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» Ensuite, quand même l'arrêté du maire de Seillières, du 26 septembre dernier, se serait écarté de l'usage, en fixant l'ouverture des vendanges à un intervalle moindre de huit jours, le tribunal de police aurait-il pu, sous ce prétexte, se dispenser d'en punir les infracteurs? Non, sans doute. C'est un principe général qu'il n'appartient pas aux tribunaux de critiquer ni reformer les règlemens de police municipale qui émanent des maires; et non-seulement les règlemens qui ont pour objet l'ouverture des vendanges, ne sont pas exceptés de ce principe, mais ils y sont spécialement soumis par l'article cité de la loi du 28 septembre 1791: les réclamations qui pourraient être faites contre le règlement (y est-il dit), seront portées au directoire du département, qui y statuera sur l'avis du directoire du district.

ni

» Le premier motif du jugement du tribunal de police, n'est donc, ni vrai en fait, fondé en droit.

» Le second motif n'est, ni mieux réfléchi, ni plus d'accord avec la loi.

» Suivant le tribunal de police, Jeannin, Beuzon et Huot n'étaient point répréhensibles, parcequ'à l'époque où ils avaient vendangé, l'arrêté du maire n'existait pas enn'était pas core, ou, ce qui revient au même, encore publié.

» Mais c'est précisément, parceque cet arrêté n'était pas encore publié, c'est précisément parceque l'ouverture des vendanges n'était pas encore proclamée et légalement connue, que Jeannin, Beuzon et Huot étaient en contravention au règlement général du 17 mai 1808, par lequel il est expressément défendu de vendanger avant les jours fixés pour chaque ban, à peine d'amende.

» Dira-t-on que la loi du 28 septembre ne déterminant aucune peine contre les infracteurs des Bans de vendange, il n'a pas été au pouvoir, soit du maire de Seillières, soit du préfet du département du Jura, d'infliger une amende quelconque à ceux qui contreviendraient à la défense portée par le règlement dont il s'agit?

» Mais, d'une part, l'art. 5 du tit. 11 de la loi du 24 août 1790, veut que les contraventions à la police municipale, soient punies des peines de simple police.

» De l'autre, l'art. 3 du même titre de la même loi met au rang des objets qui sont confiés à la police municipale, le soin de prévenir par des précautions convenables....., les tels accidens et fléaux calamiteux, que épidémies.....

les

ges? C'est d'empêcher que les raisins ne soient enlevés avant leur maturité, et qu'il n'en résulte, ou des maladies, ou des vins de mauvaise qualité.

» Les bans de vendange rentrent donc essentiellement dans les attributions de la police municipale ; et dès-là, nul doute que les peines de simple police ne soient applicables aux infracteurs de ces sortes de règlemens.

vu

» Ce considéré, il plaise à la cour, l'art. 88 de la loi du 27 ventôse an 8, les art. 3 et 5 de la loi du 24 août 1790, et l'art. 2 de la sect. 5 du tit. 1 de la loi du 28 septembre 1791, casser et annuller, dans l'intérêt de la loi, et sans préjudice de son exécution entre les parties intéressées, le jugement du tribunal de police du canton de Seillières, du 3 de ce mois, ci-dessus mentionné et dont expédition est ci-jointe; et ordonner qu'à la diligence de l'exposant, l'arrêt à intervenir, sera imprimé et transcrit sur les registres dudit tribunal.

» Fait au parquet, le 30 octobre 1810. Signé Merlin.

