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faut, même non signifié et l'on a jugé, à Riom, le 6 mai 1809 (Journ. de la Jurispr. du Code Civil, Tom. XIV, page 126), qu'une inscription avait pu être prise valablement, en vertu d'un jugement par défaut, non enregistré, ni expédié.

Quid, si, par l'effet de l'opposition ou de l'appel, le jugement en vertu duquel l'inscription a été prise, est infirmé en tout ou en partie? S'il est infirmé en tout, il est évident que l'hypothèque ne subsiste plus. Mais quant à la radiation, il suffira, lorqu'il sera passé en force de chose jugée, d'en présenter une expédition au conservateur, qui fera la radiation. S'il ne l'ordonne pas, parce que la partie a oublié d'y conclure, et que le perdant, par esprit de chicane, ne veuille pas la consentir à l'a ́miable, il sera nécessaire d'obtenir un nouveau jugement. (Art. 2157 et 2158.)

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Si le premier jugement n'est infirmé qu'en partie, la radiation ne peut avoir lieu que jusqu'à concurrence.

Quid, s'il s'agit d'un jugement rendu par un juge de paix? C'est un véritablé jugement. Il n'est pas douteux qu'il n'emporte hypothèque. Il n'en est pas de même des conventions insérées dans les procès-verbaux de conciliation: aux termes de l'article 54 du Code de Procédure, elles ont seulement force d'obligation privée; elles ne peuvent donc produire hypothèque.

Quid, si un jugement d'adjudication porte que le vendeur aura hypothèque générale sur tous les biens présens et à venir de l'acquéreur? Je pense que cette clause est nulle: c'est une véritable convention portée dans le cahier des charges, et acceptée par l'acquéreur. Or, l'hypothèque générale ne peut résulter d'une convention. Nec obstat, que cette clause est contenue dans un acte, dit jugement d'adjudication. C'est, en effet, moins un jugement, qu'un procès-verbal constatant que l'immeuble a été adjugé moyennant telles conditions, que l'acquéreur a promis de remplir; lequel procès-verbal donne en même temps à la convention la forme exécutoire.

Pour qu'un jugement puisse produire hypothèque, est

il nécessaire qu'il prononce absolument une condamnation? Je ne le pense pas; et je crois qu'il suffit qu'il contienne le germe d'une condamnation. Ainsi un jugement de reconnaissance d'écriture ne contient point de condamnation; et cependant il emporte hypothèque. En un mot, je pense que toute obligation contractée en jugement, doit emporter hypothèque. Ainsi la nomination d'un curateur à une succession vacante, emporte hypothèque, parce que, en acceptant cette nomination, le curateur contracte envers la justice l'obligatiou d'administrer la succession, et de rendre compte de sa gestion. De même il a été jugé en Cassation, le 23 avril 1823, que l'hypothèque judiciaire résultait d'un jugement qui, sans prononcer de condamnation, et sans statuer même sur l'existence de la créance, avait seulement repoussé une exception péremptoire opposée à une créance dont l'existence était déjà reconnue. (SIREY, 1823, 1re partie, page 333.)

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Quid, à l'égard du jugement qui admet une caution? Comme la caution n'est pas obligée par ce jugement, mais bien par la soumission qu'elle est obligée de faire au greffe (Code de Procéd., art. 522), c'est cette soumission qui doit emporter hypothèque, puisque c'est un acte judiciaire, et qu'elle est exécutoire, sans jugement, même pour la contrainte par corps.

Le créancier chirographaire du défunt pourrait-il, en obtenant un jugement contre les héritiers, acquérir une hypothèque sur les biens de la succession? Jugé la négative à Rouen, le 17 mars 1817, et en Cassation, le 19 août 1818. (SIREY, 1819, 1re partie, page 131.) On a pensé que la mort fixait irrévocablement le sort de tous les créanciers du décédé. Il me semble que ce principe pourrait être contesté, surtout quand la succession est acceptée purement et simplement. L'hypothèque judiciaire étant générale, et les biens de la succession étant devenus ceux de l'héritier, on ne voit pas comment le jugement obtenu contre ce dernier, n'emporterait pas hypothèque sur les biens de la succession. ]

Cependant, si les jugemens de reconnaissance ont été

rendus avant l'échéance ou l'exigibilité de la dette, il ne peut, à moins de stipulation contraire, être pris aucune inscription hypothécaire en vertu desdits jugemens, qu'autant que la dette ne serait pas acquittée au moment de son échéance ou de son exigibilité. [(Art. 1er de la loi du 3 septembre 1807, Bulletin, no 2741.) Long-temps avant l'émission de cette loi, je m'étais élevé avec force contre quelques arrêts qui avaient décidé le contraire. Il était évident que c'était renverser tout le système hypothécaire, puisqu'avec un simple billet, on pouvait se procurer non-seulement une hypothèque, malgré le débiteur, mais encore une hypothèque plus étendue que par un acte notarié quelconque, puisque l'hypothèque conventionnelle ne peut jamais frapper que les biens présens, et spécialement désignés; tandis que le jugement de reconnaissance aurait frappé tous les biens présens et à venir du débiteur. Aussi cette jurisprudence a-t-elle été justement proscrite par la loi précitée. Cependant il faut avouer que ce dernier inconvénient se retrouve encore dans la nouvelle loi; car elle permet de donner au jugement de reconnaissance, obtenu avant l'échéance, tout l'effet qu'il peut avoir, si cela a été ainsi stipulé; en sorte que le débiteur pourra, en consentant, dans un simple billet, que le créancier prenne inscription en vertu d'un pareil jugement, lui donner une hypothèque générale sur ses biens présens et à venir, hypothèque qu'il n'aurait pas pu lui conférer par un acte notarié.]

