Page images
PDF
EPUB

La métairie de Saint-Sauveur de Derval est également sur le passage de la route de Jans. On peut faire des remarques analogues sur Saint-Sauveur de Landemont, ancienne paroisse du diocèse de Nantes réunie à celui d'Angers.

CHAPITRE VII.

AUMONERIES

de Notre-Dame de Pitié ou de Patience.

La Vierge Marie, elle aussi, a connu la souffrance et conquis sa place dans le martyrologe chrétien. Debout en face de la croix pendant la Passion de son divin fils, elle a assisté à tous les tourments que lui infligeaient ses bourreaux; elle a vu saigner toutes les plaies du Rédempteur des hommes, elle a entendu les suprêmes paroles de son agonie et recueilli dans ses bras son corps inanimé. Aucun déchirement de cœur ne lui a été épargné : elle était donc digne d'être appelée la reine des martyrs, et, à ce titre, d'être invoquée par tous les affligés comme leur consolatrice. Son nom, placé au fronton d'un hôpital, était une promesse de compassion pour tous les malheureux et les infirmes qui réclamaient un soulagement.

Les chapellenies fondées sous l'invocation de NotreDame-de-Pitié, ont été nombreuses dans le diocèse de Nantes comme dans tous les autres (1). Est-ce une raison pour en conclure qu'il y avait autant d'établissements. hospitaliers? Je ne le pense pas. Il faudrait plus de

(') Confrérie de Chapelains fondée « ès eglises de Saint-Sauveur et de la Maison-Dieu Notre-Dame de l'ostelerie dudit Dinan. » Livre de la Chancellerie 1505-1506, fo 31. (Arch. dép., B.)

documents que nous n'en avons pour distinguer les bénéfices chargés du service de quelques messes à un autel particulier, des bénéfices pourvus du gouvernement d'une aumônerie. Quand une paroisse a été en possession d'une chapelle isolée dédiée à Notre-Dame-dePitié, ou d'un bénéfice sous le même vocable doté de domaines importants, il est à présumer que les fondateurs ont eu en vue la création d'une maison de secours à côté de l'édifice religieux. A l'égard de plusieurs établissements, il y a des preuves qui ne laissent pas de doute.

Dans mon premier volume, j'ai montré que la seule ville de Nantes n'avait pas moins de deux hôpitaux sous cette invocation: l'un à l'intérieur de la ville, près des Jacobins, et l'autre à l'entrée du faubourg SaintClément (1). Au Croisic, il est incontestable qu'il a existé, au XVe siècle et auparavant, un hôpital dédié à NotreDame-de-Pitié, puisque Dom Jean Laïc fit aveu au roi pour différents biens comme chapelain « de Notre-Dame de » l'ospital du Croaesic en 1478 (2). » Ce serait une erreur de croire que l'église paroissiale actuelle, consacrée en 1501, ait remplacé l'édifice révélé dans cette citation, parce qu'elle se trouve sous le même vocable. Un autre titre de 1511 indique que la chapelle de Notre-Dame-dePitié était sur un chemin conduisant au Croisic. En examinant les alentours de la ville, je ne vois que la chapelle du Crucifix qui soit en situation d'être identifiée avec celle-ci (3).

[blocks in formation]

(1) Histoire des anciens hôpitaux de Nantes, p. 15, 68 et suiv. Voir aussi Livre de la Chancellerie de 1462, fo 76. (Arch. dép., B.)

(2) Aveux des biens de mainmorte. (Arch. dép., B.)

(3)

<«< Le chemin du Croësic à la chapelle Notre-Dame-de-Pitié.» (Ibid.,

E 1382.)

Au village de Brandu, situé à l'extrémité de la commune de Guérande, subsiste la tradition d'un hôpital dont les anciens ont vu les ruines sous l'apparence de quelques cellules; or, il se trouve avéré que la chapelle érigée en cet endroit était connue sous le nom de NotreDame-de-Brandu (1).

La paroisse de Legé, dépendante, avant 1789, du diocèse de Luçon, possédait une chapelle de Notre-Dame-dePitié, qui fut détruite pendant les guerres de la Vendée. Dans le procès-verbal d'estimation des ruines, dressé en l'an VII, il est fait mention des mâsures d'une maison qui servait d'hospice, couvrant une superficie de huit cordes et bornées par la Grande-Rue. Le fief aux Malades, situé à 5 kilomètres au nord, se présente comme une dépendance possible de cette aumônerie. Suivant une déclaration de 1792, ses revenus annuels montaient à 1,244 livres, non compris une rente de 10 boisseaux de froment (2).

Le seul nom de la Limousinière, paroisse du climat de Retz, nous peint l'histoire de cette petite localité, née comme beaucoup d'autres autour d'un donjon; elle a eu pour première église paroissiale la chapelle de l'aumônerie de Notre-Dame-de-Pitié, que les seigneurs fondèrent près de leur donjon de la Touche. L'Elemosinière, traduction rigoureuse d'Eleemosinaria, qui est le nom latin d'aumônerie, est trop facile à reconnaître dans notre forme moderne pour qu'il soit utile de se livrer à une démonstration. M. de Courson, dans la préface de son Cartulaire de Redon, n'avait sans doute pas la liste de nos communes sous les yeux, quand il a mis un point d'interrogation

(1) Terrier de la sénéch. de Guérande, vol. X, fo 2407.

(2) Liasse de déclarations de 1790 et estimations de l'an VII. (Arch. dép., Q.) Liasse des biens remplacés. (Série X, ibid.)

devant le prieuré d'Elemosinaria (1). Il n'aurait pas hésité si ce rapprochement s'était présenté sous ses yeux. Au XIIIe siècle, on disait la Limozinière, et au XIVe la Lemoussinière. Ces deux variantes ne contredisent aucunement les faits que j'avance sur la foi de cette dénomination transparente, et je suis convaincu qu'en étudiant l'histoire des trois autres bourgs de la Vendée portant le même nom, on ne trouvera pas la moindre différence d'origine. Notre Limousinière est toujours sous l'invocation de Notre-Dame.

Le bourg actuel de Petit-Mars, qui est de formation récente, doit sa première agglomération à quelques maisons groupées sur la grande route de Châteaubriant, autour d'une chapelle dédiée à Notre-Dame-de-Pitié. Si l'on refuse de classer cet édifice parmi les établissements hospitaliers, je demanderai pourquoi il avait été placé dans l'endroit le plus fréquenté de ce territoire, sur le passage des voyageurs. Frappés des avantages de cet emplacement, les habitants abandonnèrent leur vieux bourg avec son église, situé près du marais Attimont et transférèrent le centre de la paroisse au lieu nommé Patience, en 1643.

Depuis cette époque, les offices religieux n'ont pas cessé de se célébrer dans la chapelle de Notre-Dame-de-Pitié et l'église du vieux bourg, devenue subalterne, servit de siège à une chapellenie dont le temporel semble emprunté à la dotation d'un hôpital ou d'une aumônerie. Je remarque, en effet, dans le dénombrement de ses biens, la gagnerie de la Moinerie, des vignes et un pré à la Hardière, et un

[ocr errors]

(1) Livre de visites du climat de Retz, fo 137. Cartulaire de Redon, p. 512. Acte de 1390. (Arch. dép., E 489.)

-

« PreviousContinue »