Page images
PDF
EPUB

dans le noble but de donner un nouvel essor à l'industrie de tous les pays allemands, et de faire revivre le sentiment de la nationalité dans les différens peuples qui les habitent.

» Pour atteindre ce résultat, il faut des sacrifices sans doute'; il faut nécessairement que tous les membres qui composent la nouvelle confédération contribuent de toute leur force au bonheur commun. Nous aussi, nous ne jouirons pas des avantages de cette union sans sacrifier quelques intérêts locaux qui, cependant, nous le croyons, seront compensés par les grands avantages que produira notre accession pour le bien-être de la nation.»

Ce traité, qu'il fallait d'ailleurs accepter ou refuser en entier, rencontra une vive opposition dans la Chambre des députés, et souleva d'orageux débats. On craignait qu'il n'interrompît les relations commerciales du pays avec la France et la Suisse, et plusieurs pétitions défavorables à la mesure furent présentées à la Chambre. La commission chargée d'examiner la question avait conclu au rejet ; mais une majorité de 40 voix contre 22 se prononça dans la Chambre pour l'acceptation du traité.

Le besoin d'une réforme judiciaire était généralement éprouvé en Bade, et la Chambre des députés en avait rappelé la néssessité dans son adresse au grand-duc, à l'ouverture de la session. Dans la séance du 21 juillet, il fut déclaré officiellement à cette Chambre que le gouvernement désirait voir réformer la législation criminelle, et que cette réforme ne devait pas seulement porter sur la procédure, comme l'avaient voulu certains orateurs, mais aussi sur la définition des crimes et sur l'application des peines. Le grand-duc consentait en outre à ce que la juridiction et l'administration fussent séparées en première instance, et il faisait demander aux États s'il ne serait pas convenable d'établir des tribunaux exclusivement chargés des affaires criminelles, afin d'accélérer les procès de cette nature.

La plupart des députés accueillirent cette communication dans les termes les plus reconnaissans et les plus flatteurs pour le gouvernement. M. de Rotteck cependant ne partagea pas cet enthousiasme pour ce qu'il ne considérait encore que comme de vaines promesses.

« Le droit d'attendre, dit-il, me semble être un droit bien pitoyable, qui 28 1835. pour

Ann. hist.

jusqu'à ce jour n'a porté pour les Allemands que des fruits imaginaires. N'avions-nous pas à nous réjouir des plus merveilleuses promesses de la part de nos ministres? N'était-il pas dit qu'une nouvelle loi sur la presse serait proposée aux États, et que la hideuse censure devait disparaître du sol germanique? Ne vous souvient-il plus que deux fois déjà vous avez prié son altesse royale de vous rendre la liberté de penser, de parler et d'écrire, et que deux fois vous avez été la dupe de votre bonne foi et de votre confiance aveugle? » Les ministres nous avaient promis de la manière la plus expresse qu'à cette session on nous présenterait un nouveau Code de procédure. Aujourd'hui ils viennent ajouter quelques nouvelles promesses aux anciennes, semblables à un mauvais débiteur qui, pour retarder le moment du paiement, promet des intérêts énormes, parce qu'il est sûr de ne jamais rembourser. En attendant, le peuple badois est devant vos portes, et attend avec inquiétude le moment où ses souhaits de réforme doivent être exaucés; le désespoir s'empare de ceux qui souffrent des inconvéniens de notre procédure surannée et barbare. L'arbitraire de nos ministres, je le sais bien, ne s'en trouve pas mal; car les mauvaises lois sont le refuge naturel de ceux qui ne respectent ni les mœurs publiques ni la liberté personnelle. Les sentimens que m'inspire la communication ministérielle sont plutôt de nature à m'affliger qu'à me consoler. »

Ces paroles firent sensation; néanmoins comme M. E. Dutlinger, vice-président de la Chambre et membre de l'opposition, était chargé de la direction des travaux préparatoires des projets de loi, et que le gouvernement invitait lui-même la commission législative à se hâter, on espérait qu'à la prochaine session, la nouvelle législation criminelle pourrait être discutée et adoptée par les États.

Quant à la couleur politique de la session de 1835, il faut la chercher dans quelques propositions faites par divers membres de la Chambre des députés, et qui, pour n'avoir pás eu plus de résultat que précédemment, n'en attestaient pas moins que cette Chambre restait fidèle à ses opinions de 1833.

M. Welker développa en faveur de la liberté de la presse une motion qui fut accueillie par des applaudissemens unanimes et renvoyée à une commission. Celle-ci fit son rapport vers le milieu d'août, en concluant à ce que la Chambre, persistant dans son vote de 1833, priât le gouvernement de présenter, à la prochaine session, un nouveau projet de loi sur la presse, et d'écarter toutes les dispositions restrictives du droit qui appartient à tous les citoyens de faire imprimer leurs opinions. Un ministre, M. de Winter, s'opposa vive

ment à ces conclusions, en objectant que la session serait close dans quelques jours, et qu'il ne restait plus de temps pour discuter les affaires d'un intérêt secondaire. M. Welker n'admettait pas que la liberté de la presse ne fùt que d'un intérêt secondaire : « La question, disait-il, de savoir si nous avons le droit de penser et de communiquer nos idées aux autres, est bien aussi importante que cette autre question : avons-nous le droit de vivre et de respirer? En effet, sans la liberté de la presse, il n'y a pas de liberté politique, pas de garantie, pas de vie constitutionnelle. Une société qui n'a pas le courage d'admettre l'échange de toutes les idées, où il n'est pas permis à tout citoyen de dire son opinion, n'a pas de vie à elle; elle n'est qu'une esclave aveugle du gouvernement. » M. de Rotteck s'exprima à peu près dans les mêmes termes, et, en définitive, le rapport de la commission fut approuvé par la majorité.

