

Dans cet état de choses, un bateau chargé de deurées coloniales à la consignation d'un marchand de Köthen (Friedheim) arriva, par l'Elbe, du royaume de Saxe à Mülhberg, sur territoire prussien..... Requis de payer le droit de consommation au tarif prussien, sauf à lui en tenir compte lorsqu'il justifierait de la consomination dans les États d'Anhalt, il s'y refusa, et le batean fut arrêté... Sur les premières plaintes du duc d'Anhalt-Köthen, la Prusse offrit la restitution entière de ce qui avait déjà été versé à ce titre dans les caisses prussiennes, et qui était imputable sur la consommation des sujets d'Anhalt, parce que cette consommation ne pouvait pas être distinguée avec certitude de celle des sujets prussiens. Mais le duc d'Anhalt-Köthen exigeait que la ligne des douanes prussiennes fût reculée de manière à ce que son territoire n'en fût plus cerné, et, ne pouvant l'obtenir, il porta plainte à la diète; et dans la séance du 25 janvier, M. de Berg, ministre du duché d'Oldenbourg, du duché d'Anhalt et de la principauté de Schwartzbourg (15° curie), dénonça formellement les procédés de la Prusse comme une violation de droit, d'atteinte à la souveraineté d'un co-État, et des art. 111 et 115 du congrès de Vienne relatif à la navigation du fleuve; et il demanda en conséquence que, par une voie quelconque, la diete fit opérer la levée du droit de consommation imposé sur son territoire, et la relaxation du bateau arrêté.

C'était un cas nouveau et curieux que de voir le possessour Fun État de 15 milles carrés géographiques d'étendue et d'une po pulation de 32,000 habitans, disputer des droits de souveraineté contre un des plus puissans rois de l'Europe. Les publicistes alle→ mands étaient impatiens de s'assurer que les arrêts de leur conseil amphictyonique ne ressembleraient pas à la toile d'araignée

qui n'arrête que les mouches. D'abord la Prusse déclina la compétence de la diète et l'intervention d'une procédure austrégale, sous prétexte qu'il ne s'agissait ici que d'une lésion d'intérêts, et non d'une lésion de droits. Elle représenta (observation faite par M. le comte de Goltz dans la 17° séance de la diète, 19 mai) qu'elle s'était conformée aux dispositions sur la navigation des fleuves; que l'art. 115 de l'acte du congrès de Vienne n'était point applicable à la plainte; qu'il n'avait point prescrit que les fleuves seraient ouverts aux navigateurs sans condition.-Que la Prusse avait proportionnellement moins de bureaux de péage que toute autre puissance; que, par la saisie, objet de la plainte, elle n'avait rien autre chose en vue que de prévenir la contrebande et d'assurer la perception des droits de consommation sur les sujets prussiens eux-mêmes; qu'elle avait fait à cet égard à S. A. toutes les propositions admissibles pour garantir le territoire prussien contre la contrebande de la part du pays d'Anhalt, mais aussi qu'elle était dans l'impossibilité de mettre son système d'impositions hors d'activité à l'égard du territoire de Köthen; et de cet exposé, le ministre de Prusse concluait qu'il n'existe dans l'espèce aucun des cas où, soit d'après l'acte fédératif, soit d'après l'acte final des conférences de Vienne, l'intervention de la confédération puisse être réclamée : que la diéte devait se borner à la voie de conseil envers le gouvernement de Köthen, et laisser à la disposition de la Prusse le soin de faire un arrangement à l'amiable, à quoi celle-ci offrait encore de se prêter.

Quoique la Prusse parût appuyée de l'avis de l'Autriche, la diète n'en rendit pas moins, à la majorité des voix, une résolution portant qu'il lui serait fait sur cette affaire un rapport par MM. d'Aretin et de Lepel, ministres de Bavière et de la Hesse électorale. C'est peut-être la décision la plus remarquable qu'elle ait rendue. La question se présenta dès-lors sous des rapports plus graves.

