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Elle peut être faite à la diligence du vendeur, du prêteur, ou de l'acquéreur; mais, dans tous les cas, aux frais 2108. de ce dernier. 2155.

Quoique cette transcription, comme nous venons de le dire, vaille inscription pour le vendeur, etc., néanmoins, pour éviter le préjudice qui pourrait résulter, à l'égard des tiers, du défaut d'inscription, le conservateur, en faisant la transcription, est tenu, sous peine de tous dépens, dommages et intérêts [envers les tiers, et non envers le vendeur, auquel le défaut d'inscription ne peut préjudicier, puisqu'il conserve son privivilége par la transcription], de faire d'office l'inscription sur son registre, des créances résultant de l'acte d'acquisition, tant en faveur du vendeur, qu'en faveur du prêteur [et gra-2108. tuitement (Décision du Ministre des Finances, du 8 floréal an 7), c'est-à-dire sans qu'il en résulte aucune augmentation des frais de transcription.

Quid, s'il y avait terme accordé pour le paiement du prix, et que le terme fût expiré? Cela est égal. Le conservateur doit toujours prendre l'inscription d'office, tant qu'on ne lui justifie pas du paiement par acte authentique.

Quid, si le prix de la vente paraît soldé par une quittance sous seing-privé, mise au bas de l'expédition présentée à la transcription, ladite quittance enregistrée? Le conservateur doit toujours prendre l'inscription d'office. (Décisions des Ministres des Finances et de la Justice en date des 30 avril et 7 mai 1811, rapportées dans SIREY, 1813, 2° partie, page 246.) Ces décisions sont fondées par analogie sur l'article 2158, qui exige, pour la radiation, que l'acte portant consentement soit authentique. Et en effet, rien ne constate que ce soit effectivement le vendeur qui a signé la quittance.

Le conservateur, en prenant l'inscription d'office au nom du vendeur, peut-il élire domicile pour lui? Jugé la négative à Paris, le 31 mai 1813. (SIREY, 1814, 2o partie, page 264.) Il résulte de là, que le vendeur doit avoir soin, dans l'acte de vente, d'élire domicile dans l'arrondissement de la situation de l'immeuble. Autrement, comme

pas

l'inscription ne réunirait les formalités prescrites par l'article 2148, elle pourrait, suivant les circonstances, être contestée; ou au moins il pourrait en résulter l'inconvénient dont nous parlerons plus bas. ( Voir l'arrêt précité dont la décision, sur ce point, ne me paraît pas admissible.) Les inscriptions devant être renouvelées au bout de dix ans, le conservateur est-il tenu de renouveler d'office? Non. (Avis du Conseil-d'État, approuvé le 22 janvier 1808, Bulletin, no 2959.) Il serait trop pénible pour lui de rechercher toutes les inscriptions d'office qui ont dix ans de date. C'est aux vendeurs, s'ils ne sont pas payés, à veiller au renouvellement.]

[Celui qui veut prêter ne consulte pas le registre de transcription, mais seulement celui des inscriptions. Si le conservateur n'était pas tenu de prendre l'inscription d'office, il en résulterait que les tiers, ne voyant aucune créance inscrite sur l'acquéreur, lui prêteraient avec sécurité, et se trouveraient ensuite primés par la créance du vendeur.]

§ II.

Du Privilége des Architectes et Entrepreneurs.

Les architectes, entrepreneurs, maçons, et autres ouvriers employés pour bâtir, reconstruire, ou réparer des bâtimens, canaux, ou autres ouvrages quelconques, ont un privilége sur l'objet qu'ils ont bâti ou réparé, en remplissant les formalités suivantes [Ces dispositions sont prises dans un arrêt de réglement du Parlement de Paris, en date du 18 août 1766, et rapporté dans l'ancien DENISART, verbo PRIVILÉGE, no 42.]:

Il faut : 1° qu'avant tout, il ait été dressé, par un expert nommé d'office [Pourquoi d'office? C'est que les parties intéressées à contester le privilége, c'est-à-dire les autres créanciers du propriétaire, n'étant pas, et ne pouvant pas être appelés à la confection des procès-verbaux, il était essentiel de prévenir les fraudes.], par le Tribunal de la situation

des immeubles, procès-verbal de l'état des lieux, relativement aux ouvrages que le propriétaire a l'intention de faire [c'est-à-dire qu'il est inutile de constater l'état de tous les bâtimens, s'il n'y a des réparations à faire qu'à une aile; que, si la toiture seulement est à refaire, on devra se contenter de constater l'état de la toiture, etc.];

Et 2o que, dans les six mois, au plus, de leur perfection, les ouvrages aient été reçus par un expert, aussi nommé d'office, et qu'il en ait été dressé également pro cès-verbal. [Ce pourra être le même expert qui a fait le premier procès-verbal; mais il faut qu'il soit nommé de nouveau.]

