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S. IX. De différentes clauses du Bail.

I. Souvent on stipule dans le bail d'une métairie, que le preneur fera les voitures de matériaux nécessaires pour réparer les bâtimens de la métairie. Mais quel sera l'effet de cette clause, si la métairie vient à être incendiée ? La réponse est que le fermier ne saurait être obligé à faire les voitures que peut exiger une reconstruction à neuf. La raison en est que les voitures auxquelles il s'est assujetti par le contrat, n'ont eu pour objet que les réparations d'entretien qui surviennent ordinairement dans le cours d'un bail, et non la reconstruction occasionée par un incendie qu'on n'avait pas prévu.

On ne peut pas non plus, en vertu de la clause dont il s'agit, obliger le preneur d'aller chercher les matériaux nécessaires dans un lieu éloigné, lorsqu'il y en a de bons dans le voisinage de la métairie: cependant, si l'endroit où l'on demande que le preneur aille chercher les matériaux n'est qu'à une distance peu considérable du lieu le plus proche de la metairie où il s'en trouve, il doit déférer à la demande.

Mais si le propriétaire venait à changer l'état des bâtimens de la métairie, et qu'au chaume qui les couvrait, il voulût, par exemple, substituer des tuiles qu'il faudrait aller chercher au loin, le preneur ne pourrait pas être tenu de ce surcroît de voitures. La raison en est qu'il ne s'est assujetti qu'à faire les voitures nécessaires pour réparer la métairie, eu égard à l'état où elle était lorsqu'il l'a prise à bail : ainsi, par le changement que le propriétaire fait à sa métairie, il n'a pas le droit de rendre plus onéreuse l'obligation du preneur.

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Si l'on stipule que la garantie aura lieu tant pour la mesure que pour la jouissance des héritages affermés, il y a une distinction à faire ou ces héritages sont entourés de murs, de palissades, de haies; ou les limites en sont déterminées par des tenans et aboutissans spécifiés dans le bail; ou bien ils n'ont ni clôture proprement dite, ni limites bien établies.

Supposons que vous me laissiez à bail cinq arpens de terres situés à Longjumeau, entourés de murs, de palissades, etc., ou limités par des héritages de tels et tels particuliers; il n'est pas douteux que vous ne soyez obligé de me faire jouir de la totalité de cinq arpens, ou de diminuer le loyer à proportion de ce qu'il s'en trouvera de moins.

Mais si vous me laissez à bail un verger situé à Saint-Denis, environné de murs, ou limité par tels et tels héritages, et que vous l'ayez énoncé contenant cinq arpens, vous ne serez pas garant de la mesure. La raison en est que ce n'est pas précisément cinq arpens que vous m'avez loués, mais un verger; c'est pourquoi vous ne me devez que la rantie de la jouissance de ce verger, tel qu'il est dans les limites que vous lui avez assignées. S'il n'est point aussi étendu que je l'avais cru, c'est moi à m'imputer de ne l'avoir pas mesuré comme j'en étais le maître avant de souscrire le bail.

ga.

Le propriétaire doit aussi éviter de choisir un temps où les travaux de campagne exigent la présence du fermier, pour demander à celui-ci les voitures qu'il s'est soumis de faire. Il est certain qu'en pareil cas, le fermier serait fondé à ne pas déférer à la demande, surtout si les réparations n'étaient pas urgentes; et si elles étaient urgentes, il faudrait savoir si ce n'est point par un effet de la négligence du propriétaire que les voitures ont été différées jusqu'alors. Si les réparations étaient à faire depuis long-temps, et que le fermier en eût averti le propriétaire, il est certain que celui-ci serait tenu de dédommager celui-là s'il l'obligeait à faire dans le fort de ses travaux, ce qu'il aurait pu faire à moindre frais dans un temps plus commode. C'est l'avis de Pothier. II. On stipule quelquefois dans un bail de moins, eu égard à la valeur de la totalité

[[ Cette distinction est rejetée par le Code civil, art. 1619 et 1765. Suivant ces articles, soit que le bail porte sur un corps certain et limite, soit qu'il comprenne des fonds distincts et séparés, soit qu'il commence par la mesure ou par la désignation de l'objet affermé suivie de la mesure, l'expression de cette mesure ne donne lieu à aucun supplément de fermage en faveur du bailleur, pour l'excédant de mesure, ni en faveur du preneur à aucune diminution du fermage pour moindre mesure, e, qu'autant que la diffé rence de la mesure réelle à celle exprimée au contrat est d'un vingtième en plus ou en

des objets affermés, s'il n'y a stipulation con

traire.