Le ministre d'Anhalt, dans une réplique aux observations de la Prusse (vingt-unième séance, 30 mai), établit que, dans les conséquences de son système, il ne s'agissait pas seulement de

fermer l'Elbe aux duchés d'Anhalt, mais qu'on visait à la médiatisation de ces États reconnus souverains; et à ce sujet, il produisit des actions judiciaires faites par les autorités prussiennes sur les sujets d'Anhalt, d'où il semble que la Prusse considérât la médiatisation de la maison d'Anhalt comme déjà commencée.

Dans de pareilles circonstances, disait-il, tous les honorables membres de la confédération ne peuvent refuser l'appui constitutionnel à un de leurs ro-Etats lésés dans ses droits essentiels de souveraineté, qui voit compromis le principe de sa qualité d'Etat immédiat, ainsi que ses droits de possession les plus importans. S. A. le duc d'Anhalt-Köthen attend donc avec une entière. confiance de la part de la diète, non-seulement une équitable interprétation des traités sur la navigation des fleuves, et son intervention pour faire relâcher de suite le bateau retenu sur l'Elbe par les autorités prussiennes, mais encore le rétablissement et la garantie de ses droits de souveraineté, qui sont subsidiairement liés avec ceux de tous les trônes d'Allemagne et d'Europe, et qui proviennent d'une mème origine. »

Cependant la Prusse, ne regardant cette affaire que comme une collision d'intérêts, persistait à décliner l'intervention de la diète, ou d'une instance austrégale, en tant qu'on y verrait une lésion de droits; elle n'acceptait qu'une médiation libre. On en voit les raisons dans la déclaration qu'elle fit remettre par son ministre à la diète dans sa vingt-quatrième séance (20 juin). Après avoir établi le droit qu'elle croit avoir, comme tout autre État indépendant, de soumettre à une enquête et de punir les crimes commis par des étrangers sur son territoire, elle repousse le reproche d'un empiétement arbitraire sur une juridiction étrangère.

< Le gouvernement prussien pourrait s'en tenir à ce petit nombre d'observations, dit le ministre de Prusse, si la passion qui prend plus d'aigreur et l'inconvenance toujours croissante des accusations les plus hardies de la part du gouvernement d'Anhalt-Köthen n'amenaient la conviction qu'il est temps de le rappeler sérieusement aux convenances, telles qu'on les observe mème dans les relations ordinaires de la vie, à la dignité des souverains.... La Prusse n'exerce aucun autre droit que celui de sa souveraineté, etc. Anhalt-Köthen en éprouve une réaction désavantageuse sur ces précédens rapports, parce qu'il est enclavé dans le territoire prussien. Peut-il, à cause des effets qui résultent de ce principe, demander que la Prusse n'exerce point son droit de souveraineté ; que la Prusse soit dépendante pour qu'il soit indépendant? La Prusse ne veut ni renoncer à son droit de souveraineté, ni demander rien de semblable à Anhalt-Kothen. Il se trouve ici une collision d'intérêt provenant uniquement de la situation respective des pays, et à laquelle on ne peut remédier que par un arrangement équitable....

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Ainsi d'un côté lá Prusse persistait à regarder cette affaire comme une simple collision d'intérêts, et ne croyait pas qu'on pût applquer forcéinent la forme de procès à des intérêts litigieux. De l'au tré,le wiùistre d'Anhalt représentant que la Prusse avait contracté comme tout autre État de la confédération, en vertu du 11° article de Pacte fédératif, l'engagement de ne soutenir par la force aucun differend qu'elle pourrait avoir avec un de ses co-États, mais de le porter devant la diète, soutenait que, dans le cas où les tentatives d'accomúrodement échoueraient, il devait y avoir une décision judiciaire par le moyen d'une instance austrégale.