Une autre motion, faite par M. de Rotteck, va montrer si les députés étaient autorisés à élever la voix en faveur de la liberté de la presse. Cette motion concernait les moyens à adopter pour maintenir et développer la constitution du duché de Bade. L'orateur, en exposant ses motifs, avait clairement donné à entendre qu'il n'y avait plus rien à espérer du système arbitraire auquel se laissaient aller les gouvernemens de l'Allemagne, et qu'il fallait, pour obtenir une amélioration réelle dans les institutions publiques, y faire entrer plus essentiellement le principe démocratique. La motion fut accueillie avec enthousiasme, et la Chambre en ordonna l'impression; mais le ministre de l'intérieur défendit par un rescrit à l'imprimeur d'obéir à cet ordre de l'assemblée. Ce rescrit fut communiqué à la Chambre, qui en vota le renvoi à une commission, après que M. de Rotteck eut déclaré qu'il voyait dans la mesure ministérielle la preuve la plus éclatante du fondement de ses appréhensions et de l'opportunité de sa motion. La Chambre, dans la séance du 18 août, s'occupa de nouveau de cette affaire ; à la majorité

de 55 voix contre 2, elle adopta [une proposition portant qu'une adresse serait présentée au grand-duc pour prier S. A. R. de vouloir bien révoquer le rescrit, reconnaître que la Chambre a le droit de faire imprimer les protocoles de ses séances, et lui abandonner en outre le soin de prendre, à l'égard de la motion dont il s'agissait, telle disposition qu'elle jugerait convenable.

Cette session, qui fut close le 28 août, avait eu pour dernier résultat l'adoption d'une loi communale, d'après laquelle seront admis à nommer les bourgmestres et échevins, 1o dans les communes de 3000 habitans et au dessous, tous les citoyens ; 2° dans les autres communes, tous les contribuables qui posséderaient un capital inscrit dans les registres pour une valeur de 500 florins au moins (environ 1000 francs). L'élection pourrait avoir lieu quand même l'assemblée électorale ne réunirait pas la moitié des électeurs, et l'on procéderait au scrutin secret.

[blocks in formation]

L'accession du duché de Bade au système de douanes prussien, entraîna celle de Nassau et de Francfort. Le duché de Nassau, ayant profité d'un assez mauvais prétexte pour se dégager de son traité conclu en 1833 avec la France, ne rencontrait à l'extérieur aucun obstacle à son entrée dans l'union prussienne; mais il n'en était pas de même de Francfort, qui se trouvait lié vis-à-vis de l'Angleterre par un traité de commerce et de navigation du 13 mai 1832. Il fallut donc entamer une négociation pour changer cet état de choses; un nouveau traité en conséquence fut signé le 29 décembre 1835 à Londres, et le tarif prussien fut bientôt en vigueur à Francfort comme dans le duché de Nassau.

HESSE-DARMSTADT.

HESSE-CASSEL.

D'après la manière dont les élections s'étaient faites en

Hesse-Darmstadt, à la fin de l'année dernière (voyez 1834 p. 392), on devait s'attendre à une session aussi calme, aussi froide que la précédente avait été bruyante et animée. En effet, cette session, ouverte le 27 avril par le grand-duc, dont le discours ne contenait absolument rien de saillant, n'a laissé jusqu'ici d'autre trace que la discussion d'une loi pour le rachat des rentes foncières, aux termes de laquelle tout propriétaire possédant des biens-fonds soumis à cette sorte d'imposition, aura la facnlté de les en affranchir en payant dix-huit fois le prix de la rente annuelle.

En Hesse-Cassel, où la session fut ouverte le 6 janvier, l'opposition parlementaire avait conservé toute sa force et toute sa vivacité; aussi la lutte s'y est-elle souvent rallumée entre le gouvernement et l'assemblée des États avec une vigueur dont aucune autre Chambre en Allemagne ne pouvait plus donner d'exemple.

Une loi municipale avait été votée dans une session précédente, avec cette disposition spéciale qu'elle serait mise à exécution le 1er janvier 1835; cependant, la promulgation de la loi n'ayant pas eu lieu en temps utile, la disposition en question fut comme non avenue, et le gouvernement dut solliciter de l'assemblée des États une loi nouvelle, autorisant les magistrats municipaux à continuer leurs fonctions d'après les anciennes ordonnances. L'assemblée se montra disposée à accorder un délai pour prendre les mesures nécessaires à l'exécution de la loi municipale; mais on ne put s'entendre sur la longueur de ce délai : les ministres demandaient qu'il fût illimité, tandis que l'assemblée voulait que tout fût terminé le 1er juillet prochain au plus tard: Enfin ce dissentiment disparut, grâce à la présentation par le ministère, d'un autre projet de loi relatif à la réorganisation des communes, qui ne différait pas moins du dernier, quant à son ensemble et à ses détails , que par la teneur des considé

rans.

Une question plus difficile à résoudre à la satisfaction des

« PreviousContinue »