Il résulte encore de l'art. 1622, combiné avec l'art. 1765, que l'action en supplément de fermage de la part du bailleur, et celle en diminution de la part du preneur, doivent être intentées dans l'année à compter du jour du contrat, à peine de déchéance. Et de l'art. 1623, combiné avec le même art. 1765, il résulte encore que, s'il a été affermé deux fonds par le même contrat, et pour un seul et même prix, avec désignation de la mesure de chacun, et qu'il se trouve moins de contenance en l'un et plus en l'autre, on doit faire com pensation jusqu'à due concurrence. ]]

III. On stipule aussi assez fréquemment dans les baux, que le preneur sera tenu d'acquitter les cens et rentes seigneuriales: mais une telle stipulation ne s'applique qu'aux redevances modiques; c'est pourquoi si les biens loués se trouvaient chargés d'une rente considérable, quoique seigneuriale, le preneur n'en serait pas chargé en vertu de la stipulation dont il s'agit, si d'ailleurs il n'en avait point eu de connaissance.

Si, en chargeant le preneur d'acquitter les cens et droits seigneuriaux, le bailleur n'avait indiqué ni le montant de ces droits ni les seigneurs auxquels ils sont dus, il serait tenu des frais et des amendes qui pourraient résulter du défaut de paiement.

[[ Il n'existe plus de cens ni de rentes seigneuriales; mais les mêmes observations peuvent s'appliquer aux rentes foncières dont le fermier serait chargé par son bail d'acquitter le bailleur. ]]

IV. Comme celui qui loue son bien, en conserve non-seulement la propriété, mais encore la possession, puisqu'il possède par son locataire, et que les loyers qu'il perçoit lui tiennent lieu de jouissance, il faut en tirer la conséquence que c'est le propriétaire et non le locataire qui doit acquitter toutes les char ges imposées sur les héritages loués, à moins que, par une clause particulière du bail, le locataire ne se soit expressément soumis à remplir cette obligation pour le propriétaire. Cependant ce n'est jamais ce dernier qui doit acquitter la dime; et il est facile d'en apercevoir la raison : c'est que la dîme n'est pas une charge du fonds, et qu'elle n'est due que sur les fruits, en vertu d'une coutume qui a passé en obligation: or, c'est le locataire qui perçoit les fruits; c'est donc lui qui est tenu d'acquitter la dime.

droits de champart non seigneuriaux dont les fonds affermés peuvent être grevés, le bailleur doit en indemniser le fermier, s'il n'a pas pris la précaution d'en charger celui-ci par son bail. La raison en est que l'obligation de payer, à titre de champart, une portion des fruits des fonds affermés, n'est pas de droit commun; qu'elle ne peut être fondée que sur des titres particuliers; et que, dès là, le fermier ne peut être présumé, ni en avoir eu connaissance, lorsqu'il a traité avec le bailleur, ni s'y être soumis. ]]

Les lois qui ont établi certaines impositions, telles que le vingtième, portent que les fermiers ou locataires seront contraints de les acquitter; mais il ne faut pas conclure d'une telle disposition que les impositions ne soient pas à la charge du propriétaire : le fermier n'en fait que les avances, qu'il retient ensuite sur les loyers ou fermages.