Entre des prétentions si divergentes de la part de deux pòîssances si disproportionnées, l'embarras de la diète était évident. Le rapport que lui firent, dans sa seizième séance (5 juillet), M. le baron d'Aretin et M. de Lepel, ne dissimulait point que les dernières explications de la Prusse affaiblissaient malheureusement l'espérance d'un rapprochement. Néanmoins la diete n'y renon gait point; mais, dans l'espérance de gagner assez de temps pour y parvenir, elle ajourna après ses vacances, au mois de novembre, sa résolution sur la question de savoir «< par laquelle des différentes voies constitutionnelles on devait amener la décision de l'affaire principale qui est de la compétence de la diète. »

Alors, comme dans les autres affaires importantes qui se discutent hors de la diète, et que l'ou rapporte ensuite tout éclaircies et décidées à son protocole, pendant qu'on se débattait à Francfort sur des formes, on discutait à Dresde sur le fond de la querelle, c'est-à-dire sur la navigation de l'Elbe, dans une espèce de congrès des envoyés de tous les États riverains de ce fleuve, sous les auspices et la présidence de l'Autriche. Le 23 juin, après bien des difficaltés, les plénipotentiaires avaient signé une convention en trenté-trois articles, pour régler la navigation de l'Elbe d'après les résolutions du congrès de Vienne, Voici la substance de cet acte de navigation.

« Le fleuve de l'Elbe est déclaré libre. Les' bateliers de chaque Etat riverain pourront naviguer librement de chaque point de l'Elbe jusqu'à la mer, et prendre où il leur conviendra des charges et des retours, aucun droit d'étape et de relâche forcé n'entravera sa marche sur toute l'etendue de l'Elbe ; il ne

sera exercé envers le batelier libre aucun droit de la part d'une ville ou corporation quelconque, aucun privilege affecté à un corps de bateliers; le bateau qui lui appartiendra en propre et qu'il aura équipé lui-même pourra · aller sans empéchément d'un heu de commerce à l'autre. Les trente-cinq bureaux de douanes qui bordaient antérieurement l'Elbe sont réduits à quatorze sur toute la partie du fleuve qui arrose des Etats riverains. Les droits de péage, qui ont une influence si nuisible sur le commerce et la navigation, ont été non-seulement diminués, mais encoré rámenés à des taux fixes, et ils ne pourront jamais ètre haussés sans un accord général de tous les intéressés. Les objets d'industrie de l'intérieur du pays et ceux de première néceseessité ne sont que faiblement imposés : les visites nombreuses des cargaisons, qui avaient lieu antérieurement sur les bateaux mêmes qui parcouraient foute l'étendue du fleuve, ont été réduites avec urie entière confiance à la révision d'un seul état. De sages réglemens ont banni de la navigation de l'Elbe tout arbitraire de la part des employés dans la perception des droits et la visite des cargaisons; on a pris différentes mesures de police convenables pour protéger contre toute injustice le navigateur loyal, et surveiller avec soin eeluti qui ne le serait pas....

Cette convention, dont les ratifications ti'ont été échangées que le 12 décembre, a définitivement établi la liberté de la navigation de l'Elbe, dont l'ouverture, d'abord fixée au 1er janvier 1822, a ensaite été remise au 1er mars. Comme elle semblait devoir amener une conciliation entre Anhalt-Kötlien et la Prusse, la diète germanique ajourna encore sa décision da 21 novembre au décembre, et du 7 au 13, époque où la Prusse a déclaré qu'elle ferait relâcher le bateau saisi à Friedheiin. It ne s'agissait plus à fà fin de l'année que de faire un arrangement pour le remboursentent des taxes de consommation qu'Anhalt payait depuis trois ans à lá Prusse.

Cette affaire terminée, ou plutôt éludée dans la crainte de faire un scandale, au moment où les princes occupés d'un objet encore plas sérieux n'avaient rien de plus à cœur que d'ajuster leurs querelles, a dispensé la diète d'examiner une question dont les dé bais pouvaient ébranler les bases de la confédération gerntanique; mais elle n'en a pas moins laissé dans quelques esprits la conviction que toutes les précautions prises pour assurer l'indépendance et la souveraineté des petits Etats pourraient céder, en certains cas, à la convenance des grands, et que la procédure austrégale ne pourrait terminer que de légers différends entre les Etats secon

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