Page images
PDF
EPUB

La marche tracée par ces deux articles est d'une extrême simplicité. Elle paraît particulièrement se référer au cas où l'homologation ne constitue qu'une formalité, à l'occasion de laquelle aucune difficulté ne s'élève. Le jugement alors est rendu en la chambre du conseil, comme le prévoyait déjà, dans un cas particulier, l'art. 458 du Code Napoléon. Mais si l'homologation donnait lieu à une contestation, le jugement devrait être rendu à l'audience.

« Art. 887. Si le tuteur, ou autre chargé de poursuivre l'homologation, ne le fait dans le délai fixé par la délibération, ou à défaut de fixation, dans le délai de quinzaine, un des membres de l'assemblée pourra poursuivre l'homologation contre le tuteur, et aux frais de celui-ci, sans répétition.

D

L'homologation poursuivie par les membres de l'assemblée contre le tuteur doit être portée à l'audience, conformément aux observations présentées sur l'article précédent.

Sans répétition, c'est-à-dire que le tuteur supportera personnellement les frais occasionnés par sa négligence, sans pouvoir les répéter contre son pupille.

«Art. 888. Ceux des membres de l'assemblée qui croiront devoir s'opposer à l'homologation, le déclareront par acte extrajudiciaire, à celui qui est chargé de la poursuivre, et, s'ils n'ont pas été appelés, ils pourront former opposition au jugement. »

Tout membre de l'assemblée peut déclarer par acte d'huissier, à celui qui est chargé de poursuivre l'homologation, au tuteur par exemple, qu'il s'oppose à cette homologation. Si le tuteur alors n'appelle pas ce membre dans l'instance en homologation, ce dernier pourra se pourvoir par la voie d'opposition. J'appelle votre attention sur ce point. L'opposition est ordinairement une voie ouverte à une partie défaillante, pour faire rétracter par le tribunal un jugement par défaut. Mais, pour qu'une partie soit défaillante, il faut qu'elle ait été appelée, et que, sur l'assignation, elle n'ait pas comparu, ou que, plus tard, elle n'ait pas conclu. Ici l'opposition est ouverte à un membre qui n'a pas été appelé, et contre lequel, par conséquent, il n'a pu être donné défaut.

L'opposition dont parle notre article est donc d'une nature particulière. Celui qui, dans l'intérêt du mineur, s'oppose à l'homologation, doit être appelé en cause par celui qui la poursuit. La sanction de la nécessité d'appeler dans l'instance d'homologation le membre qui a fait la déclaration prescrite par notre article, consistera dans le droit que la loi lui donne de s'opposer au jugement rendu sans lui.

1120.« Art. 889. Les jugements rendus sur délibération du conseil de famille seront sujets à l'appel. »

Le législateur a craint qu'on ne considérât la délibération du conseil de famille présidée par le juge de paix (art. 416, C. N.) comme un jugement en premier ressort soumis en appel au tribunal d'arrondissement, qui est le juge ordinaire des appels des juges de paix (art. 404, C. pr.). Non; la délibération du conseil de famille ne constitue point un jugement; le tribunal d'arrondissement, auquel cette délibération est soumise, statue en premier ressort, et sa décision peut être réformée par la cour impériale.

Il n'y a lieu à appel que si l'instance d'homologation a soulevé une contesta

tion devant les premiers juges. Ceux qui ont été parties en première instance peuvent seuls interjeter appel. Ainsi je n'admettrai pas les personnes dénommées dans l'art. 888 à interjeter appel du jugement, en négligeant la voie de l'opposition, qui leur est seule ouverte. Mais celui qui aurait formé opposition au jugement d'homologation dans les cas de l'art. 888, et qui aurait succombé sur son opposition, pourrait interjeter appel du jugement de débouté d'oppo

sition.

Enfin, l'appel me paraît recevable, même quand le litige ne s'élève pas à une valeur de 1,500 fr. (V. la loi du 11 avril 1838). Ici la loi ne distingue pas ; on doit l'entendre dans le sens le plus favorable aux intérêts des mineurs. *

[121.