» Ouï le rapport de M. Schwend-SaintEtienne, et M. Daniels, avocat général;

» Vu le réquisitoire du procureur-général près la cour, agissant aux termes de l'art. 88 de la loi du 27 ventôse an 8, et le jugement du tribunal de police du canton de Seillières du 3 octobre dernier......;

» Vu l'art. 2, sect. 5 du tit. 1 de la loi du 16 octobre 1791; la loi du 16 fructidor an 3; l'art. 2, tit. 11 de la loi du 24 août 1790 et l'art. 5 du même titre......;

» Considérant, en fait, que les arrêtés de la mairie de Seillières des années 10, 14, 1806, 1808 et 1809 constatent un usage, dans la localité, contraire à celui qui est allégué, puisqu'ils justifient que l'ouverture des vendanges, dans ces années, a été fixée à des époques plus rapprochées que la huitaine du jour de leur publication;

» En droit, qu'il n'appartient pas aux tribunaux de critiquer, modifier ou réformer les actes administratifs et les règlemens de police à l'égard desquels les réclamations ne peuvent être portées qu'à l'autorité administrative supérieure, aux termes des lois citées ;

>>Que les bans de vendange rentrent essen. tiellement dans les attributions de la police municipale, et que les contraventions à ces actes et règlemens doivent être punies des peines de simple pol ice;

>> Considérant que le délit dont étaient préve nus Jeannin, Beuzon et Huot, consistait en une contravention formelle à l'art.` 122 du rẻ. » Or, quel est le but des bans de vendan- glement de police du 17 mai 1808, qui defend

expressément de vendanger avant les jours fixés pour chaque ban, à peine d'amende ; et que c'est précisément pour avoir vendangé. avant la publication de l'arrêté de la mairie, publié le 27 septembre, qui fixait l'ouverture de la vendange au 1er octobre, qu'ils se trou vaient en contravention au règlement prohi bitif du 17 mai 1808, publié le 22 du même mois; qu'ainsi, le jugement qui les renvoie de la plainte, présente excès de pouvoir et contravention à la loi du 16 fructidor an 3 et à celle du 24 août 1790;

» Par ces motifs, et conformément à l'art. 456 de la loi du 3 brumaire an 4, faisant droit au réquisitoire du procureur général, casse et annulle, dans l'intérêt seul de la loi, et sans préjudice de son exécution entre les parties, le jugement rendu par le tribunal de police du canton de Seillières, le 3 octobre dernier, en faveur de Jeannin, Beuzon et Huot... ... }) ]]

BAN DE MARIAGE. V. Bans de mariage. BAN DE MARS, BAN D'AOUT, BANS GÉNÉRAUX. Termes usités dans le ressort du parlement de Flandre.

I. Les Bans de mars sont des proclamations qui se font chaque année au retour du printemps, pour avertir les habitans des villages de ce qu'ils ont à faire pour les reparations des chemins, et fixer les amendes auxquelles s'exposent ceux qui causent quelque dommage aux fruits croissant sur les terres d'autrui.

Un arrêt de règlement du parlement de Flandre du 14 août 1780 ordonne, art. 1, que « les bans de mars seront publiés chaque » année dans toutes les paroisses et seigneu»ries du ressort de la cour, à la sortie de la » messe paroissiale du lieu, le dimanche avant » le 15 du mois de mars; et ensuite affichés à » la porte de l'église ou de l'auditoire, à péril » de 10 liv. d'amende, qui sera payée par les » baillis, mayeurs, gens de loi et procu»reur d'office, solidairement, applicable, » moitié au profit du seigneur, et l'autre » moitié à la table des pauvres de la paroisse. »

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»lation de l'air et l'accès des rayons du » soleil ».

L'art. 3 porte qu'il « sera accordé par la» dite publication, le délai d'un mois, pour faire et achever toutes les réparations indi» quées, lequel délai pourra être prolongé » de quelques jours, si des pluies considéra» bles, quelque inondation ou des obstacles >> imprévus empêchaient que les chemins pus» sent être réparés dans ledit délai ».

[[Les Bans d'août sont des proclamations qui se font à l'ouverture de la moisson.

Le Commentaire anonyme sur le tit. 1 de la coutume de la châtellenie de Lille, qui a été imprimé en 1774, nous retrace la teneur de ces proclamations, telles qu'on les fait dans cette partie de la Flandre:

<< 1. On ne peut charier, gerber ou avêtu-, rer avant le lever du soleil, ni après le coucher du soleil.

>> 2. On ne peut emporter les gerbes ou avètures d'autrui.

» 3. On ne peut glaner avant le soleil levé, ni après le soleil couché.