[[Telle est, pour la contribution foncière qui remplace actuellement le vingtième, la disposition expresse de la loi du 22 novembre 1790, tit. 5, art. 10; et de la loi du 3 frimaire an 7, art. 147. ]]

A l'égard des impositions relatives aux réparations des églises paroissiales, Pothier remarque qu'elles sont d'une nature mixte : elles sont charges du fond pour une portion, et charges personnelles du fermier ou locataire qui est paroissien, pour l'autre portion. Comme les églises paroissiales concernent principalement et immédiatement l'utilité des habitans, il est juste que les locataires et fermiers contribuent à l'entretien de ces églises avec les propriétaires des fonds. La portion à laquelle ils doivent contribuer, est ordinairement réglée au tiers du taux auquel la maison ou métairie, dont ils sont locataires ou fermiers, a été imposée.

Le locataire ou fermier étant tenu de contribuer pour un tiers à ces impositions en qualité d'habitant et de paroissien, il s'ensuit, continue le jurisconsulte cité, 1o que, si le locataire a sous-baillé toute la maison, c'est le sous-locataire qui est tenu du tiers de l'imposition, et non le locataire : et que, s'il n'a sousbaillé que pour partie, le sous-locataire est tenu d'une partie du tiers de la taxe à proportion de ce qu'il occupe; 2o que le locataire d'un magasin ou d'autres bâtimens destines à renfermer ou à débiter des marchandises, ne doit point son tiers du taux de la taille d'église, imposée sur ces sortes de bâtimens. La raison en est qu'un tel locataire qui a son domicile ailleurs, n'étant ni habitant ni paroissien, n'a aucune qualité qui le rend coutribuable. Quant aux

[[La dime est abolie par les lois du 4 août 1789. Ainsi, ce qu'on vient de lire à cet égard, est aujourd'hui sans objet. TOME II.

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Observez que, dans la répartition de la taxe, les bâtimens qui ne servent pas pour l'habitation d'un paroissien, doivent être imposés à un tiers de moins que les maisons; autrement, le propriétaire d'un magasin ou autre bâtiment semblable, qui n'ayant point de locataire paroissien, doit porter son taux en entier, se trouverait porter plus que sa part des deux tiers de l'imposition due par les propriétaires.

A l'égard des maisons occupées par les propriétaires, elles doivent être taxées comme les maisons louées; parceque le propriétaire, étant en même temps paroissien, doit contribuer à l'imposition dans les deux qualités.

[[Aujourd'hui, lorsque, pour subvenir à une charge communale, on impose des centimes additionnels sur les biens-fonds, les bailleurs en sont seuls chargés, parceque les centimes additionnels suivent en tout le sort de la contribution foncière. ]]

V. Souvent on stipule que le preneur pourra être contraint par corps à executer le bail: une telle stipulation est autorisée par l'art. 7 du tit. 34 de l'ordonnance du mois d'avril 1667. Mais cette clause ne peut avoir lieu que dans les baux à ferme, et elle ne se supplée pas. Ainsi, lorsqu'elle n'est point intervenue, le bailleur ne peut exercer ses droits que sur les biens du preneur.

Il faut remarquer que la disposition de l'or donnance de 1667, dont nous venons de parler, ne peut pas s'exécuter en Lorraine, parcequ'elle est contraire à ce que prescrit l'art. 12 du titre 20 de l'ordonnance du duc Léopold, du mois de novembre 1707, qui est ainsi conçu : « Défendons à tous nos sujets de s'o»bliger par corps les uns envers les autres >> par aucun contrat, convention ou condam>> nation volontaire, à peine de nullité ».

[[La ci-devant Lorraine est aujourd'hui soumise comme toute la France, à la disposition de l'art. 2062 du Code civil, qui est conforme à celle de l'ordonnance de 1667.]]

Observez aussi que, quand le bail par lequel on a stipulé la contrainte par corps, est fini, et que le fermier continue à jouir par réconduction tacite, la stipulation dont il s'agit, demeure sans effet: la raison en est que la réconduction tacite ne s'étend qu'aux clauses ordinaires, et non à celles qui, comme la contrainte par corps, sont extraordinaires.

Les héritiers du fermier qui continuent à jouir du bail, ne peuvent pas non plus être contraints par corps en vertu de la clause par laquelle celui qu'ils représentent, s'est soumis à cette peine. La raison en est qu'une telle

soumission est purement personnelle, et ne peut engager des héritiers.

