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droit Français, livre IV, titre VI, § 29.) Maintenant la créance de la femme contre son mari, même pour la répétition de sa dot, n'est plus privilégiée; elle est simplement hypothécaire : le seul avantage qu'elle a sur les autres créances également hypothécaires, c'est qu'elle a rang in-. dépendamment de toute inscription. Mais ce privilége, si on peut l'appeler ainsi, n'est pas personnel; il est inhérent à la créance, et passe à tous les ayant-cause de la femme.] Il y a des créances plus ou moins privilégiées. En conséquence, entre créanciers tous privilégiés, les uns peuvent être préférés aux autres, en raison de la nature du privilége. Si les priviléges sont de même nature, les créanciers 2096. sont payés par concurrence.

2097.

Les priviléges du trésor royal et du trésor de la couronne, ainsi que l'ordre dans lequel ils s'exercent, sont réglés par des lois particulières. Ils ne peuvent d'ailleurs, en général, préjudicier aux droits acquis antérieurement à des tiers. 2098. [On a cependant jugé à Limoges, le 18 juin 1808, que la régie des domaines primait, pour les droits de mutation après décès, toute espèce de créanciers, même ceux de la' succession. (SIREY, 1809, 2o partie, page 157.) Cette décision paraît contraire à la disposition de l'article 2098, pour ce qui concerne les créanciers de la succession, surtout dans le cas de séparation des patrimoines. Il est certain, en effet, que le droit de mutation est payé à raison de la translation de la succession sur la tête de l'héritier. Or, qu'importe cette translation aux créanciers de la succession? Les biens de la succession sont toujours pour eux les biens du défunt; ils les poursuivent comme tels, et non pas comme biens de l'héritier.

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Nota. La même question s'étant présentée à la Cour de cassation, cette Cour paraît avoir adopté la doctrine que nous établissons ici, ainsi qu'on peut s'en convaincre par son arrêt du 6 mai 1816, rapporté dans SIREY, 1re part., page 423.] Nous ferons connaître, au surplus, dans un chapitre particulier, à la fin du présent Titre, la nature et l'étendue des droits du trésor public, dans les cas les 'plus importans.

Quant aux priviléges des particuliers, nous aurons à voir,

1o. Sur quels objets ils peuvent s'exercer;

2o. Dans quel ordre ils s'exercent.

Les modes d'extinction étant les mêmes pour les privilé ges que pour les hypothèques, nous en traiterons dans la seconde Partie.

CHAPITRE PREMIER.

Des Choses qui peuvent être l'objet des Priviléges.

Les priviléges peuvent frapper sur tous les biens, ou 2099. seulement sur les meubles, ou seulement sur les immeu2104.bles.

2101.

SECTION PREMIÈRE.

Des Priviléges qui s'exercent sur tous les biens.

Les créances privilégiées sur la totalité des biens [Il paraîtrait, d'après l'article 2101, que ces priviléges ne s'exercent que sur les meubles; mais le contraire résulte bien évidemment des articles 2104 et 2105, sauf qu'ils ne s'exercent sur les immeubles que subsidiairement. Remarquez, au surplus, que le mot meuble est ici par opposition au mot immeuble, et que, par conséquent, il ne doit pas être entendu dans le sens restrictif porté dans l'article 535, mais pour tout ce qui n'est pas immeuble réel ou fictif.], sont :

1o. Les frais de justice, [ qui concernent l'intérêt commun des créanciers, tels que les frais de scellé et d'inventaire. Ceux qui sont faits seulement dans l'intérêt d'un créancier, suivent le sort de sa créance.

Quant aux frais relatifs à la vente des biens et à la distribution des derniers, il faut appliquer les distinctions sui

vantes :

D'abord, ceux qui sont relatifs à la saisie et vente des meubles, ne sont privilégiés que sur les meubles, et les

frais de saisie et vente des immeubles ne sont privilégiés que sur les immeubles.

2o. En matière de saisie immobilière, les articles 715 et 716 du Code de Procédure distinguent les frais, en frais ordinaires et frais extraordinaires. Les frais ordinaires sont tous ceux qu'on est obligé de faire pour parvenir à la vente, indépendamment de tout incident. Ils sont payés par l'adjudicataire, en sus de son prix; ils n'ont donc pas besoin de privilége. Les frais extraordinaires sont les procédures incidentes, qui ne sont point nécessaires en elles-mêmes pour la validité de la poursuite, mais sans lesquelles, cependant, on n'eût pu parvenir à la mettre à fin, ou à faire distribuer les deniers. Ces frais n'étant point payés par l'adjudicataire, sont privilégiés sur le prix, mais seulement lorsqu'il en a été ainsi ordonné par jugement. ( Code de Procédure, article 716.)

3o. En matière de saisie mobilière, la même distinction a lieu, sauf que, dans la saisie mobilière, proprement dite, l'acquéreur n'étant chargé d'aucune espèce de frais, ils sont tous payés par privilége, savoir les frais ordinaires de plano; et les frais extraordinaires, s'il en a été ainsi ordonné. Le motif de différence, ici comme dans la saisie immobilière, entre les deux espèces de frais, est que les actes qui constituent la procédure ordinaire, sont connus et dé– terminés d'avance par la loi. Le commissaire à la contribution ou à l'ordre peut donc juger s'il en a été fait d'autres que ceux que la loi prescrit. Il n'en est pas de même des frais extraordinaires ; c'est au tribunal qui a statué sur l'incident, à juger si les frais auxquels il a donné lieu, sont de nature à être payés par privilége, s'ils ne pouvaient être moindres, etc.