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III. Les Bans généraux se publient avec ceux de mars et d'août. On les appelle généraux, parcequ'ils portent sur des faits de police communs à toutes les saisons de l'année.

IV. Il n'appartient qu'aux seigneurs hautsjusticiers et vicomtiers de faire publier par leurs juges, les bans de mars et d'août; les seigneurs bas-justiciers et fonciers n'ont pas ce pouvoir, parcequ'ils n'ont aucune part la manutention de la police.

à

L'art. 8 du tit. 1 de la coutume de la châ

tellenie de Lille ne permet de procéder à cette publication qu'après que les bans ont été adjugés, c'est-à-dire, réglés et arrêtés par la cour du seigneur, sur la réquisition qu'il en fait à ses hommes, soit en personne, soit par le ministère de son bailli ou du lieutenant de celui-ci.

L'art. 13 du même titre déclare que les seigneurs hauts-justiciers ou vicomtiers qui ressortissent au bailliage de Lille, « ne peuvent >> faire adjuger et publier en leurs terres et » seigneuries, les bans de mars et d'août, que » préalablement ils n'aient été adjuges en la » salle dudit Lille ».

[[ V. Depuis que les justices seigneuriales

ont été supprimées par les lois des 4 août 1789 et 7 septembre 1790, les Bans de mars, les Bans d'août et les Bans généraux sont tombés en désuetude. Les officiers municipaux sont cependant encore, en certain cas, autorisés par

l'art. 46 du tit. 1 de la loi du 22 juillet 1791, sur la police municipale et correctionnelle, à faire, sous le nom d'arrétés, des proclamations qui sont obligatoires pour les citoyens et dont les tribunaux de police doivent assurer l'exécution. V. Armes, §. 2; et mon Recueil de Questions de droit, aux mots Tribunal de police, §. 4. ]]

*BAN DU TRÈS-FONDS. C'était, dans la coutume de Metz, une espèce de décret par lequel, après trois publications et certaines formalités, le créancier d'une rente se faisait adjuger l'héritage assuré et non relevé, pour en jouir comme d'un bien à lui appartenant Il en est fait mention dans le

en propre.

tit. 2 de l'ordonnance de Metz, de l'an 1564, qui se trouve dans le coutumier général, avant les nouvelles coutumes de cette ville. (M. Bou CHER D'ARGIS, père. ) *

*BAN ET ARRIÈRE-BAN. C'est l'assemblée des vassaux et arrière-vassaux, convoqués par le souverain, pour marcher contre l'ennemi, lorsque le service de l'État l'exige.

C'est un devoir auquel s'obligent particulièrement ces vassaux envers le roi, lorsqu'ils lui font la foi et hommage : ils jurent et promettent de lui être fidèles, et de le servir en

vers et contre tous.

Le ban s'applique aux fiefs relevant immé diatement du roi, et l'arrière-ban aux arrièrefiefs l'un désigne le service ordinaire de chaque vassal, et l'autre le service extraordi naire de tous les vassaux. (M. Dareau. ) *

)

[[ L'abolition du régime féodal a nécessairement entrainé celle de la convocation du ban et de l'arrière-ban, qui d'ailleurs n'avait plus eu lieu en France depuis 1674. Tous les citoyens français sont aujourd'hui tenus au service militaire. Le mode de leur assujettissement à ce service, est déterminé par les lois sur le recrutement qui ont remplacé celles sur la Conscription. V. Conscription et Milice. ]]

BAN en Provence. C'est une amende imposée à ceux qui introduisent leur bétail dans les terres défensables, ou dans des lieux où ils n'ont pas droit de le faire paître.

Par les statuts de Provence, la peine du ban est réglée à un certain taux ; mais il est permis aux communautés d'habitans de l'augmenter.

[[ Aujourd'hui ces peines sont réglées par les lois générales, notamment par celle du 28

septembre - 6 octobre 1791, sur la police rurale; et aucune communauté d'habitans n'a le droit de les augmenter. V. Amende, Banon et Délit rural.

BAN militaire se dit d'un mandement fait à cri public pour ordonner ou pour défendre quelque chose aux troupes.

