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Soit, dit M. de Macis, mais en attendant l'heure inexorable des archanges aux armures d'hyacinthe, aux trompettes retentissantes, et aux glaives de flamme, contentons nous modestement.... de l'amour.

Et le demi-sourire qui accompagnait ces paroles fut suivi d'une de ces caresses que préludent, pour ainsi dire les joies de Paradis. Hélène, l'heure avance et si cela t'est agréable nous nous rendrons sans delai à notre nouvelle habitation..... il ne faut pas faire attendre le capitaine.

Hélène se leva joyeusement elle avait si grande envie de voir sa future demeure. Deux heures après ils arrivèrent aux portes du chateau.

Le Capitaine qui fumait son cigare sur la terrasse se hata de les rejoindre. M. de Macis lui presenta sa femme.

Le jeune officier fit son compliment à Madame de Macis. Charles, dit-il en se retournant vers son ami, je vous félicité d'avoir enfin trouvé l'épouse qui doit embellir votre avenir.

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Les jeunes officiers en sont-il avertis ? demanda M. de Macis.

Vous concevez qu'il n'était pas facile de garder un pareil secret; le commandant demanda de vos nouvelles et force me fut de lui dire que nous aurions bientôt le plaisir d'accueillir une jeune mariée (le capitaine salua de nouveau Hélène). Depuis votre depart notre bon colonel a perdu son fils ainé. Ce malheur ne me serait pas arrivé, dit-il, "si mon habile chirurgien n'ent pas été absent." Au désir de son mari, Madame Emerillon est ici pour recevoir M. de Macis.

La femme du commandant est chez moi ?

Oui, et elle à si bien surveillé tous les preparatifs que ton epouse n'à pas autre chose à faire qu'à se reposer.

Ils entrèrent au salon où Madame Emerillon fit à Hélène le plus gracieux accueil, mais jugeant que les nouveaux mariés ne seraient pas fachés de se trouver seuls, elle ne prolongea pas sa visite.

Voilà le crépuscule qui arrive, dit-elle en se retournant vers le capitaine, voulez-vous vous donner la peine de me conduire chez moi ?

Quelques instants après, deux beaux chevaux attelés à une voiture élégante s'arrêtaient à la porte du château. Un domestique entra et remit le billet suivant à M. de Macis :

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"Par l'ordre du commandant je vous envoie cette voiture; il vous prie de l'accepter de sa part pour votre présent de noces. Les chevaux vous viennent de la part de vos camarades qui vous présentent leurs plus sincères félicitations. Faites-nous la grâce d'agréer ce petit témoignage de l'estime et de l'affection que ressentent pour vous

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Le commandant me prie de vous faire savoir qu'il aura l'honneur de rendre demain ses devoirs à Madame de Macis.

Le mois suivant, Monsieur de Macis eut une réunion de ses amis, et la douceur et l'intelligence, non moins que la beauté de son épouse fut l'admiration de tout le monde.

Après quelques heures passées dans la joie et le bonheur, la compagnie se sépara, laissant le bon médecin fort content des témoignages d'intérêt que les officiers lui avaient donnés.

G

VIII.

LE FOYER DOMESTIQUE.

"Le printemps nous disperse et l'hiver nous rallie :
Auprès de nos foyers notre âme recueillie
Goûte ce doux commerce à tous les cœurs si cher;
Oui, l'instinct social est l'enfant de l'hiver.

Le foyer des plaisirs est la source feconde ;
Il fixe doucement notre humeur vagabonde:
Là, s'épanche le cœur : le plus pénible aveu,
Long-temps captif ailleurs, échappe au coin du feu.

Là, vient se renouer la douce causerie;
Quelqu'un en la contant recommence sa vie :
Un autre d'un ami tentant la patience,

De ses vers nouveaux-nés lui fait la confidence.

On agace ses tisons, on bénit la fortune

Et tous contre l'hiver, tous, font cause commune.”

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"Er führet mich in den Weinkeller und die Liebe ist sein Panier über mir."