TITRE XI

DE L'INTERDICTION (C. D.).

L'interdiction enlève à l'interdit le droit de se diriger luimême et d'administrer ses biens. En matière civile (1) l'interdiction peut être prononcée contre la personne qui est dans un état habituel d'imbécillité, de démence ou de fureur (art. 489, C. N.); les art. 490 et 491 (C. N.) indiquent ceux qui peuvent provoquer l'interdiction.

Le Code Napoléon avait déjà tracé la procédure d'interdiction; notre titre reproduit ou complète les dispositions du Code Napoléon.

Toute demande en interdiction est portée devant le tribunal civil d'arrondissement du domicile de la personne qu'il s'agit de faire interdire (art. 492, C. N.). Voilà pour la compétence.

« Art. 890. Dans toute poursuite d'interdiction, les faits d'imbécillité, de démence ou de fureur, seront énoncés en la requête présentée au président du tribunal; on y joindra les pièces justificatives, et l'on indiquera les témoins. »

Cet article reproduit la disposition de l'art. 493 du Code Napoléon qui est peut-être plus précis encore, en exigeant que les faits soient articulés. Notre article 890 indique l'acte qui doit contenir cette articulation de faits; c'est une requêle présentée au président du tribunal. A cette requête on joint les pièces justificatives, telles que des lettres ou des actes constatant l'état mental de la personne qu'on veut faire interdire ; on indique en outre les témoins qui pourront attester les faits articulés.

« Art. 891. Le président du tribunal ordonnera la communication de la requête au ministère public, et commettra un juge pour faire rapport à jour indiqué, »

«< Art. 892. Sur le rapport du juge et les conclusions du procureur impérial, le tribunal ordonnera que le conseil de famille, formé selon le mode déterminé par le Code Napoléon, section IV du chapitre II, au titre de la Minorité de la Tutelle et de l'Émancipation donnera son avis sur l'état de la personne dont l'interdiction est demandée. »

(1) En matière pénale, la condamnation à certaines peines entraîne un état d'interdiction légale, dont nous n'avons pas à nous occuper ici.

Le Code Napoléon ne disait pas que le jugement qui ordonne de prendre l'avis de la famille serait rendu sur le rapport de l'un des juges. Ce rapport est fait en la chambre du conseil, où le jugement d'avant faire droit est également rendu. Par ce jugement le tribunal peut, si les faits ne lui paraissent pas concluants, rejeter de plano la demande en interdiction (1). Mais, quelque probable que lui paraisse la vérité des faits allégués, et quelque concluants que soient les faits articulés il ne pourrait de plano prononcer l'interdiction. Il faut qu'il prenne d'abord l'avis de la famille réunie suivant les formes indiquées au Code Napoléon (art. 406 et suiv.; V. aussi les art. 494 et 495, C. Nap. et les commentaires de ces articles).

« Art. 893. La requête et l'avis du conseil de famille seront signifiés au défendeur avant qu'il soit procédé à son interrogatoire.

« Si l'interrogatoire et les pièces produites sont insuffisants, et si les faits peuvent être justifiés par témoins, le tribunal ordonnera, s'il y a lieu, l'enquête, qui se fera en la forme ordinaire.

« Il pourra ordonner, si les circonstances l'exigent, que l'enquête sera faite hors de la présence du défendeur; mais, dans ce cas, son conseil pourra le représenter. »

D'après l'art. 496 du Code Napoléon, le tribunal, après avoir reçu l'avis du conseil de famille, doit interroger le défendeur en la chambre du conseil. Mais notre art. 893 place, entre l'avis du conseil de famille et l'interrogatoire du défendeur à l'interdiction, une signification à ce dernier, tant de la requête qui contient les faits articulés que de l'avis du conseil de famille. L'acte de signification contiendra assignation à la personne qu'on veut fair e interdire (Arg. d'analogie de l'art. 329 C. de pr.), et c'est par cet acte qu'elle a peut-être connaissance de la demande en interdiction dirigée contre elle.