Rendus par les tribunaux: Parce que, pour donner lieu à l'hypothèque judiciaire, il faut qu'il y ait prononciation du juge. En conséquence, les jugemens arbitraux n'emportent hypothèque, qu'autant qu'ils ont été revêtus de l'ordonnance judiciaire d'exécution.

Par les tribunaux français: Parce que les jugemens rendus par les tribunaux étrangers, ne produisent également hypothèque, qu'autant qu'ils ont été déclarés exécutoires par un tribunal français, sauf les dispositions contraires qui peuvent résulter des lois politiques ou des traités. 2123. [J'ai substitué les mots rendus par les tribunaux étran

gers, à ceux-ci, rendus en pays étranger, qui se trouvent dans l'article 2123, et cela à cause des jugemens des consuls français, qui sont rendus dans l'étranger, et qui, néanmoins, doivent emporter hypothèque. Il est vrai que l'on peut dire que l'hôtel du consul est censé territoire français. ]

[Lorsque cette exécution est demandée à un tribunal français, le Français condamné peut-il demander la révision du procès? (Voyez au 1er vol., page 93.)]

SECTION III.

De l'Hypothèque conventionnelle.

L'hypothèque conventionnelle est celle qui résulte de 2117. la convention des parties. Elle peut être définie: Un contrat accessoire et solennel, par lequel une personne, ayant capacité d'aliéner, affecte un ou plusieurs immeubles, spécialement désignés, à l'acquittement d'une obli gation.

Un contrat accessoire: Il ne peut y avoir d'hypothèque, qu'autant qu'il existe une obligation principale, pour sûreté de laquelle l'hypothèque est établie. [Donc, tant qu'il n'existe pas d'obligation principale, il ne peut y avoir d'hypothèque valable. Si, par exemple, Pierre a constitué une hypothèque à Paul, pour sûreté d'une somme que Paul a promis de lui prêter, l'hypothèque est dite, dans ce cas, prépostère; et, comme telle, elle est nulle. Tel est le principe général, mais qu'il faut cependant admettre avec la distinction suivante : Pour que l'hypothèque soit regardée comme prépostère, et soit conséquemment nulle, il faut, non-seulement qu'elle précède l'obligation principale, mais encore que celui qui l'a constituée, soit maître de devenir débiteur ou non. Ainsi, dans l'espèce que nous venons de poser, Pierre, malgré la convention, est bien le maître d'emprunter, ou de ne pas emprunter à Paul la somme convenue. Il n'y a donc point de lien, point d'obligation, puisque toute obligation contractée sous une condition purement potestative de la

part du débiteur, est nulle. (Art. 1174.) Donc, point d'hypothèque. (L. 1, § 1, ff. Qui potiores, et L. 4, ff. Quae res pignori vel hypothecæ.)

Mais s'il ne dépend pas de celui qui a constitué l'hypothèque, de devenir débiteur ou non, alors la constitution est valable. (L. edd. 1, in princip.) Et ce qui prouve que cette distinction doit être admise dans notre droit, c'est qu'il est dit dans l'article 2155, que la femme a hypothèque pour sa dot du jour de la célébration de son mariage; et cela sans distinction de l'époque à laquelle la dot a pu être payée: tandis qu'elle n'a hypothèque pour l'indemnité des dettes qu'elle a contractées avec son mari, que du jour même de l'obligation. Or, cette différence n'a pas d'autre motif, si ce n'est que, dans ce dernier il dépend du mari que l'obligation ait lieu, tandis qu'il n'est pas en son pouvoir de ne pas recevoir la dot, puisqu'il en est responsable envers sa femme. (Article 1569.) Nec probè dici, dit PAPINIEN, loi précitée, in potestate ejus esse, ne pecuniam residuam redderet, ut minùs dotata mulier esse videatur.

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cas,

· Depuis l'impression de la première édition de cet ouvrage, il a été rendu par la Cour de Caen, un arrêt contraire aux principes que nous venons d'établir. Dans l'espèce, un banquier avait ouvert un crédit de 100,000 francs, à un particulier qui, pour sûreté des sommes à payer en vertu de ce crédit, avait consenti, au profit de ce banquier, une hypothèque sur un immeuble, jusqu'à concurrence de ladite somme de 100,000 francs. Le débiteur ayant failli, le rang de l'hypothèque fut contesté par un créancier postérieur, et, par arrêt du 11 août 1812, la Cour de Caen a donné la priorité au banquier. (SIREY, 1815, 2o part., pag. 128.) On s'est pourvu en Cassation; et le pourvoi a été rejeté le 26 janvier 1813. (SIREY, 1814, 1re part., pag. 41.)

Nonobstant ce préjugé, je n'en persiste pas moins dans l'opinion que j'ai émise, et que je vais fortifier, autant que possible, en réfutant les motifs des arrêts que je viens de citer. On a dit:

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