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THE NEW YORK
PUBLIC LIBRARY

150730

ASTOR, LENOX AND TILDEN FOUNDATIONS. 1899

L'Auteur se reserve le droit de la traduction.

WILCOCKSON, IMPRIMEUR, ROLLS BUILDINGS, FETIER LANE.

AVANT-PROPOS.

Dans un des ouvrages de M. de Bernard se trouve fort habilement dépeint le despotisme de la vie privée; cette description m'impressionna vivement et quelques années après, voulant faire moi-même un essai littéraire, elle me fournit un sujet. De quinze à vingt-cinq ans, on est fort souvent victime d'une tyrannie qui assoupit les germes de toutes les bonnes qualités. Une main amie et secourable à cette époque-là assure le bonheur de toute une vie; mais il n'est pas rare d'être entièrement dépourvu de cet appui au moment où l'on en a le plus besoin. Pour illustration de mon idée, je cite l'histoire de Pauline convenons que c'est un cas extrême.

Pauline est une petite fille de dix ans, unique enfant de parents dont elle fait les délices. Tout le monde la regarde avec admiration, et l'on ne trouve pas son égale en sagesse et en beauté. Pauline eut pu devenir reine, si les diadêmes ne couronnaient que les têtes les plus belles et les plus intelligentes.

Mais huit ans se sont écoulés, et un grand changement a eu lieu. Avec les années sont venues les réflexions et la conviction que le monde n'est pas si bon, si sensible, que sa jeune et ardente imagination le lui avait dépeint. y a d'abord les frivolités dont elle s'ennuie; ensuite

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les petitesses qu'elle méprise; enfin ce sont les injustices qui la révoltent. Il se germe en elle, pour tout ce qui l'entoure, un sentiment de dégoût qui, à son insu, s'enracine de plus en plus dans son cœur. L'esprit borné de ses parents n'a point ce qui'l faut pour guider une jeune fille au delà des années de l'enfance; et comme ils prêtent une oreille impatiente aux idées qui s'éveillent en elle, le silence et la contrainte font naître un éloignement qui s'accroit de jour en jour. Sa mère cherche vainement à reléguer l'intelligence de sa fille, dans les mêmes bornes où la nature a placé la sienne; mais elle ne réussit que trop à augmenter de plus en plus la tristesse de son enfant, qui perd bientôt cet air gai et riant si naturel à son âge; les soucis commencent déjà à voiler son front.

Bientôt arrive le mariage. Pauline, par pur désir de quitter une maison, où elle ne trouve plus ni affection, ni sympathie, se donne sans amour à un homme indigne d'elle, qui, frappé de sa beauté, n'a pas même l'intelligence de s'apercevoir de ses autres bonnes qualités. Sans enfants auxquels elle aurait pu prodiguer les élans de sa tendresse assoupie, l'affection dont Dieu l'a douée ronge son cœur. Sa souffrance muette qui n'avait ni consolateur ni confident la minait lentement, et à peine deux ans s'étaient-ils écoulés depuis ses noces que la pauvre Pauline se coucha pour ne plus se relever.

Le mari, en apprenant la mort de son épouse s'écria: “Fasse le ciel que ma seconde femme soit plus joyeuse! celle-là m'a fort attristé."

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