Les frais de scellé sont-ils préférables sur les immeubles aux créanciers hypothécaires? La Cour de Paris a jugé l'affirmative, le 28 janvier 1812. (SIREY, 1813, 2o part., pag. 192.) La raison de douter était que, ces frais ne servant qu'à la conservation du mobilier, ils paraissent inutiles aux créanciers hypothécaires; mais la raison de décider a que ces créanciers ont, sur le mobilier, le même droit

été

que les chirographaires; ils ont donc intérêt à sa conservation. D'ailleurs, le scellé est encore utile pour la conservation des titres des propriétés immobilières.

Mais il a été jugé par la même Cour, le 27 novembre 1814, que ces frais n'étaient point préférables au privilége du locateur. (SIREY, 1816, 2° part., pag. 205.) On s'est fondé sur ce que le locateur étant lui-même saisi, en quelque sorte, des meubles à titre de nantissement, n'a pas besoin de scellé pour les conserver. Le scellé ne serait donc nécessaire que pour la conservation du mobilier non appa'rent, sur lequel le locateur n'a point de privilége. ] Pr. Cependant les frais de poursuite en contribution ne vien662. nent qu'après le paiement des loyers. [Il n'en serait donc pas de même des frais de saisie ou vente:ils primeraient toujours le privilége du locateur. La raison de différence est que ces frais sont nécessaires dans l'intérêt de tous les créanciers et par conséquent du locateur lui-même : au lieu que ceux de contribution sont inutiles au locateur, puisqu'il ne contribue pas. Par la même raison, il en faut dire autant du créancier nanti d'un gage. (Voyez, à l'égard de ce dernier, les articles 536 et 537 du Code de Commerce, et mes Institutes Commerciales.)

C'est par suite du principe contenu dans l'article 662 du Code de Procédure, qu'il a été jugé à Paris, le 20 novembre 1818, et en Cassation, le 20 août 1821 (SIREY, 1822, 1re part., pag. 28), que le privilége du locateur était préférable à celui des frais de justice, faits faits par l'administration

de la faillite du locataire.

Mais comme les frais de saisie et de vente, quoique privilégiés sur les meubles et les immeubles, doivent être payés d'abord sur les meubles, s'il arrive qu'ils absorbent le prix des meubles, le locateur qui se trouve par là privé du droit d'exercer son privilége, peut-il prétendre qu'il doit être subrogé au privilége des frais de justice sur les immeubles? Jugé la négative à Limoges le 15 juillet 1813. (SIREY, 1814, 2o part., pag. 262.)]

2o. Les frais funéraires [non excessifs, et proportionnés à la condition et à la fortune du défunt. (L. 14, § 6, ff. de

Religiosis.) Ils sont préférés à tout, même au trésor royal pour les contributions. (DE LA COMBE, verbo FRAIS FUNÉRAIRES.) Quid, s'ils avaient été payés par un tiers? Je pense qu'il y aurait une subrogation légale. ( Argument tiré de l'article 593 du Code de Procédure.) On pourrait même soutenir que la subrogation n'est pas nécessaire. Le privilége est concédé à la créance, sans égard pour la personne à qui elle est due; et en effet, ces sortes de frais devant être payés comptant, le but de la loi serait manqué, si le privilége ne pouvait pas être invoqué par ceux qui les ont payés, quels qu'ils soient.]

3o. Ceux de dernière maladie. [ Quid, s'il s'agissait d'une maladie chronique, qui ait duré plusieurs années? Le montant du privilége doit, dans ce cas, être remis à l'arbitrage du juge. Appliquez, au surplus, ce qui est dit ci-dessus, relativement aux frais funéraires, pour le cas où ils auraient été payés par un tiers. La cause est également favorable, et il y a les mêmes raisons. L'on ne peut obliger un apothicaire de faire l'avance des drogues nécessaires. ]

4o. Les gages née courante.

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des gens

de service, pour une année et l'an

[Il s'agit des gages, seulement, et non des avances. Cependant si ces avances étaient pour alimens, je pense qu'ils jouiraient du privilége accordé aux fournisseurs de subsistances. Il a été jugé à Metz, le 4 mai 1820 (SIREY, 1821, 2o partie, page 102), que, sous le nom de gens de service, doivent être compris les commis marchands. Ce même arrêt a jugé que le privilége ne doit avoir lieu que pour le temps qui serait nécessaire pour prescrire l'action. Si donc les salaires étaient fixés par mois, comme ils seraient prescrits par six mois, le privilége n'aurait lieu que pour six mois. Des expressions une année, et l'année courante, il faut conclure que les ouvriers à la journée ne jouiraient pas du même privilége, sauf peut-être sur la chose à laquelle ils auraient été employés.]

5o. Les fournitures de subsistances, faites au débiteur et à sa famille [seulement. C'est d'après cela qu'il a été jugé à Rouen, le 14 juillet 1819 (SIREY, 1819, 2o partie, page

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