[[ L'art. 2062 du Code civil porte que, même sans stipulation, « les fermiers et les » colons partiaires peuvent être contraints » par corps, faute de représenter à la fin du » bail, le cheptel de bétail, les semences et » les instrumens aratoires qui leur ont été » confiés, à moins qu'ils ne justifient que le » déficit de ces objets ne procede point de leur » fait ».

La loi du 15 germinal an 6 contenait la même disposition, quoique d'ailleurs elle n'autorisat pas, dans les baux, la stipulation de la contrainte par corps. ]]

VI. Les baux portent quelquefois la clause que le preneur ne pourra pas sous-bailler sans que le bailleur n'y ait consenti par écrit ; mais on n'oblige pas les preneurs à exécuter cette clause à la rigueur. Ainsi, quand quelque circonstance l'oblige à quitter la maison louée et qu'il présente au bailleur un souslocataire d'un état à occuper la maison comme l'occupait le preneur lui-même, tout l'effet de la clause se réduit à ce que le bailleur qui ne veut point accepter le sous-locataîre, peut faire résilier le bail, faute par le preneur de s'être conformé à la clause par laquelle il lui était défendu de sous-bailler: mais si le bail

leur voulait exiger l'exécution du bail, on ne l'admettrait point à empêcher le sous-bail, parcequ'il n'aurait aucun intérêt à cet empê

che ment.

Si le preneur n'a pas sous-loué la totalité des choses comprises au bail qui lui défend de sous-louer sans le consentement du bailleur, et qu'il reste en possession d'une partie de ces choses, le bailleur ne peut pas demander la résolution du bail, quelque petite que soit la portion réservée par le locataire, pourvu que les lieux soient garnis: telle est la jurisprudence du châtelet de Paris; et la cour des aides a jugé en conformité, par un arrêt rendu le vendredi 17 mars 1758, dont voici l'espèce telle qu'elle est rapportée par l'auteur de la Collection de jurisprudence.

Le dérangement des affaires du sieur Guyot de Villers l'ayant obligé de sous-louer à quatre personnes différentes l'hotel de la Vallière, situé à Paris, rue Neuve-Saint-Augustin, qu'il avait d'abord occupé en totalité, et dont il ne conserva pour lui qu'un très-petit appartement, le duc de la Vallière demanda la résolution de son bail, et se fonda sur ce qu'il était interdit au sieur de Villers de sous-louer l'hotel et de céder son droit de bail sans le consentement par écrit du bailleur. — Il y avait cette circonstance, que les baux des sous-lo

cataires se montaient à 13,200 livres, et que le prix du bail fait au sieur de Villers n'était que de 10,000 livres : ainsi, les créanciers unis du sieur de Villers, auxquels il avait fait un abandonnement de ses biens et de ses droits, trouvaient un bénéfice de 3,200 liv. par an, outre le petit logement que le sieur de Villers s'était réservé.

Le duc de la Vallière ajoutait à ses moyens le sieur de Villers avait été fort longque temps sans habiter l'appartement qu'il s'était conservé; et de ces deux circonstances, jointes au fait de l'abandonnement total des droits du sieur de Villers à ses créanciers, le duc de la Vallière concluait qu'il avait pu demander la résiliation du bail.

Le sieur de Villers, aidé par l'intervention de ses créanciers unis, soutenait que, puisqu'il avait conservé une portion de l'hôtel, on ne pouvait pas faire résoudre son bail; il attestait sur cela la jurisprudence du châtelet; il ajoutait, pour détruire le prétendu reproche de l'abandon de son appartement pendant quelque temps, qu'on ne pouvait raisonnablement s'en faire un moyen contre lui, puisqu'il était naturel qu'il mit sa personne à couvert dans des circonstances critiques où le contrat d'arrangement fait avec ses créanciers, n'était pas encore homologué.

A l'égard de l'abandonnement qu'il leur avait fait, il n'opérait tout au plus, disait le sieur de Villers, qu'un mandat qui ne le dépouillait que fictivement.

Ces moyens furent adoptés, et l'arrêt cité débouta le duc de la Vallière de sa demande en résiliation.