Le tribunal pourrait-il juger la demande en interdiction sur l'avis du conseil de famille et les conclusions du ministère public, sans faire subir un interrogatoire au défendeur ? Sans interrogatoire, l'interdiction ne peut être prononcée, mais elle peut être rejetée (2). L'avis du conseil de famille prouvera quelquefois au tribunal le peu de fondement de la demande.

L'art. 496 du Code Napoléon indique où et comment se fera l'interrogatoire. Le tribunal peut, d'ailleurs, ordonner plusieurs interrogatoires (art. 497, C. N.). On comprend, en effet, que le premier, ayant eu lieu peut-être dans un intervalle lucide, ne suffise pas pour déterminer la conviction des juges.

Après le premier interrogatoire, il peut être, suivant les circonstances, commis un administrateur provisoire pour prendre soin de la personne et des biens du défendeur (art. 497, C. N.).

Enfin, si les pièces, l'interrogatoire ou les interrogatoires sont insuffisants, le tribunal peut ordonner une enquête à l'égard des faits susceptibles de preuve testimoniale. Le tribunal est autorisé à ordonner l'enquête hors de la présence du défendeur, notamment en cas de fureur.

Pour les formes de cette enquête, comme pour le surplus de la procédure, on

(1) Cass., Rej., 6 janvier 1829 (Dall., Rép., vo Interdiction, no 68). (2) Cass., Rej., 4 août 1812 (Dall. Rép., vo Interdiction, n° 87). 26 février 1819 (Dall., eod., no 88).

[blocks in formation]
[ocr errors]

suit la marche d'une affaire ordinaire. Le jugement est nécessairement rendu en audience publique (art. 498, C. N.).

Le tribunal, qui statue sur la demande en interdiction, peut l'admettre ou la rejeter purement et simplement. Il peut aussi, tout en rejetant la demande, donner au défendeur un conseil judiciaire (art. 499, C. N.).

Ces différents jugements sont susceptibles d'appel; et l'art. 894 indique, suivant la décision prise par le tribunal, à qui appartiendra le droit d'interjeter appel.

<< Art. 894. L'appel interjeté par celui dont l'interdiction a été prononcée sera dirigé contre le provoquant.

« L'appel interjeté par le provoquant ou par un des membres de l'assemblée, le sera contre celui dont l'interdiction a été provoquée.

«En cas de nomination de conseil, l'appel de celui auquel il aura été donné sera dirigé contre le provoquant. »

L'appel sera interjeté par le défendeur à l'interdiction contre le jugement qui l'interdit; par le provoquant ou par un membre du conseil de famille, contre le jugement qui rejette la demande en interdiction. Les deux premiers alinéa de notre article indiquent clairement quels seront les intimés sur ces appels.

On peut s'étonner au premier abord de voir la personne interdite figurer dans l'instance d'appel, par elle-même et sans intermédiaire, comme appelante ou comme intimée. Mais l'appel est suspensif d'exécution et remet tout en question. La capacité du défendeur est encore entière aux yeux de la loi.

Remarquez aussi le droit donné à tout membre du conseil de famille d'interjeter appel du jugement, quand même il n'aurait pas figuré en première instance.

Le jugement qui a nommé un conseil judiciaire au défendeur peut être frappé d'appel soit par celui qui a provoqué l'interdiction, et qui trouve que les juges n'ont pas été assez loin, soit par la personne à qui le conseil judiciaire est donné, et qui trouve que les juges auraient dû rejeter purement et simplement la demande.

1122. Dès que l'interdiction est devenue définitive, soit par l'expiration du délai d'appel, soit par la confirmation en appel du jugement qui prononçait l'interdiction, ou par un arrêt d'appel infirmatif du jugement qui rejetait la demande, le jugement ou l'arrêt reçoit une publicité déterminée par l'art. 502 du Code Napoléon. Il faut porter à la connaissance des tiers le jugement qui rend l'interdit incapable de contracter.