[[V. l'art. 20 du tit. 3 de la loi du 8 juillet 1791, sur les places de guerre. ]]

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* BANALITÉ. C'est, suivant la définition de Bouhier, sur la coutume de Bourgogne chap. 61, le droit d'interdire à ceux qui y sont sujets, la faculté de faire certaine chose, autrement que de la manière qui leur est prescrite, sous les peines portées par les lois, les conventions ou la coutume.

I. Les effets de la banalité consistent principalement en deux points: le premier, de contraindre les sujets de venir au moulin, dire à toutes personnes de construire, dans four ou pressoir banal; le second, d'interl'enclave de la banalité, des moulins, des pressoirs ou des fours.

La banalité de moulin produit un troisième effet, qui consiste dans le droit d'empêcher les meuniers voisins de venir chasser dans le territoire banier, c'est-à-dire, que la banalité de moulin donne au meunier le droit exclusif d'aller chercher les grains et de reporter les farines.

II. La plupart des auteurs du seizième et même du dix-septième siècle, ne voyaient dans les banalités que l'effet de la force et de la tyrannie; mais alors nous avions des jurisconsultes et très-peu de publicistes; on connaissait les lois et l'on ignorait absolument l'histoire. Les savans n'avaient pas encore tiré du chaos ces monumens des deux premières races, qui seuls pouvaient porter la lumière sur l'ancien état des personnes et des choses. Cet état est aujourd'hui connu, et cette connaissance a fixé les idées sur les banalités, comme sur quantité d'autres points.

« Nous avons la preuve (dit le président Bouhier), par plusieurs titres d'affranchissement de la main-morte accordé par les seigneurs à leurs sujets, que l'assujettissement à la banalité a été communément l'une des principales conditions de cette franchise (Dunod, des Prescriptions, part. 3, ch. 11, page 398; Chopin, sur Paris, liv. 2, tit. 8, no 1). Il y a même grande apparence qu'on ne manquait guère de l'insérer dans de pareils actes. Ör, on sait que la plupart des habitans des seigneuries étaient anciennement main-mortables; et c'est ce qui a fait dire avec raison, à l'un des hommes du monde le mieux ins

truit de nos antiquités (Pithou, cité par Guyot, des Fiefs, tome 1, page 343), que les banalités ont succédé à l'esclavage personnel.

» Une seconde cause de leur introduction vient du besoin qu'ont eu les pauvres villageois, d'implorer le secours de leurs seigneurs, pour avoir des moulins, des pressoirs et des fours banaux. (Pocquet de Livonnière, des Fiefs, liv. 6, chap. 6; La Mare, de la Police, liv. 5, tit. 9, ch. 3, et Dunod, loc. cit.) Il n'y avait point autrefois de moulins à vent en Europe, et les moulins à eau étaient fort rares. Les peuples étaient fatigués des moulins à bras. Le cours d'eau dans les lieux de leurs demeures, ne leur appartenait pas. D'ailleurs ils n'avaient point de bois pour en construire, pour batir des pressoirs et faire chauffer des fours. De plus, l'argent leur manquait pour fournir aux frais de ces constructions. Les seigneurs leur offrirent de les faire; mais avec la condition, que pour se dédommager de cette dépense et de l'entretien dont ils se chargerent, leurs sujets ne pourraient se servir d'autres moulins, pressoirs ou fours que des leurs; et que pour en avoir l'usage ils paieraient une rétribution modique. Quoi de plus naturel et de plus juste ! »

[[ Mais V. ci-après, no 10. ]]

III. Les banalités se partagent en deux classes générales les unes sont légales, les autres conventionnelles.

On appelle banalités légales celles qui sont établies par la coutume.

Nous avons effectivement en France des provinces considérables et en grand nombre, comme Poitou, Anjou, Angoumois, etc., dans lesquelles le seigneur justicier a, par cette seule qualité, droit de banalité, non-seulement sur les hommes levans et couchans sous sa justice, mais même sur les fiefs de ses vassaux qui n'ont point de juridiction exercée. Vigier, sur l'art. 29 de la coutume d'Angoumois, en rapporte un arrêt célébre rendu après deux enquêtes par turbes, le 20 juillet 1634.