La clause de ne pas sous-bailler un bien rural doit s'observer plus scrupuleusement: la raison en est qu'il est intéressant qu'une terre soit cultivée par tel fermier plutôt que par tel autre, attendu que tous n'ont pas la même aptitude à la chose; cependant, si des circonstances particulières mettaient le preneur dans l'impossibilité de continuer l'exploitation du bail, et qu'il présentât à sa place un bon fermier, il faudrait que, nonobstant la clause du bail, le propriétaire de la métairie agréát le fermier, ou qu'il consentit à la résiliation du bail.

[[Cette distinction entre la clause de ne pas sous-louer une maison, et la clause de ne pas sous-bailler un bien rural, est contraire aux vrais principes sur l'exécution des contrats; et le Code civil la condamne formellement. L'art. 1717, qui fait partie de la section des règles communes aux baux des maisons et des biens ruraux, porte que la faculté

de sous-louer et de céder son bail à un autre peut être interdite pour le tout ou pour partie, et que cette clause est toujours de rigueur.

Par cette dernière disposition, le Code civil condamne encore l'opinion ci-dessus énoncée, qui tend à obliger le propriétaire d'agréer le fermier que lui présente le preneur, ou de consentir à la résiliation du bail.

VII. Y a-t-il quelque différence entre la clause qui prohibe la faculté de sous-louer, et la clause qui prohibe la faculté de céder le bail? V. Sous-location.

VIII. Au surplus, pour les métairies proprement dites, il n'est le nécessaire pas que bail en prohibe expressément la sous-location. Cette prohibition y est toujours sous-entendue. « Celui qui cultive sous la condition » d'un partage de fruits avec le bailleur, ne » peut ni sous-louer ni céder, si la faculté ne » lui en a été expressément accordée par le En cas de contravention, le pro

» bail. >> priétaire a droit de rentrer en jouissance, » et le preneur est condamné aux dommages» intérêts résultant de l'inexécution du bail. » Ce sont les termes du Code civil, art. 1763 et 1764.]]

S. X. Des cas où le preneur peut obtenir la remise des loyers, en tout ou en partie.

I. Voici les principes généraux que Pothier établit à cet égard.

1o. Le preneur ou locataire doit avoir la remise du loyer pour le tout, lorsque le bailleur n'a pu lui procurer la jouissance ou l'uLa raison de ce sage de la chose louée.

principe est que le contrat de louage s'analyse en une espèce de contrat de vente de fruits futurs, ou de l'usage futur de la chose louée, dont le loyer est le prix: or, de même que la vente des fruits futurs n'est valable, et que le prix n'en est dû qu'autant que ces fruits naîtront et feront par leur existence la matière du contrat, on doit pareillement décider qu'il ne peut être dû de loyer, lorsque le preneur n'a pu avoir aucune jouissance ni usage dont ce loyer soit le prix.

2o. Le preneur ou locataire que le bailleur n'a pu faire jouir pendant une partie du temps du bail, doit avoir la remise du loyer pour le temps pendant lequel il n'a pu jouir. La raison en est que chaque partie du loyer est le prix de la jouissance de chaque partie du temps que devait durer le bail: iì ne peut donc être dû de loyer pour la partie du temps durant lequel le preneur n'a eu ni pu avoir cette jouissance.

3o. Le preneur ou locataire que le bailleur

n'a pu faire jouir de quelque partie de la chose qui lui a été louée, doit avoir la remise du loyer pour cette partie pendant le temps qu'il n'en a pu avoir la jouissance. -Ce principe, qui est une suite des précédens, peut néanmoins souffrir quelque limitation, comme on le verra ci-après.

4o. Le preneur ne peut demander remise du loyer lorsque l'empêchement est venu de sa part. — Il suffit en ce cas qu'il y ait une jouissance ou usage possible de la chose qu'il n'a tenu qu'au preneur d'avoir ou par lui ou par d'autres, pour que le loyer en soit dû. 5o. Le loyer n'est dû que pour la jouissance que le preneur a eue en vertu du bail. vant ce principe, si le preneur, pendant le cours du bail, a acquis la pleine propriété, ou du moins l'usufruit de la chose louée, il doit être déchargé du loyer pour le temps qui reste à courir du bail depuis son acquisition, parcequ'il ne jouit plus en vertu du bail, mais de son chef.