Le montant de ce privilége ne peut jamais excéder la valeur constatée par le second procès-verbal; et, dans le cas où cette valeur serait supérieure à la plus-value de l'immeuble au moment de l'aliénation, et résultant de travaux faits, le privilége ne peut jamais excéder cette plus-value. [Si donc il y a pour dix mille fr. d'ouvrages faits, mais que la valeur de l'objet ne se trouve augmentée que de quatre mille francs, il n'y aura privilége que pour quatre mille francs. Mais l'ouvrier aura-t-il au moins, pour le surplus, hypothèque à la charge de l'inscription? Non, à moins qu'il n'ait un titre réunissant toutes les conditions requises pour prod.:ire l'hypothèque conventionnelle. L'article 2113 ne déclare hypothécaires de droit, que les créances privilégiées, mais qui ont cessé de l'être, faute d'avoir rempli les formalités requises pour la conservation du privilége. Or, ici, l'excédant de la plus-value n'a jamais été, et n'a jamais pu être privilégié. Mais remarquez:

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1o. Qu'il ne suffit pas que la plus-value ait existé au moment de la confection des ouvrages; il faut qu'elle existe encore au moment de l'aliénation de l'immeuble. Et en effet, le travail de l'ouvrier ne doit pas profiter aux autres créanciers: mais aussi il ne peut leur préjudicier. Quand il y a réellement plus-value au moment de l'aliénation, l'ouvrier peut dire aux autres créanciers: Sans mon travail, cette plus-value n'existerait pas; il ne serait pas juste que vous vinssiez profiter d'un travail dont je ne serais pas payé.

Mais quand l'immeuble ne vaut pas, au moment de la vente, plus qu'il n'eût valu, si les travaux n'eussent pas été faits, le même raisonnement ne peut avoir lieu; et il ne doit plus y avoir de privilége.

2o. Qu'il faut que la plus-value résulte des travaux faits. Il peut donc se faire qu'il y ait plus-value, et que cependant il n'y ait pas privilége; comme il peut arriver que la chose soit considérablement diminuée de valeur, et que, néanmoins, le privilége ait lieu.

Exemple du premier cas: Une maison valait vingt mille francs au moment où l'on a commencé les travaux, qui ont monté à six mille francs. A la même époque, le percement d'un chemin ou d'une rue a augmenté d'un quart la valeur intrinsèque de la maison. Au moment de l'aliénation, qui a lieu peu de temps après, elle vaut vingt-cinq mille francs. Quoiqu'il y ait réellement plus-value de cinq mille francs, néanmoins comme cette plus-value ne résulte pas des travaux faits, mais de circonstances absolument étrangères, il n'y a pas lieu au privilége.

Exemple du second cas : Un château vaut soixante mille francs; on a fait, à l'une des ailes, des réparations qui en ont augmenté la valeur de quatre mille francs : tout le château est brûlé, hors l'aile réparée; de sorte qu'il n'est plus vendu que vingt mille francs. S'il est constant que, sans les réparations, le prix n'eût été porté qu'à seize mille francs, le privilége aura lieu pour quatre mille francs, quoique l'objet total ait été vendu quarante mille francs de moins qu'il ne valait au moment où les ouvrages ont été commencés.

Quid, si les travaux étaient nécessaires pour la conservation de l'immeuble; putà, une digue à rétablir, un gros mur à réparer? Le privilége a lieu pour la totalité des dépenses, et sur la totalité du prix. Puisqu'on les suppose nécessaires pour la conservation de l'immeuble, l'on doit en conclure qu'il eût péri, si elles n'eussent pas été faites. La plus-value est donc du prix de tout l'immeuble. ]

Ceux qui ont prêté les deniers pour payer les entrepreneurs, etc., jouissent du même privilége, en remplissant 2108. les conditions requises pour acquérir la subrogation.

Le même privilége peut avoir lieu sur la mine concédée, en faveur de ceux qui, par acte public, et sans fraude, justifieraient avoir fourni des fonds pour la recherche de la mine, ainsi que pour les travaux de construction, ou confection de machines, nécessaires à son exploitation, à la charge de se conformer aux articles 2103 et autres du Code Civil, concernant les priviléges. (Art. 20 de la loi du 21 avril 1810; Bulletin, no 5401.)

Dans tous les cas, le privilége se conserve par l'inscription successive des deux procès-verbaux sus mentionnés [ L'inscription du premier procès-verbal ne peut, à la vérité, faire connaître quel sera le montant de la créance; mais ́elle sert toujours à avertir les personnes qui voudraient prêter au prêter au propriétaire de l'immeuble, qu'il y aura des créanciers qui les primeront. ], et alors, le privilége date de l'inscription du premier procès verbal. Que veulent 2110. dire ces mots? Nous avons déjà établi que l'inscription était nécessaire pour donner effet au privilége, mais non pour lui donner rang ou date, puisque le caractère distinctif du privilége est de primer les hypothèques, même antérieures. Cela est vrai. Aussi la disposition dont il s'agit ici, estelle particulière à ce cas; elle a pour but d'empêcher les surprises. Le privilége des ouvriers a donc besoin de la date: et ce qu'il y a de singulier, c'est que cette date est absolument indifférente, quant aux créanciers hypothécaires antérieurs à la confection des travaux, et n'est nécessaire qu'à l'égard des créanciers postérieurs à ces mêmes travaux. Deux exemples vont faire connaître, d'abord, la nécessité de donner en général une date à ce privilége, et en second lieu, l'inutilité de cette date à l'égard des créanciers antérieurs.

Premier exemple: Une maison vaut trente mille francs; elle est hypothéquée à un premier créancier inscrit pour vingt mille francs : il y est fait des travaux qui augmentent la valeur de dix mille francs. Elle est ensuite hypothéquée à un second créancier, qui s'inscrit pour vingt mille francs : l'entrepreneur ne fait inscrire son premier procès-verbal que postérieurement à ces deux inscriptions.

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