L'art. 897 étend ces conditions de publicité au jugement qui nomme un conseil judiciaire.

Art. 897. Le jugement qui prononcera défenses de plaider, transiger, emprunter, recevoir un capital mobilier, en donner décharge, aliéner ou hypothéquer sans assistance de conseil, sera affiché dans la forme prescrite par l'art. 501 du Code Napoléon. »

Ce jugement, conformément à l'art. 501 du Code Napoléon, sera affiché dans la salle de l'auditoire, et dans les études des notaires de l'arrondissement, afin que les tiers connaissent l'incapacité dont se trouve frappée, à l'égard de certains actes, la personne avec laquelle ils voudraient traiter.

« Art. 895. S'il n'y a pas d'appel du jugement d'interdiction, ou s'il est confirmé sur l'appel, il sera pourvu à la nomination d'un tuteur ou d'un subrogé tuteur à l'interdit, suivant les règles prescrites au titre des Avis de parents.

« L'administrateur provisoire nommé en exécution de l'art. 497 du Code Napoléon, cessera ses fonctions, et rendra compte au tuteur, s'il ne l'est pas lui-même. »

Le tuteur sera nommé conformément aux dispositions des art. 406 et suivants du Code Napoléon. Toutefois le mari est tuteur légal de la femme interdite (art. 506, C. N.). Dans tous les autres cas, il y aura lieu à la tutelle dative.

La femme de l'interdit, relevée de l'incapacité prononcée contre les femmes par l'art. 442, 3o, C. N., pourra être choisie pour tutrice de son mari (art. 507, C. N.); mais elle n'est pas sa tutrice légale.

Notre art. 895 n'est, au surplus, que la reproduction de l'art. 505 du Code Napoléon. Pour les effets du jugement, je vous renvoie aux art. 502, 503, 504, 508 et suiv. (C. N.).

1123. « Art. 896. La demande en mainlevée d'interdiction sera instruite et jugée dans la même forme que l'interdiction. »>

L'interdit peut recouvrer sa raison; les causes de l'interdiction cessant, l'interdiction doit cesser elle-même (art. 512, C. N.). L'interdit présente alors requête au président du tribunal de son domicile, c'est-à-dire du domicile de son tuteur (art. 108, C. N.). Cette requête est soumise aux formalités indiquées par les art. 891 et 892. Sur l'avis du conseil de famille, le tribunal ordonne qu'il sera procédé à un interrogatoire, et, s'il y a lieu, à une enquête, et prononce sur la demande en mainlevée.

L'interdit n'est pas tenu de diriger sa demande contre un adversaire; seulement le conseil de famille, qui la connaît nécessairement, puisqu'il donne son avis, interviendra dans l'instance, s'il le juge convenable, pour combattre la demande en mainlevée. Enfin, le jugement de mainlevée n'est pas soumis aux conditions de publicité de l'art. 501. Cette publicité n'est pas nécessaire ; celui qui a fait lever son interdiction n'a aucun intérêt à cacher le jugement qui lui rend sa capacité, et il le fera connaître à tous ceux avec qui il voudra contracter. *

TITRE XII

DU BÉNÉFICE DE CESSION (C. D.).

1124. * La cession de biens ou l'abandon qu'un débiteur insolvable fait de tous ses biens à ses créanciers est volontaire ou judiciaire (art. 1265, 1266, C. N.). La cession de biens volontaire a lieu dans la forme qui convient aux parties contractantes, et ses effets sont réglés par la convention (art. 1267, C. N.). Mais si le débiteur ne peut s'entendre avec ses créanciers, il obtient, s'il est malheureux et de bonne foi, la liberté de sa personne, en abandonnant tous ses biens à ses créanciers (art. 1268). Tel est le bénéfice de cession, ou la cession judiciaire, dont notre titre règle la procédure.

Tout débiteur malheureux et de bonne foi a droit au bénéfice de cession, mal

« PreviousContinue »