D'autres coutumes, telles que la Marche, Bretagne, le Maine et autres, font de ces banalités un droit de fief. Le moulin, le four du simple seigneur féodal, emporte de plein droit la contrainte de banalité sur ses sujets

et tenanciers.

Les banalités conventionnelles sont celles qui doivent leur existence à une convention: elles se divisent encore en deux classes.

Les unes sont établies par le bail primitif, in traditione fundi: le seigneur, en donnant à cens telle ou telle partie de ses domaines,

a imposé au preneur, outre le cens écrit dans l'acte, l'obligation de moudre ses grains, cuire ses pâtes et pressurer ses raisins à ses fours, moulins et pressoirs.

Dans d'autres seigneuries, la banalité est l'effet d'une convention synallagmatique : les habitans dépourvus de bois pour alimenter leurs fours, et de moyens pour construire des moulins et des pressoirs, ont composé avec leurs seigneurs: celui-ci s'est chargé de la construction et de l'entretien de ces usines, à la condition qu'ils ne pourraient porter ailleurs leurs grains, leurs pâtes, ni leurs raisins.

Voilà l'origine des banalités, du moins pour la majeure partie.

IV. Quant aux titres nécessaires pour les établir, nulle difficulté pour les banalités légales: la coutume fait le titre de tous les sei

gneurs.

A l'égard des autres coutumes, elles forment deux ordres différens : les unes ont des dispositions sur ce point, les autres sont muettes. Dans les premières, il faut se conformer à ce qu'elles ordonnent; dans les autres, on suit la disposition de l'art. 71 de la coutume de Paris.

V. Ce qui concerne le titre nécessaire pour établir une banalité, présente encore une question, celle de savoir s'il est nécessaire que le titre soit souscrit par l'universalité des habitans.

Ceux qui ont apporté le plus d'attention à l'examen de ce qui peut être relatif à l'intérêt des communautés, font les distinctions suivantes : «< Ou c'est une affaire dans laquelle chacun de ceux du corps, outre l'intérêt commun, a un intérêt particulier; et alors le consentement de tous est si absolument né

cessaire, que le défaut d'un seul est capable de rendre nul tout ce qui s'est fait sans sa participation; ou c'est une affaire dans laquelle chacun de ceux qui composent la communauté, n'a qu'un intérêt commun, et seulement parcequ'il est du corps; et alors il suffit, pour la validité de l'acte, que la plus grande partie ait donné son consentement, comme il arrive dans les elections, dans les jugemens et plusieurs autres actes ». (D'Antoine, dans son Commentaire sur la règle de droit canonique, quod omnes tangit, in 6o.

Fréminville, dans son Traité du gouvernement des biens des communautés, chap. 10, adopte cette décision, et même il distinguetrois cas: ou il s'agit dans l'assemblée des habitans, de choses de pure police et dont l'effet n'est pas perpétuel, comme de nommer des échevins, des messiers, etc.; ou il s'agit d'affaires nota

bles, comme d'un prêt ou d'un emprunt considérable, ou de passer transaction pour terminer un procès; ou, s'il s'agit de traiter avec le seigneur, de s'assujettir envers lui à un droit de banalité, de corvée ou autre servitude. Au premier cas, dix habitans, lorsque l'assemblée a été dûment convoquée, suffisent; au second cas, il en faut les deux tiers au moins; au troisième, il faut le consentement de tous, parceque l'affaire les intéresse tous en particulier.

Ces distinctions, adoptées par les meilleurs auteurs, paraissent de toute équité. Comment concevoir que la volonté d'un tiers puisse en assujettir un autre? Il faut donc que chaque individu consente à l'asservissement. Alteri per alterum iniqua conditio fieri non debet... factum suum cuique, et non alteri debet esse nocivum. Voilà les principes.

Tout le monde connaît cette maxime en matière de corvées: n'y est soumis qui ne veut. Il y a identité de raison pour les banalités : ibi eadem ratio, ibidem jus.

