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- J'attends quelqu'un qui m'aime un peu.

Mais c'est une sottise, Docteur; c'est ridicule. Toutes les femmes sont impatientes de se marier; mais quant à l'amour, on ne le trouve nulle part. D'autres me disaient: Malheur à toi si ta femme t'aime tant! cela la rendra jalouse; et dans ta profession, tu comprends, elle ne manquera pas d'occasions de l'être.

Toutefois j'insistai non-seulement qu'elle devait m'aimer, mais aussi être assez instruite pour que je pusse le regarder en amie et compagne.

Hélène réalisera à merveille ces désirs là.

Savez-vous, Cristophe, continua M. de Macis, lorsque de jour en jour on me reprochait ma femme idéale, c'était pour moi un grand chagrin. Il me semble que parmi les officiers, il y en avait quelques uns qui me portaient une vraie inimitié. Ils me disaient, "Docteur, tu as beaucoup vieilli depuis peu ; on ne reconnait plus tes beaux traits d'autrefois; tu n'es plus en état de choisir parmi les jeunes et belles. D'autres s'écriaient, "Voilà le docteur, qui attend une femme qui lui tombe des cieux." Poussé à bout par leurs railleries, je leur dis un jour: Messieurs, je me vengerai de vous tôt ou tard; alors on se mettait à rire plus bruyamment que jamais et à vociférer, "Si par malheur un de nous est frappé d'une balle, c'est notre chirurgien qui rendra le coup mortel . . . . gare au Docteur!" Il n'y avait qu'Albert de Bergenheim qui disait, "Si chacun avait ce qui lui est dû, c'est notre bon ami le médecin qui aurait la belle des belles.

A cette époque me trouvant indisposé, je demandai et obtins un congé d'un an, et ayant plusieurs amis en Angleterre, je me determinai à visiter ce pays.

Cristophe, la crainte me vient quelquefois qu'à la longue Hélène ne s'attriste loin de ses amis et de sa propre patrie.

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Quant à cela, soyez tranquille; ses manières sont si gracieuses et elle parle si parfaitement le français; les femmes

des officiers ne peuvent manquer de s'intéresser à elle, mais il lui faudra une Allée des Platanes pour ses rêveries.

Il y a près de la caserne une charmante résidence avec un grand jardin et une belle avenue. J'ecrirai au Capitaine Bergenheim de la prendre pour moi, si elle est encore inoccupée. Comme il faut que je m'absente d'Hélène pendant plusieurs heures chaque jour, je veux lui procurer tous les comforts possibles.

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L'Allée des Platanes est la constante retraite d'Hélène en été. Peu de temps avant votre arrivée en Angleterre, je passai à Roseville pour demander à ma belle-sœur de se promener à cheval avec moi. Annette est si timide que je ne puis jamais l'engager à le faire. Ne la trouvant pas à la maison, je dirigeai mes pas vers sa promenade favorite. En m'approchant, la douce voix d'Hélène frappa mon oreille: elle récitait des vers qui témoignaient qu'elle était triste parfois malgré sa jeunesse et sa beauté... Le poème fini je m'approchai d'elle, en la priant de me le copier.

Ces vers, étaient-ils composés par Hélène ?

Non; ils étaient écrits par Mademoiselle Toulman.
Recitez-moi le poème.

Nous sommes près de la maison, cependant je pense qu'il y aura du temps.

ALONE.

A thousand millions walk the earth
Whom time and death control
Alone and lonely from our birth,
Each one a separate soul.

Yet the great God who made all things
And good he saw they were,
Gave not to man a seraph's wings
To quit this lower sphere!

(Though sheathed plumes the spirit hath, In life but half unfurled,

To float him o'er its burning path,
In thought's aerial world.)

Not wings to bear us far away
God gives his children here,
But tendrils of the heart which may
Infold each blessing near.

Affections-sympathies divine-
High aspirations wake;

Each seeking with its like to twine,
And joy to give and take.

These are his gifts that strongest glow
In Genius' burning breast,

Which can but half its radiance show,

Soul-lit at his behest!

Alone through childhood's lagging hours,
Which creep until our prime,
Heart-longing, like the folded flowers,
To reach a gladder time.

Alone!-for even then begin

The discipline and wrong
Which crush the nobler soul within
And make it of the throng:

Even in just proportion due,
As the young heart is warm,
To mould to loftier thoughts and true,
It takes the shape of harm.

Torn are the tendrils soft and strong,
That may not cling aright;
Yet how instinctively, for long,

They struggled towards the light!

Alone !-we never know how much

Till we that trial dare,

When Care, who heaps with stealthy touch, Bids us our burden bear.

A fardel made of many things,
Of sorrows unforeseen,

Of hopes, whose knell keen memory rings,
To show-what might have been!

Life's errors wreck the little store
Of time which moulds our fate;
And seldom beacons shine before,
But mock us when too late.

Alone! alone! each highest thought,
The one least understood;

Till oh! in death-life's battle fought-
We are alone with God!

III.

ROSEVILLE.

Thus in his graver vein, the reverend sire
Sometimes declaimed. Of right and wrong he taught
Truths as refined as ever Athens heard;

And (strange to tell!) he practised what he preached.

ARMSTRONG.

L'entretien des deux amis nous porte naturellement à la description de Roseville; c'est ainsi que se nommait la terre de M. Seymour. Celui-ci devint veuf lorsque ses filles étaient encore enfants, et après la mort de sa femme, il invita sa sœur, madame Mordante, veuve depuis plusieurs années, à prendre soin de ses filles, qu'il aimait tendrement et qu'il ne voulait pas laisser aux soins des domestiques. On verra, par la conversation suivante, de quelle manière elle s'acquitta de ce saint devoir.

Combien Annette a été triste aujourd'hui, dit madame Mordante un soir que ses deux nièces s'étant retirées, elle se trouva seule avec son frère.

- Je puis facilement expliquer cela; et alors j'ai quelques mots à vous dire par rapport à Hélène, dont je suis plus occupé en ce moment que de sa sœur.

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