La bise est dure et violente, le ciel orageux, la neige tombe sur un sol déjà couvert de la blanche livrée de l'hiver..... les beaux jours et la belle parure de l'été effleurent la mémoire comme le souvenir d'un rêve.

Lorsque la Nature nous présente une voûte ténébreuse, on cherche naturellement un dédommagement dans son intérieur. Heureux celui qui y trouve un soleil qui n'est pas obscurci

par des vapeurs grossières! une lumière pure et inaltérable, à qui tous les jours ajoutent un nouveau trait, à mesure que le grand ouvrage de dévéloppement avance vers sa perfection.

Puissiez-vous, cher lecteur, être de ces privilégiés ! Si malheureusement vous n'en êtes pas, ne m'accompagnez pas plus loin, car je vais pénétrer dans l'intimité d'un foyer vivifiant et lumineux, éclairé par les beaux astres de l'intelligence et de l'amour.

Hélas! non,

Le bonheur vous a-t-il été donné en partage? me dites vous, tandis qu'un sourire naissant me révèle qu'une espérance bien-fondée de félicité, couve au fond de votre cœur.

Lisez-donc ! je ne crains plus que mon tableau vous désespère. Un feu-de-Noël jette ses rayons chaleureux dans une pièce dont l'ameublement d'une élégante simplicité, indique le bon goût de ses habitants.

M. de Macis rentré depuis quelques moments est assis dans son fauteuil.

Voilà mes courses finies pour aujourd'hui au moins, dit-il.

- Oh! j'en suis bien aise, répondit sa femme; toute la matinée me fâchait de te savoir exposé à la rigueur de ce temps affreux. Chère Hélène, cela me fait mieux apprécier le bien-être que j'éprouve auprès de toi.....tout en conduisant mon cheval, je me dis: Cette neige me bat le visage assez rudement, mais peut-être ne suis-je pas moins heureux que ceux qui sont encore ensevelis dans leurs lits d'édredon.

Ta profession t'oblige à braver le froid et le chaud, et que de chagrins encore.

- Pour aujourd'hui, au moins, je ne suis pas soumis à l'inconvénient d'une poussière enflammée tourbillonnant dans les rues; sans doute, il y a des inquiétudes inséparables de mon état. Les uns se plaignent de maladies imaginaires, les autres avec des maladies réelles ne se rétablissent pas parce qu'ils négligent mes instructions.

Je n'aurais pas pu me soumettre à tant de caprices.

Ne dis pas cela, Hélène; je saurais me résigner à de plus grands maux en me rappelant le bonheur qui m'attend dans mon intérieur. Quel contraste entre la bise au dehors et notre salon que l'amour a parsemé de ses plus belles fleurs..... Comment t'es-tu amusée ce matin?

Ayant surveillé les affaires de ménage je me suis occupée de ma broderie; le temps s'obscurcissait de plus en plus et en désirant ardemment ton retour, je me trouvais disposée à déclamer contre la longueur interminable de l'hiver. Pendant l'été je me résigne de meilleure grâce à tes courses journalières. Je suis triste dans l'absence de mon cher mari, me dis-je, mais le grand air le réjouit, et le soleil l'accompagne; si j'étais toujours auprès de lui, peutêtre finirais-je par l'ennuyer. Qui sait? je n'ai pas les connaissances étendues qu'ont les messieurs.

Chère Hélène, tu n'as pas cela à craindre, mais il me semble que je suis naturellement trop rêveur, et qu'il est heureux pour moi que ma profession exige des fatigues corporelles qui servent de distraction à la pensée. Qu'en dit le poète ?

"Thee, Paridel, I marked thee there,
Stretched on the rack of a too easy chair,
And heard thy everlasting yawn confess
The pains and penalties of idleness."*

Il est vrai qu'on se sent mal à l'aise en restant long-temps auprès de feu.

Tu as fait cela ce matin ?

Oh, non! mais autrefois j'étais très sensible au froid, maintenant je n'y fais pas attention.

-Les hivers sont-ils moins rigoureux ?

Le bonheur fait oublier les petits inconvénients, répondit naïvement Hélène en levant ses beaux yeux vers son mari.

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