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PRÉLIMINAIRES

§ Ier. LE ROI ET LE POUVOIR JUDICIAIRE.

35.- Le Souverain n'exerce personnellement aucune partie de ce pouvoir. Ce sont les autorités judiciaires de l'État qui l'administrent, mais elles le font au nom du Roi, ainsi que le prouvent les articles 24 de l'ordonnance du 14 mai 1886 sur la compétence et la procédure civile et commerciale devant les tribunaux (1) et 98 du décret du 27 avril 1889 sur l'organisation de la justice pénale (2) ainsi conçus :

Article 24:

Les expéditions des jugements, ordonnances, mandats de justice et de tous actes emportant exécution parée, seront conçues en ces termes :

Nous, Léopold II, Roi des Belges, Souverain de l'État Indépendant du Congo,

A tous présents et à venir, faisons savoir:

Mandons et ordonnons à tous huissiers à ce requis de mettre le présent jugement, ordonnance, mandat ou acte à exécution.

A tous commandants et officiers de la force publique d'y prêter la main lorsqu'ils en seront légalement requis.

(1) Bulletin officiel 1886, nouvelle édition, p. 61. p. 210. Recueil usuel, t. I, p. 112.

Voir aussi LOUWERS,

(2) Bulletin officiel 1889, p. 112.— Voir aussi LouWERS, p. 194 et Recueil usuel, t. I, p. 320.

En foi de quoi, le présent jugement, ordonnance, mandat ou acte a été signé et scellé du sceau du tribunal ou de l'officier de qui il émane.

Article 98:

L'exécution des jugements ne pourra être poursuivie que sur une expédition intitulée au nom du Roi-Souverain et délivrée en forme exécutoire.

§ II. MISSION DU POUVOIR JUDICIAIRE.

DIVISION.

AUTORITÉS DU POUVOIR JUDICIAIRE.

36. Mission du pouvoir judiciaire.- Son importance. Le pouvoir judiciaire, ainsi qu'il a déjà été dit plus haut, a comme mission de veiller à l'exécution des lois et de les appliquer en cas de contestation. On comprend aisément, par là, l'importance qu'a pour un État son bon exercice, car c'est l'ordre tout entier de l'État qui en dépend. « C'est la partie essentielle de la constitution politique d'un peuple, disent les Pandectes belges, car la liberté et la propriété des citoyens sont en dernière analyse dans les mains du pouvoir judiciaire, comme le disait M. le Procureur général Faider, le 6 mars 1879; tout y ramène et tout s'y abrite » (1).

37. Division. Le rôle du pouvoir judiciaire est double :

I. Il doit régler les contestations qui naissent entre les individus de l'État, ou des individus avec l'État, au sujet de leurs intérêts privés.

II. Il doit réprimer les atteintes qui sont portées par

(1) Pandectes belges, t. 72, col. 176.

les individus aux lois édictées pour le maintien de l'ordre social, de la tranquillité publique, et pour la garantie des personnes et des propriétés, et qui sont sanctionnées par une peine.

Et suivant qu'il accomplit le premier ou le second de ces rôles, le pouvoir judiciaire donne naissance à l'organisation de la «justice civile » et à celle de la « justice pénale ou répressive ».

38.

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Dans

Organismes et autorités judiciaires. l'État Indépendant, comme dans la plupart des États modernes, l'exercice du pouvoir judiciaire est confié à peux grands organismes : le Ministère public et les Tribunaux.

Le Ministère public est « une autorité distincte de l'autorité judiciaire à proprement parler, mais qui est placée près d'elle pour requérir et maintenir l'exécution des lois, veiller à tout ce qui intéresse l'ordre général, et les droits des personnes qui ne peuvent se défendre par elles-mêmes » (1).

Le Ministère public ne rend donc pas réellement la justice. Le décret du 3 juin 1906 a cependant, dans les limites que nous examinerons plus loin, dérogé à ce principe.

Le Ministère public, que l'on désigne aussi sous le nom de « Parquet », se compose d'un Procureur général, de Procureurs d'État et de substituts du Procureur d'État. A côté d'eux et sous leur dépendance fonctionnent, pour les aider dans une partie de leur mission, des officiers de police judiciaire.

Les Tribunaux, au contraire, sont investis de la

(1) THIMUS. Droit public, t. II, p. 268.

plénitude de l'autorité judiciaire, car leur mission est d'appliquer, à proprement parler, la loi dans les cas de conflits qu'on leur soumet, et cette mission, ils sont seuls (1) à l'avoir dans l'État.

Les Tribunaux sont composés d'un ou de plusieurs iuges et d'un greffier. Sauf dans des cas exceptionnels prévus par la loi, le Ministère public est représenté auprès de chaque tribunal par un officier du Ministère public. Mais les tribunaux civils siègent généralement sans son intervention tandis que les tribunaux répressifs, au contraire, ne peuvent valablement siéger sans lui.

A côté des tribunaux sont établis des « huissiers » qui sont comme les messagers officiels de l'autorité judiciaire.

§ III. DES PERSONNES QUI PARTICIPENT

A L'ADMINISTRATION DE LA JUSTICE.

Des Magistrats.

39. Sens du mot. - Leur classification.

« Dans un

sens tout à fait large, on entend par magistrat tout officier civil qui participe à la justice, à la police ou à l'administration.

« Dans un sens moins étendu, les magistrats sont les membres de l'ordre judiciaire, juges ou officiers du Ministère public » (2).

Dans l'administration de la justice congolaise, les magistrats sont de carrière ou occasionnels.

Aux seuls magistrats de carrière on réserve officiel

(1) On verra que les chefs locaux rendent aussi parfois la justice, mais ils n'appliquent pas les lois de l'État, ils n'appliquent que les coutumes locales. (2) GLASSON et COLMET DAAGE. Précis théorique et pratique de procédure civile, t. I, p. 35, chap. II.

lement le nom de magistrats; ce sont des docteurs en droit qui font de la carrière judiciaire leur carrière principale. Ils se divisent en deux catégories : en « magistrats nommés par décret » ce sont des docteurs en droit admis définitivement par un décret du Souverain dans le service judiciaire; et « en agents judiciaires » qui ne sont nommés qu'à titre de suppléants et par un arrêté du Gouverneur général.

Parmi les « magistrats nommés par décret », certains reçoivent leur destination par un décret : ce sont les magistrats appelés à remplir les fonctions de président ou de juges du tribunal d'appel, de Procureur général et de Procureurs d'État, et de juges des tribunaux de première instance. Les autres ainsi que les magistrats « agents judiciaires » ne reçoivent leur destination que par un arrêté du Gouverneur général qui les répartit entre les autres postes du service judiciaire suivant les nécessités de celui-ci.

A défaut de magistrats de carrière, le Gouverneur général peut appeler pour remplir des fonctions judiciaires, même de juge ou d'officier du Ministère public, des agents étrangers à l'administration de la justice, qui exercent, à côté de leurs fonctions judiciaires, des fonctions dans d'autres domaines. Ce sont des magistrats occasionnels.

Le décret du 21 avril 1896 (1) a déterminé les conditions de nomination aux fonctions de la magistrature, la préséance et l'ordre hiérarchique de ses membres et de ceux de l'ordre judiciaire en général, leurs traitements, etc.

(1) Bulletin officiel 1896, p. 104. Voir aussi LouWERS, p. 175 et Recueil usuel, t. II, 489.

p.

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