Sui

6o. Lorsque le preneur n'a pas été privé absolument de la jouissance de la chose, mais que, par un accident imprévu, sa jouissance

ait souffert une altération et une diminution très-considérable, il peut demander qu'on lui diminue le loyer proportionnellement à ce qu'il a souffert dans sa jouissance.

II. Voici maintenant l'application que le jurisconsulte cité fait de ces principes aux baux des maisons et des métairies.

A l'égard des maisons, si le bailleur est en demeure d'en remettre les clefs au preneur, celui-ci n'en devra les loyers qu'à compter du jour que sa jouissance aura commencé.

Il en serait de même si, nonobstant la remise des clefs, la maison se trouvait inhabitable, par quelque cause que ce fût : dans ce cas, le preneur pourrait refuser de recevoir les clefs, jusqu'à ce que la maison eût été rendue habitable, et qu'on lui eût offert de nouveau de lui en remettre les clefs. Il pourrait même demander la résiliation du bail; parceque, pour se loger, il n'est pas obligé d'attendre que cette maison soit réparée.

Cependant, si ce n'était que par cas fortuit que la maison fût inhabitable, le bailleur pourrait empêcher la résiliation du bail, en offrant de loger le preneur dans une autre maison, jusqu'à ce que celle qui est louée, fût réparée; mais alors il convient que le bailleur fasse raison au preneur de ce qu'il lui en aura coûté pour le second délogement.

Si, après être entré dans la maison louée, quelque cas fortuit oblige le preneur d'en sortir, il doit être dispensé d'en payer les loyers,

à compter du jour de sa sortie. Tel serait le cas où des experts auraient rapporté que la maison louée est menacée d'une chute prochaine.

Mais si la jouissance du preneur n'a été empêchée que relativement à quelque partie de la maison louée, il ne doit être déchargé du loyer que pour cette partie.

Nous avons même fait voir, que, lorsque le travail qu'il a fallu faire pour réparer la maison louée, n'a duré que quelques jours, ou n'a causé qu'une incommodité légère au preneur, il ne lui est dû aucune remise sur le loyer. V. ci-devant, §. 6.

III. Si c'est par son fait ou par sa faute que le preneur a été privé de la jouissance de la maison louée, il n'a nul droit pour être déchargé du loyer; c'est ce qui résulte du quatriéme principe que l'on a établi précédemment.

[[Cette décision doit même s'appliquer au cas où les affaires publiques obligeraient le preneur d'aller résider ailleurs : non-seulement il devrait le loyer qui aurait couru pendant son absence, mais il ne pourrait même pas, s'il n'y était autorisé par une loi particulière, faire résilier le bail pour les termes à échoir. V. ci-après, S. 14, no 2. ]]

IV. Pour faire l'application du sixième principe au bail d'une maison, Pothier suppose l'espèce suivante :

Alexandre a loué à César une auberge, située sur la grande route; et depuis le bail, le gouvernement ayant établi la grande route ailleurs, de fréquentée qu'était l'auberge auparavant, elle est devenue déserte : quoique, dans ce cas, César ait conservé la jouissance de toutes les parties de la maison louée, il ne laisse pas d'être en droit de demander qu'il lui soit fait une remise sur le loyer, parcequ'il a souffert une diminution considérable dans le produit de l'auberge.

Mais si, dans le temps du bail, l'auberge d'Alexandre était la seule d'un endroit, et que, durant le cours du bail, il se fût établi d'autres auberges dans le même lieu, César ne pourrait prétendre aucune remise sur le loyer, sous prétexte que la concurrence des nouvelles auberges aurait diminué le produit de la première.

La différence entre les deux cas dérive de ce qu'en passant le bail, il n'y avait nulle raison pour que César crût qu'il ne s'établirait point de nouvelle auberge dans le lieu où il louait la sienne; et qu'au contraire, il n'avait pas dû prévoir que le gouvernement ferait changer la route établie. L'établissement d'une nouvelle auberge n'est qu'un évé

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