Les partisans de l'opinion contraire se fondent principalement sur cette consideration: la pluralité, disent-ils, a le même intérêt que le surplus dans les droits qu'elle avoue au seigneur.

Mais si l'adhésion de la pluralité n'est que l'effet de la faiblesse, de la timidité, de la séduction, est-il juste qu'un pareil acte fasse la règle des autres habitans? Comment des gens sans propriétés, et indifférens sur leur etat (et c'est le gros des communautés), pourront-ils changer la condition des gens riches et aisés? Enfin, ceux qui n'ont point trempé dans les cabales dont ces sortes d'actes ne sont que trop souvent l'effet, doivent-ils être les victimes de ceux qui ont eu la bassesse de se vendre au seigneur ?

Les auteurs qui se contentent de la pluralité, s'appuient communément de l'autorité d'Henrys, liv. 3, quest. 19. Mais si l'on y regarde de près, on remarque que cet auteur leur est plus contraire que favorable. Après avoir établi que le préambule des terriers n'oblige pas, Henrys ajoute : « Ou le préambule » est fait en la présence des emphytéotes et de » leur consentement, ou c'est en leur absence. » Au premier cas, il pourrait être obligatoire, » mais il faudrait aussi, qu'ils fussent tous » dénommés, qu'ils fussent tous assemblés, et » que le notaire leur eût fait entendre la te» neur du préambule, et les conditions qu'il » porte; il faudrait qu'il leur eût déclaré les » droits et les devoirs auxquels ils s'obligent; » et qu'en un mot, on cût observé ce qu'il TOME II.

» faut observer pour rendre un contrat va»lable ».

Les expressions dont se sert Henrys, font parfaitement connaître qu'il exige dans les reconnaissances de droits généraux, le consentement de chaque individu.

C'est également l'avis de Bannelier dans ses notes sur Davot, tome 1, traité 3, no 42; après avoir rapporté les maximes de Ducieu, conformes à son opinion, il ajoute Cet au teur possédait des seigneuries; mais étant magistrat souverain, il n'en fut que plus attentif aux saines maximes.

[[ V. le plaidoyer du 31 mars 1813, rapporté ci-après, no 13.

VI. Encore une condition pour la validité du titre il faut qu'il renferme une cause, et une cause juste et raisonnable. On demande si les frais de la construction et de l'entretien de l'usine banale forment une cause suffisante.

Une réflexion saisit d'abord tous les esprits: c'est que cette maxime si universellement reconnue, que les banalités ne peuvent s'établir que pour cause légitime, ne présenterait que des mots vides de sens, si la construction de l'usine banale remplissait le vœu de cette règle, puisque, dans tous les cas, cette construction est un préalable toujours indispensablement nécessaire. Cependant Ferrière tient l'opinion contraire sur l'art 71 de la coutume de Paris : « Si un seigneur (dit-il) » proposait aux habitans que, pour leur com» modité, il leur ferait bâtir un moulin et un » four, pourvu qu'ils s'assujettissent à la ba»nalité, et que les habitans y consentissent, » ce serait valable, pourvu que la cause fût » légitime ».

Guyot, dans son Traité des Banalités, page 356, s'élève contre cette décision et la réfute d'une manière qui ne laisse rien à désirer; voici ses termes : « Cette opinion de » Ferrière doit être rejetée comme trop per» nicieuse. 1o. Il dit, pourvu que la cause soit » légitime: or, quelle serait cette cause? Les » habitans, dit-il, seraient soulagés d'une » dépense qu'ils ne pourraient faire. Mais » cela peut-il balancer la perte de leur li»berté, et le profit considérable du sei»gneur dont le moulin et le four ne peuvent » plus manquer d'ouvrage sous peine de con» fiscation et d'amende ? Cela n'emporte-t-il » pas toujours l'utilité devers le seigneur » seul? 2o. Cette cause d'utilité apparente » est un piége à des habitans; eh! Qui ne sait » pas que ce consentement serait toujours » amené par la puissance du seigneur, sous

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